![]() | Longues propagandistes, série 14 |
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En extra: Les éditos du Monde |
C omme l'ont montré, en France et aux Pays-Bas, les résultats négatifs des consultations sur la Constitution européenne, l'Europe suscite beaucoup de méfiance dans les opinions publiques de plusieurs pays. Une enquête de la Sofres, menée pour Arte du 24 août au 5 septembre dans cinq des six grands Etats de l'Union, confirme que nombre de citoyens ne sont pas convaincus des bienfaits de l'Europe et que les catégories populaires le sont moins que les cadres moyens et supérieurs. Les Espagnols apparaissent comme les plus europhiles, les Français comme les plus europhobes. Le sondage a été réalisé auprès d'échantillons de 950 à 1 000 personnes, choisies selon la méthode des quotas (France, Espagne) ou par méthode aléatoire (Allemagne, Grande-Bretagne, Pologne).
C'est la situation économique qui apparaît, dans les réponses des plus eurosceptiques, comme le principal facteur de désaffection. Ainsi, lorsqu'on demande aux gens quels mots leur viennent à l'esprit, parmi ceux qui leur sont proposés, à propos de l'Europe, ils sont 60% en moyenne à citer l'euro, dont 81% en Espagne et 78% en Allemagne – - sans qu'on puisse dire si une telle référence est positive ou négative – - et 51% à évoquer la liberté de voyager, dont 74% en Espagne et 52% en France, mais le chômage est mentionné par près d'un tiers des personnes interrogées, en particulier les Allemands (47%), les Espagnols (45%), les Français (28%) et les Polonais (26%), ainsi que le gaspillage d'argent (47% en Allemagne, 42% en Espagne, 32% en France, 21% en Grande-Bretagne). La prospérité, qui est l'un des objectifs de l'Union, n'est citée que par 21% des gens: 56% d'Espagnols, mais seulement 17% de Français, 16% d'Allemands, 15% de Polonais, 11% de Britanniques.
Quand on demande aux gens s'ils ont le sentiment, grâce à l'Europe, de vivre dans un pays plus prospère, les Français et les Polonais répondent négativement. En France, 43% des personnes interrogées (contre 29%) estiment qu'elles vivent dans un pays moins prospère. En Pologne, 43% également (contre 24%) sont de cet avis. Les plus mécontents sont les ouvriers (52% en France, 49% en Pologne, 47% en Allemagne). La majorité des Britanniques (42% contre 30%), des Allemands (45% contre 34%) et surtout des Espagnols (77% contre 10%) estiment vivre dans un pays plus prospère.
Se sentent-ils plus en sécurité ? Sauf en Espagne (51% contre 21%) et, à un degré moindre, en Allemagne (45% contre 34%), les réponses positives l'emportent de peu sur les réponses négatives (34% contre 32% en France, 30% contre 28% en Pologne) ou sont légèrement inférieures (32% contre 34% en Grande-Bretagne). Dans les cinq pays, sauf en Espagne et, paradoxalement, en Grande-Bretagne, le score est négatif chez les ouvriers. Se sentent-ils plus protégés ? Cette fois, les écarts sont plus nets. Oui, répondent les Espagnols (58% contre 18%), les Allemands (48% contre 31%), les Français (38% contre 30%) et les Polonais (33% contre 14%). Non, disent les Britanniques (36% contre 33%). En Allemagne et en France, les ouvriers se sentent moins protégés. En Grande-Bretagne, ce sont surtout les plus de 50 ans qui éprouvent ce sentiment.
Les citoyens des cinq pays ont-ils le sentiment de payer les produits plus cher à cause de l'Europe ? La réponse est unanime. Toutes catégories confondues, ils sont 83% en Allemagne, 82% en Espagne, 80% en Pologne, 72% en France et 56% en Grande-Bretagne à considérer que l'appartenance de leur pays à l'Europe a fait monter les prix.
Pensent-ils qu'ils vivent mieux grâce à l'Europe ? Oui, pour une majorité d'Espagnols (57% contre 13%) et de Britanniques (33% contre 24%). Non, pour une majorité de Français (41% contre 22%), de Polonais (33% contre 18%) et même d'Allemands (34% contre 33%). Les ouvriers sont les moins satisfaits en Allemagne (46%) et en France (58%), les agriculteurs en Pologne (41%). Sur cette question comme sur d'autres les femmes sont nettement plus critiques que les hommes et les jeunes plus confiants que leurs aînés.
Une majorité d'Allemands (48% contre 28%), de Britanniques (48% contre 29%), de Français (42% contre 26%) et, à un degré moindre, de Polonais (24% contre 21%) estiment que leur identité et leur culture sont davantage menacées que protégées par l'Europe. Seuls les Espagnols (44% contre 25%) sont d'un avis contraire. Les Espagnols (49% contre 32%) et, à un degré moindre, les Français (38% contre 36%) jugent que, grâce à l'Europe, leur pays est plus puissant dans le monde. Les Allemands (44% contre 32%), les Britanniques (42% contre 31%) et les Polonais (38% contre 35%) expriment une opinion contraire.
Est-il plus efficace d'agir à l'échelle européenne ou à l'échelle nationale ? Ils sont une majorité à penser que la lutte contre le chômage doit être conduite à l'échelle nationale, et non à l'échelle européenne. C'est ce que répondent 72% des Britanniques (contre 20%), 56% des Français (contre 40%), 52% des Allemands (contre 44%), 47% des Espagnols (contre 45%). En revanche, les Polonais préfèrent une action européenne (57% contre 37%). En matière de fiscalité et de protection sociale, la majorité des Européens privilégient aussi l'échelon national (73% des Britanniques, 60% des Espagnols, 57% des Polonais, 56% des Allemands et des Français pour la fiscalité, 70% des Britanniques, 69% des Français, 66% des Allemands, 52% des Polonais pour la protection sociale, les Espagnols faisant exception sur ce point avec 46%, contre 48%).
En revanche, les questions de politique étrangère, d'environnement, d'immigration doivent relever, selon une majorité de personnes interrogées, de l'échelon européen, sauf pour les Britanniques, qui donnent la priorité à l'échelon national.
Thomas Ferenczi
Article paru dans l'édition du 04.10.05
L e rejet par les électeurs français, lors du référendum du 29 mai, du projet de Constitution européenne et, au-delà, le coup d'arrêt porté à la construction européenne sont tout sauf un accident. Le sondage-choc réalisé par la Sofres dans cinq pays de l'Union pour Arte et rendu public par la chaîne franco-allemande, mardi 4 octobre, en apporte une impressionnante confirmation.
