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La France est un pays en guerre
(heureusement, elle n'est pas seule dans son camp…)
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L' histoire, du moins celle événementielle, ce
n'est pas trop mon truc, alors je ne sais plus exactement quand la France signa pour la
dernière fois un traité de paix; il me semble que c'est en 1815, il est probable que de
1830 à 1870 elle en signa plusieurs, mais avec de petites nations — petites d'un point de
vue géopolitique et géostratégique. En tout cas, il est certain qu'en 1870 elle entra en
guerre et que, depuis, elle n'en est pas sortie. Ça avait commencé plus tôt, alentour de
1848, à une décennie près: à cette époque, plusieurs nations occupées d'Europe entrèrent
en lutte contre leur occupant; dans le même temps, dans ces pays occupants des mouvements
insurrectionnels tentèrent — et parfois réussirent — à renverser les pouvoirs en place.
Suite à cela, il y eut des résultats divers, parfois la réaction (la contre-révolution)
«rétablit l'ordre», parfois les révolutionnaires et indépendantistes triomphèrent. Dans
l'un et l'autre cas, la cause initiale ne fut pas résolue et ces conflits continuèrent
pendant les deux décennies suivantes, parfois de manière (relativement) feutrée, comme en
France par exemple, parfois violemment, comme en Italie.
On arrive donc vers 1870, moment où, peut-on dire, les positions sont acquises: telles
nations sont “progressistes”, telles sont “réactionnaires”, les frontières de ces nations
sont à-peu-près fixées, et les populations dans ces frontières, assez unifiées. La guerre
franco-allemande de 1870 est alors le départ d'une autre série d'événements, dont le but
général est: le triomphe de la réaction ou du progressisme. Ceci n'est pas du au hasard,
depuis au moins les débuts de l'empire carolingien, «l'espace français» est le point de
ralliement du “progressisme” et «l'espace germanique» celui de la “réaction”. D'un sens,
cette répartition est une sorte de jeu, mais un jeu cruel où les pions sont des humains:
factuellement, les “Français” sont des Goths et les “Germains” sont des Francs — non pas
d'un point de vue généalogique, s'entend, mais du point de vue des institutions: entre le
II° et le IX° siècles, partant d'un premier centre de fixation du côté de ce qui est de
nos jours le Luxembourg, les tribus germaines se lancèrent à la conquête de l'Europe et y
imposèrent leur autorité, de l'Espagne aux Balkans, des Balkans à la Scandinavie, de la
Scandinavie à l'Espagne. Le début est plus ancien, ça démarra un millénaire avant, à peu
de choses près, et du côté du Danube, mais on peut dire que c'est une autre histoire, qui
certes a encore son impact sur l'histoire actuelle, mais bien moins que cette aventure
commencée il y a environ deux mille ans. Pour l'instant nous passerons sur le gros de
l'histoire et en viendrons au moment fatidique, 1870, la guerre fratricide, les Germains
contre les Germains. Non que ce soit la première, mais les autres se terminèrent par un
traité de paix, et non celle-ci. Ce qui fait une différence significative.
Les guerres, il y en a de deux sortes: celles contre l'autre et celles contre le même.
Chaque sorte se divise en deux sortes: celles contre l'autre lointain ou proche; celles
contre le même extérieur ou intérieur. Ce qui se dira: guerre contre l'autre autre, puis
contre l'autre même, puis contre le même autre, puis contre le même même. Le dernier cas
est bien entendu la «guerre civile»; le précédent désigne la guerre entre voisins d'une
même aire culturelle; le deuxième est ce que Huntington appelle «choc des civilisations»,
qu'on nommera plus justement guerre entre empires; enfin, le premier cas s'applique aux
processus colonialistes ou impérialistes. Évidemment, tout ça ne se sépare si nettement,
le plus souvent une entité politique réalise successivement ou conjointement plusieurs
types de conflits. Si on considère la situation dont je parlais
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