Débat - Démographie et catégories ethniques

Classements scientifiques et identités ethniques

Patrick Simon

"Ce qu'il y avait d'embêtant, c'est que Madame Rosa n'avait pas la sécurité sociale parce qu'elle était clandestine. Depuis la rafle par la police française quand elle était encore jeune et utile comme j'ai eu l'honneur, elle ne voulait figurer nulle part. Pourtant, je connais des tas de juifs à Belleville qui ont des cartes d'identité et de toutes sortes de papier qui les trahissent, mais Madame Rosa ne voulait pas courir le risque d'être couchée en bonne et due forme sur des papiers qui le prouvent, car dès qu'on sait qui vous êtes on est sûr de vous le reprocher. […] Madame Rosa ne figurait donc nulle part et avait des faux-papiers pour prouver qu'elle n'avait aucun rapport avec elle-même"

Il faut se méfier de l'identité "vécue", et d'une façon générale de toutes les références au "vécu" - comme on dit le "chantage au…" - qui semblent considérer qu'il y aurait une disposition "authentique" ou "naturelle" distincte des artefacts construits par les représentations de tous ordres: médiatiques, administratifs, scientifiques. La référence à l'identité tient souvent lieu de "pensée magique", introduisant l'irrationnel et l'affectif, et en dernière instance l'ineffable, comme explication des comportements et attitudes. Interpréter les relations sociales en terme d'identité revient le plus souvent à recouvrir les rapports sociaux du voile épais des déterminants psychologiques, en occultant la part proprement sociale, et nécessairement telle, qui organise les rapports - "interculturels" ou autres - dans lesquels se négocie et se met en scène l'identité.

La thématique identitaire rencontre depuis plusieurs années une vogue croissante, tout en suscitant le scepticisme chez de nombreux chercheurs en sciences sociales. La boîte noire qu'est l'identité résiste à toutes les tentatives de définition compréhensive et épuise les ressources scientifiques. Pour reprendre la fameuse conclusion de Claude Lévi-Strauss au séminaire consacré à l'exploration des multiples facettes de cette notion, l'identité est "une sorte de foyer virtuel auquel il nous est indispensable de nous référer pour expliquer un certain nombre de choses, mais sans qu'il ait jamais d'existence réelle" (Lévi-Strauss, 1977: 332). Ainsi en est-on réduit à ne jamais pouvoir objectiver l'identité et à n'en saisir que les traces laissées par son expression: les signes et symboles matériels ou spirituels destinés à l'incarner dans le jeu social. S'engageant sur cette autre piste, on peut également approcher l'identité en creux, en suivant les processus de formulation et de construction auxquels se livrent les acteurs sociaux. Cette perspective suppose d'abandonner toute prétention à énumérer les traits et contours de l'identité, conçue comme un précipité instable des innombrables combinaisons d'indicateurs qu'on peut sans doute inventorier, c'est à cette tâche que se sont consacrés des générations d'ethnologues particulièrement motivés, mais dont on ne parvient pas à maîtriser simultanément le contexte dans lequel se formule la production identitaire et la cristallisation particulière qui en résulte.

Parmi les nombreux "marqueurs" susceptibles d'exprimer "l'emblématique identitaire", les catégories de classement mobilisées par les acteurs sociaux pour se définir et appréhender les autres (blasonnement social et stéréotypes) forment un objet d'étude particulièrement signifiant. Mais là encore, le caractère contextuel de cette opération, son élaboration incessante au cours des interactions quotidiennes et ses transformations sous l'imposition des images collectives rendent délicates son étude. C'est lorsque ces identifications deviennent durcies dans les procédures d'enregistrement administratif ou scientifique, notamment dans la statistique, qu'elles se prêtent le mieux à leur déconstruction. C'est pourquoi nous voudrions nous intéresser ici, non pas à la façon dont les individus se définissent, mais à l'autre bout de chaîne: l'enregistrement et la codification des identités dans les classifications statistiques. Ce qu'Alain Desrosières (1993) qualifie d'encodage met en évidence des opérations de labelisation et de dénomination effectuées par l'institution statistique, opérations par lesquelles des "identités" de référence sont énoncées et finissent par influencer les propres identifications des acteurs sociaux. La réflexivité de la catégorisation, qu'elle soit pratiquée par l'administration, la science ou les médias est attestée de longue date, même si ses effets ont parfois été largement exagérés. Il n'en reste pas moins qu'en tant que mise en forme du monde social, la catégorisation statistique révèle les types de définition de soi légitimes du point de vue de l'Etat, et en retour, tend à formater les identités socialement acceptables. Ce rôle éminent de l'Etat et de ses institutions dans l'énonciation des identités publiques s'exprime tout particulièrement dans le cas des populations immigrées ou, phénomène relativement récent dans le contexte français, de leurs descendants.

