Fait les 21 et 22 mai 2005, revu le 26 mai 2005
D e temps à autres je reçois des courriers que
je n'arrive à relier à rien, comme celui-ci:
Du fait, j'envoyai cette réponse:
De: Olivier Hammam
À: jean-michel dumay
Objet: Re: Rumeurs et cie
Bonjour,
J'apprécie toujours de recevoir du
courrier, mais parfois il m'arrive de m'interroger sur les raisons qui poussent tels de
mes correspondants de m'envoyer un e-mail. Ici, c'est le cas: qu'est-ce qui a pu vous
donner l'idée qu'une émission de France Culture sur les rumeurs pouvait m'intéresser ?
Remarquez bien que ce n'est pas faux:
presque toutes les émissions de France Culture éveillent mon intérêt (en fait, j'écoute
rarement d'autres radios, et j'écoute beaucoup celle-ci). Par contre, je ne suis pas
particulièrement passionné par les rumeurs. Non que ça ne m'intéresse, mais pas plus que
d'autres sujets, et bien moins que certains.
En toute amitié.
Olivier Hammam.
----- Original Message -----
[Suivait le message]
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Là-dessus, je reçus ceci:
De: jean-michel dumay
À: Olivier Hammam
Objet: Re: Re: Rumeurs et cie
Bonjour,
Ma démarche était reliée à la lettre précédente, et à la vie des informations circulant
sur internet, à laquelle nous sommes de plus en plus exposés, alors la question de
l'objectivité de ces publications, blogs et forums de discussions si nombreux me semble
pour le moins basique.
Voir le site hoaxbuster.com pour de nombreux exemples.
Si le sujet est abscons, excusez-moi d'avoir joué les intrus.
Amicalement.
Jean-Michel
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Ça commençait à s'éclairer. Je fis donc cette réponse:
De: Olivier Hammam
À: jean-michel dumay
Objet: Re: Re: Rumeurs et cie
Bonjour,
Désolé de le dire, mais je crains bien
d'avoir égaré votre précédent courrier; il y a peu, ma machine a sévérement planté
(problème de virus), et ça provoqua la perte de plusieurs messages dont probablement le
votre. Si vous l'avez en réserve, auriez-vous l'amabilité de me l'envoyer de
nouveau ? Ça me permettra de faire le lien.
Merci d'avance. Olivier Hammam. | |
Il y a une petite inexactitude, le problème à l'origine du plantage n'était pas un
virus, mais une panne de courant. Quoi qu'il en soit, mon correspondant me réexpédia le
message en question.
De: jean-michel dumay
À: Olivier Hammam
Objet: Re: Re: Rumeurs et cie
Bonjour,
Voilà le texte égaré, en espérant qu'il ne va pas vous ennuyer !
Être insatisfait, ne pas oublier qui on est, avec un brin d'humour, c'est vrai,
avec un côté "anar" (Façon Rabelais, tiens!)
et vouloir penser plus juste…Pas mal comme attitude.
Mais votre expérience avec acrimed me paraît plus porteuse d'enseignements
maintenant, et cette vision d'une manipulation de l'information me paraît exiger
un boulot d'investigation, vu la complexité du terrain…
Un terrain à critiquer certes mais sincérement, sans faire de "cartons" avec l'esprit
malveillant, sinon il ne reste plus personne debout, et qui lire aprés ? On se
retrouve sans dialogue possible.
Je pense que certains partisans du oui ont pu être de bonne foi, c'est la
question de l'objectivité quand on lit un texte de cette nature, lecture du français,
science exacte ?
Je me répète qu'il faut penser à tous les cas de figure quand je regarde les autres,
ceux qui ne pensent pas comme moi !
Ce qui s'y passe, dans ces têtes, (ma tête ?) : vaste programme aussi !
N'avez-vous pas été frappé par les réactions autour d'un certain plan "B" ?
Lancé à son regret (ça se complique déjà) par un grand penseur (du passé récent) de
l'Europe Jacques Delors pour ne pas le nommer.
Combien se sont rués dessus et qui ne l'écoutaient pas auparavant, et pour le coup
l'ont cru sans vérifier !
C'est vrai que comme ancien enfant gâté, j'aurais voulu des variantes autour d'un
corps central soumises au vote, mais un tel boulot aurait-il été possible ?
Un traité constitunionnel à la carte ! Je délire !
Comment cette usine à gaz s'est-elle construite ?
Que s'est-il passé pendant son mandat, sortir un texte lourd où l'accord de tous
semble avoir été une gageure !
Et quelle marge de manœuvre reste-t-il après pareille épreuve collective ?
Et les peuples rêvaient-ils ou non, qui était prêt à intervenir au milieu de cette
Convention ?
Que de questions essentielles avant de dire que l'on sait !
Et l'irrationnel a sa part dans cette histoire.
Certaines influences semble se répandre comme un gaz (c'est dans l'air) et semble
accréditer l'inconscient collectif de Carl Gustav Jung, et nous échappent,
insaisissables, impalpables.
