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Pénombre — la lettre grise n° 6


PREMIER ÉPISODE

Créon:

"La sphinge aux airs changeants nous contraignait
À laisser l’affaire obscure, pour regarder à nos pieds.

Péhaimécy:

En reprenant au début, je vais l’éclaircir une nouvelle fois, moi comme vous.

[…]

Le Chœur fait son entrée; il restera sur la scène jusqu’à la fin de la pièce.

Le Chœur:

Oh ! innombrables les fléaux
Que je supporte ! Tout l’équipage
Est malade, et, dans ma pensée, pas d’arme
Avec quoi se défendre: ni les pousses
De la noble terre ne croissent, ni les femmes en gésine
Ne se relèvent des douleurs hurlantes – pour accoucher !
On peut les voir l’un après l’autre, comme un oiseau à l’aile rapide
S’élancer plus fort que le feu irréductible vers le rivage du dieu vespéral."

MESURE POUR MESURE OU FÉTICHE CONTRE FICTION

Anna O. et le PMSI, ou petite histoire d’un groupe de travail et les réflexions qui s'en suivent

Avertissement
Cette saynète s’est efforcée d’éviter les patois locaux. La traduction étant cependant parfois malaisée, le traducteur a dû recourir à des apartés sous forme de notes dont les initiés pourront se dispenser.
Question qui découle de l’avertissement:
L’accès au langage psychanalytique rencontrerait-il plus de résistances que l’accès au langage statistique et mathématique ?

Deux ou trois choses que je sais du groupe de Pénombre

 L e groupe de travail de Pénombre sur le PMSI en psychiatrie(1) aura travaillé deux ans ou un peu plus. Deux ans, c’est court pour une psychanalyse, surtout si les séances sont espacées et qu’il s’agit d’analyser le PMSI, mais chacun pourra au terme de ce travail sur soi et sur son institution continuer son auto-analyse personnelle, professionnelle et institutionnelle.

Particulièrement inspiré, l’un d’entre nous, un soir, déclara: “En somme, si le PMSI psychiatrie est vraiment destiné à maîtriser l’immaîtrisable et servir de guide au financement de la psychiatrie, c’est un adjuvant, aux effets secondaires incontrôlables et probablement aggravants pour les soignés. En revanche, s’il est abandonné, il aura fonctionné comme une fiction dont la construction aura été pour chacun un moyen de réfléchir à sa propre pratique, et aura permis un échange, dans l’accord ou dans le conflit, entre tous ceux qui ont en charge la psychiatrie”.

La première hypothèse semble hélas se réaliser, et risque de rendre gris, après leur avoir montré de belles couleurs(2), tous ceux, soignants et soignés, que la psychiatrie a saisis. Lors d’une nouvelle réunion, un autre, inspiré à son tour, réfléchit à haute voix devant le groupe et s’exclama: “Voyons, imaginons face à ce système de comptabilité, imaginons Anna O…(3)”. L’étonnement, l’exaspération, même une sorte de frayeur se peignit sur le visage de quelques-uns et quelques-unes: confusion entre Anna O., et celle d’Histoire d’O(4) ? ou rejet de toute référence à Freud ? Il n’en reste pas moins que le raccourci fut saisissant. Cela marquait sans doute le retour du patient, un patient qui a une histoire et dont l’existence dérange manifestement.

Je me suis interrogée sur l’origine de l’effet de surprise ou de l’effet comique provoqué par cet “Anna O. et le PMSI”: une jubilation dans ce rapprochement comme aurait opéré un mot d’esprit. Anna O. à côté du PMSI, c’était confronter deux approches quasi irréductibles où le patient était censé occuper le centre du débat mais de façon incommensurable. Comme si l’on rapprochait une fiction quasi mythique et un fétiche !

Mais, comme dans la comédie, donnons maintenant la parole à chacun et écoutons ce qu’ils nous disent.

Le PMSI et son petit frère, le PMSI en psychiatrie

Le PMSI fait partie des nombreux instruments de gestion érigés en fétiche, propres aux processus de "modernisation" du service public mis en œuvre depuis une vingtaine d'années(5). Parmi ces processus, un d’entre eux est constant: il s’agit d’appliquer à l’organisation des services publics, ici l’organisation hospitalière, des approches, des méthodes et des recettes qui auraient fait leurs preuves dans le domaine industriel et marchand. La transférabilité de ces outils n’étant pas assurée, leur mise en œuvre tend à transformer leur objet, ici l’hôpital, de telle sorte qu’il s’adapte à ce qui serait une évolution inéluctable, le sens de l’histoire(6). Version moderne d’un mythe ancien, qui consiste à modifier la réalité de l’hôpital et de ses agents pour qu’elle soit conforme au modèle de l’entreprise, au moule de la gestion et au lit de Procuste(7).

