UNE DEMOCRATIE POUR
LES RASTIGNAC

Quelques réflexions sur le simulacre démocratique
Par Igor Reitzman

"A prendre le terme dans la rigueur de l'acception, il n'a jamais existé de véritable démocratie et il n'en existera jamais."
(ROUSSEAU, Le Contrat social, III, 4)

Il est difficile d'étudier les phénomènes de pouvoir et de violence, sans réfléchir sur l'Etat, c'est-à-dire sur l'Institution qui est censée contrôler ces phénomènes, qui détient le monopole de la violence légitime et dont nous attendons - à tort ou à raison - protection et prévention.

LES ASPECTS DEMOCRATIQUES

Il se dit beaucoup que nous vivons en démocratie et en effet si nous comparons aux régimes totalitaires qui ont sévi ou qui sévissent encore dans de nombreux pays du monde, notre société est moins éloignée que d'autres de la démocratie. Dans le concret, cela se traduit par un certain nombre de réalités bien connues:

  1. Le président de la République, les députés[1], les membres des Assemblées régionales et locales sont élus au suffrage universel (un suffrage deux fois plus universel en FRANCE depuis 1945 puisque les femmes ont enfin le droit de vote).
  2. L'opposition au pouvoir en place a la possibilité d'exprimer son point de vue et de s'organiser ouvertement sans risquer la mort ni la prison. Ses chefs ont largement accès à la télévision et à la radio, ils peuvent disposer de journaux, publier des livres, faire distribuer des tracts, faire coller des affiches, appeler à des manifestations.
  3. Il y a une liberté d'association non seulement pour les partis politiques mais aussi pour la réalisation de toutes sortes d'objectifs: défense des droits de l'homme, féminisme, amélioration des conditions de vie des travailleurs, protection des consommateurs, etc.
  4. Face au pouvoir exécutif et au pouvoir législatif, il existe des juges qui - en dépit des possibilités énormes de pression de l'exécutif sur chaque magistrat[2] - se montrent, plus souvent qu'au temps de VICHY, capables d'indépendance[3].
  5. Certains journaux publient des informations défavorables au pouvoir en place sans être immédiatement saisis ou frappés de lourdes amendes, sans que les journalistes soient emprisonnés ou assassinés.

Dans une première approche, on peut donc constater qu'il existe face au pouvoir, des contre-pouvoirs. Le contraste avec les pays totalitaires est certes important: Au gros bâton qui assassine cent rebelles mais risque d'en faire lever mille, les privilégiés, ici, préfèrent la douceur de l'édredon qui amortit, qui étouffe en douceur et qui endort. A la censure brutale en chaussures à clous, encore efficace dans les sociétés analphabètes, les dominants, ici, préfèrent avec raison autoriser la circulation de quelques propos contestataires que noiera aussitôt le flot immense des informations mondialisées sans cesse balayé lui-même par le flot de l'heure suivante… Reprenant une distinction coluchienne, je préfère nettement les sociétés du Cause-toujours aux sociétés du Ferme-ta-gueule. Pourtant si l'on veut y regarder de plus près, nous sommes encore bien loin de la démocratie réelle[4].

APPARENCES ET REALITE

1- Puisque tout l'édifice est cautionné par le suffrage universel, il est indispensable de s'interroger sur la réalité d'un mécanisme qui a permis en France et dans les différents pays du monde, l'accès aux affaires de gens cyniques, corrompus, totalement indifférents à l'intérêt public. On est installé depuis longtemps dans la justification que si le peuple ne gouverne pas comme l'annonce le terme démocratie, cela tient au fait que les citoyens sont trop nombreux, trop occupés pour une démocratie directe dans laquelle ils discuteraient et voteraient eux-mêmes les lois. Il semble entendu une fois pour toutes que l'on est toujours en démocratie dès l'instant où ceux qui exercent le pouvoir sont élus par la population. Mais comment peut-on parler de suffrage universel quand des candidats sont élus par 20 ou 30% des électeurs inscrits ? Aux Etats-Unis présentés volontiers comme une grande démocratie, la réélection du Président CLINTON en novembre 1996 a été assurée par 24,5% de la population en âge de voter[5]. L'absence d'une alternative crédible conduit beaucoup de citoyens, notamment dans les milieux populaires à se désintéresser totalement de candidats dont ils savent qu'ils n'ont rien à attendre en tant que citoyens[6].

ROBERT et FABIENNE avaient voté avec enthousiasme pour la gauche en 1981, puis profondément déçus, ils étaient tout de même retournés aux urnes afin de voter contre la droite; peu à peu ils découvrirent que les uns et les autres utilisaient un langage différent mais qu'ils faisaient finalement la même chose. Maintenant ils votent blanc, ce qui leur permet de ne plus être déçus.