En France, mais aussi en Allemagne et en Grande-Bretagne, ou encore dans un pays comme la Pologne entré dans l'Union il y a dix-huit mois seulement, c'est désormais un lourd sentiment de doute – - de défiance même - –, qui prédomine à l'égard de l'Europe. A l'exception de l'Espagne, dont la solide europhilie est à la mesure des bienfaits que ce pays a tirés de son adhésion depuis une vingtaine d'années, l'Europe ne rassure plus et fait encore moins rêver. Elle inquiète.
C'est particulièrement vrai pour l'opinion publique française. Longtemps l'Europe y a été – - au moins de façon diffuse et souvent avec assurance – - considérée comme "l'avenir de la France", comme son espace naturel de développement, comme le levier de sa modernisation et de son ouverture sur le monde après la disparition de son empire colonial. Pendant un demi-siècle, du général de Gaulle à François Mitterrand, en passant par Georges Pompidou et Valéry Giscard d'Estaing, chacun s'était employé à en convaincre les Français.
Ce ressort, à l'évidence, est cassé. Certes, l'Europe reste associée à l'idée de la "liberté de voyager, d'étudier et de travailler partout en Europe" (pour 52% des Français), à celle de la "paix" (46%) ou de la "diversité culturelle" (35%). Pour bien peu, en revanche, elle est synonyme de "démocratie" (24%), de "prospérité économique" (17%) ou de "protection sociale" (15%).
Pire encore, dans un pays fondateur – et à bien des égards inspirateur – de la Communauté puis de l'Union, le bilan de l'aventure européenne apparaît, à ce jour, lourdement négatif. Il se trouve une majorité relative de Français pour considérer que l'appartenance à l'Europe fait de la France un "pays moins prospère" (43%, contre 29% qui estiment qu'elle est "plus prospère"). De façon encore plus saisissante puisqu'il s'agit d'un record d'Europe, 41% de nos concitoyens (et jusqu'à 58% des ouvriers) ont le sentiment de "vivre moins bien" du fait de l'Europe, contre 22% qui estiment "vivre mieux" grâce à elle.
Rudes constats ! Et redoutables défis pour une Europe en berne et une France en panne de projet. Tout, en effet, est aujourd'hui à reconstruire: la confiance dans la construction européenne, l'aptitude de l'Union à proposer un projet collectif à ses membres, sa capacité à convaincre ses citoyens qu'elle reste, au XXIe siècle, la condition de la prospérité collective. A ne pas s'atteler d'urgence à cette tâche, les hommes politiques européens – mais surtout les Français, toujours prompts à se défausser sur Bruxelles de leur propre impuissance –, manqueraient à leur responsabilité historique.
Article paru dans l'édition du 04.10.05
Alain-Marc R. ♦ 03.10.05 | 16h23 ♦ Il n'y a pas de réelle europhobie, simplement une défiance chaque jour justifiée sur le mode de construction de l'union européenne. Cette défiance, au lieu d'être une "europhobie" est au contraire un appel à d'autres modalités politiques d'unification. Il faut cesser de culpabiliser les individus parce qu'ils refusent d'accepter ce qu'on leur propose. Ce ne sont pas les populations qui bloquent l'Europe mais ceux qui prétendent possèder le monopole de sa construction.
delumeau@club.lemonde.fr (Japon) ♦ 03.10.05 | 16h21 ♦ Europeen de toujours je rentre helas dans la categorie des decus voire des inquiets. Avant d'elargir, il aurait ete sage d'integrer politiquement, culturellement et militairement les 6 pays fondateurs qui, a eux seuls, representaient une population comparable a celle des USA, potentiellement plus homogene. Une Europe puissance aurait ete possible. A present l'Europe ne controle plus son destin alors que les reglementations communautaires empechent chaque pays de se proteger individuellement.
orbi ♦ 03.10.05 | 16h18 ♦ les français sont TCEphobes à 55,5% (chiffres vérifiés et sûrs). Un même sondage sur la France donnerait les mêmes réponses. les français malgré le fait qu'ils soient en paix, qu'ils aiment bien voyager dans leur pays, qu'ils apprécient leurs diversités régionales s'interrogent . Est-ce que la France est plus démocratique? non. vous vivez mieux? non - Etes-vous plus prospères, non?. la France économique est en panne? oui, sociale? oui. démocratique? oui. les francais francophobes.
Roger Dumont ♦ 03.10.05 | 16h14 ♦ Pour seulement 46% des personnes interrogées, l'Europe est associée à l'idée de la paix. C'est peu !
MARIE THERESE J. ♦ 03.10.05 | 16h12 ♦ Le projet européen, au départ, c'est la paix, la démocratie, la prospérité, la sécurité sociale, et la puissance. L'offensive libérale de ces 25 dernières années a brisé le consensus européen: pour beaucoup, l'Union européenne signifie aujourd'hui souffrance sociale et soumission aux Etats-Unis, ce qui n'est pas acceptable pour la majorité des Français.
Aillard ♦ 03.10.05 | 15h51 ♦ A Edouard: "Plus personne aujourd'hui ne traverserait la Manche pour rejoindre Londres comme le faisaient des tas de gars de 20 ans en 1940... " voici une phrase aussi pittoresque que dénuée de sens. Qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire? La France de la fin des années 30 n'avait rien d'un pays volontaire et courageux, et on parlait déjà d'assistanat. Assistés, les Français? Oui sûrement, mais dès qu'on essaie de prendre une initiative, il y a une belle administration pour vous barrer la route
Maurice Maginot ♦ 03.10.05 | 15h49 ♦ "France europhobe" ? Je ne vois pas que ce sentiment distingue la France dans l'Union. Pourquoi ce titre culpabilisateur ? "Europhobe" vraiment ? Moi je vois une immense europhilie déçue. Une fois encore, s'il vous plaît, respectez les données sur lesquelles vous fondez vos analyses... alors vous aussi vous cesserez de "manquer à vos responsabilités historiques" !
desfrontières ♦ 03.10.05 | 15h29 ♦ Il est indéniable que l'on vit mieux grâce à l'Europe: prjet né ds le coeur des Philosophes du 18ème siècle: l'erreur c'est l'élargissement; il fallait réaliser un pays unique avec les pays fondateurs; l'entrée du Royaume Uni a marqué la fin. Le Royaune Uni aurait créé une zone avec la Scandinavie; le mélange a créé des chocs culturels difficilement surmontables; vivre en paix ds la prospérité en se respectant et non en se critiquant les uns les autres comme c'est la cas aujord'hui.