En effet, si l'identité est une thématique à la mode, elle s'est attachée une déclinaison promise à un bel avenir: l'ethnicité. Constamment sollicitée dans les chroniques de l'actualité sociale, la référence aux "origines", réelles ou supposées, des individus vient remplacer, ou s'ajouter, aux anciens descripteurs en terme de classe sociale. L'étiquetage ethnique se généralise tout particulièrement à propos des "jeunes issus de l'immigration", autrement qualifiés de "seconde génération". La prolifération des labels ethniques se repère dans l'ensemble des milieux sociaux et amène de nombreux chercheurs à les incorporer dans leurs propres catégories d'analyse. Cependant, cette évolution se réalise en rupture de la tradition des sciences sociales françaises qui n'a que très peu construit l'objet ethnique et ne propose pas de cadre d'intelligibilité pour étudier les relations interethniques telles qu'elles sont représentées aujourd'hui (Streiff-Fenart, 1997).

Tributaires des représentations nationales du fait migratoire, ces catégories descriptives ont également contribué à diffuser et solidifier les modèles d'interprétation de l'altérité culturelle. Le contraste entre l'omniprésence des classifications raciales et ethniques aux Etats-Unis, Canada ou Grande-Bretagne, pour ne citer que ces pays, et leur quasi absence jusqu'à récemment en France témoigne de la profonde imbrication entre l'ordre du classement, celui de la construction des faits sociaux et les formulations nationales des identités. Les connexions entre la cristallisation des identités collectives dans le champ social et leur expression dans les classements statistiques seront illustrées par une brève incursion dans l'histoire des catégories utilisées pour décrire l'immigration dans les recensements français. Dans une seconde partie, nous traiterons des ambiguïtés liées à l'usage scientifique des catégories ethniques, notamment dans leur élaboration dans le champ de la statistique.

Immigration et codage

L'extrait de "La vie devant soi", d'Emile Ajar, ou Romain Gary, encore un problème d'identité, mis en exergue à ce texte rappelle le jeu social, parfois cruel, auquel nous nous livrons pour définir notre identité, pour nous et pour les autres. Le contexte dans lequel Madame Rosa a été amenée à avoir "des faux-papiers pour prouver qu'elle n'avait aucun rapport avec elle-même" est sans doute trop particulier et émotivement chargé pour servir de référence, mais cet exemple permet de retenir plusieurs éléments capitaux pour l'analyse des identités, et singulièrement de l'identité "ethnique", à savoir que:

  1. l'identité se construit dans le rapport à l'autre, au cours de relations qui se tiennent sur plusieurs niveaux: celui des rapports inter-individuels (les contacts sociaux), celui des représentations (confrontation des représentations collectives) et celui du rapport aux institutions de classement (administration et science);
  2. la production identitaire se situe dans des rapports d'inégalité, de domination et de subversion, de telle sorte que "l'identité vécue" est, en partie, le produit des formes de déterminations en oeuvre dans chaque société. Il faudrait alors approcher la question de l'identité à travers celle du bricolage en déclinant une série d'oppositions: l'identité imposée-identité revendiquée, reproduction-invention, stigmatisation-affirmation, occultation-reconnaissance.
  3. le processus suivi par la production identitaire est étroitement dépendant des contextes historiques, sociaux et politiques dans lesquels il s'inscrit. Ces contextes favorisent les choix et options, ou les imposent, parmi une grande pluralité d'identité à la disposition des individus. La tension entre les options et les contraintes ou assignations forme du reste l'une des objets d'analyse les plus féconds pour comprendre les mécanismes de la production identitaire.

L'opération de classification statistique met à jour les jeux et les représentations qui sont à l'oeuvre dans la formulation de l'identité, puisqu'en se fixant dans les nomenclatures, les catégories offrent des références commodes pour se penser et concevoir les autres. La classification est une activité de connaissance qui répond a des fins pratiques: elle construit le cadre de compréhension et d'interprétation de l'expérience sociale. Loin d'être naturel ou "inné", le classement est une disposition sociale qui mobilise de multiples compétences et dépend des systèmes sociaux dans lesquels sont situés les individus. La construction de catégorie passe par une réduction du réel qui conduit à accentuer les ressemblances et les différences, plaçant les sujets ou les objets dans des grilles hiérarchiques qui reproduisent le complexe de normes et valeurs en vigueur dans les systèmes sociaux.

