Le Monde - Société -
Le clonage humain, série 2: Clonage «thérapeutique» |
• LE MONDE | 16.08.01 | 12h34 |
Elisabeth Bursaux |
• LE MONDE | 10.07.01 | 16h32Les députés veulent que le Parlement se saisisse de la question du clonage thérapeutiqueFruit d'un long travail conduit par une mission composée de cinquante-sept députés et présidée par Bernard Charles (PRG, Lot), ce rapport traite de l'ensemble des sujets d'actualité déjà abordés depuis près de deux ans par le Conseil d'Etat, le Comité consultatif national d'éthique, le Conseil national de l'ordre des médecins ou la Commission nationale consultative des droits de l'homme. Il aborde ainsi les différentes problématiques relatives à l'assistance médicale à la procréation, à la recherche scientifique sur l'embryon humain, au don et à l'utilisation des produits du corps humain, ainsi qu'à la brevetabilité de ces derniers. Il approuve, pour l'essentiel, les dispositions contenues dans le projet de loi sur la bioéthique. Le rapport de la mission de l'Assemblée nationale traite aussi sans ambiguïté de l'une des questions les plus controversées du moment: celle de la légalisation du "clonage thérapeutique". Cette pratique consiste, schématiquement, à fabriquer un embryon humain à des fins non pas de reproduction, mais de recherche et de traitement médical. En février, le président de la République, Jacques Chirac, s'est déclaré opposé à une telle proposition, tandis que le premier ministre, Lionel Jospin, après avoir pris position, à la fin de l'année 2000, en faveur du clonage thérapeutique, a finalement choisi de s'aligner sur la position du Conseil d'Etat (Le Monde du 21 juin). UN MOT QUI "PRÊTE À CONFUSION""La question du recours au clonage thérapeutique fait l'objet d'un débat en France, mais aussi en Europe et aux Etats-Unis, a expliqué, mardi 10 juillet, Alain Claeys (PS, Vienne), rapporteur de la mission d'information. Il faut être attentif aux questions terminologiques. L'utilisation du mot "clonage" prête à confusion. Il faut insister sur le fait que l'objectif n'est pas de parvenir au développement d'un être humain, mais d'obtenir, à partir des cellules somatiques d'un patient, les cellules souches dont la différenciation contrôlée permettrait de traiter l'affection dont il est porteur sans provoquer de phénomène de rejet". Selon M. Claeys, que l'on soit convaincu ou non de l'opportunité d'ouvrir un tel domaine controversé de recherche, "on ne peut pas accepter le fait que le Parlement soit exclu de ce débat alors que le Comité d'éthique, la Commission des droits de l'homme, le Conseil d'Etat, le premier ministre et le président de la République ont exprimé leur propre point de vue". Le rapport souligne que la commission spéciale qui sera chargée de l'examen du projet de loi pourrait organiser sur cette question une "audition publique", au cours de laquelle défenseurs et opposants au clonage thérapeutique pourront "éclairer le choix final du législateur". Pour M. Claeys, si cette technique devait finalement être autorisée, il faudrait régler la question du don des ovocytes, ces cellules sexuelles féminines indispensables à la création des embryons conçus à des fins thérapeutiques. La mission, qui juge que ce serait "une erreur, et même une faute", de ne pas commencer le débat de révision des lois de 1994 avant la fin de la législature, estime qu'il faut faire pression sur la Commission de Bruxelles afin d'obtenir une interprétation rigoureuse du texte controversé de la directive européenne de 1998 sur la brevetabilité du vivant. |
Jean-Yves Nau • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 11.07.01 |
• LE MONDE | 07.08.01 | 19h51Lionel Jospin renonce à légaliser le clonage à visée thérapeutiqueUne étape importante dans le débat sur la bioéthique vient d'être franchie. Contrairement à ce qu'il avait initialement programmé, le gouvernement ne proposera pas d'autoriser par voie législative la pratique du clonage dit thérapeutique, cette technique qui, de l'avis des biologistes, pourrait permettre de soigner de nombreuses affections aujourd'hui incurables. Lionel Jospin a, sur ce point, choisi de suivre les conclusions de l'assemblée générale du Conseil d'Etat qui, à une voix de majorité, s'est prononcée, jeudi 14 juin, contre cette disposition. Sans jamais utiliser le terme de "clonage thérapeutique", le texte de l'avant-projet de loi du gouvernement prévoyait bien d'autoriser, sous certaines conditions très précises, le "prélèvement de cellules" sur des personnes volontaires. Les noyaux de ces cellules auraient ensuite pu être inclus dans des ovocytes énucléés afin de constituer des embryons humains, ces derniers ne pouvant toutefois pas être utilisés à des fins procréatives. Tout en condamnant de manière explicite le clonage reproductif, le gouvernement entendait ainsi permettre aux biologistes français de participer aux recherches dans ce domaine en pleine expansion. Présentant le 28 novembre 2000 les grandes