PIERRE G. ♦ 03.10.05 | 15h25 ♦ Reaction a chaud: Comment les Francais peuvent dire qu'ils vivent mieux ou moins bien du fait de l'Europe ??? Sur quoi se basent ils pour faire la comparaison ? Evidemment avec nos hommes politiques qui insistent sur ce qu'ils ne peuvent pas faire a cause de l'Europe (encore entendu ce matin a propos de la SNCM), et jamais sur ce que l'Europe apporte (ne parlons pas des subventions...), comment les reactions pourraient elles etre differentes ?
MICHEL F. ♦ 03.10.05 | 14h57 ♦ A croire qu'il n'y a pas eu débat au printemps dernier sur ce sujet pour titrer que la France est europhobe. Beaucoup de ceux qui ont voté "non" ne sont pas europhobe mais ne veulent plus d'une Europe libérale, où c'est le marché qui impose sa loi, où la puissance publique ne doit plus intervenir, où ce sont des fonctionnaires européens, des personnes nommées et non des élus qui sont à la tête des principales institutions européennes. Donc, pas europhobe, mais libérophobe.
Denis P. ♦ 03.10.05 | 14h57 ♦ Cet article postule que ce sont les Francais qui doivent changer et non l'Europe. Les perceptions ont leur part de vrai. Elitiste, ancree dans un certain bouillon de culture ideologique, indigeste par ses dimensions, l'Europe semble se reduire au statut etrique d'une super-agence europeenne d'harmonisation et de coexistence pacifique. 25 pays sans autre commune mesure qu'un siege autour d'une table. Pas de projet politique commun. Des decisions a l'arrache. Un consensus mou.
MARCEL G. ♦ 03.10.05 | 14h40 ♦ Je suis d'accord avec votre édito, mais je ne souscris pas à votre titre.Il ressort de votre analyse que les français sont déçus par l'Europe, mais ils ne sont pas europhobes. Ils en attendaient une amélioration de leurs condition de vie, à tort ou à raison, or nous avons toujours pratiquement 10% de chômeurs....
Aillard ♦ 03.10.05 | 14h38 ♦ Drôle de conclusion, quand même "la France europhobe", raccourci un peu hâtif, non? M'enfin peu importe, il est effectif, et nous n'avions pas besoin de sondages pour le savoir, que les Français (et non la France) n'ont, dans leur majorité, plus envie du rêve Européen, du moins pour le moment. La France perd sur tous les terrains, et depuis quelques temps déjà, plus de coupe du monde de foot à se mettre sous la dent, donc les Français se replient sur des valeurs surannées, phénomène normal...
Edouard ♦ 03.10.05 | 14h36 ♦ L'Europe a ete cree par des gens qui avaient connus la guerre et qui etaient fermement decide a ce que cela n'arrive plus. Aujourd'hui ils ont disparus et avec eux cette idee fondatrice. Aujourd'hui les gens veulent que l'Europe apporte prosperite et assistance. La culture et la conscientisation du risque a disparu et ete remplacee par la culture de l'assistanat. Plus personne aujourd'hui ne traverserait la Manche pour rejoindre Londres comme le faisaient des tas de gars de 20 ans en 1940...
HocusPocus ♦ 03.10.05 | 14h27 ♦ Si, plutot que la "concurrence libre et non faussée", les diverses institutions europeennes se fixaient à elles memes pour valeurs cardinales "la démocratie", "la prospérité économique" et la "protection sociale", le TCE aurait suscité moins d'aversion, et les résultats du sondage en référence auraient été différents. La France n'est "en panne de projet" que parce qu'il est devenu quasiment impossible de faire coincider les aspirations des peuples avec les paradigmes ultralibéraux imposés.
À dix jours du référendum du 15 octobre sur la nouvelle Constitution irakienne, l'armée américaine accroît la pression contre les partisans d'Al-Qaida réfugiés dans l'ouest de l'Irak, en y lançant une deuxième opération d'envergure baptisée"River Gate", dans la foulée de celle, dénommée"Iron Fist", qui a fait une trentaine de morts depuis samedi, près de la frontière avec la Syrie.
L'Etat-major américain a annoncé, mardi 4 octobre, que quelque 2 500 soldats participaient depuis la veille à cette nouvelle opération, lancée principalement contre les localités de Haditha, Haqlaniya et Barwana (environ 200 km à l'ouest de Bagdad, le long de l'Euphrate, dans la province sunnite Al-Anbar). Une vingtaine de marines avaient été tués en août dans cette zone, considérée par les Américains comme l'un des principaux axes de pénétration de combattants étrangers en Irak et l'un des bastions rebelles.
L'armée américaine a déploré mardi la perte de quatre de ses soldats, dont deux sont morts au combat et un autre est mort des suites de ses blessures dans l'explosion d'un engin piégé à Haqlaniya, alors qu'un quatrième a été tué par une autre explosion à Karabila. Ces décès portent à 1 930 le nombre de soldats américains morts en Irak depuis l'invasion du pays en mars 2003, selon un décompte de l'AFP à partir des chiffres du Pentagone.
Assistées de forces irakiennes, les troupes américaines ont notamment pour objectif d'"empêcher Al-Qaida d'opérer dans les localités de la vallée de l'Euphrate". L'opération "Iron Fist" se déroule depuis samedi plus en amont, avec environ un millier de soldats américains, essentiellement des marines. Elle vise "un sanctuaire terroriste connu" dans la région de Sada, à une dizaine de kilomètres de la frontière syrienne.
Haditha est "un carrefour important pour les activités d'infiltration d'Al-Qaida en Irak en provenance de la frontière syrienne", selon l'armée américaine: les membres de l'organisation peuvent ensuite se diriger au nord vers Mossoul ou plus à l'est vers Ramadi, Fallouja et enfin Bagdad.
Un citoyen britannique, Colin Peter, a été arrêté avec un groupe d'Irakiens armés par des gardes-frontières dans la province irakienne de Nadjaf limitrophe de l'Arabie saoudite. Les forces britanniques ont confirmé cette arrestation d'un ressortissant britannique lundi.