2- L'opposition qui s'exprime à la radio et à la télévision n'a pas une politique fondamentalement différente lorsqu'elle arrive aux affaires, comme on a pu le voir depuis 1981. Il existe une classe politique formée dans les mêmes écoles et les mêmes facultés, partageant les mêmes théories économiques, les mêmes convictions et les mêmes valeurs, en particulier l'amour de l'argent et du pouvoir, l'indulgence envers les diverses formes de corruption, les mêmes techniques de clientélisation. Elle est composée de clans en rivalité pour les postes de commande mais solidaires quand il s'agit de voter certaines amnisties ou de refuser la levée d'immunité de parlementaires affairistes. L'alternance dans les ministères les plus sensibles (Intérieur, Justice, Finances) a fourni à chaque camp des informations aussi précieuses que confidentielles sur l'autre camp. De temps en temps, une petite phrase imprudente confirme aux citoyens que le jeu de la barbichette[7] est toujours la face cachée du jeu politique.

Comment ne pas s'interroger quand on découvre qu'un gouvernement de droite a versé - pour un emploi fictif et pendant plusieurs années - un traitement de haut fonctionnaire au chef de l'opposition…

Pour les journalistes courtisans, il est entendu, une fois pour toutes, que constater la généralisation de certaines pratiques immorales dans l'ensemble de la classe politique, ce serait faire le jeu du Front national, comme si les citoyens devaient seulement choisir entre corruption et fascisme, comme si ce qui mène au fascisme était, non la corruption mais la dénonciation de cette corruption[8]. Dois-je le préciser, à mes yeux, les cadres du F.N. comme ceux du P.C. font partie de cette classe politique comme les bouts de l'omelette font partie de l'omelette. Ce qui les distingue éventuellement des autres, ce ne sont pas les scrupules mais une accession restreinte et récente aux postes les plus intéressants…

Que les convictions soient les mêmes ne fait pas obstacle à l'opposition des discours: Quand un secteur de l'opinion est déjà acquis à un groupe politique, les nouveaux venus auront à choisir entre

FONCTIONS MANIFESTES ET
FONCTIONS LATENTES DE L'ETAT

Dans une Société moderne comme la nôtre, la réalité de l'Etat est fondamentalement ambiguë. D'une part, il assure des fonctions relevant du bien commun: arbitrage entre les intérêts particuliers, entretien de la voierie, hygiène et santé publiques, organisation des transports, protection des citoyens et des consommateurs, etc. D'autre part, il organise la société de manière à préserver et si possible accroître les privilèges des plus riches. Ceux qui deviennent les conservateurs provisoires du système, en tirent des avantages non négligeables (satisfactions substantielles dans l'ordre du pouvoir et de la reconnaissance sociale, cumuls de traitements et d'indemnités, accès au tourisme "officiel", logements somptueux[10], domesticité, voitures de fonction, protection (de plus en plus relative) contre une trop grande curiosité des juges, privilège dans l'accès aux informations sensibles[11] qui permettent les coups financiers des amis, consolidation des réseaux-clientèles qui favoriseront leur maintien au pouvoir et fourniront ultérieurement d'intéressantes positions de repli, etc.)

Le système ne peut assurer ses fonctions latentes - la défense des intérêts des possédants et la consolidation du système oligarchique - que dans la mesure où il reste à peu près crédible aux yeux d'une partie de l'électorat, dans sa fonction manifeste de protecteur de l'intérêt général. Les intérêts des possédants étant sur bien des points en contradiction avec l'intérêt général et avec les intérêts des gens ordinaires qui constituent la grande majorité de la population, on pourrait s'attendre à ce qu'un tel système ne puisse tenir longtemps sans exploser. Nous constatons qu'il n'en est rien. L'effondrement de la monarchie de droit divin, l'affaiblissement des croyances religieuses qui en constituaient le fondement, l'installation d'un suffrage de plus en plus universel, l'accès de plus en plus large à l'instruction primaire, puis secondaire, rien de tout cela n'a réussi à remettre en cause fondamentalement et durablement la vieille société inégalitaire. Je vais tenter d'apporter quelques éclairages sur une évolution aussi paradoxale.

DU DROIT DIVIN AU SUFFRAGE UNIVERSEL

Dans l'Ancien Régime, la cérémonie solennelle du sacre conférait à un individu qui était tout platement fils aîné du roi précédent, une légitimité surnaturelle. Qu'il soit à demi-fou, vaguement débile ou plus intéressé par la cueillette des femmes que par les affaires de l'Etat, il devenait, par la caution du clergé, un personnage sacré, un thaumaturge qui - en FRANCE - était censé guérir des écrouelles rien qu'en les touchant. l'Eglise avait installé solidement la croyance dans la monarchie de droit divin, qui pouvait se résumer dans la formule suivante:

"Le roi est le représentant de Dieu sur terre, et par conséquent lui désobéir, c'est désobéir à Dieu lui-même."