lignes de l'avant-projet de loi de relecture des lois de bioéthique de 1994, le premier ministre s'était dit convaincu du fait que "la société française aspire à ce que la prise en compte de valeurs fondamentales encadre, sans les rendre impossibles, l'avancée des connaissances scientifiques et leurs applications potentielles dans le domaine de la santé humaine". RÉIFICATION DE L'EMBRYONIl répondait ainsi par avance aux arguments de ceux pour qui la légalisation de la pratique du clonage thérapeutique conduirait à une réification de l'embryon humain tout en constituant l'étape précédant l'acceptation du clonage reproductif. Cette disposition était, au sein du gouvernement, défendue notamment par les ministres de la recherche et de la santé. La controverse avait été relancée, début février, par le président de la République. S'exprimant à Lyon dans le cadre d'un congrès mondial sur les sciences du vivant, Jacques Chirac avait, pour la première fois, pris publiquement position contre la légalisation de la technique du clonage thérapeutique. "Je ne suis pas favorable à l'autorisation du clonage thérapeutique, avait déclaré M. Chirac. Il conduit à créer des embryons à des fins de recherche et de production de cellules et, malgré l'interdit, rend matériellement possible le clonage reproductif et risque de conduire à des trafics d'ovocytes". On précise à l'hôtel Matignon qu'en prenant acte du vote de l'assemblée générale du Conseil d'Etat, M. Jospin espère qu'un large débat démocratique pourra s'ouvrir sur ce sujet très sensible afin que la question puisse être mieux abordée lors de l'examen, sans doute pas avant 2002, du texte par le Parlement. Seule la Grande-Bretagne a, aujourd'hui, autorisé par voie législative la pratique du clonage thérapeutique. |
J.-Y. N. • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 16.06.01 |
• LE MONDE | 23.02.01 | 13h33 |
Jean-Paul Caverni est professeur de psychologie
cognitive à l'université d'Aix-Marseille-I et membre du Comité consultatif national
d'éthique. • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 24.02.01 |
• LE MONDE | 15.11.00 | 15h07 |
Premier enfant né après DPI en FrancePremier succès de la mise en œuvre du diagnostic préimplantatoire (DPI) en France: un enfant est né le 13 novembre, à l´hôpital Antoine-Béclère, de Clamart (Hauts-de-Seine), indemne d´une redoutable maladie génétique qui avait fait perdre auparavant trois enfants à cette famille. Car c´est là le but du DPI: rechercher, après fécondation in vitro, les embryons non porteurs du gène délétère et les réimplanter dans l´utérus de la mère. «Les indications du DPI sont celles du diagnostic prénatal, explique le professeur Arnold Munnich, généticien, chef du service qui a mis au point à Necker le DPI et travaille en liaison étroite avec le service du professeur Frydmann à l´hôpital Béclère. Le DPI évite le recours à l´interruption de grossesse qui suit le diagnostic prénatal pratiqué après quelques semaines de gestation». Encore rare aujourd´hui – il ne se pratique que dans deux centres, à Paris et Strasbourg, et bientôt à Montpellier –, il est proposé en priorité aux familles déjà durement éprouvées par la survenue de maladies génétiques mortelles. |
Le problème éthique vient de ce que ces cellules souches sont les cellules des embryons. Et la plupart des pays ont banni la recherche sur l´embryon.
La situation se complique par les attentes encore plus fortes concernant les cellules issues d´embryons clonés, c´est-à-dire d´embryons créés par transfert de noyau d´une cellule d´un individu à un ovocyte énucléé. Le clonage humain a été banni dès l´annonce du succès du clonage de la brebis Dolly. En revanche, utiliser les cellules souches adultes qui résident dans la plupart des organes humains et qui servent à les régénérer ne soulève aucun problème éthique.
Le GEE a «tenu compte du pluralisme de sa composition et de la diversité culturelle européenne, aux sensibilités nationales très contrastées», selon Noëlle Lenoir, sa présidente. L´avis présenté a été adopté à l´unanimité et le groupe a été guidé par la considération du caractère extrêmement prometteur des cellules souches pour la thérapeutique, «plus encore que la thérapie génique», insiste Ann McLaren, embryologiste britannique et membre du GEE.
«Le groupe juge éthiquement inacceptable la création d´embryons à partir de dons de gamètes afin de se procurer des cellules souches, étant donné que les embryons surnuméraires représentent une source alternative disponible», précise l´avis. Quant au clonage thérapeutique, le GEE estime que «la création d´embryons par transfert de noyaux de cellules somatiques pour les besoins de la recherche sur la thérapie par les cellules souches serait prématurée».
En effet, le GEE insiste sur l´importance de mener des recherches et de les financer sur les autres cellules souches humaines, « à partir d´embryons surnuméraires, de tissu fœtal et de cellules souches adultes ».