Dans la mise en place des outils de gestion, l’urgent est constamment favorisé aux dépens de l’important. Le PMSI-MCO (médecine, chirurgie, obstétrique) importé des États-Unis, a été mis en place au pas de charge et sans concertation, en réponse à une absence de tradition forte de production de données médicales et à l’absence d’un système d’information comptable. Le PMSI est présenté comme une méthode qui permet une réelle redistribution des ressources entre les établissements, sur la base de la mesure de leur produit médicalisé. Autrement dit, le soin est un produit et l’hôpital une entreprise qui produit du soin. Le PMSI est parfaitement adapté aux opérations de l’appendicite et aux accouchements, à condition qu’aucune complication ne les accompagne. Désormais les groupes homogènes de malades (GHM) doivent devenir la base du calcul de la dotation budgétaire annuelle, les comparaisons interhospitalières se faisant sur une base rationnelle qui permet de mener une révision systématique des bases budgétaires afin de réallouer les moyens en fonction de l’activité. Michel Naiditch et Gérard de Pouvourville ont analysé comment la construction PMSI-MCO s’est faite sans véritable débat public, ni tentative de négociation avec le monde professionnel et grâce à une coalition d’acteurs qui lui était favorable(8).

L’adaptation de cet outil de gestion à la psychiatrie, qu’aucun autre pays que la France n’avait envisagé, aurait dû permettre de répondre à l’injonction exprimée par la Cour des comptes en 1988 qui dénonçait les insuffisances du système d’information. Celle-ci demandait la mise en œuvre d’outils au niveau national pour analyser les disparités régionales et entre établissements et conduire les restructurations permettant une meilleure répartition de l’offre de soins. Dans la logique administrative, il faut aboutir, disposer d’un outil qui conforte la fiction de l’égalité d’accès aux soins, et qu’importent les variances qui fâchent.

Finalement, après bricolages nombreux, le PMSI pourrait mesurer correctement (statistiquement s’entend), les troubles mentaux organiques, c’est-à-dire les démences de type Alzheimer, et les troubles graves du développement physique et psychique rencontrés dans l’enfance. Comme l’indique Jean Paul Liauzu(9), les meilleurs niveaux de variance expliqués se rencontrent dans les cas de dépendances majeures, comme pour les deux groupes de malades précédemment cités et qui représentent environ 6% des hospitalisations. Les cas d’hospitalisations les plus nombreux, les psychoses (dont la schizophrénie) et les névroses ont une part de variance expliquée ne dépassant pas 11%. Comment dans ces conditions, ne pas considérer l’outil PMSI-psychiatrie autrement que comme une échelle de mesure qui enferme le soin dans une définition restrictive qui servira de justification pour des politiques au service d’une planification qui est la résultante de plusieurs tendances: rigidité contre souplesse, moyens contre fins, régionalisation contre centralisation, etc. Un tel système ne peut que privilégier les prises en charge médicamenteuses dont les résultats doivent être rapidement obtenus; il ne peut qu’encourager la progressive désaffection à l’égard de la pratique analytique des psychiatres au profit de la délégation du soin à toute la pharmacopée des psychotropes.

Cette désaffection se double d’un essoufflement, voire de la disparition, des générations qui ont défendu la psychothérapie institutionnelle(10), où le soin se trouve largement diffusé dans la vie même de l’établissement: repas, moments de loisirs, télévision, activité de groupe, accès au parc de l’établissement et activités diverses (théâtre, ateliers, art-thérapie). On comprend que le PMSI qui mesure des points ISA, calculés par la somme des soins directement appliqués au patient, compte pour peu de choses cet environnement qui a permis dans l’espace institutionnel le développement d’un freudisme sans divan. Tous ceux qui ont vu le film “La moindre des choses” qui montre comment une troupe de comédiens a monté avec des malades mentaux un spectacle théâtral à la clinique de La Borde pourront s’interroger sur ce que ferait le PMSI de ce travail. Venons-en maintenant au rapprochement du PMSI et d’Anna O. avec son étrangeté. Le point commun des deux termes de la comparaison réside dans leur lien avec la pathologie mentale.

Anna O. et la fiction freudienne

Anna O.