On ne peut comprendre l'effroyable supplice de l'écartèlement infligé au malheureux dément qui avait blessé LOUIS XV que si l'on se souvient du statut particulier de roi très chrétien. Et le pardon des offenses ? demanderez-vous. Ce serait oublier qu'à l'inverse de l'ironie, le pardon doit aller de bas en haut…

Cette croyance commode est aujourd'hui remplacée par une autre, mieux adaptée à une époque dans laquelle l'aspiration à la démocratie est d'autant plus partagée qu'elle est vague. Bien des gens sont prêts à admettre ce qui pourtant ne va pas de soi:

Il y a démocratie dès l'instant où la désignation des dirigeants de la Cité se fait par l'élection.

CONDITIONS DE SURVIE DE L'OLIGARCHIE DEMOCRATIQUE

Dans un système fondé sur l'élection, deux variables deviennent décisives: le personnel politique qui s'offrira aux choix des électeurs et les électeurs eux-mêmes.

Pour que l'Etat ne tombe pas en des mains innocentes, il faut veiller à la formation et à la sélection de gens qui resteront fidèles pour l'essentiel aux grands choix de société sur lesquels nous vivons depuis l'instauration du Code Civil. Les Facultés de droit et de sciences économiques, les Instituts d'Etudes Politiques et l'Ecole Nationale d'Administration garantissent la formation conforme d'une fraction importante de ce personnel. Les appareils des partis politiques installés assurent le filtrage et la promotion des ambitieux qui pensent bien. Il faut aussi façonner convenablement les électeurs afin qu'ils continuent à répartir bien sagement leurs voix entre les différentes fractions de la classe politique.

La fabrication des élus comporte en somme deux grandes étapes: la fabrication de l'électeur puis la fabrication de l'élu, c'est-à-dire l'élection proprement dite. Dans la seconde étape, ce qui est le plus apparent, c'est la procédure, le formalisme: l'urne, l'isoloir, le bulletin et la traduction des voix en sièges (mode de scrutin avantageux, découpage astucieux des circonscriptions). La très forte médiatisation de cette procédure contraste avec le silence qui entoure le processus - complexe, indéfini - de fabrication de l'électeur. Dans ce processus, interviennent trois rouages importants: l'école, les médias et les appareils politiques.

L'école - J'ai déjà évoqué largement (à propos des violences symboliques) cette école qui enseigne sans éveiller, qui entasse le savoir dans les têtes dociles et installe le rejet de toute connaissance dans les têtes rebelles, qui évite tout surgissement collectif[12] de l'esprit critique et qui écarte le plus grand nombre de la compréhension des mécanismes à l'oeuvre dans la vie politique et économique.

Combien de Français par exemple, savent ce que sont les stock options… Combien pourraient décrire les effets spécifiques du scrutin majoritaire sur la vie politique… Combien ont été préparés à l'idée que l'ennemi mortel du mal n'est pas nécessairement le bien. Ou plus concrètement au fait que la haine du fascisme peut déraper en adhésion au stalinisme et réciproquement.

Il faudrait aussi parler de l'instruction civique à l'école. La défiance constante dont elle est l'objet de la part des ministres successifs se manifeste par des signes sans ambiguïté: des horaires dérisoires, pas d'enseignants spécifiques, pas de filière spécifique de formation… Attribuée en complément d'horaire à des enseignants de français ou d'histoire et géographie qui n'ont pas forcément l'enthousiasme et la compétence, qui choisiront souvent de décrire des procédures (le conseil municipal) plutôt que d'analyser des processus (la loi d'airain des organisations ou le rôle des groupes de pression dans l'évolution de la législation). Bien sûr, vous allez me dire que l'essentiel n'est pas là. Même si les élèves avaient des enseignants qualifiés et 6 heures d'instruction civique par semaine, cela ne changerait pas grand'chose, si la classe reste ce système monarchique façonnant des sujets plutôt que des citoyens.

Les médias - Les médias doivent maintenir la population dans l'analphabétisme politique tout en lui donnant l'illusion qu'elle est informée. Il faut donc veiller à ce que les grands moyens d'information /désinformation restent entre de bonnes mains. Ce n'est pas si difficile puisque ces moyens sont tenus soit par l'Etat, soit par de puissants groupes financiers. L'évolution de grands titres comme Libération ou le Nouvel Observateur permet de vérifier comment - quand des poids lourds rentrent dans le capital de l'entreprise de presse - une ligne éditoriale se modifie à travers les années, en ménageant le lectorat et la conscience de rédacteurs coincés entre leur besoin de survivre et leur attachement à des valeurs non cotées en Bourse. Une stratégie rentable peut consister à garder le langage, le style, le format, l'ordre des rubriques, les thèmes, tout en dérivant avec délicatesse dans les contenus, en veillant à ne pas mettre en dissonance trop brutalement les lecteurs traditionnels et les rédacteurs les plus scrupuleux… Le poids de la publicité des grands annonceurs dans l'équilibre financier des journaux conduit à des auto-censures plus ou moins lourdes.