Avec AFP et AP
LEMONDE.FR | 04.10.05 | 13h43
P amir XII, douzième régiment militaire français envoyé en Afghanistan depuis la chute des talibans et l'institution de l'ISAF, à la fin 2001, a officiellement pris lundi soir le relais de Pamir XI. Ce bataillon de 600 hommes, issu de la 2e brigade blindée d'Orléans, et pour l'essentiel du régiment de marche du Tchad de Noyon (RMT), sera comme son prédécesseur chargé de sécuriser la zone de responsabilité française, qui couvre le nord de Kaboul et la plaine de la Shomali, et ce pendant quatre mois.
Il est commandé par le colonel Thierry Ducret, chef de corps du RMT de Noyon (Oise), qui a pris le relais du colonel Jacques Duffour, commandant de Pamir XI, lors d'une cérémonie à l'aéroport militaire de Kaboul. Principalement composé d'unités de la 7e brigade blindée de Besançon, Pamir XI était arrivé début juin avec pour principale mission d'assurer la sécurité, dans sa zone, des élections législatives du 18 septembre. Celles-ci se sont déroulées sans incident majeur, à la grande satisfaction du colonel Duffour. "Vos efforts ont été récompensés par le parfait déroulement des élections parlementaires", a-t-il déclaré lundi à ses troupes. L'armée française affirme que les opérations de Pamir XI ont aussi permis de récupérer et de détruire plus de 20 tonnes de munitions. Au cours de ces quatre mois, le bataillon français a également effectué plus de 200 escortes, 230 surveillances de nuit et plus de 200 opérations civilo-militaires (aides sanitaires, construction d'écoles, forages de puits, etc.).
Le changement de bataillon intervient dans un contexte d'intenses négociations au sein de l'OTAN sur l'extension du mandat de l'ISAF, qui compte 10 500 soldats originaires de 37 pays. Déployée dans les régions stables de Kaboul, mais aussi au nord et à l'ouest du pays, l'ISAF doit étendre en 2006 son rayon d'action aux régions de l'est et du sud, agitées par une violente rébellion antigouvernementale, notamment des talibans. Elle y viendrait en appui de la coalition militaire sous commandement américain (18 000 hommes, à 90% Américains) qui, elle, mène des opérations armées quotidiennes dans le cadre de la"guerre au terrorisme". Si Washington pousse à un rapprochement entre les forces de l'ISAF et de la coalition, sur fond de rumeurs de réduction de ses troupes en Afghanistan, plusieurs pays de l'OTAN, dont la France, s'opposent à cette"bellicisation" du mandat de l'ISAF, jusqu'ici force de maintien de la paix. Lors d'un entretien avec le président afghan, Hamid Karzaï, lundi à Paris, la ministre de la défense française, Michèle Alliot-Marie, "a confirmé que la France n'était pas favorable à la fusion des deux opérations à ce stade car elles ont des missions et des moyens différents", selon son entourage. Plusieurs autres membres de l'OTAN se sont en revanche déclarés volontaires pour fournir les 6 000 soldats nécessaires dans le Sud, notamment le Royaume-Uni, le Canada et les Pays-Bas.
La France compte consolider ses positions à Kaboul, avec des effectifs proches du niveau actuel, les opérations extérieures mobilisant déjà 2 400 soldats au Kosovo et 4 000 en Côte d'Ivoire, d'après des sources militaires sur place. Lundi, le président Chirac a réaffirmé à M. Karzaï la volonté française de "prendre le commandement de Kaboul et de sa région" au sein de l'ISAF. "La mission de Kaboul correspond mieux à ce que l'armée française sait faire: des opérations de terrain, de la coopération avec les autorités locales et de l'appui au développement", explique une source militaire à Kaboul. Lundi, le colonel Duffour s'est félicité des "excellents contacts noués par Pamir XI avec la population". Son successeur, le colonel Ducret, s'est engagé à "poursuivre dans cette voie".
avec AFP
LEMONDE.FR | 04.10.05 | 13h40
À quelques mois de la commémoration du 90e anniversaire de la bataille de Verdun, le maire de la ville, Arsène Lux (UMP), a créé la surprise en annonçant qu'il souhaitait voir le Centre mondial de la paix, des libertés et des droits de l'homme quitter l'ancien palais épiscopal le 1er janvier 2007 "au plus tard" . L'élu considère que le centre n'a "pas atteint ses objectifs" et il souhaite reprendre possession de ce bâtiment du XVIIe siècle, propriété de la commune, pour y installer les collections du Musée municipal.
Le conseil municipal a adopté, mardi 13 septembre, une délibération autorisant le maire à dénoncer unilatéralement le bail emphytéotique signé en 1988, pour une durée de cinquante ans, entre la ville et l'association du Centre mondial de la paix (CMP). La municipalité de l'époque avait investi 4 millions de francs (610 000 euros) pour rénover l'ancienne résidence de l'évêque et y accueillir les activités du centre, alors en cours de création.
Inauguré en 1994, le CMP ambitionnait de devenir un "lieu de rencontres, d'études et de documentation de dimension internationale sur les droits de l'homme, les libertés et la défense de la paix" . "Aucun de ces buts n'a été atteint, juge aujourd'hui Arsène Lux. Pas un organisme international n'a adhéré au projet et les chiffres de fréquentation sont très en dessous des obje ctifs."
Le centre a accueilli, en 2004, un peu plus de 70 000 visiteurs. "Dont moins de 7 000 entrées payantes , tempère l'élu. Pour gonfler les chiffres, on a ouvert ce lieu à toutes sortes d'activités qui n'ont rien à voir avec sa vocation initiale. Le palais épiscopal de Verdun mérite mieux que de faire office de salle polyvalente."
Député (PS) de la 2e circonscription de la Meuse, Jean-Louis Dumont, ancien maire de Verdun et trésorier de l'association, se dit "consterné" par cette décision. "On s'attaque à un symbole , dit-il. Remarquez, ce n'est pas nouveau... Depuis son arrivée à la mairie, en 1995, M. Lux a divisé par dix le montant de la subvention muni cipale (15 000 euros en 2004, pour un budget total de 300 000 euros), de manière à nous asphyxier financièreme nt."