La classification statistique présente également une normativité qui relève de deux registres contingents, souvent contradictoires: celui de la description et de la connaissance, qui relève de la science, et d'autre part, celui de la prescription et de l'action, qui revient au politique. Ces deux registres sont intimement liés dans le recensement, opération de collecte des informations alimentant la connaissance de base des caractéristiques de la population, des biens et des richesses (donc de la puissance) d'un pays. A la jonction du classement administratif et de la catégorisation scientifique, le recensement se présente comme l'une des opérations les plus abouties de mise en forme des identités. En produisant le découpage légitime du monde social, il fournit la grille de lecture à travers laquelle sont représentés et pensés les faits sociaux.

L'introduction dans le recensement d'une question relative à la nationalité des habitants remonte à 1851. Abandonnée en 1856, cette question figurera sans discontinuer par la suite. La formulation de la question ne varie pas de 1871 à 1946 et enregistre la nationalité en trois catégories: Français de naissance, Français par naturalisation (ou par assimilation comme le précise les publications du recensement) et étranger. Ce triptyque reprend pour partie les catégories juridiques codifiées par un droit de la nationalité qui s'est mis en place tout au long du XIXe siècle. Se formulant conjointement à l'avènement du "modèle national républicain", la législation de la nationalité s'est orientée vers un assouplissement des conditions de naturalisation et à une automaticité de l'acquisition pour les enfants nés en France. La loi du 7 février 1851 introduit ainsi le fameux article instituant l'attribution automatique de la nationalité française en vertu du double jus soli. Ce dernier stipule que tout enfant né sur le territoire français d'un père lui-même né sur le territoire français possède la nationalité française à la naissance (disposition étendue à la mère en 1893). L'avancée de 1851 n'est en fait que le prélude à la réforme de 1889, considérée comme "un moment fondateur qui fixe et rationalise le droit de la nationalité en France jusqu'à nos jours" (Noiriel, 1991: 88).

En étendant le jus soli, les législateurs ont, pour reprendre l'analyse de R.Brubaker (1993), consolidé leur "conception de la nation assimilationniste, étatique et profondément enracinée dans la géographie politique et culturelle", tout en assurant la congruence entre citoyenneté virtuelle (celle conférée par la naissance sur le territoire) et la citoyenneté effective (qui apporte les droits sociaux et politiques, mais aussi les devoirs). Ils ont parié sur la faible motivation des étrangers nés en France à répudier la nationalité française dont ils jouissent à leur majorité. Les calculs effectués par P.Depoid leur donnent raison: de 1889 à 1927, 18 000 enfants nés en France sur 260 000 réclament la nationalité de leurs parents, soit 7% du total (Depoid, 1942: tableau p.41). Par ce dispositif, la disparition de la population étrangère sur une génération était assurée. Après la grande réforme de 1889, les dispositions concernant la nationalité connaîtront des aménagements en 1893 et en 1927. Succédant à la période vichyste, le fameux code de la nationalité de 1945 qui fait référence depuis lors se contentera de rassembler les textes épars dans un seul corpus juridique. Cette stabilité des définitions des catégories juridiques explique que les catégories statistiques utilisées en France pour classer les "immigrés" ont formellement peu évolué au cours du siècle. De même le libellé de la question reste sensiblement identique jusqu'en 1990, hormis l'addition en 1962, d'une question sur la nationalité antérieure des Français par acquisition.