Alors cette unanimité du oui dans les médias, je n'ai pas la prétention d'être sûr
d'avoir la meilleure explication…
Je vais relire la vôtre, en me gardant de tout préjugé.
L'étude des rumeurs aussi, et la facilité de tant d'individus à saisir des
fadaises confond le lecteur attaché à la saine raison !
La manière dont les États-Unis ont traité les témoignages sur les ovnis dans
les années 50, est riche d'enseignements sur la soumission de la presse
d'alors et des savants envers l'armée de l'air (la peur du ridicule aidant).
Vaste programme.
Amicalement.
Jean-Michel
| |
Voilà qui cadrait mieux le propos. Je fis une très longue réponse.
De: Olivier Hammam
À: jean-michel dumay
Objet: Sans acrimonie…
Bonjour,
C'est ça même: ma machine avait planté
peu après réception de votre message. C'était le bête truc de la panne de courant, mais
le résultat fut assez sévère pour que je doive tout réinstaller. Pas si grave, je ne
perdis que les trois ou quatre derniers messages reçus et envoyés, mais surtout je perdis
pas mal de temps à reconfigurer mon système. Il me semble bien avoir reçu une réponse à
ma réponse, donc j'ai du en envoyer une.
Un conseil: ne préjugez pas négativement
de la réception de vos courriers, pour moi, je considère a priori que mes messages sont
intéressants, ainsi que ceux qu'on m'envoie; et pour ceux-là, si je m'ennuie à leur
lecture, je ne manque pas de le faire savoir…
****************
Relisant plus précisément le message que
vous m'avez réexpédié, il me semble bien que c'est justement la réponse à ma réponse: si
je me souviens bien, le premier message était plus axé sur ma «critique acrimonieuse» et
mes démêlés avec Henri Maler d'ACRIMED. D'ailleurs, ce message-ci, je ne me souviens que
vaguement l'avoir lu, sauf le tout début.
Votre discussion sur le projet de
Constitution européenne me plaît assez: oui, j'ai été frappé de ce que les «partisans du
“non”», qui refusaient tout des «partisans du “oui”», acceptèrent facilement cette idée
de “plan B” venant d'un défenseur avéré du oui. Frappé notamment qu'à partir d'une
déclaration très générale et de l'ordre de l'évidence ordinaire ("Le devoir de vérité
impose de dire qu’il peut y avoir un plan B. Mais une solution rapide est
impossible" - souligné par moi), certains «partisans du “non”» tirèrent un délire
assez paranoïaque sur le thème «“ils” nous mentent, “ils” ont un “plan B”».
Pour moi, j'avais, et j'ai toujours,
autant d'incertitudes sur ce texte: lisant mon texte là-dessus, vous aurez constaté que,
dans le fond, ce traité ne me disconvenait pas vraiment; j'ai voté “non”, mais n'étais
pas un «partisan du “non”», et le discours de ces quelques groupes qui se faisaient les
hérauts du vote “non” et se préparaient donc, s'il était majoritaire, à nous expliquer
que c'était leur “non” à eux, me semblait aussi douteux que la propagande massive
en faveur du “oui”.
Vous aurez constaté comme moi qu'après le
vote comme avant les médias restent toujours aussi oui-ouistes. Je trouve notamment très
amusant le fait que l'argument le plus courant, sur ma radio préférée (France Culture) ou
dans la presse, se base sur le fait que les évaluations du CSA et, pour la presse, les
études faites depuis, “prouvent” que le sentiment du public est injustifié, et que le
rapport entre les intervenants pour et contre le traité fut assez équilibré; comme
d'habitude, les médiateurs font l'impasse sur le point qui posait problème: eux. Si par
exemple on considère l'émission de Christine Ockrent France Europe Express,
indéniablement elle invita à-peu-près autant de oui-ouistes que de nonistes, avec ce
léger problème qu'elle et ses petites camarades interviouveurs laissaient les tenants du
“oui” développer tranquillement leur discours, en l'émaillant ici et là de petits bruits
ou de commentaires approbateurs, alors qu'ils interrompaient assez systématiquement les
tenants du “non” en tentant de disqualifier leurs arguments. Je me souviens aussi d'une
émission de Marc Voinchet sur France Culture, peu de temps avant le référendum sur le
traité. En introduction, il expliqua qu'il y invitait des «partisans du “non”» (ce que
n'étaient pas ses hôtes) non par choix mais par obligation, ses responsables lui ayant
signifié qu'après une précédente émission avec des «partisans du “oui”» (ce qu'étaient
ses hôtes ce jour-là), le cahier des charges de l'antenne l'obligeait à faire celle-ci;
ça donnait le ton. Mais surtout, tous les interviouveurs étaient partisans du “oui”,
ce qui donna une émission curieuse: de temps à autres, les invités s'exprimaient;
avant qu'ils aient pu exposer un minimum leur position, l'un ou l'autre des questionneurs
(dont, notablement, Françoise Benhamou, la «minuteuse de l'économie culturelle») les
interrompait grossièrement et développait un long discours propagandistement oui-ouiste
dont le lien avec l'intervention de ces invités était peu discernable… À mon jugé,
environ les deux tiers de l'émission furent monopolisés par ces interviouveurs
oui-ouistes, ce qui donnait une assez curieuse impression.