Selon M. Dumont, l'équipe du centre "n'a pas démérité" . "Plusieurs chefs d'Etat sont venus, de nombreux intellectuels s'y retrouvent, des milliers d'élèves de différentes nationalités nous rendent visite chaque année", plaide le député socialiste, qui évoque notamment une rencontre organisée au Centre mondial de la paix entre des jeunes Israéliens et Palestiniens, alors que venait d'éclater la deuxième Intifada.
"Le maire , poursuit M. Dumont, considère qu'il suffit, pour toucher les consciences, de montrer ce que fut la boucherie de Verdun. Nous pensons qu'un lieu de paix a toute sa place à côté des champs de bataille." Un point de vue que réfute M. Lux. "La guerre, c'est dramatique et dégueulasse, mais c'est notre histoire. 162 000 hommes ont péri ici, voilà la vérité et l'universalité de Verdun. Vouloir faire de cette ville meurtrie une capitale éthérée de la paix est une supercheri e", estime-t-il.
En voulant déloger le CMP de l'ancien palais épiscopal, Arsène Lux a fait voler en éclats un consensus politique né il y a plus de dix ans. Le conseil d'administration du centre est composé d'élus meusiens de tous bords. Son président, le sénateur UMP Gérard Longuet, a laissé entendre qu'il n'hésiterait pas à saisir la justice pour faire respecter le bail et empêcher le déménagement du centre.
Nicolas Bastuck
Article paru dans l'édition du 04.10.05
L es enfants à qui, plus tard, on demandera "Quand a fini le XXe siècle ?" répondront peut-être le 31 décembre 2000 à minuit. Ils auront raison et ils auront tort. C'est le 11 septembre 2001 qu'un nouveau siècle a commencé. Avant, on n'avait pas vraiment vu la différence entre le XXe et le XXIe siècle. Comme la génération de 1900 n'avait pas vu mourir le XIXe siècle avant la grande guerre de 14-18. Une citation d'André Malraux, plus ou moins apocryphe, plus ou moins réductrice, servait de passe et de passeport pour l'an 2000: le prochain siècle sera spirituel ou ne sera pas. C'est au nom de l'Esprit saint que des esprits malsains, se réclamant d'un Allah méconnaissable, ont tout fait pour que le XXIe siècle n'existe pas. Ou seulement sous sa forme la plus tragique.
New York. Londres. Madrid. Bali. Nous voici dans le vif du sujet, dans le rouge vif, avec encore du sang et des cris, des attentats aveugles, la peur mondialisée, le décret pseudo-divin d'une croissance sans limite donné au droit de tuer. Est-ce Al-Qaida, la main ou la barbe du "prophète" Ben Laden ? On finit par ne plus savoir qui est qui; qui se cache derrière qui. On ne voit que des films de mauvaise qualité pris par des vidéastes amateurs ou des caméras de surveillance montrant les futurs kamikazes se mêlant à la foule sans nom.
A Bali, les images sont aussi anonymes. Les chaînes de télévision nous les montrent sans grande précaution, comme s'il allait de soi que, devant la gravité des faits, il faut donner à voir sans être trop regardant sur les sources des documents. Dimanche 2 octobre, on a donc tous vu ce kamikaze en tee-shirt noir pénétrant dans un restaurant et se dirigeant d'un pas décidé vers les cuisines, son sac à dos accroché aux épaules. Puis un éclair violent, à la mesure de la déflagration. Sans commentaire. Juste des cris, des éclats de verre. Des morts. Trois terroristes dont les têtes ont été retrouvées après l'explosion. Têtes coupées, puisque le crime est suivi sur-le-champ de sa punition suprême pour les auteurs de tels actes. Pas de sanction, pas de jugement. Seulement le sentiment d'un désastre humain où l'humanité tout entière semble régresser.
Est-ce là de la barbarie ? S'agit-il d'un code de vie et d'honneur que nous avons peine à comprendre, avec nos pensées d'Occidentaux ? Peu importe au fond. Le terrorisme échappe aux définitions, il déborde les limites de la raison. Ne peut le comprendre que celui ou ceux qui pratiquent le langage des bombes, une langue morte une fois que les armes ont parlé.
Maintenant il faut vivre avec. Un coup loin, New York. Un coup près, Madrid. Un coup loin (plusieurs coups, même), Bagdad. Un coup près, Londres. Un coup loin, Bali. Un coup près, à qui le tour, et si Paris, demain... Avec des si... Mais pas besoin de si pour éprouver un sentiment diffus d'inquiétude. Dans les transports en commun parisiens, une voix de femme, anonyme bien sûr, nous demande d'être "attentifs ensemble" . Pas une semaine sans que le trafic soit interrompu pour cause d'objet suspect, sur une voie, sur un quai. Vivre avec. Compagnie douceâtre et lancinante. En espérant de ne jamais avoir à vivre sans; sans les proches qu'on pourrait perdre si demain tout sautait quelque part où sont les gens qu'on aime.
éric fottorino
Article paru dans l'édition du 04.10.05
T out comme il est immensément difficile de définir la vérité, bien qu'assez facile de flairer un mensonge, il est parfois difficile de définir le bien. Le mal, quant à lui, possède une odeur parfaitement reconnaissable: tous les enfants savent ce qu'est la douleur. Ainsi donc, chaque fois que nous imposons délibérément une douleur à quelqu'un, nous savons ce que nous faisons. Nous faisons du mal.
L'âge moderne a changé ces notions. Il a brouillé cette distinction évidente que faisait l'humanité depuis sa prime enfance, depuis le jardin d'Eden. A un moment du XIXe siècle, pas très longtemps après la mort de Goethe, une nouvelle façon de penser a fait son apparition dans la culture occidentale: elle a balayé le mal, allant jusqu'à nier son existence. On a appelé sciences sociales cette innovation intellectuelle. Pour les nouveaux praticiens, pleins d'assurance, parfaitement rationnels, optimistes et absolument scientifiques, de la psychologie, de la sociologie, de l'anthropologie et de l'économie, le mal n'était pas une question. En y réfléchissant, le bien non plus.
Encore aujourd'hui, certains spécialistes des sciences sociales ne parlent tout simplement pas du bien et du mal. Pour eux, tous les actes et les motivations de l'homme découlent des circonstances, qui sont souvent hors du contrôle des individus. "Les démons n'existent pas plus que les dieux, disait Freud, car ils sont les produits de l'activité psychique de l'homme." Ainsi, nous sommes régis par notre environnement social.