Si vous ne voulez pas perdre la manne venant de BOUYGUES, ELF, ALCATEL ou la LYONNAISE DES EAUX, il y a des informations qu'il vous sera interdit de publier, voire de rechercher… Le fait est connu depuis trop longtemps pour que je m'y attarde. Ces grands groupes ont bien compris que le plus sûr est encore de mettre la main sur une chaîne de télévision, une radio de grande écoute, plusieurs journaux et revues. On n'est jamais si bien servi que par soi-même et le travail d'analphabétisation politique des électeurs passe mieux quand il est distillé en doses homéopathiques quotidiennes par une équipe richement motivée et fortement homogène[13].

Parmi les éléments innombrables qui tissent la réalité humaine quotidienne, une poignée seulement parvient aux organes de presse. Un nouveau filtrage, totalement volontaire celui-là, va déterminer ce qui viendra à la connaissance de chaque public. Au très grand public, celui de la télévision et des radios de grande écoute, on offre le paquet le plus léger: le sport, les événements officiels (voyages présidentiels, petites phrases piquantes du premier ministre ou des leaders de l'opposition), puis les événements dont il serait trop scandaleux de ne pas parler (mais rapidement de façon à garder du temps pour les mondanités), enfin un fait divers pittoresque ou sordide... L'important n'est pas d'informer mais de donner aux gens le sentiment qu'on les informe et qu'en 5, 10 ou 30 minutes, on leur a dit l'essentiel.

C'est peut-être dans l'univers médiatique que se manifeste aujourd'hui avec le plus d'éclat la culture de la soumission. Ecoutez ces journalistes courtisans qui interrogent le notable du jour avec de respectueux "que faut-il penser de...?" Ils ne semblent pas s'apercevoir des contre-vérités renvoyées avec un admirable sens du flou; ils se gardent bien de poser les questions précises qui contraindraient le notable à s'engager soit dans le mensonge, soit dans l'aveu.

Parler des médias d'une façon aussi globale est forcément injuste. Ces affirmations ne concernent que les gros bataillons (en pourcentage des publications distribuées, de l'écoute des journaux radios et télévisés…). Mais je trouve parfois des articles stimulants dans des journaux comme le MONDE ou le Canard Enchaîné. J'écoute avec intérêt beaucoup d'émissions de France-Culture et certaines de France-Inter…

La plupart des journalistes aiment à se présenter comme des modèles d'objectivité dont le rôle se limiterait à rapporter des faits en laissant aux lecteurs le soin de conclure. Il faut reconnaître que notre crédulité est plus grande face au journaliste officiellement non engagé que face au représentant d'intérêts bien précis. Nous sommes plus ou moins en défiance si nous écoutons l'avocat de PAPON, le président du C.N.P.F., un représentant en spiritueux ou un homme politique... Mais quand notre station de radio préférée nous donne les températures aux "quatre coins de l'hexagone", nous fait savoir que le premier ministre a obtenu la confiance avec 5 voix de majorité, que le tabac a tué près de 60 000 personnes l'an dernier, qu'un immeuble s'est effondré à Nice suite à une explosion de gaz, comment, après toutes ces informations certainement vraies, rester vigilant face aux mensonges (en particulier les mensonges par omission) qui vont, au fil des jours et des années, colorer notre vision du réel...

EPIMENIDE dit que tous les Crétois sont menteurs. Mais EPIMENIDE est Crétois donc il ment et son affirmation est fausse. Les Crétois ne sont pas menteurs. Il n'y a donc pas de raison de dire qu'EPIMENIDE ment et par conséquent s'il affirme que les Crétois, etc...

Il existe encore dans le grand public une conception naïve du menteur, conception déjà illustrée dans l'Antiquité par les sophistes grecs. Dire "tous les Crétois sont menteurs" est un stéréotype (donc une proposition fausse) mais définir le menteur comme un individu qui ment chaque fois qu'il ouvre la bouche est une généralisation encore plus absurde. Il est bien plus réaliste de se souvenir que les menteurs fiables[16] sont des gens qui disent généralement la vérité. C'est justement parce qu'ils apparaissent comme des professionnels de la vérité que l'on continue à les croire lorsqu'il y aura utilité pour eux de mentir.

La distance, plus ou moins forte entre l'objectivité annoncée et la partialité de fait, constitue l'une des multiples formes spécifique du mensonge journalistique. Un autre mensonge spécifique consiste à cacher le tutoiement et le copinage qui lient le notable et son interviewer.

Les appareils politiques - Ils contribuent à la fabrication des électeurs essentiellement par la démagogie et le clientélisme. Une forme banale de démagogie consiste à multiplier des promesses que l'on est bien résolu à ne jamais tenir. La tradition en est si solidement établie, qu'on regarde avec compassion celui qui n'a pas encore compris que "les promesses électorales n'engagent que ceux qui les écoutent…" La publicité mensongère peut vous amener devant un tribunal s'il s'agit d'une savonnette mais elle peut aussi vous porter aux plus hautes fonctions s'il ne s'agit que de l'avenir de la nation.