L´Europe devrait édicter des règles imposant un contrôle et une transparence des recherches menées sur l´embryon et sur les cellules souches. L´évaluation scientifique de leur utilisation « devrait être conduite en liaison avec l´Agence européenne pour l´évaluation des médicaments », lit-on dans l´avis. Les éléments biologiques humains ne devraient pas pouvoir être vendus. Sont ainsi bannis le commerce des embryons, des tissus de fœtus morts, des ovocytes. Cette interdiction devrait permettre d´éviter que les femmes soient soumises à des pressions. Concernant les essais thérapeutiques, le caractère encore lacunaire du savoir scientifique impose d´afficher la sécurité et le respect de la santé du patient comme les deux préalables: tout mettre en œuvre pour éviter les contaminations bactériennes ou virales, d´une part, « mesurer les risques que les cellules souches transplantées causent des anomalies ou entraînent la formation de tumeurs ou de cancers », d´autre part.
Le GEE, présidé par Noëlle Lenoir, est placé auprès de la Commission européenne et rend des avis consultatifs. Ces avis ne sont pas destinés à passer au-dessus des avis nationaux, et le GEE ne prétend pas édicter ses choix. Ses avis sont cependant précieux, notamment pour les pays européens qui ne se sont pas encore dotés de lois de bioéthique ou qui envisagent de les compléter. «Le groupe a trouvé un point d´équilibre entre la liberté de la recherche et le respect de la dignité humaine», a conclu Göran Hermerén, philosophe suédois et membre du groupe.
• LE MONDE | 08.02.01 | 14h16 |
Raphaëlle Bacqué et Jean-Yves Nau • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 09.02.01 |
• LE MONDE | 09.08.01 | 11h22Vers une nouvelle voie de création de cellules souchesPourra-t-on créer des cellules souches embryonnaires sans avoir à créer un embryon ? C'est le but d'une recherche très active conduite par PPL Therapeutics PLC, la compagnie écossaise qui avait participé au clonage de l'agnelle Dolly en 1996. Selon le Wall Street Journal daté 3-4 août, cette société aurait mis au point un système moins controversé que la création d'embryons pour obtenir des cellules souches ayant des caractéristiques embryonnaires. Alan Colman, directeur des recherches de PPL, se propose de faire remonter le temps à des cellules humaines adultes pour les ramener au stade embryonnaire. Il a déclaré au Wall Street Journal qu'il a déjà réussi à obtenir cette inversion du temps biologique, ou dédifférenciation, sur des cellules de bovin. Plusieurs compagnies pharmaceutiques sont aussi engagées dans cette recherche mais aucun article scientifique sur le sujet n'a encore paru. Cette annonce de PPL prend tout son sens au moment où les débats concernant le caractère éthique de la création de cellules embryonnaires par clonage ont lieu dans nombre de pays, et notamment aux Etats-Unis. La Chambre des représentants a voté, le 31 juillet, un texte interdisant et criminalisant tout clonage humain, et le Sénat est appelé à se prononcer sur le sujet. Enfin, le président Bush a fait part de sa réticence à laisser faire cette recherche. L'intérêt thérapeutique des cellules souches est connu depuis longtemps. Il en existe dans l'organisme adulte, dont le rôle est de pourvoir au remplacement, à l'intérieur d'un tissu, des cellules vieillies ou endommagées. Elles sont le plus souvent capables de donner naissance à des cellules de plusieurs lignages et sont très utilisées depuis de nombreuses années. Les greffes de moelle, par exemple, sont la transfusion de cellules souches hématopoïétiques, à savoir les cellules capables de renouveler toutes les lignées cellulaires du sang. Les cellules souches adultes auraient, cependant, un moindre potentiel de multiplication que les cellules souches embryonnaires. Ce qui a décuplé l'intérêt pour ces dernières, qui sont susceptibles de se diviser et de donner naissance à tous les tissus et organes différenciés qui constituent un être humain, mais ont aussi un potentiel prolifératif quasi sans limite. Cependant, des cellules dérivées d'un embryon "étranger" susciteraient chez le receveur une réaction de rejet immunitaire et obligeraient à lui proposer un traitement immunosuppresseur. Ce qui ne serait pas le cas si l'embryon était créé par transfert du noyau d'une cellule du receveur dans un ovule – ce qu'on appelle le clonage thérapeutique. Le clonage embryonnaire, reproductif ou thérapeutique, repose sur le fait que le noyau de la cellule qui se substitue à celui de l'ovule et porte tout le patrimoine génétique de l'embryon est reprogrammé par des facteurs contenus dans l'ovule et revient ainsi au même stade initial que celui des gamètes (Le Monde du 9 août). Il perd tous les éléments qu'il avait acquis au cours de la différenciation et qui avaient réduit au silence la plupart de ses gènes. La mise au jour des mécanismes de la reprogrammation permettant de rendre à toute cellule les capacités de son ancêtre, la cellule embryonnaire, rendrait inutile le passage par le clonage embryonnaire et serait le vrai point de départ de la recherche concernant la thérapie cellulaire à partir des cellules souches. Elle n'est encore aujourd'hui qu'à l'état de promesse car les chercheurs ne savent pas encore dériver les diverses lignées cellulaires des cellules embryonnaires. |
Elisabeth Bursaux |
• LE MONDE | 01.08.01 | 11h35 |
Catherine Tastemain
Des chimères, des clones et des gènes, de Nicole Le Douarin. Editions Odile Jacob, Paris 2000, 480 p., 195 F (29,73 euros). |