En fait, c'est globalement ce que
j'avais constaté: quand une personne intervenait en faveur du oui, le médiateur qui
l'interrogeait tendait le plus souvent à la laisser développer son discours sans trop
sonder la validité de ses déclarations; dans l'autre cas, nos braves médiateurs ne
manquaient pas de demander à la réputée personne noniste de légitimer son propos, de
l'étayer, ne manquait bien sûr pas de la contester, et surtout, ne manquait pas, chose
rarement faite dans l'autre sens, de confronter ses arguments avec ceux développés par
les oui-ouistes. Passe le référendum, avec le résultat qu'on sait. Dans un texte récent,
j'y reviens, en écrivant notamment ceci:
«Nos politiques oui-ouistes et, dans leur foulée, nos commentateurs et
éditorialistes médiatiques partent d'un principe non démontré: le ‘non’ est
“anti-européen” et le ‘oui’ “pro-européen”. Or, la fibre européenne d'un Chirac, d'un
Sarkozy, d'un Hollande, restent à prouver. Pourquoi décerner un brevet d'européanité
aux tenants du ‘oui’, qui n'ont pourtant cessé, dans cette campagne, de proclamer que
grâce à la Constitution “la France sera plus forte” ? Curieux argument de la part de
pro-européens, ou supposés tels… Autre curiosité, au lendemain du vote un tenant du ‘oui’
se désolait à la fois du supposé “repli nationaliste” (repli sur l'État-nation) de ceux
qui votèrent ‘non’ et de ce qu'ils aspiraient à une “nation européenne”: il faut
savoir ! Mais de toute manière, les mêmes nous expliquent que le “modèle de
l'État-nation” est dépassé…».
Au fond, que révèle ce référendum ?
Que dans l'esprit de beaucoup de médiateurs joue le réflexe de classe: pour la majeure
partie d'entre eux (précisément, pour ceux des médiateurs à qui on laisse l'opportunité
d'exprimer leurs opinions), ils se situent dans la frange de la population qui tire
profit de la tendance libérale à l'œuvre dans l'Union européenne, du fait que leur revenu
se maintient, ce qui fait que leur pouvoir d'achat tend à augmenter; ils sortent des
écoles qui formatent les esprits à considérer que cette tendance est «naturelle et
inéluctable», ont des affinités avec les groupes politiques qui ont inventé dans le
demi-siècle passé cette division ternaire du monde: qui n'est pas “libéral” est
“fasciste” ou “communiste”, et comme fascisme et communisme ne sont pas souhaitables, il
n'y a qu'un choix possible: «social-libéral» ou «conservateur-libéral» ou
«chrétien-libéral» mais du moins, libéral…
D'un sens, les médiateurs sont le plus
souvent honnêtes, je crois, simplement ils ne tiennent pas compte de deux choses: d'une
part, l'on décide d'entrer dans tel ou tel médium, parce qu'on a au départ des affinités
avec ce médium, donc l'on partage l'idéoloie implicite qu'il diffuse; de l'autre, dans
tout groupe social il y a une tendance normale à «se plier à la loi du groupe». Lors de
la campagne pour le référendum, j'ai assisté à plusieurs réunions en faveur du “oui”
organisées par les socialistes; lors des discussions informelles avec les organisateurs
ou les intervenants invités, le discours général était, en gros, «ce traité n'est pas le
meilleur imaginable ni même il ne me convient»; d'où je demandais, «Alors pourquoi
appelles-tu à voter pour lui ?»; «C'est “pour faire avancer l'Europe”»; demande
secondaire, «Donc tu trouves que c'est une avancée ?»; cette fois, la réponse était
mitigée: en un premier temps, on me parlait des parties I et II, censées justement être
ces avancées promises; ayant bien lu le texte, je pointais tous les articles ou paragraphes
qui, tant au plan du droit européen actuel que de celui du droit national français, étaient
des régressions; alors, on passait de la lettre du texte à «l'esprit» de ces deux premières
parties; bien sûr, je ne manquais pas de faire remarquer que ce pourquoi on allait voter
n'était pas «l'esprit», mais la lettre du texte; immanquablement ça se terminait par la
même suspicion, «Tu es donc contre l'Europe ?». Quand on en passait aux parties III
sqq., la discussion devenait plutôt étrange: mes interlocuteurs commençaient
immanquablement par me dire qu'«il y a des avancées»; je leurs demandais lesquelles; on
me citait tel article, et à chaque fois, soit je relevais que dans tel autre traité ou
dans telle directive cette supposée avancée faisait déjà partie du droit européen ou
n'allait pas tarder à en faire partie, soit j'allais plus loin dans l'article pour
relever les paragraphes qui, au mieux annulaient cette “avancée”, parfois allaient contre
elle. Cette partie de la discussion se terminait presque toujours de la même manière: de
toute manière ces parties ne font que reprendre les traités antérieurs en les simplifiant.