Ces grandes lignes appliquées de 1891 jusqu'à 1990 ont connu, malgré tout, des inflexions significatives. La première inflexion tient au type de traitement qui est fait des informations contenues dans le recensement. En effet, si les nomenclatures contribuent à définir le découpage acceptable du corps social, l'information retenue par l'institution et diffusée par l'intermédiaire des tableaux publiés va renforcer le processus de légitimation des catégories. La publication des tableaux sur les étrangers ou les "naturalisés" va connaÓtre des périodes très contrastées, o? alternent monographies détaillées et absence presque totale de données. Le volume et la nature des tableaux retenus traduisent, tout autant que les classements employés, les préoccupations des pouvoirs publics en maticre d'immigration. De 1926 r 1946, un volume entier comprenant plus de 350 pages de tableaux détaille les grandes caractéristiques des étrangers et naturalisés, pour la France entière et par département. On relève de larges développements sur l'activité professionnelle. Ce traitement spécifique des étrangers et naturalisés est abandonné entre 1954 et 1968, période au cours de laquelle apparaît transitoirement la catégorie des "Français musulmans". Le recensement de 1968 marque une nouvelle période dans l'utilisation de la variable "nationalité". Après la digestion des secousses liées à la décolonisation, on assiste à un regain d'intérêt pour les étrangers, dont les effectifs n'ont cessé de croître depuis le début des années 60. On retrouve les développements spécifiques sur les étrangers (4e partie), la population selon le lieu de naissance (5e partie) et les rapatriés d'Algérie (6e partie). Mais 1968 amorce une rupture plus marquante en introduisant la nationalité dans l'exploitation courante des tableaux sur les ménages et sur les logements. D'abord timide (8 tableaux en 1968), ce croisement va devenir constant en 1975. Dès lors, la nationalité va s'imposer parmi les grande variables de cadrage, telles que le sexe, l'‚ge ou la catégorie socio-professionnelle. La banalisation de l'utilisation de la nationalité, devenue l'un des descripteurs légitimes et signifiants de l'individu ou du ménage, annonce et accompagne les développements de la "question immigrée". Les recensements de 1982 et 1990 accorderont une place importante aux étrangers, puis aux Français par acquisition distribués selon leur nationalité antérieure et leur lieu de naissance.

La seconde inflexion concerne la construction des catégories mobilisées et leur relation aux statuts juridiques. En apparence, les découpages retenus par l'institution statistique pour décrire les populations immigrées se tiennent dans le cadre de la nationalité juridique. Pourtant, ils font apparaître, en creux, une lecture particulière de la citoyenneté. Celle-ci se manifeste avec évidence dans le maintien de la catégorie des "Français par acquisition", aux définitions juridique et conceptuelle relativement ambiguës. Alors que l'Etat ne reconnaÓt pas de différences entre citoyens français selon le mode d'acquisition de la nationalité, et qu'il n'existe pas d'effet prolongé de l'acquisition (excepté le "stage civique", de durée variable, qui suit la naturalisation jusqu'en 1973), la modalité est enregistrée dès 1851 et fait l'objet d'exploitations séparées et détaillées entre 1926 et 1946. Dans un soucis de connaissance et de suivi du processus de naturalisation, conçu comme la pierre de touche du modèle d'assimilation français, on va donc construire et imposer les "Français par acquistion" comme composante ordinaire de la population. L'essentiel ne réside pas dans l'écart accompli par rapport à une norme juridique que le recensement ne doit pas nécessairement respecter. L'intérêt porté aux "Français par acquisition" indique clairement que la statistique ne se soumet pas aveuglément aux catégories administratives mais qu'elle produit des classements en référence à des problématiques. L'exposé des motivations présidant à l'enregistrement des "Français par acquisition" rappelle ainsi qu'il s'agit "d'étudier l'assimilation des étrangers dans la population française" et "d'analyser et comparer les caractéristiques démographiques et sociales des différentes composantes de la population totale".

Un autre glissement s'est produit lorsqu'il a fallu classer les ressortissants de l'Union française, héritiers d'un système où nationalité et citoyenneté ne coïncidaient pas toujours. Depuis toujours, le cas des "indigènes" ressortissants de l'empire colonial français a posé des problèmes particuliers. La distinction coloniale entre "nationalité" et "citoyenneté" complique les catégories habituelles de la métropole. Une classification ad hoc est adoptée dans l'empire colonial, et notamment en Algérie où, malgré l'extension de la citoyenneté française à l'ensemble des habitants par la loi organique de 1947, la distinction par statut (civil ou personnel: art. 3) est maintenue. La catégorie des "Français musulmans" naît de la juxtaposition du critère de citoyenneté et du statut personnel musulman. Si le recensement appliqué en Algérie, département français, utilise une nomenclature faisant figurer les différents statuts, ce n'est bien évidemment pas le cas en métropole. Aucune mention dans le bulletin normalisé ne rappelle le statut personnel, ce qui va obliger les services du recensement à imaginer une règle de chiffrement originale et, à notre connaissance, sans équivalent depuis. Pour restaurer le clivage par statut personnel, on procède en classant en "musulmans originaires d'Algérie" les "personnes nées en Algérie ayant à la fois un nom et un prénom à consonance arabe ou berbère" et en "Français de naissance originaires d'Algérie" ceux qui ont "un prénom chrétien ou israélite". Le classement des noms s'effectue à partir d'une liste fournie par la Statistique d'Algérie.