L’histoire d’Anna O. est l’un des cas fondateurs de la psychanalyse avec quelques autres, appliquée à l’analyse de l’hystérie. Il a fini par prendre place de mythe. L’un des intérêts de l’histoire d’Anna O., dans l’histoire de la psychanalyse, provient de ce qu’elle permet de suivre par recoupements de divers témoignages, comment se croisent différents récits se rapportant à la vie d’un patient et comment ils aboutissent à une construction que l’on pourrait appeler fiction ou mythe. Cette fiction ou ce mythe traduit une logique qui renvoie au fonctionnement inconscient qui apparaît dans diverses expressions: mots tels que le patient les énonce, fantasmes manifestés par des symptômes, lapsus et contretemps (untoward event, tel que l’écrit Freud -en anglais- dans une communication sur Anna O.).

Anna O. est une jeune fille soignée par le médecin viennois Breuer de 1880 à 1882 pour des symptômes hystériques liés à la maladie de son père. Ce cas d’hystérie est présenté comme un modèle de guérison par la cure cathartique.

L’histoire officielle raconte qu’Anna aurait d’abord été sujette à des hallucinations, des contractures et des quintes de toux. Puis, elle a des troubles de la vision, du langage et de la motricité. Elle mélange plusieurs langues, ne sait plus s’exprimer en allemand et finit par choisir l’anglais. Breuer la soigne par les procédés de la cure par la parole et la méthode cathartique, ce qu’Anna désigne comme le «ramonage de cheminée», qui est une forme de remémoration. Les symptômes alors s’aggravent. Breuer fait interner Anna dans un sanatorium et la soigne par la méthode de l’auto-hypnose. La dernière période se caractérise par la levée progressive des symptômes. La malade parle de nouveau en allemand et guérit de sa paralysie.

Anna et Bertha

Une autre version est racontée par Jones qui révèle le vrai nom d’Anna O., Bertha Pappenheim. Dans cette version, Breuer aurait été l’objet d’un transfert amoureux de la part de la jeune fille, qui aurait développé une grossesse nerveuse, ce qui aurait effrayé le thérapeute et l’aurait conduit à interrompre la cure par crainte de voir son mariage menacé. Le transfert amoureux d’Anna O. sur l’analyste, révélé par un contretemps (untoward event) survenu au moment où la jeune fille exprimait son fantasme, est, bien sûr, au cœur de la cure, puisqu’il permet de travailler sur le refoulement du désir amoureux d’Anna pour son père(11).

D’autres travaux(12) démentent cette version: Bertha aurait été soignée par hypnose, puis par d’importantes doses de chloral puis de morphine qui auraient fait d’elle une morphinomane. Par ailleurs, Bertha n’aurait jamais eu de grossesse nerveuse, correspondant à un amour de transfert sur Breuer et l’ensemble du récit que Freud fait à son épouse Martha dans sa correspondance puis racontée par Jones semble contredit par les faits.

Bertha aurait surmonté sa maladie par un engagement militant d’où était bannie toute relation charnelle avec les hommes. Différents psychanalystes ont repris à leur compte l’ensemble des variantes du récit des cures et de la vie de Bertha pour mieux suivre comment Freud a construit son interprétation et le mythe d’Anna O., c’est le cas de Mustapha Safouan et de René Major.

Au contraire, à partir de 1985, aux États-Unis, plusieurs chercheurs se sont attachés à démontrer que Freud était un mystificateur et aurait falsifié la vérité pour promouvoir la psychanalyse comme unique méthode de guérison des maladies psychiques. Selon les adeptes de cette thèse, la patiente aurait fait semblant d’être hystérique pour se moquer de son médecin. Dans la conclusion de leur article sur Bertha Pappenheim, Élisabeth Roudinesco et Michel Plon(13) concluent qu’à force de méconnaître l’histoire de la conscience subjective des savants, de réduire les mythes fondateurs à des mystifications et de passer du culte positiviste de l’archive à la dénonciation antifreudienne, l’historiographie révisionniste américaine aura fini, en 1995, par adopter, à propos de Anna O., la méthode interprétative dénoncée par Jones et par épouser au nom de la différence des sexes, les thèses les plus rétrogrades des médecins de la fin du XIXe siècle qui regardaient l’hystérie comme une simulation(14).

Le patient, le fétiche et la fiction

Sûr de la justesse de ses hypothèses et face à la sauvagerie du traitement des maladies mentales et notamment de l’hystérie, on comprend que Freud ait voulu faire valider sa théorie dont l’enjeu est la reconnaissance du patient comme sujet de sa guérison, ce qui n’exclut pas qu’il soit l’objet de soin. Nous voici donc bien au cœur d’une guerre scientifique, au sens où l’entend Isabelle Stengers(15).