D'où je demandais: si c'est la même chose, pourquoi l'intégrer dans un texte nouveau à
portée constitutionnelle ? Et là, pas de réponse…
La majeure partie des médiateurs
m'apparaît comme mes socialistes oui-ouistes: au mieux, ils adhèrent aveuglément à cette
fiction d'ordre propagandiste selon laquelle «il faut faire avancer l'Europe», alors que
les commentateurs les plus lucides (quel que soit leur bord), y compris Jacques Delors,
Jean-Claude Juncker et Louis Michel, ces parangons d'européanité, considèrent qu'il
serait temps de faire une pause pour remettre à plat l'arsenal réglementaire,
institutionnel, juridique et législatif existant; au pire (et je crains que le pire soit
souvent de rigueur), ils font jouer le réflexe de groupe sans même être convaincus de la
validité de ce qu'ils défendent. J'entendais hier, toujours sur France Culture (la seule
radio que j'écoute…), dans l'émission La Vie comme elle va, le sociologue
Christian Morel qui discutait de la prise de décision absurde, à laquelle il a consacré
un livre; entre autres, il parlait de ce cas assez intéressant:
«Prenons [cet] exemple. Une famille, à savoir le père, la mère, le fils et
son épouse, sont dans un ranch au Texas. Il fait très chaud. Ils discutent, tranquillement
assis sur la terrasse. Ils décident de faire une promenade dans une ville située à 150
kilomètre de là. Ils prennent leur voiture, qui n'est pas climatisée, et traversent une
partie du désert. Ils déjeunent dans un fast food mauvais. En rentrant chez eux, ils se
rendent compte qu'ils n'avaient aucune envie de faire cette promenade. Et pourtant, la
décision avait été prise collectivement. En effet, chacun a imaginé que les autres en
avaient envie et personne n'a osé briser la bonne harmonie du groupe».
La tendance massive des médiateurs à se
poser comme favorables au traité constitutionnel me semble ressortir de ce cas: pour avoir
discuté avec plusieurs “oui-ouistes”, j'ai constaté que chacun était tendanciellement peu
favoravle au texte; en revanche, discutant avec d'autres “oui-ouistes” ou du moins
supposés tels, et partant du principe que leurs interlocuteurs étaient favorables au
traité, ils mettaient leurs doutes de côté et, «pour ne pas briser l'harmonie du groupe»,
se renforçaient l'un l'autre dans leur fausse conviction d'être «pour». Cela dit, il en
était de même pour les “nonistes” militants: les rares fois où je discutai avec certains
d'entre eux, ils filtraient le texte avec la grille de leur idéologie pour ne retenir
que les articles ou paragraphes qui confirmaient leurs préjugés, et tenter de mener une
discussion raisonnable se révélait tout aussi impossible qu'avec un “oui-ouiste” patenté.
Par exemple, impossible de discuter du contenu véritable de la directive sur les
services, abusivement dénommée, en France, “directive Bolkestein”…
****************
Je m'excuse pour ce long discours; pour
ce qui en est d'une de vos remarques, «Comment cette usine à gaz s'est-elle
construite ?», il y a une réponse: au départ, le mandat de notre Convention
était tout autre, il portait sur ce qui est devenu les parties III et suivantes (sauf les
protocoles directement liés au deux premières parties), c'est-à-dire élaborer un traité
qui reprendrait l'ensemble des traités antérieurs, exception faite de celui de 1957 et de
la partie de celui de 1992 instituant l'UE, pour les simplifier et les harmoniser. En
cours de route, principalement sous l'impulsion des représentants de la France et celle
du “présidium”, elle s'autoproclama «assemblée constituante» et changea de son proche
chef son mandat pour l'orienter vers l'élaboration d'une supposée Constitution
européenne; ce qui explique l'aspect «usine à gaz» du texte, qui dut rassembler des
visées - et des volontés - contradictoires. Et qui n'y parvint qu'imparfaitement, pour
dire le moins…
****************
Difficile de déterminer si cette
campagne référendaire s'appuyait sur des argumentaires de type «rumeur», ou alors, on le
vit autant du côté des nonistes militants que de celui des oui-ouistes: tel que je l'ai
compris sur le moment, il y avait de part et d'autres des personnes qui argumentaient sur
le texte même, serait-ce d'une manière approximative ou inexacte, puis toute cette
cohorte de personnes qui ne peuvent «valider» leur position d'autre manière que par la
disqualification ad hominem de leurs supposés adversaires. Dans le texte où je
discutais du référendum à venir, j'écrivais ceci:
«Enfin il y a le lendemain du vote: le ‘oui’ ou le ‘non’ l'emportent.