Le même principe sera appliqué en 1962, alors que l'Algérie vient d'accéder à l'indépendance. Comment, en effet, restituer une division par nationalité qui n'existe pas dans les faits lors du remplissage du questionnaire ? Alors que la logique voudrait qu'on regroupe les originaires d'Algérie en référence à leur nationalité (Français ou Algérien), on va maintenir la distinction héritée du statut personnel. Celle-ci est approchée, une nouvelle fois, à partir du nom et du prénom. Les catégories décrivant les migrants d'Algérie se multiplient: rapatrié français de naissance, Français musulman ayant choisi de conserver la nationalité française, Français musulman devenu Algérien. Le recensement de 1968, soit 6 ans après l'indépendance de l'Algérie, s'appuie désormais sur une distinction par nationalité clarifiée. La présentation des tableaux du recensement de 1968 redistribue les originaires d'Algérie selon leur nationalité actuelle. Un tableau est malgré tout consacré aux originaires d'Algérie autre que les rapatriés (d'ascendance métropolitaine, selon la classification retenue), mélangeant les 85 520 "Français musulmans originaires d'Algérie" et les 471 020 Algériens. Enfin, le classement des "originaires d'Algérie" se complète avec la catégorie des "rapatriés d'Algérie" dont la définition s'opère par l'exclusion des nationaux algériens et des "Français musulmans".

Français par acquisition, Français musulmans: les catégories retenues dans les tabulations codifient la perception que l'institution entend délivrer de l'immigration en France. L'opération de mise en forme des résultats relaie le travail d'encodage pratiqué par la catégorisation. En définitive, aucun obstacle technique n'empêchait le statisticien de produire des tableaux fondés sur le lieu de naissance des immigrés. La question figure sans discontinuer depuis 1851. On lui a préféré une classification exclusive par nationalité qui révèle la stricte soumission de la nomenclature aux critères de l'assimilation à la française, fondée depuis les grandes réformes de la fin du XIXe siècle sur l'acquisition de la citoyenneté. La statistique publique a donc reproduit et entériné les catégories juridico-administratives reconnues par l'…tat sans explorer d'autres formulations, tout en les aménageant à certaines occasions pour coller au plus près de la définition de la citoyenneté. On ne saurait mieux mettre en évidence l'importance du tropisme juridico-national sur les modes de représentation des faits sociaux. A la fin du XIXe siècle, quand les services du Census aux Etats-Unis choisissaient de classer la population américaine selon le lieu de naissance, la statistique française suivait une voie radicalement différente pour répondre aux mêmes questions.

Entre étiquetage et reconnaissance, l'ambiguïté des catégories ethniques

En privilégiant les catégories juridiques pour décrire les populations en relation avec l'immigration, l'institution statistique donne l'apparence de respecter une définition objective des individus. Or celle-ci échoue dans son ambition d'objectivité sur un double plan. En premier lieu parce que les déclarations de nationalité sont soumises dans une certaine mesure aux interprétations des intéressés. La complexité du code de la nationalité, notamment dans les cas des anciens ressortissants de l'empire colonial et des enfants nés en France de parents étrangers, réduit significativement la fiabilité des enregistrements. Mais ce qui retire à la catégorie "étranger" toute objectivité tient à son utilisation courante dans une acception extensive distincte du stricte critère juridique. Dans la littérature des sciences humaines, mais plus encore dans les débats politiques et médiatiques, la notion "d'étranger" a le plus souvent désigné un archétype s'identifiant à "l'immigré", ou plutôt "l'allogène" dont les définitions fluctuent selon des contextes. L'imprécision qui s'attache aux usages du concept d'étranger dérive des habituelles indéterminations propres aux catégories reprises par le sens commun. Elle tire cependant un surcroît d'efficacité de la validation assurée par les classements juridiques. La confusion entre la catégorie juridique et le terme générique d'étranger explique en partie la conviction, erronée, que les scrutateurs de la société (sciences humaines, personnel politique, médias) et les statistiques désignaient bien les mêmes objets.