Du bon usage de l'hypéronyme[17] - Pour tromper l'opinion publique, un moyen aussi simple qu'efficace consiste à choisir pour parler d'une réalité complexe, un niveau d'abstraction suffisant: Voulez-vous réduire les dépenses publiques utiles (remplacement des collèges PAILLERON qui ont la faiblesse de brûler trop facilement, recrutement et formation d'éducateurs, d'infirmières et d'enseignants, rénovation des quartiers dits défavorisés, modernisation des hôpitaux, construction de logements à loyer modéré, suppression des points noirs du réseau routier, travaux de prévention des inondations, etc.) ? surtout ne rentrez pas dans ces détails trop concrets et dites simplement : Il faut réduire le train de vie de l'Etat. Une partie importante du grand public ne peut que s'enthousiasmer pour un tel projet. Le train de vie de l'Etat. (selon le niveau de culture et d'information de chacun) c'est COURTELINE et ses ronds-de-cuir, des ministères gorgés de technocrates et de sinécuristes, la domesticité pléthorique du palais de l'Elysée, la Garde Républicaine en gants blancs, le grand tourisme diplomatique, les emplois fictifs à la Mairie de PARIS ou à Air-France, le bel hôtel particulier du Président de l'Assemblée Nationale, les fonds secrets généreusement distribués aux partis de la Majorité, les Renseignements Généraux, les chasses à RAMBOUILLET ou la garden party présidentielle du 14 juillet, etc.)

LE CLIENTELISME

"On ne peut pas tromper tout le monde indéfiniment" disait déjà Abraham LINCOLN. Quand le mensonge et la démagogie ont perdu une partie de leur efficacité, la classe politique ne peut conserver son pouvoir qu'en faisant appel à cet autre levier qu'est la clientélisation, toujours très efficace dans un monde où coexistent abondance et pénurie. Opérer la transmutation occulte, généralisée et continue des citoyens en clients, telle est la fonction de la clientélisation. Il s'agit de constituer patiemment des réseaux aussi denses, aussi étendus que possible de gens qui se sentiront redevables et se mobiliseront quand il le faudra, pour voter et faire voter en faveur du bon candidat. Quand il transcende les frontières partisanes, quand il mêle toutes les sensibilités de l'extrême-droite à la gauche la plus dogmatique, ce réseau peut - entre les mains d'un RASTIGNAC de talent - mener jusqu'à la tête de l'Etat. Le procédé est connu depuis l'Antiquité romaine. Le client était un plébéien qui s'était mis sous la protection d'un patricien. Aujourd'hui on ne parle plus que de parrains (ce qui renvoie toujours au père) et le système, hiérarchisé comme toute féodalité, peut fonctionner sur un mode intense et ouvertement crapuleux (le racket), aussi bien que sur un mode diffus et policé (les premiers cercles de la société libérale très avancée), le mode policier des indicateurs servant de transition et le cas échéant d'intermédiaire[18]. Sans doute serait-il du plus haut intérêt de savoir comment au cours des siècles, le système s'est affiné, complexifié. Tel n'est pas mon propos. Je me contenterai ici d'évoquer quelques exemples de monnaies positives[19]. Je citerai des monnaies simples mais un parrain peut aussi utiliser des monnaies plus subtiles: par exemple lorsqu'il se trouve parvenu à un niveau suffisant de notoriété, il peut fidéliser en invitant à sa table mais aussi en s'invitant lui-même chez des gens simples. Il s'attachera des dévouements en rendant des services mais aussi en les demandant et en utilisant ainsi l'effet PERRICHON.

On se souvient peut-être que M. PERRICHON[20] est sauvé par l'un des soupirants de sa fille, tandis que l'autre plus retors s'arrange pour être sauvé par celui dont il espère devenir le gendre. "Je vous ai sauvé la vie, dit le bourgeois lyrique, je ne l'oublierai jamais".

J'évoquerai surtout des ressorts matériels mais il ne faut jamais oublier qu'en filigrane, ce qui s'installe, souvent de manière définitive, dans la relation entre le client et son parrain, c'est une fidélité naïve de nature transférentielle. La fidélité, voilà le grand mot lâché. La fidélité est le propre du caniche comme "le rire est le propre de l'homme". Mais le spectacle d'un homme-caniche n'a vraiment rien de risible. Cette vertu creuse, pour reprendre la pertinente distinction d'André BERGE[21], tant vantée par les dignitaires du clientélisme, conduit parfois des clients à transgresser la loi, à mettre au second plan le bien public, à sacrifier leurs propres intérêts, puis à se sentir encore plus liés justement par ce qu'ils ont donné. En fait, la fidélité au parrain n'est qu'une forme socialement valorisée de la soumission.

Mais le parrain ne gagne pas à tous les coups et certains sans dédaigner le coup de pouce proposé, refusent d'entrer dans la toile d'araignée.