Quel que soit le cas il faut que tous ceux qui ont voté agissent, non les uns contre les
autres mais dans le même sens car, au-delà de leur “intime conviction”, ils doivent
considérer les conséquences d'un vote très partagé. […] Je sais que nos dirigeants
actuels ont l'habitude de dire “nous avons gagné” quand, même avec 50,43% des voix
exprimées, un vote va dans le sens qu'ils ont choisi. En un premier temps disons “non”
et ensuite, négocions».
Or, les politiciens comme les
commentateurs médiatiques se sont placés sur le plan de «le “non” a gagné» ou «le “oui” a
perdu». De la démocratie considérée comme un match de boxe… La chose hélas prévisible
mais qui me désole tout même est la suivante: suite au vote massif en faveur du “non”
(dire: «la victoire du “non”»), les partisans du “oui”, qui sont en même temps les
partis de gouvernement, ont affiché leur mépris de la décision populaire en disant
tous, «Bon, les partisans du “non” ont gagné, et puis ? Qu'est-ce qu'ils vont faire
de leur victoire ?» C'est le problème: il ne s'agit pas de gagner ou de perdre, il
s'agit de tenir compte, en démocratie, de la décision du démos, de la volonté
populaire; si les partisans du “oui” considèrent ne pas pouvoir réorienter leurs options
politiques pour tenir compte de ce vote ils se doivent de remettre leur mandat: le
peuple les a élus, le peuple leur signifie qu'ils mènent une politique contraire à sa
volonté, qui a raison ? Le peuple ou l'élu ? C'est selon moi le principal
problème de la V° République: elle suppose une haute valeur morale de ses élus, ce qui
depuis le référendum gaullien de 1969 est chaque année plus douteux. C'est ainsi.
En toute amitié. Olivier Hammam.
****************
PS: M'autorisez-vous à utiliser votre message pour l'insérer dans une des pages de mon
site, avec ou sans spécification de votre adresse e-mail, à votre choix. Quoi qu'il en
soit, j'utiliserai cette réponse, mais j'aime bien faire profiter mes lecteurs du message
qui a motivé ma réponse.
Meci d'avance. O.M.H. | |
J'eus cette réaction, assez longue elle aussi (1.125 mots, contre 2.500 pour mon e-mail).
De: jean-michel dumay
À: Olivier Hammam
Objet: D'accord avec "sans" ! (acrimonie)
Bonjour,
Enfin je laisse mon PC tranquille, après un crise de maniaquerie sur mon nouveau
modem-routeur wifi, muni d'un nouveau pare-feu sorte de filtre protecteur
contre les pirates, qui se "chamaillait" avec mon antivirus de courrier :
moralité, plus d'accès à ma boîte, tant que je ne désactivais pas l'antivirus !
Changement d'antivirus, et me revoilà, ouf ! Mais j'ai dû me débrouiller tout
seul… La hot-line dont je tairai le nom est… basique.
Donc je suis en retard pour vous répondre, veuillez m'en excuser.
J'écoute en ce moment l'"Atelier de création radiophonique" (France-Culture)… ce
nom sonne vieillot, mais ça me rassure !
**********************************************************
Votre analyse mérite de s'y pencher attentivement, et j'apprécie sa bonne tenue, où
chacun des protagonistes pourra se reconnaître sans se sentir agressé, mais invité à se
regarder lui-même comme dans un histoire étrange, et découvrir en lui un décalage avec la
réalité, dont il n'est pas coutumier !
Voilà ce que je cherchais à travers Internet, un esprit critique impartial et tourné vers
la cohérence, sans préjugés, mais qui veut bien juger, avec ou sans l'aide d'un
chêne !
D'abord vos constatations sont justes sur les médiateurs, un accord tacite et "flottant
dans l'air", des réactions qui semblent témoigner de l'absence d'un processus que
j'avais découvert avec bonheur au lycée : Faire d'abord une thèse, ensuite son
antithèse, pour ensuite aboutir à une véritable synthèse.
Souvenez-vous d'une des meilleures questions que posaient certains (bons)
interviewers :
"Quel est selon vous le meilleur argument de ceux d'en face ?"
Malheureusement, la plupart des personnes questionnées choisissaient l'évitement,
l'incompréhension, qu'elles soient oui-ouistes ou nonistes…Mieux valait affaiblir
jusqu'au bout l'argumentaire de l'autre en face..Fatale erreur à mes oreilles !
Un petit effort à ce moment aurait relevé le débat, et la démocratie ressemble alors
à un auberge espagnole, on est prié d'amener tout ce que l'on vaut sur place !
Il est vrai que la mentalité française valorise plutôt la résistance, la négation,
l'esprit frondeur, mais sans se rendre compte que cela ne dédouane pas d'être original,
atypique, si l'on prétend vouloir être soi-même, cela demande beaucoup d'efforts
d'analyse distanciée de son groupe, vous avez constaté qu'il existe un
conformisme du non, qui dément sa prétention à être plus libre que celui du oui.