Les conditions d'acquisition de la nationalité française, variables selon le lieu de naissance des étrangers et de leurs parents, de leur filiation et des unions qu'ils ont contractées, contribuent à la constitution du groupe des "Français par acquisition" et, par soustraction, de celui des étrangers. Ces derniers forment en définitive une catégorie de population extrêmement hétérogène, modelée par les critères de sélection stipulés dans les procédures de naturalisation. En reprenant à leur compte cette catégorisation, les différents utilisateurs en sciences sociales sont donc tributaires d'une production normative. Lorsqu'ils interprètent l'évolution des caractéristiques socio-démographiques des étrangers en France, de nombreux chercheurs reproduisent, dans leurs propres analyses, le "biais administratif" dont ils devraient s'affranchir. Par ailleurs, les théories relatives à l'intégration des immigrés qui dominent actuellement le paysage scientifique accordent une place centrale à la notion de processus. Celle-ci renvoie à une historicité qui s'accommode mal d'un critère aussi labile et , parfois, transitoire que la nationalité. Se déroulant sur une vie, voire sur plusieurs si l'on retient les théories inter-générationnelles, l'intégration concerne des populations qui apparaissent à la suite d'une migration et qui vont par la suite entrer dans une relation dialectique avec les institutions et les membres de la société d'installation. Au coeur de ce processus complexe et multiforme, l'acquisition de la nationalité marque une étape sans doute déterminante, du point de vue du "modèle français d'intégration". Cependant, cette étape s'inscrit dans une trajectoire initiée bien avant l'arrivée en France, et qui se poursuit par la suite. Il importe donc, pour apprécier la place qu'occupe l'acquisition de la nationalité dans le processus, de disposer de l'ensemble de la trajectoire sans le pré-découpage opéré par le classement juridique. Pour restituer la cohérence des parcours en se plaçant du point de vue des populations concernées, sans plaquer une grille d'interprétation formée par l'application des catégories juridico-administratives, le recours à la catégorie "immigré" s'est progressivement imposé sous l'égide du Haut Conseil à l'intégration (HCI, 1991).

Proposé par Michèle Tribalat (1989), l'usage d'une catégorie "immigré" combinant le lieu et la nationalité de naissance entendait résoudre les lacunes et biais d'analyse liés au concept d'étranger. Ce parti-pris méthodologique a finalement été adopté par l'INSEE, sous une forme intermédiaire pour la publication des tableaux du recensement de 1990, et plus directement dans des travaux récents: publication d'une courte synthèse tirée des recensements (Daguet et Thave, 1996), puis d'un volume de synthèse consacré aux "immigrés en France" dans la collection "Contours et caractères" (INSEE, 1997). Mais le passage de la catégorie des étrangers à celle des immigrés ne répond que de manière imparfaite aux besoins suscités par les développements d'une ethnicisation spectaculaire des rapports sociaux. La circulation extensive de labels ethniques pour décrire les populations en prise avec l'actualité sociale constitue l'un des faits majeurs de ces dernières années et pose un problème délicat aux sciences sociales. Est-il possible de produire de nouvelles formes de classement qui, tout en s'émancipant des catégories du national, ne se soumettraient pas passivement à celles du sens commun ? Ou, pour replacer ce questionnement dans la thématique de l'identité, comment analyser les procès d'identification tout en élaborant des objets scientifiques autonomes et en maîtrisant, autant que possible, les effets de modelage du social qu'engendre la catégorisation pratiquée ?

En première analyse, deux méthodes distinctes permettent d'enregistrer des "identités ethniques" qui sont le plus souvent approchées en tant qu'expression des "origines". Cette notion d'origine est du reste complexe à préciser, comme on le verra par la suite. La première méthode utilise des éléments "objectifs" extraits de la biographie des individus, en inférant par là que cette description d'une "origine" correspond à une sorte "d'identité de référence". Le choix du lieu de naissance, caractéristique fixe tout au long de l'existence, s'ajuste bien à l'objet "immigration" qui se définit par le mouvement d'un pays à un autre. Le lieu de naissance des parents ajoute une indication supplémentaire distinguant les enfants des immigrés nés dans le pays d'installation. La restitution de la filiation, grâce au lieu de naissance des parents, permet de s'affranchir de la notion stricte " d'immigration " et ouvre l'analyse de la reproduction, non seulement démographique, mais aussi identitaire. Au-delà de la filiation directe, les brassages entre les populations interdisent d'utiliser une approche mécanique de l'ascendance. En effet, à chaque nouvelle génération, le stock d'ascendants augmente de manière géométrique, de telle sorte que la "3e génération" aura 8 "bisaïeuls" et la "4e génération" sera dotée de 16 "trisaïeuls". Sauf à supposer une étanchéité complète des différents groupes entre eux, les combinatoires deviennent rapidement trop complexes pour attribuer des origines uniques. Cette approche se montre cohérente avec son objet et permet d'englober toutes les populations participant aux relations interethniques. En revanche, elle perd toute efficacité lorsque l'arrivée des premières vagues migratoires remonte à plus de deux générations. Dans ce cas de figure, la filiation réelle des individus ne peut convenablement fournir d'indications sur leurs "origines". Il devient nécessaire de passer à une définition "active" de l'origine, c'est à dire de faire référence à une appartenance. C'est ce qui fonde la seconde méthode.