LES MONNAIES DU CLIENTELISME

On peut parler de monnaie positive quand le parrain intervient ou fait intervenir un tiers (son propre parrain ou un autre client) de manière à ce qu'un bien rare ou un service délicat soit accordé à la personne. C'est dans les domaines où règne la pénurie (emploi et logement), que le clientélisme fonctionne le plus spectaculairement, mais quand on veut bien y regarder de plus près, on s'aperçoit que toutes les activités peuvent être concernées. Il arrive que les usagers se plaignent d'une administration tatillonne, qui égare des dossiers, qui inflige 10% de pénalité pour un retard de 2 jours, qui tarde à payer ce qu'elle doit, etc… Pour les notables, la maltraitance bureaucratique, quand elle se manifeste, est pain bénit puisqu'elle leur donne l'occasion de montrer leur pouvoir et leur bienveillance… Comme députés, ils votent la confiance à des ministres qui mettront en place les réglementations persécutrices. Puis comme élus locaux, ils voleront au secours de l'administré qui fait allégeance…

Logements - En s'inspirant d'un très vieux sophisme, on pourrait dire: un beau logement bon marché est rare donc si l'on vous offre un beau logement bon marché, cela risque de vous coûter cher. Les municipalités des grandes villes, les dirigeants de grandes administrations comme l'Assistance Publique, la Caisse Nationale d'Assurance Maladie… disposent d'un parc parfois très important d'appartements qui peuvent être considérés comme un formidable pouvoir d'achat.: Un journaliste ou un élu de l'opposition qui s'est laissé tenter par un bel appartement dans le Marais pour un loyer très intéressant (ou par un simple HLM pour son fils non prioritaire) pourra difficilement ne pas se montrer reconnaissant. Il est assez improbable en tout cas, qu'il dénonce un système dont il continue à bénéficier. Quand on a bien compris cela, on voit mieux pourquoi beaucoup de politiciens de tous bords sont attachés au cumul des mandats. Ce n'est évidemment pas, comme ils le prétendent, le simple besoin de rester en contact avec le terrain car la position de conseiller municipal y suffirait; ce n'est pas non plus le cumul des rémunérations, les voitures et logements de fonction, encore que l'addition ne soit pas forcément négligeable. En fait il existe au moins deux façons d'évaluer le pouvoir d'achat d'un notable: en termes de trésorerie (quels biens peut-il s'offrir dans l'année); en termes de pouvoir (quels services et quelles complaisances peut-il acheter dans le court, le moyen et le long terme). Etre député-maire ou sénateur-maire d'une ville importante, c'est avoir la haute main sur des appartements mais aussi sur un budget et sur des emplois, c'est côtoyer les ministres et les chefs de cabinet. Si je suis dans le même temps maire et ministre de l'Intérieur[22], j'ai autorité - comme ministre - sur le préfet qui est censé contrôler la manière dont je gère ma ville. Si ce haut fonctionnaire manque de souplesse, s'il fait du zèle, une mutation - avantageuse ou non - règlera le problème.

Emplois - Plus le chômage est important, plus la recommandation efficace sera susceptible d'installer la dépendance. On ne saurait trop insister sur l'infinie diversité des situations et sinécures que le népotisme procure, depuis les emplois de jardiniers, huissiers de ministère, gardiens de square jusqu'aux postes de chargés de mission, directeurs de grande entreprise nationalisée sans parler des emplois fictifs ouverts dans les administrations publiques et certaines grandes entreprises. Pour tenir, pendant des années, un emploi fictif à 60 000F par mois, il faut certes avoir des compétences et une éthique très particulières[23] Ce népotisme - qui installe des clients là où l'on aurait besoin de gens intègres et compétents - finit par coûter très cher. Le seul exemple du Crédit Lyonnais (ses dirigeants et ses "contrôleurs") suffirait à le montrer. Ce n'est pas seulement un problème qualitatif. Comme l'affirmait déjà un bon économiste au début de ce siècle, "il est à craindre que dans chaque entreprise d'État ou municipale le nombre des places soit mesuré, non aux besoins du service, mais au nombre des clients à placer"[24].

La perte d'emploi durable voire définitive transforme une part croissante des salariés et de leurs familles en assistés dont la survie matérielle sera plus ou moins précaire selon les aides qu'ils reçoivent de divers organismes et associations de bienfaisance. Même les allocations qui correspondent à des droits acquis par les cotisations versées antérieurement (par exemple les ASSEDIC) peuvent tarder à venir de telle sorte qu'une intervention d'élu semblera nécessaire…

Justice - De nombreux moyens sont à la disposition du Parquet quand il reçoit instruction de protéger un délinquant. Par exemple, il peut décider de ne pas poursuivre, confier le dossier à un magistrat incompétent ou docile, dessaisir le magistrat efficace, le muter (éventuellement avec avancement pour éteindre son amertume), classer l'affaire, faire traîner jusqu'à ce qu'il y ait prescription ou jusqu'à disparition des témoins[25], organiser le vice de forme qui permettra de faire casser toute la procédure, etc… Peut-on encore refuser quelque chose au notable qui vous a sauvé de la prison et peut-être du déshonneur ?