Et d’abord le versant freudien. Pour faire valoir le bien-fondé de leurs travaux par la présentation du cas d’Anna O., il fallait, pour Freud et Breuer, dont Anna était la patiente, prendre Pierre Janet de vitesse. Celui-ci était l’auteur de la théorie de l’automatisme psychologique appliquée à des patientes identiques à celles de Freud et Breuer. Il valait mieux pour les médecins viennois ne pas trop s’arrêter à l’écart qui pouvait exister entre le cas présenté dans les communications savantes et l’histoire de Bertha Pappenheim.

Aujourd’hui donc la chose est avérée: l’histoire d’Anna O., telle que l’a narrée Jones, est une fiction construite à partir de l’observation d’un cas d’hystérie et de l’auto-observation de Freud. Il s’agit bien d’une reconstruction du cheminement inconscient, assumée comme telle, permettant comme pour Œdipe, une mise en mouvement d’associations qui s’ouvrent sur une parole qui ne pourrait être énoncée sans cet appareil, sans cette interprétation. Avec cette parole, le patient reconstruit une vérité de lui-même qui ne pourrait se dire, sans recourir à une transposition. On pourrait exprimer la chose autrement en disant que le patient se reconnaît dans une métaphore de lui-même que lui renvoie l’analyste: “Je est un autre” selon la déclaration de Rimbaud.

Aujourd’hui, sur l’autre versant de la guerre menée par la psychanalyse, on ne trouve plus Pierre Janet, mais c’est la communauté des professionnels de santé, médecins hospitaliers et gestionnaires qu’il faut convaincre. Lisons Jean de Kervasdoué, ancien directeur des hôpitaux(16), principal promoteur du PMSI en France, dès 1981. L’ancien directeur des hôpitaux s’inquiète de la disparité observée entre les régions et les établissements et s’en prend à la disparité des soins, “la plus choquante de toutes, qu’il s’agisse des différents domaines, bio, psychosocial, systémique, comportemental, ethnologique, etc. Si, en France, la psychiatrie et son exercice sont contrôlés, ce n’est pas le cas de la psychologie et de la psychanalyse. Les pratiques sont-elles toutes aussi efficaces les unes que les autres et, si c’est le cas, pourquoi ne pas retenir la moins coûteuse ?”. Qui peut désigner la pratique la moins coûteuse sur le moyen ou long terme ? Certainement pas le PMSI-psychiatrie. On aurait affaire à ce que la psychanalyse décrit comme un fétiche: artifice magique qui fait prendre la partie pour le tout, ou encore, tenant lieu de ce que le gestionnaire croit comprendre et maîtriser. Le PMSI mesure une partie très minoritaire de l’activité psychiatrique. Cette part du tout n’est pas construite comme est construit un échantillon représentatif de l’ensemble dans une enquête par sondage. Il s’agit du morceau de l’ensemble qui conforte le gestionnaire dans son désir que le modèle fonctionne. Celui qui veut maîtriser les dépenses de santé par un redéploiement des moyens à partir de l’homogénéisation des signes cliniques ou de dépendance présentés par les malades peut croire effectivement que les malades sont homogènes et les dépenses maîtrisables. L’opération ne considère que ce qui concerne sa construction, de la même façon que le fétiche protège le fétichiste de son angoisse de castration et de sa désillusion devant le corps de sa mère.

Le Coryphée

Les gestionnaires du PMSI «savent». Les psychanalystes, lorsque la théorie ne leur cache pas le patient, savent seulement qu’ils sont «un parmi d’autres» et qu’ils sont «supposés savoir», rien d’autre. Il existe de mauvais analystes qui «savent», que la théorie rend sourds aux patients et pour qui les fictions ne fonctionnent plus que pour produire des normes. Il existe aussi de bons gestionnaires qui connaissent les limites de leurs outils. L’inquiétant n’est pas le doute de l’analyste, sa résistance ou son contre-transfert, l’inquiétant ne peut provenir que de la mystification et de son utilisation comme outil de pouvoir.

«Dans les textes de Freud, souligne Maud Mannoni, on peut toujours marquer la présence d’un double discours: l’un ouvrant sur une fascination pour la science, l’autre laissant parler les mythes et nous rappelant que le savoir nous dupe»(17). Dans l'affaire du PMSI comme dans le cas d'Anna O., ce sont deux modes d'approche de la souffrance psychique qui sont proposées. Pour le PMSI, il s'agit d'un outil qui masque l'effroi provoqué par la folie et en permet le déni, ce qui est très exactement le rôle du fétiche. L'histoire d'Anna O., on pourrait dire les histoires, nous propose une fiction dynamique, où les versions multiples de l'hystérie peuvent se reconnaître et permettre à chacun d'accepter sa folie. C'est pourquoi il nous a plu de rapprocher Anna O. et le PMSI.