J'ai quand même pu trouver des contradicteurs de la Constitution de haut niveau,
comme Jean-Paul Fitoussi, et j'en oublie, qui savent argumenter avec précision
et… poliment ! Ca marque d'autant plus, par contraste avec la bouillie
d'effets de mauvais esprit et d'insultes typiquement françaises….
Je l'avoue, j'ai voté "oui, en pensant mais", souvenez-vous que Giscard
d'Estaing avait rendu célèbre cette expression, en contestant que ce traité soit
"vraiment" européen ! Nuance !
J'ai perçu "l'effet de dilution" que le nombre de pays actuels - 25 - a pu
provoquer dans l'élaboration de ce texte. Alors l'Européen, il est comme une substance
homéopathique, supportant des dilutions incroyables, jusqu'à "la mémoire de l'eau"
si contestée par des scientifiques sourcilleux ! Dois-je froncer les
sourcils moi aussi ?
Un oui d'encouragement, mais pas à faire n'importe quoi, comment dire oui tout en
demandant une évolution plus humaine ?
Les régressions constatées, la détestable et inévitable dualité entre l'esprit et la
lettre (Surtout pour mon ordinateur : la petite erreur de virgule sur un ligne de
programme peut le mettre au tapis !) sans oublier la qualité humaine de ceux
qui devront l'appliquer dans la réalité, tout cela me fait penser à un effet "papillon"
possible de certains détails apparemment insignifiants du texte pourront avoir des
conséquences, peut-être imprévisibles.
Ce n'est pas une succession de lignes de programme informatique, l'engrènement des mots
dans l'esprit humain n'a pas la même précision que dans nos PC Intel ou Amd.
L'embarras que vous avez constaté en posant des questions sur la construction du texte
vient de la difficulté même de faire sans fédération, donc un traité, mais
"comme" une fédération pour avoir une Constitution, plus
contraignante, plus forte devant la diversité difficile de tous ces pays.
Et vous m'avez expliqué simplement que c'est lié à l'apparition de cette inattendue
"Assemblée constituante", où certains représentants français ont joué leur
rôles. De fieffés Jacobins ?
A cause d'eux cette évolution n'a plus été un long fleuve tranquille !
Le nombre des membres a fait aboutir à des compromis boiteux, qui montrent bien que le
salut ne viendra qu'en s'élevant pour chacun, le maillon faible pourra tout
compromettre.
C'est une situation ambiguë, d'où cette appellation : Traité constitutionnel.
Et on aura quand même tendance à recompiler ce qui a pu passer de justesse, de peur de
remettre en question ce qui tient debout, faire du neuf avec du vieux, pour ne pas se
créer plus de tracas encore ! Cette idée de Constitution a dû faire peur à
certains !
Sans faire de philosophie, ce texte est comme le témoignage de l'état de tous ces hommes,
regroupés avec leurs aspects grands et misérables, une "photo de groupe" où tout le monde
a voulu être au premier rang, mais le dernier mot appartenait au photographe.
C'est un défi de jouer loyalement le jeu de la démocratie, en France plus difficilement
qu'ailleurs : 55%, c'est fort, mais pas assez pour nullifier 45% !
Et comme vous le dites si bien, il s'agit d'aller dans le même sens, et mettre nos
intelligences du même côté de la balance. C'est vrai que l'on demande plus d'efforts sur
soi aux partisans du oui dans ce cas, mais les partisans du non doivent le prendre en
compte, et surtout améliorer leur analyse pour la rendre plus acceptable aux autres. Je
n'aime pas les gens qui décident en un clin d'œil jusqu'à l'absurde, inébranlables :
ça passe ou ça casse ! Comme à la guerre.
Mais là l'effet de groupe est toujours là, et comment s'en abstraire pour faire
avancer le navire ?
Je préfère cette explication à l'effet de rumeur, qui concerne plutôt la vie privée, les
fantasmes et les obsessions secrètes qui jouent comme des relais inconscients.
Il me revient des expressions comme les "variables d'ajustement" ou le
"temps disponible de cerveaux humains" : Quels effets inconscients
finissent-elles par avoir dans une société ?
Le Luxembourg n'a pas suivi l'effet du non, et confirme la difficulté d'une unité de
vision entre les pays, a l'évidence le même raisonnement s'applique à leur vote : à
respecter, puisque c'est la règle du jeu, où l'on apprend à respecter le oui comme le
non !
A bientôt.
Ah j'oubliais un site assez curieux, trop illustré, trop grandiloquant, mais tellement
vaste que l'on peut s'y perdre à rêver…
J'aimais bien au début, mais je m'en suis détaché.
La théorie du complot y abonde, mauvais signe… A vous de voir, et votre avis
m'intéresse
http://perso.wanadoo.fr/metasystems/News.html
Jean-Michel Dumay
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Message complété de ce bref appendice:
De: jean-michel dumay
À: Olivier Hammam
Objet: petit oubli
C'est encore moi,
Juste pour vous dire d'accord de faire figurer ma lettre !