Et cela fait un siècle que l'on nous explique que nous sommes motivés exclusivement par notre intérêt économique, que nous ne sommes que les produits de nos cultures ethniques, que nous ne sommes rien de plus que les marionnettes de notre subconscient.
En d'autres termes, les sciences sociales modernes ont constitué la première tentative sérieuse pour débarrasser la scène humaine à la fois du bien et du mal.
Pour la première fois dans leur longue histoire, le Bien et le Mal ont tous deux été supplantés par l'idée que les circonstances sont toujours responsables des décisions, des actes et, surtout, des souffrances de l'homme. C'est la faute de la société. C'est la faute d'une enfance malheureuse. C'est la faute de la politique. Du colonialisme. De l'impérialisme. Du sionisme. De la mondialisation. Ainsi a commencé le grand championnat du monde des victimes.
Pour la première fois depuis le Livre de Job, le diable s'est trouvé au chômage. Il ne pouvait plus jouer avec l'esprit des hommes comme il le faisait depuis toujours. Satan était congédié. C'était l'époque moderne. Eh bien, les temps changent peut-être de nouveau. Si Satan a été viré, il n'est pas resté inactif. On a assisté au XXe siècle au pire spectacle du mal perpétré de sang-froid de toute l'histoire. Les sciences sociales n'ont réussi ni à prédire, ni à affronter, ni même à saisir ce mal moderne et fortement imprégné de technologie. Ce mal du XXe siècle s'est très souvent déguisé en réforme mondiale, en idéalisme, en rééducation des masses afin de leur "ouvrir les yeux". Le totalitarisme a été présenté comme une rédemption profane pour quelques-uns aux dépens de millions de vies.
Aujourd'hui, nous sommes sortis du fléau de la règle totalitaire et nous avons un immense respect pour les cultures. Pour la diversité. Pour le pluralisme. Je connais des gens prêts à tuer tous ceux qui ne sont pas pluralistes. Le postmodernisme a une fois de plus embauché Satan, mais, aujourd'hui, sa mission tire sur le kitsch: un petit groupe secret de "forces louches" est responsable de tout, qu'il s'agisse de la pauvreté, de la discrimination, de la guerre, du réchauffement de la planète ou du 11-Septembre et du tsunami. Les gens ordinaires sont toujours innocents. Ce n'est jamais la faute des minorités. Les victimes sont, par définition, moralement pures. Avez-vous remarqué que, aujourd'hui, le diable ne semble jamais posséder une personne isolée ?
Nous n'avons plus de Faust. Selon le discours à la mode, le mal est un conglomérat. Les systèmes sont mauvais. Les gouvernements sont mauvais. Des institutions sans visage dirigent le monde pour leur propre profit sinistre. Satan n'apparaît plus dans les détails. Les hommes et les femmes pris individuellement ne peuvent pas être "mauvais" au sens ancien du Livre de Job, de Macbeth, de Iago, de Faust. Vous et moi, nous sommes toujours des gens très bien. Le diable, c'est toujours "l'establishment". On est, à mon avis, en plein kitsch éthique. (...)
Aujourd'hui, permettez-moi de revenir à Goethe. Le Faust de Goethe nous rappelle sans cesse que le diable est personnel, pas impersonnel. Que le diable met tout le monde à l'épreuve et que chacun de nous peut réussir ou échouer. Que le diable est tentateur et séduisant. Que l'agression peut s'implanter en chacun de nous.
Le bien et le mal chez chaque homme ne sont pas les attributs d'une religion. Il ne s'agit pas forcément de termes religieux. Nous avons le choix d'infliger ou non la douleur, de la regarder en face ou de détourner les yeux, de nous impliquer personnellement pour soulager la douleur, comme un médecin de campagne dévoué, ou de nous contenter d'organiser des manifestations de protestation et de signer des pétitions systématiques – nous sommes tous confrontés plusieurs fois par jour à cette palette de choix. Il peut bien sûr nous arriver de nous tromper, mais, quand nous nous trompons, nous savons tout de même ce que nous faisons. Nous connaissons la différence entre le bien et le mal, entre infliger la douleur et la soulager, entre Goethe et Goebbels. Entre Heinrich Heine et Heydrich. Entre Weimar et Buchenwald. Entre la responsabilité individuelle et le kitsch collectif.
Dans les années 1940, à Jérusalem, j'étais un jeune garçon nationaliste, voire chauvin. J'ai juré de ne jamais mettre le pied sur le sol allemand, de ne jamais acheter de produits allemands. La seule chose que je ne pouvais pas boycotter, c'était les livres allemands. Si on boycotte les livres, me suis-je dit, on devient un peu comme "eux". Je me suis d'abord cantonné à la lecture de la littérature allemande d'avant-guerre et des auteurs antinazis. Plus tard cependant, dans les années 1960, j'ai commencé à lire, en hébreu, les œuvres de la génération des écrivains et des poètes allemands d'après-guerre. En particulier, les œuvres des auteurs du Groupe 47 [groupe littéraire allemand créé, en septembre 1947, à Munich]. Je me suis imaginé à leur place. Je vais le dire plus nettement: ils m'ont convaincu de m'imaginer à leur place, dans les années sombres, juste avant et juste après. En les lisant puis en en découvrant d'autres, je n'ai pas pu continuer à détester simplement tout ce qui était allemand, passé, présent et futur.
Je crois qu'imaginer l'autre constitue un antidote puissant au fanatisme et à la haine. Je crois que les livres qui nous permettent d'imaginer l'autre peuvent nous aider à nous immuniser contre les stratagèmes du diable, le Méphistophélès du coeur. Ainsi, Günter Grass et Heinrich Böll, Ingeborg Bachmann et Uwe Johnson et surtout mon très cher ami Siegfried Lenz m'ont ouvert la porte de l'Allemagne.
Avec un certain nombre d'amis allemands très proches, ils m'ont permis de briser mes tabous, de m'ouvrir l'esprit et finalement le coeur. Ils m'ont réappris le pouvoir de guérison de la littérature.
Imaginer l'autre n'est pas seulement un outil esthétique. C'est aussi, à mon avis, une obligation morale essentielle. Et, finalement, imaginer l'autre est également un plaisir humain profond et très subtil.
Ce texte est extrait du discours du romancier lors de la remise du prix Goethe, à Francfort-sur-le-Main.