Élisabeth ZUCKER-ROUVILLOIS

© Pénombre 2001


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(1) Le PMSI en psychiatrie est le personnage central de l’intrigue, nous lui consacrerons une présentation détaillée le moment venu. Que les lecteurs de Pénombre déroutés par cette lente progression se rassurent. Ils sauront tout de Péhaimécy arrivés "au cœur du P.M.S.I." (page 29).
(2) Cf. le texte de René Padieu.
(3) Anna O. est une patiente de Breuer puis de Freud, c’est le troisième personnage de cette scène, que nous présenterons à son tour.
(4) Roman érotique de Pauline Réage, publié en 1954. Ce roman, attribué à Jean Paulhan et à Aragon, raconte l’histoire d’une femme présentée tantôt comme une prostituée se soumettant aux situations les plus dégradantes tantôt comme une amante sublime. Ce n’est qu’à la fin de sa vie que Dominique Aury, traductrice et critique littéraire, a reconnu en être l’auteur.
(5) Voir sur ce thème Jean-Pierre Le Goff, Les illusions du management, La Découverte, 2000.
(6) Philippe Mossé: Le lit de Procuste. L’hôpital: impératifs économiques et missions sociales, éd. Erès, 1997.
(7) Procuste était un brigand que la légende grecque décrit comme celui qui adaptait la taille du corps d’un grand nombre de voyageurs à celle des lits qu’il avait disposés sur leur chemin. Il étirait les membres des petits et raccourcissait ceux des grands, pour que tous soient conformes à ses modèles.
(8) Michel Naiditch et Gérard de Pouvourville: Le programme de médicalisation du système hospitalier: une expérimentation sociale limitée pour une innovation majeure du management hospitalier, Revue française des affaires sociales, n°1 janvier –mars 2000.
(9) Cf. son article dans ce numéro “Y’a pas de raison !”.
(10) La psychothérapie institutionnelle a été introduite par le catalan, François Tosquelles, à Saint Alban en 1940. Sa pratique sera poursuivie par Lucien Bonnafé à partir de 1942. Ce courant, qui refuse la doctrine figée des constitutions (pour laquelle une personne est dotée d’une constitution qui ne pourra évoluer: par exemple neurasthénique, hypocondriaque, maniaque) et ouvre une perspective dynamique dans le traitement des maladies mentales, participe au vaste mouvement d’hygiène mentale né de l’intégration pragmatique de la psychanalyse à la psychiatrie. La psychothérapie institutionnelle se situe à un carrefour d’idées contradictoires. D’un côté, elle conteste à travers Freud l’organisation asilaire fondée sur la doctrine des constitutions, et de l’autre, elle dote le pouvoir médical de moyens de surveillance qui n’ont pas toujours grand-chose de commun avec l’éthique de la psychanalyse lorsqu’ils conduisent à son évitement et ne sont pas considérés seulement comme des passages qui ouvrent à une thérapie de type analytique. L’insulinothérapie, l’électronarcose, puis, plus tard, les neuroleptiques, les tranquillisants et les antidépresseurs sont devenus le symbole d’une forme nouvelle d’appropriation du savoir psychiatrique (Cf. Elisabeth Roudinesco, Histoire de la psychanalyse en France. T. 2, Seuil, 1986).
(11) Le transfert condense le report sur l'analyste des mouvements de l'inconscient du patient. On appelle amour de transfert, l’amour inconscient porté à l’analyste pendant la cure, cet élan condense les autres désirs amoureux.
(12) Notamment ceux d’Henri Ellenberger, en1970, puis ceux d’Albrecht Hirschmüller, en 1978.
(13) Dictionnaire de la psychanalyse, Fayard, 1997.
(14) À propos du traitement de l’hystérie, les récits abondent. Un des plus saisissants est raconté par Stanislas Tomkievicz (L’adolescence volée, Calmann-Lévy, 1999). Dans l’ensemble, et jusqu’à une date récente, ces traitements étaient d’une extrême violence (le récit de Tomkievicz remonte aux années cinquante).
(15) In Baudoin Jurdant ed., Impostures scientifiques, les malentendus de l’affaire Sokal, La Découverte, 1998.
(16) Jean de Kervasdoué: Quel avenir pour la psychiatrie, Halopsy, Janssen-Silag, n°28, janvier 2000.
(17) Maud Mannoni, La théorie comme fiction, éd. du Seuil, 1979.


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