Jean-Michel Dumay
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Je fis cette première, rapide et partielle réponse, dont on excusera, j'espère, la
grossière faute de syntaxe que comporte son titre:
De: Olivier Hammam
À: jean-michel dumay
Objet: Encore une fois, les "petits" montre l'exemple…
Bonjour,
Je n'ai pas encore lu votre dernier
message avec attention, et celui-ci rebondit seulement sur son dernier paragraphe
concernant le Luxembourg: en France malheureusement, la majorité des tenants du oui ont
démontré, au lendemain du référendum du 29 mai, et s'il en était besoin, qu'ils étaient
aussi peu “Européens” que ce qu'ils imputaient à ceux qui votèrent non, puisqu'ils
décidèrent que le vote de la France «enterrait» le traité soumis au vote (à considérer
que les dirigeants de la Grande-Bretagne, avec leur empressement à enterrer, pour leur
compte, leur hypothétique référendum à venir, firent la même démonstration). Comme si la
décision d'un seul pays, le notre, valait pour tous les autres.
Dans l'édition électronique du Monde
on lit cet encart:
«"Le message qui émerge et qui s'adresse à l'Europe et au monde, c'est
que la Constitution n'est pas morte après les votes en France et aux Pays-Bas", a
estimé le premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, dans une intervention,
dimanche 10 juillet, sur RTL […].
M. Juncker s'est prononcé pour une poursuite du processus d'adoption. "A la fin
(…) nous verrons quels Etats membres ont dit non. Nous devrons prendre la
décision, soit de demander à [la France et aux Pays-Bas] de revoter, soit d'entamer
une renégociation du traité" […]».
On voit que même dans cet encart le
sentiment de supériorité des médiateurs français persiste: pour avoir entendu sa
déclaration, je sais ce que «résume» la partie mise entre crochet, «à la France et aux
Pays-Bas»: Juncker rappelait ici que pour le traité fondant l'Union européenne on
demanda à l'Irlande et au Danemark de revoter. Comparer la France à ces pays !
Quelle honte ! On peut rappeler ici le début de l'éditorial du Monde en date
du 6 juin 2005:
«N'accablons pas les Britanniques. En suspendant le référendum prévu
l'année prochaine, ils ont sans doute donné le coup de grâce à l'idée de Constitution
européenne, mais les blessures fatales avaient été infligées d'abord par les Français,
puis par les Néerlandais».
Bref: la France a parlé, tout est
dit… Or, pour l'instant sur 15 pays qui se sont prononcé, 13 ont approuvé le
traité; si le rapport reste le même pour les 10 pays restants, on aura au final de 21 à
22 pays l'approuvant, de 3 à 4 le rejetant, ce qui nous met dans le cadre fixé par le
traité, où plus d'un État-membre sur cinq l'aura approuvé, ce qui engagera, comme le
rappelle Jean-Claude Juncker, une phase de renégociation pouvant aboutir, le cas échéant,
par un second vote des États l'ayant désapprouvé. Je suis comme vous, bien qu'ayant voté
non au référendum récent: la question n'est pas de savoir qui «a gagné», mais de
respecter la décision des peuples européens, ceux-ci auraient-ils approuvé le texte par
l'entremise de leurs représentants; à un certain moment, les organes représentatifs de
l'éxecutif (conseil et commission) et le Parlement européen ont décidé qu'un certain
texte devait être soumis aux États-membres dans certaines conditions et selon certains
critères, et ce n'est pas à deux ou trois réputés «grands» États de décider en cours de
route que la règle change parce qu'ils en jugent ainsi…
Bien à vous. Olivier Hammam. | |
Et j'eus cette réponse à ma réponse:
De: jean-michel dumay
À: Olivier Hammam
Objet: Re: Encore une fois, les "petits" montre l'exemple…
Bonjour,
Alors là, oui, nous y sommes en face de cette attitude française de décider à la place
des autres… Comment peut-on être Persan ? disait Montesquieu…
Comment peut-on être Européen ? Non, Franco-Européen ! Sinon rien ! Voilà
ce que je perçois, à travers toutes ces déclarations, tout le monde doit penser comme
nous, jusqu'en Lituanie. L'arrogance n'a pas de camp.
J'éprouve une sympathie "instinctive" en écoutant Jean-Claude Juncker, il a cette
simplicité qui manque à beaucoup. Il aborde logiquement cette nouvelle étape, et me fait
penser que nous devrions entre Européens nous "synchroniser" en idées et en actes,
d'une manière qui laisserait à chacun sa tonalité personnelle, où la France n'a pas à
imposer son diapason !
L'issue du non n'est pas dans un leçon donnée aux autres, elle devrait donner
l'occasion de faire connaissance entre européens, et certes mon oui n'est pas du
tout un "label" de bon Européen !
Ce "label", je le chercherais dans une attitude d'ouverture aux paroles des autres pays,
et l'envie de s'entendre sans attitude de supériorité.