Traduit de l'anglais par Florence Lévy-Paoloni.
© Amoz Oz
Amos Oz est écrivain israélien.
Ce texte est extrait du discours du romancier lors de la remise du prix Goethe, à Francfort-sur-le-Main.
par Amos Oz
Article paru dans l'édition du 04.10.05
L e "tous unis", qui résonne un peu comme le "tous ensemble" du mouvement social de 1995, est encore une formule qui marche. La journée nationale d'action lancée, mardi 4 octobre, par les cinq confédérations syndicales représentatives - CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC -, avec le concours de la FSU, de l'UNSA et de l'Union syndicale Solidaires et avec l'appui de la gauche et de l'extrême gauche politique, a été un succès. A la mi-journée, le nombre de manifestants et le pourcentage de grévistes relevé dans les entreprises publiques et dans l'éducation nationale montraient que sur des thèmes revendicatifs porteurs, de la défense de l'emploi à celle pour le pouvoir d'achat en passant par la lutte contre la précarité, les syndicats avaient réussi leur pari. Cette première mobilisation syndicale de masse depuis le référendum du 29 mai et l'arrivée de Dominique de Villepin à Matignon devrait avoir une ampleur supérieure à celle du 10 mars.
En début d'après-midi, les décomptes établis faisaient état de centaines de milliers de manifestants - plus de 550 000 selon les organisateurs et 230 000 selon la police - dans les 150 manifestations en France. Outre le défilé parisien (150 000 personnes), c'est à Marseille, avec le conflit de la SNCM en toile de fond, que la démonstration de force a été la plus remarquée avec, selon les syndicats, 100 000 manifestants. Dans tous les défilés, on a observé une présence plus importante de salariés du secteur privé même si la dominante du secteur public demeure. Le 11 mars, L'Humanité avait recensé dans les "manifs" de la veille 1,5 million de personnes. Pour le 4 octobre, le chiffre devrait être du même ordre ou légèrement supérieur. Dans les entreprises publiques, les ordres de grandeur de grévistes sont comparables à il y a sept mois : 32,3% à la SNCF ; 23% à EDF ; de 25,2% à 37% à l'Education nationale ; 15% à 30% à La Poste ; 25% chez France Télécom. Dans de nombreuses villes de province, les transports en commun ont été fortement perturbés.
Sans être le "mardi noir" que certains médias annonçaient, quitte à en faire un argument pour réclamer une loi instaurant un service minimum dans les transports, la journée du 4 octobre a été suffisamment forte pour être visible. Le succès était attendu, tant le mécontentement, souligné avec éclat par la victoire du non au référendum du 29 mai sur la Constitution européenne où les"peurs sociales" ont aussi joué, était manifeste, nourri par une insécurité sociale rendue persistante par le niveau élevé du chômage, la stagnation du pouvoir d'achat et l'état calamiteux des comptes sociaux. Il y a, à l'évidence, de nombreux ingrédients d'une crise sociale qui se trouvent réunis. Pour autant, il ne faut pas surestimer l'ampleur de cette colère sociale d'un jour. Dans le secteur privé, mais aussi dans certaines entreprises publiques, manifester ne signifie pas nécessairement être gréviste. Dans un pays où, depuis 1980, mis à part quelques "accidents" comme 1995, la conflictualité dans les entreprises privées est, année après année, en chute libre, les salariés sont peu"gréviculteurs". Nombre d'entre eux - il est trop tôt pour connaître la proportion - utilisent leurs heures de crédit liées à leur mandat syndical ou leurs jours de "RTT" (réduction du temps de travail) pour rejoindre un cortège syndical. Quand les syndicats lancent un appel interprofessionnel, ils s'adressent à une population de 22 400 000 agents de l'Etat, salariés des entreprises publiques et privées. Si 1,5 million de personnes y répondent, cela ne fait jamais que 4,6% du salariat concerné. Un chiffre qui correspond, à peu de choses près, au taux de syndicalisation dans le secteur privé qui était, en 2003, de 5,2%.
Le syndicalisme ayant la réputation, largement fondée, d'être divisé et faible, il était crucial pour son image de réussir cette"épreuve du feu" du 4 octobre, alors qu'il partait avec l'avantage d'être soutenu, selon les sondages, par plus de 70% des Français. Ils ont réussi à afficher leur unité, même si derrière les banderoles communes les divergences sont légion. Et ils ont joué les gros bras, alors que la faiblesse de leurs troupes, ou de leurs"divisions" en langage militaire, les a placés, ces dernières années, dans l'incapacité de contrecarrer la politique économique et sociale du gouvernement. Ainsi n'avaient-ils pas empêché, en 2003, la réforme des retraites de Jean-Pierre Raffarin. La France a toujours été un pays sous-syndicalisé, notamment par rapport aux pays d'Europe du Nord où les syndicats rendent des services à leurs adhérents. Elle est devenue, à la suite d'une crise du syndicalisme qui a fait perdre en trente ans aux cinq confédérations les deux tiers de leurs membres, la lanterne rouge des pays industrialisés de l'OCDE avec, en 2003, un taux de syndicalisation de 8,2%.
Au soir du 4 octobre, la balle est dans le camp du gouvernement. L'opposition ayant soutenu les manifestations, le premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, qui a manifesté dans sa ville de Tulle, a fait de cette mobilisation une sorte de motion de censure, en lançant le jour de la rentrée parlementaire: "Le gouvernement doit entendre la colère, l'impatience, le mécontentement d'une large partie de nos concitoyens. Il doit donc revenir sur ses décisions contestables en matière de remise en cause du droit du travail, de la protection sociale ou de l'égalité devant l'impôt". Au même moment à l'Assemblée nationale, le premier ministre répliquait:"Tout le gouvernement écoute le message que nous adressent les Français. Nous voulons répondre à leurs inquiétudes et à leurs aspirations. Ils veulent des résultats et nous nous battons pour cela". Dominique de Villepin a déjà souhaité une relance des négociations dans les branches professionnelles sur les minima salariaux, trop souvent encore inférieurs au smic, et il peut faire un signe aux syndicats en rouvrant les négociations salariales dans les fonctions publiques.