Mais ces stratégies ne concernent qu'une minorité déviante. Pour les citoyens ordinaires, il faut mettre en place tout à la fois des pénalisations lourdes et des contrôles rares plutôt que des contrôles quotidiens et de pénalisations graduées. Il est malsain d'annoncer sur certains axes une limitation de vitesse à 80 si on laisse de façon habituelle les gens rouler à 120. Pourquoi attendre l'accident meurtrier pour contrôler l'alcoolisation des conducteurs ? Des contrôles quasi continus à la sortie des restaurants, des bars et des discothèques réduiraient l'hécatombe... Quand elle pose des règles et tolère que ces règles soient violées de façon continue par le plus grand nombre, la puissance publique perd beaucoup de sa crédibilité. Mais cette inconséquence si spectaculaire se révèle très grande cohérence, si au lieu de penser en termes de puissance publique et de civisme, on l'envisage comme l'une des facettes de la clientélisation… Incité à enfreindre les règlements, entraîné par un flot unanime, l'automobiliste finit toujours par tomber sur un contrôle d'autant plus fructueux qu'il est rare. Il lui faudra alors une grande vertu civique pour ne pas solliciter le notable capable de faire sauter sa contravention. Que pourrait refuser celui qui n'a pu continuer son activité qu'en sauvant in extremis son permis de conduire. La principale fonction des contrôles routiers[26] n'est pas l'élimination des accidents mais la clientélisation des automobilistes.

Signes de reconnaissance - Il n'est évidemment pas possible d'inviter tous les électeurs à la Garden Party de l'Elysée ou à une chasse à RAMBOUILLET. D'ailleurs si c'était le cas, où serait la reconnaissance ? "Je veux qu'on me distingue", dit ALCESTE. C'est à quoi justement doivent servir l'entrée puis l'élévation dans le grand troupeau des décorés (Légion d'honneur, Mérite, Palmes académiques, Toison d'or, Mérite agricole, etc.) et dans les petits troupeaux au charme discret où l'on n'entre que sur parrainage (Jockey, Rotary, Lyon's club, etc…). Bien entendu, à côté de ces signes réservés aux petits et grands notables, il y a la menue monnaie des poignées de mains, des banalités de comptoir, des tournées sur les marchés, où l'on mobilise les sourires généreux et les plates flatteries[27].

Les monnaies collectives - Si diversifiées qu'elles soient, toutes ces monnaies ne touchent malgré tout qu'une partie infime de la population. Il se trouve encore des gens qui préfèrent respecter les limitations de vitesse, qui ne s'intéressent ni aux petits rubans, ni aux chasses présidentielles… Mais résisteront-ils à ces monnaies collectives que sont pour une ville, la construction d'un lycée tout neuf, d'un Institut Universitaire de Technologie, d'une piscine olympique ? Sous cet angle, le mieux placé semble celui qui est tout à la fois député et maire, qui soupe avec les ministres et qui tutoie le président du Conseil Régional. Le cumul des mandats est généralement présenté comme un moyen efficace de favoriser le développement de sa cité. Si le fait était confirmé, si les villes dont les maires étaient bien en cour, furent fastueusement arrosées, cela voudrait dire qu'on utilisa les impôts payés sur l'ensemble du territoire national pour corrompre collectivement les électeurs de ces villes. Que les crédits ne soient pas répartis en fonction des besoins légitimes des populations mais sur une base de copinage, cela relèverait du favoritisme et de l'abus de biens sociaux…

DES LANGUES DE BOIS AUX BOTTES DE CUIR

TARTUFFE en cette fin de XXème siècle est le grand modèle de la classe politique. Les styles de tartufferie se sont diversifiés pour tenir compte des intérêts et des sensibilités différentes dans le corps électoral. Il y a plusieurs langues de bois dans la maison du parrain. Dans la version grand-public-qui-réfléchit, le ministre dira avec conviction tout ce qu'il faudrait faire et les braves gens hocheront la tête avec satisfaction: c'est bien là le langage qu'ils attendaient. Le journaliste complaisant se gardera bien de demander pourquoi le gouvernement n'a pas encore réalisé. Mais si par hasard la question était posée, le ministre dirait qu'il n'est là que depuis quelques mois, que tout ne peut pas être fait en même temps, que PARIS ne s'est pas construit en un jour, qu'il attend le rapport de la Commission. Personne ne semblera se souvenir que Monsieur le Ministre était déjà aux affaires dans le précédent gouvernement et qu'il a simplement changé de portefeuille… Les chefs de l'Opposition critiqueront courtoisement la politique de la Majorité, puis, une fois au pouvoir, ils trouveront de bonnes raisons pour continuer dans la même direction. Chaque camp déçoit à son tour, tandis que l'adversaire se refait une santé par une cure d'opposition. Mais quand la confiance dans la démocratie se sera usée dans ces alternances dérisoires, beaucoup découvriront avec horreur qu'il "est encore fécond, le ventre d'où a surgi la bête immonde"[28].