Plutôt que d'attribuer une origine en fonction d'un lieu de naissance, celle-ci accorde une priorité à l'auto-identification. Suivant une logique de choix plus ou moins rationnel, les individus doivent se classer dans des rubriques "ethniques" dont ils considèrent qu'elles indiquent leurs origines. Il ne s'agit donc plus de construire une catégorie à partir d'indications qu'on va interpréter, mais au contraire, de laisser libre cours à l'expression d'une identité. Le recours à cette méthode signifie qu'on assume le caractère fondamentalement subjectif des réponses. Toute une série de filtres s'interposent entre l'énoncé brut de la situation de l'individu et le classement qu'il va finalement choisir. La consistance de l'image publique de son origine, le degré de stigmatisation qu'elle subit, sa propre identification à celle-ci, l'intérêt qu'il porte à l'expression de cette identité sont autant de critères qui vont le pousser à déclarer ou ne pas déclarer son origine. Plus encore, pour tous ceux qui peuvent se revendiquer d'une multiplicité d'origines, le choix d'une ou deux d'entre elles fait intervenir une sorte de hiérarchisation où s'exprime une foule de déterminants, personnels ou sociaux. Le fait que ce soit l'individu qui se détermine ne laisse aucune possibilité d'intervenir sur le classement et laisse pendante la reconstitution des logiques présidant à son choix. Avec cette méthode, on ne saisit donc pas "l'origine" des individus, mais bien leurs "ethnic options", pour reprendre la formule de M.C.Waters (1990). Là encore, la méthode est cohérente avec la problématique des relations interethniques, puisque les effets de représentations, d'imposition et d'intériorisation de labels font partie intégrante des processus d'intégration. Plus encore, en promouvant une logique de choix, ce mode d'enregistrement favorise une théatralisation statistique, c'est à dire la projection dans les opérations de classification des conflits et rapports de concurrence caractérisant les relations interethniques.

Ainsi, le census aux Etats-Unis qui comporte des questions ouvertes sur "l'ascendance" (ancestry) peut-il être considéré comme un espace de confrontation, de négociation et de reconnaissance pour les identités collectives, alors que le recensement français reste excessivement étanche à toute intervention autre que celle des experts. En ce sens, le défaut de représentation des identités collectives en dissonance avec la norme nationale, constaté dans les médias ou la politique, trouve son prolongement logique dans l'espace statistique. La définition et les limites des catégories font l'objet de luttes plus ou moins ouvertes, d'autant plus âpres que la désignation des populations relève avant tout de rapports de domination: de l'Etat sur ses "citoyens", des groupes "légitimes" sur ceux dont on construit "l'illégitimité". Aussi, le travail "spontané" de la catégorisation s'apparente-t-il à une opération de marquage social où s'élaborent et se reproduisent des divisions fondées sur des différences ethnico-raciales. Pourtant, et c'est là tout le paradoxe de l'analyse des procédures de classement "ethnique", la racialisation des catégories ne procède pas seulement d'une imposition des dominants à l'encontre des populations "immigrées" (ou perçues comme telles), mais peut également être investie par les minoritaires eux-mêmes. Dans le contexte français, caractérisé par une forte prévention de l'Etat à utiliser des labels ethniques, l'euphémisation ou l'occultation de certaines désignations représentent l'une des formes de la domination. L'usage et l'abus par les "jeunes des banlieues" -encore une catégorie dont l'usage pratique ne repose que sur son absence de consistance- d'une terminologie ethnique ou raciale pour se nommer et nommer les autres, peut dès lors s'interpréter comme un acte de résistance à cette forme de violence symbolique, exercée par la "société d'intégration", que constitue la dénégation de l'altérité