N'avez-vous pas été frappé par l'attitude des nouveaux pays membres, lors du débat
sur le budget européen, ils étaient prêts à réduire leurs exigences financières
pour que ça marche, c'est aussi là que les petits ont montré l'exemple !
Ce Traité est pour moi une tentative historique, qui aura eu le mérite de lancer un
débat qui dépasse la seule France, et que je souhaite de mieux en mieux cerné,
pour évoluer plus humainement.
Avec une nouvelle conscience des enjeux de société, à coucher sur le papier.
Lisez un texte à un moment donné, revenez-y deux mois plus tard, et ô surprise notre
perception (plus ou moins) a changé !
Pourquoi ne pas continuer de l'étudier comme un prototype, sans être sacrilège aux yeux
des nonistes, pour évoluer et décoller de cette polémique où l'on dépense tant d'énergie
mentale à amoindrir des individus, et les figer dans une seule attitude. Que du
gaspillage. Je préfère l'apprentissage, et la critique constructive.
A bientôt.
Jean-Michel
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Pour l'heure, la correspondance s'arrête là. Elle illustre une chose évidente pour qui
ne situe pas ses positions relativement au traité constitutionnel et surtout au récent
référendum français sur cette question: pour l'électeur honnête qui s'est positionné sur
une autre posture idéologique qu'«anti-européens» (chez les oui-ouistes militants) contre
«ultra-libéraux» (chez les nonistes militants), on peut discuter tranquillement et avoir
des points de vue assez proches, quoi qu'on ait voté le 29 mai 2005. En fait, comme mon
correspondant, j'étais agacé par les partisans de l'un ou l'autre camp, qui les uns comme
les autres simulaient un positionnement sur le texte même, alors que bien souvent leurs
motifs avaient d'autres ressorts. Pour qui aura lu ma motivation de vote, (toujours
lisible à la toute fin du texte «Il y a propagande et
propagande…»), elle est simple:
«[…] Je le répète je ne suis pas contre ce traité, et y suis même
plutôt favorable, avec quelques aménagements. Voici mon problème: je ne puis donner ma
confiance à des gens qui pensent que la fin justifie les moyens et que tous les moyens
sont bons. C'est ainsi».
Certains ont fait pencher la balance entre le désir d'avoir enfin un texte européen à
valeur constitutionnelle et la défiance envers les élites vers la défiance, d'autres vers
l'adoption du texte, mais l'écart était mince, jusqu'au dernier jour ou presque j'étais
encore incertain, et j'imagine qu'il en fut de même pour mon correspondant. Finalement,
ce qui me fit choisir fut le forcing exercé par «les plus hautes autorités» dans
la dernière semaine pour menacer les Français des pires maux (je me moquais notamment de
Raffarin qui, sur la fin, dressa un tel tableau catastrophique que j'en disais, «il a
même dit que si le “non” passait, les volcans d'Auvergne se réveilleraient»; ce à
quoi j'ajoutais: «Quoi que: c'est déjà fait, VGE s'est réveillé…»). les
partisans du “oui” faisant de cette affaire une question de politique intérieure, je
donnais une réponse proprement française à la question.
Pour moi les votes français et néerlandais n'auront au final que peu de conséquences
sur la mise en place, dans les trois ou quatre ans à venir, de textes reprenant une large
part de ce traité fourre-tout. Cela se fera autrement, mais ça se fera. Pour l'heure, des
raisons qui n'ont que peu à voir avec le texte, notamment celle à l'œuvre depuis au moins
cinq ans du leadership européen, tenu pendant plus de trente ans par le fameux
«couple franco-allemand», plus en plus disputé par la Grande-Bretagne, appuyée d'autres
États, fait qu'on assiste à ce petit mais passager psychodrame familial; là-dessus, et
toujours pour des raisons de politique intérieure, certains partisans du “oui” expliquent
que «la France a été affaiblie par le vote négatif du 29 mai». C'est idiot, puisque donc
cet affaiblissement n'a rien à voir, et est à l'œuvre depuis quelques cinq ans. Ce n'est
que le dernier couplet de la chanson que nous sevent nos gouvernants depuis deux bonnes
décennies: les choses vont mal en France «à cause de l'Europe».
L'Europe joue depuis quelques temps le rôle attribué auparavant au destin ou à Dieu:
la cause effective de toute chose et la conséquence finale vers où nous allons. Cette
Europe, celle des oui-ouistes comme des nonistes, ressemble à l'univers des antiques, un
univers cyclique. J'ai une plaisanterie sur «ce que fait l'Europe»: que fait l'Europe
depuis cinquante ans ? Elle avance. Que se passera-t-il si le “oui” l'emporte ?
L'Europe avancera. Cela valait aussi, du moins si le oui l'emportait, pour les opposants
militants au traité, selon qui il confirmait et accentuait l'orientation «ultra-libérale»
des politiques européennes. Cela dit, ça marche aussi pour le non: que fait l'Europe
depuis cinquante ans ? Elle avance. Que se passera-t-il si le “non” l'emporte ?
Elle restera comme avant…
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