[1] Mais pas les sénateurs…
[2] Chaque magistrat dépend du gouvernement pour son avancement et ses mutations; les procureurs reçoivent des instructions du ministère, etc.
[3] Depuis 1992, des juges d'instruction osent inculper des ministres. En 1940, un seul magistrat avait refusé le serment de fidélité à PETAIN.
[4] Et que ce soit souvent pire ailleurs n'est pas une raison pour se résigner…
[5] 50% des votants qui ne sont eux-mêmes que 49% de la population en âge de voter (0,50 x.0,49 = 0,245 soit 24,5%).
[6] D'où l'importance croissante de la clientélisation - voir plus loin…
[7] "Je te tiens, tu me tiens par la barbichette", etc.
[8] Qui oserait prétendre que MONTESQUIEU fait le jeu du FN quand il affirme que "tout pouvoir corrompt".
[9] C'est en tout cas l'explication la plus bienveillante.
[10] Palais de l'Elysée, hôtel particulier du Président de la Chambre des Députés, etc.
[11] Quand les coups sont réalisés trop brutalement, en une seule journée, la COB peut se trouver dans l'obligation d'ouvrir une enquête
[12] L'Etat dans une société relativement démocratique comme la nôtre n'a pas vraiment les moyens d'empêcher un enseignant particulier de développer l'esprit critique de ses élèves. Mon jugement sur l'école dans sa globalité est donc heureusement contredit par un certain nombre d'exceptions parfois brillantes…
[13] D'autres ont parlé de ces médias bien mieux que je ne pourrai le faire. Il faut lire en particulier Serge HALIMI, Les nouveaux chiens de garde (LIBER - RAISONS D'AGIR, 1997)
[14] Les chauvins ordinaires sont le plus souvent stratifiés: strate nationale (Allez les verts !), strate régionale et strate du club local pour la gloire duquel on est prêt aux plus grands sacrifices qui peuvent à l'occasion être humains (Il suffit de se souvenir - dans des genres sanglants différents - du HEYSEL ou du stade de FURIANI ou encore, en plus discret, du dopage)
[15] Le sportiologue est un connaisseur des performances sportives: il connaît le nom de celui qui gagna le tour en 1908 et même la couleur de son maillot. Il arrive que le sportiologue ait lui-même une activité physique…
[16] Auxquels on peut se fier… On peut aussi lire: la probabilité qu'ils tombent en panne - en tant que menteurs - est très faible.
[17] Rappelons que l'hyperonyme est un terme générique: par exemple oiseau est l'hyperonyme de merle et de grive (qui sont des hyponymes de oiseau)
[18] Si on ne suit pas de près le développement des "affaires" dans les régions où le libéralisme est le plus avancé, on pourra penser que ma formulation est excessive…
[19] Pour ne pas… alourdir le propos, j'ai renoncé à parler des monnaies négatives, celles qui viennent punir - sans sortir de la légalité - le journaliste trop curieux ou trop indocile…
[20] Eugène LABICHE, Le voyage de M. PERRICHON
[21] André BERGE, dans Les maladies de la vertu, distingue les vertus pleines des vertus creuses telles que la fidélité (à qui, à quoi) et le courage (pour faire quoi) qu'il serait léger d'admirer a priori…
[22] Ou premier ministre ou collègue ou ami politique ou adversaire politique à ménager, etc.
[23] Pour connaître le salaire horaire, on divise le salaire du mois par le nombre d'heures travaillées 25.000F: 250 = 1000F; 25.000F: 2 = 12.500F; 25.000F: 1/4 = 100.000F. Pour un emploi fictif, le diviseur est nul et par conséquent l'opération devient impossible ou du moins très délicate quel que soit le montant mensuel: 25000 ou 60000/0 donne à la limite l'infini. Les Français sont aujourd'hui gouvernés par un premier ministre qui pendant plusieurs années, par une grâce spéciale venue d'en haut (le Quai d'Orsay), toucha, à chaque heure, l'infini…
[24] Charles GIDE, Économie politique, t. I, p. 322.
[25] Parmi les cas les plus spectaculaires, PAPON, TOUVIER et BOUSQUET dont les crimes furent commis il y a 50 ans.
[26] Cette stratégie peut être rapprochée de ce qui se passe pour les gens qui sont passés par la prison.
[27] On se souvient sans doute de Monsieur JOURDAIN disant: "Mais que peut-on refuser à un grand seigneur qui vous dit: Mon ami"
[28] Suivant la belle formule de BRECHT dans La résistible ascension d'Arturo UI


Texte disponible sur le site de l'auteur :
http://www.reitzman.fr/