La reconnaissance des identités ethniques par l'intermédiaire de la catégorisation scientifique laisse entier le risque de réification des groupes ethniques. Il ne peut être assumé que si l'on considère que l'émergence d'identités ethnicisées dans la société découle de conditions historiques que les sciences sociales doivent prendre en compte et éclairer. C'est parce qu'il existe un mouvement de fond dans la société qui débouche sur un durcissement des référents ethniques que leur reprise dans les analyses scientifiques devient nécessaire. Dans le contexte français, on assiste à une diffusion extrêmement rapide des classements ethniques dans l'espace public. Les stéréotypes et préjugés "racistes" et xénophobes se développent aussi bien dans la sphère politique qu'à tous les niveaux de la vie sociale. La discrimination ethnique s'étend aux marchés de l'emploi et du logement, dans l'éducation et les relations aux services, de telle sorte que les inégalités ne suivent plus seulement une logique sociale, mais s'appliquent à des sous-populations distinguées par leurs origines géographico-culturelles. La responsabilité sociale des chercheurs apparaît donc sérieusement engagée: est-il préférable de défendre une invisibilisation des différences ethniques dans l'appareil d'observation, au risque de laisser prospérer l'occultation des pratiques discriminatoires, ou bien de construire des catégories qui, par leur seule existence, peuvent éventuellement renforcer une désignation stigmatisante des populations ?

Le recours aux catégories "ethniques" peut alors se justifier par le rôle social d'une meilleure connaissance des relations entre les immigrés et la société d'installation. En décridibilisant les stéréotypes appliqués aux populations ethnicisées, la déconstruction des mécanismes d'étiquetage, qu'ils soient d'ordre institutionnel ou pratiqués lors des interactions sociales, est une entreprise préalable à toute tentative de résorption des discriminations en fonction de l'origine, réelle ou supposée, des individus. Le débat qui s'est longtemps tenu autour de la notion de "race" peut aisément se transposer dans ce nouveau cadre. S'il existe désormais un consensus dans le domaine scientifique pour abandonner toute conception "primordialiste" de la race, la plupart des chercheurs s'accordent à promouvoir une approche en terme de "relations raciales". L'objet d'analyse n'est donc plus la "race", mais "l'idée de race", pour reprendre la formule de Robert Miles (1984). On reconnaît conjointement l'inexistence de la "race" en tant caractéristique générique et la virulence d'un comportement raciste qui, dans son expression sociale, mobilise une stratification raciale de la population. C'est le racisme qui, en créant la race, impose aux sciences sociales la problématisation des "relations raciales" et, par conséquent, la construction d'une représentation sociale de la race. Le glissement d'un objet dont on pourrait énumérer les qualités à une analyse dynamique, nécessairement fluctuante, est ainsi relevé par Etienne Balibar: "De la théorie des races ou de la lutte des races dans l'histoire humaine, qu'elle soit fondée sur des bases biologiques ou psychologiques, on passe à une théorie des 'relations ethniques' (ou des race relations) dans la société qui naturalise non pas l'appartenance raciale mais le comportement raciste". (1988: 35).

La plupart des chercheurs utilisant ce type de catégorie pose un regard lucide sur leur nature et leurs limites. P.Poutignat et J.Streiff-Fenart effectuent dans leur ouvrage sur les Théories de l'ethnicité cette utile mise au point:

"la notion d'ethnicité […], consiste largement non pas à attester l'existence de groupes ethniques, mais à poser cette existence comme problématique, c'est à dire à poser comme problématique la consubstantialité d'une entité sociale et d'une culture par quoi on définit habituellement le groupe ethnique. Théoriser l'ethnicité, cela ne revient pas à fonder le pluralisme ethnique comme modèle d'organisation socio-politique, mais à examiner les modalités selon lesquelles une vision du monde 'ethnique' est rendue pertinente pour les acteurs". (1995: 17).

La question des modalités de l'objectivation de l'ethnicité reste entière. La catégorisation fige durablement la nébuleuse identitaire et introduit de l'inertie dans ce qui est de l'ordre du mouvement. Il importe de dépasser la tension entre la nécessité de fixer momentanément le mouvant pour élucider les faits sociaux, ce qui est, à mon sens, le propre de l'observation en sciences sociales, et le risque d'enfermement dans des catégories dévalorisantes, ou, tout du moins, d'assignation. Le problème devient plus aigu et délicat à négocier quand il concerne des catégories de type institutionnel, comme celles produites par l'administration ou figurant dans le recensement, dont la visée n'est pas seulement de connaissance, mais essentiellement de prescription et d'action. C'est précisément parce qu'il n'y a pas, pour la statistique, de distinction évidente de ces deux registres que la manipulation de catégories renvoyant aux "origines ethniques" devient extrêmement sensible et fait l'objet de débats souvent passionnés à l'intérieur des sciences sociales.

Patrick Simon (INED), Août 1998


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