Sur la revendication phare des syndicats, l'abrogation ou le retrait du contrat nouvelles embauches (CNE), ce contrat à durée indéterminée hors normes qui permet à l'employeur pendant deux ans de congédier son bénéficiaire sans avoir à se justifier, Dominique de Villepin restera inflexible. Il pourra cependant continuer à jouer de sa singularité et à afficher sa différence avec Nicolas Sarkozy. A l'ultralibéralisme de son ministre de l'intérieur, qui agite de nouveau le chiffon rouge d'une loi sur le service minimum, le premier ministre peut opposer son"social-villepinisme", fait de mesure et de pragmatisme. Le premier ministre peut aussi corriger sa méthode, en jouant effectivement le jeu de la concertation avec les syndicats et en respectant tout simplement l'engagement solennel contenu dans la loi du 4 mai 2004 selon lequel "toute réforme substantielle modifiant l'équilibre des relations sociales doit être précédée d'une concertation effective avec les partenaires sociaux et, le cas échéant, d'une négociation entre eux".
Les syndicats ont besoin de "grain à moudre". Le succès relatif de leur journée du 4 octobre n'aura de sens que s'il est suivi de résultats, préoccupation qu'a toujours mise en avant François Chérèque, le secrétaire général de la CFDT. "La CGT, a souligné son secrétaire général, Bernard Thibault, est déjà prête à envisager des suites si les réponses appropriées ne viennent pas". Mais le temps où les syndicats prétendaient qu'il suffisait d'appuyer sur un bouton pour déclencher un grand mouvement social est révolu. Même en 1995, l'histoire ne s'était pas déroulée ainsi. Si à l'arrivée elle ne change pas la donne, la multiplication des journées nationales d'action, solution qui pourrait tenter un Bernard Thibault avant son congrès de Lille en avril 2006, où il jouera son avenir syndical, risque de s'avérer pour le syndicalisme contre-productive. Surtout à l'entrée dans une période pré-électorale…
Michel Noblecourt
LE MONDE | 04.10.05 | 17h50
L' Allemagne pourrait faire face à une crise institutionnelle si les deux principaux partis présents au Bundestag, la CDU et le SPD ne parviennent pas à s'entendre sur la formation d'une grande coalition. Mercredi 5 octobre, une nouvelle rencontre réunira conservateurs et sociaux-démocrates pour un troisième tour de "discussions exploratoires" préalables aux vraies négociations sur la formation d'un gouvernement "rouge-noir".
Pour la presse allemande, Schröder est déjà parti Les journaux allemands estimaient, mardi, que l'avenir de Gerhard Schröder était déjà scellé. "Schröder annonce son retrait", titrait le quotidien à grand tirage Bild. Pour le Financial Time Deutschland, le SPD préparait déjà l'après-Schröder et "un changement de génération" avec notamment la nomination prochaine d'Andrea Nahles, âgée de 35 ans et porte-parole de l'aile gauche du parti, au poste de secrétaire générale. |
Les discussions butent toujours sur la question du titulaire de la chancellerie. Le vice-président du groupe parlementaire SPD, Ludwig Stiegler, a averti que "si la CDU dit que cette question doit d'abord être résolue, il n'y aura pas de négociation. Nous finirons notre tasse de thé et nous rentrerons à la maison". Même détermination du côté de la CDU: "Il n'y aura pas de négociations sur le contenu, si le SPD n'accepte pas que notre candidate devienne chancelière (...). Le SPD doit reconnaître la réalité après les élections de Dresde" - élections qui ont augmenté l'avance de la CDU – a affirmé de son côté mardi 4 octobre le secrétaire général de la CDU, Volker Kauder, à la chaîne publique de télévision ARD.
Les dirigeants de la CDU n'excluent pas une rupture des pourparlers si le SPD campe sur ses positions. Lors d'une conférence téléphonique lundi soir, ils ont décidé de faire de la question du chancelier le point central de la réunion de mercredi. "Je pense que le SPD finira aussi par comprendre que l'on ne débute pas de négociation de grande ampleur sans avoir d'abord réglé la question centrale", a assuré le chef de l'Union chrétienne-sociale (CSU), Edmund Stoiber.
M. Schröder avait laissé entendre, lundi, sur la radio allemande RTL, qu'il pourrait ne pas être le candidat du SPD à ce poste. Mais la direction du parti a renouvelé toute sa confiance au chancellier, lundi soir, et a affirmé qu'elle n'avancerait pas d'alternative.
En cas de blocage des négociations, les Verts ont déjà signalé qu'ils n'étaient pas prêts à être l'alternative pour la CDU et leur allié traditionnel, les libéraux du FDP. "Les Verts ne sont pas à la disposition des perdants des élections dans leur partie de poker", a déclaré mardi la co-présidente du parti écologiste, Claudia Roth. "Il n'y aura aucune tolérance pour une coalition" CDU-CSU/FDP, a-t-elle ajouté, estimant que les différences culturelles et politiques étaient trop importantes.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 04.10.05 | 20h42
P remier pas vers la sortie ou simple manoeuvre tactique ? Le chancelier allemand sortant, Gerhard Schröder, a en tout cas laissé entendre, lundi 3 octobre, pour la première fois depuis les législatives du 18 septembre, qu'il était prêt à renoncer à se maintenir à son poste, auquel il s'est jusqu'à présent agrippé en dépit de la courte, mais réelle, victoire électorale de l'opposition conservatrice. "Je ne veux pas être un obstacle à la poursuite du processus de réformes que j'ai engagé et à la formation d'un gouvernement stable en Allemagne" , a-t-il déclaré à la chaîne de télévision RTL. Mais, a-t-il ajouté, son avenir à la chancellerie n'est pas de son ressort: "Il s'agit de la prétention politique de mon parti à diriger un gouvernement, une question sur laquelle seule la direction de mon parti peut prendre une décision. J'accepterai toute décision."
Quelques heures plus tard, au terme d'une réunion du présidium du Parti social-démocrate (SPD), son président, Franz Müntefering, douchait les espoirs de la droite en affirmant que M. Schröder "devait rester chancelier" . Tel est "l'objectif" de son parti au moment d'aborder, mercredi, une troisième séance de pourparlers exploratoires avec les Unions chrétiennes (CDU-CSU) en vue de tenter de former un gouvernement de coalition. Sous-entendu, cette position pourrait ne pas rester immuable. Et M. Müntefering, un proche de M. Schröder à qui il avait succédé à la présidence du parti en mars 2004, d'ajouter: "Avant l'ouverture de véritables négociations sur le futur gouvernement, il n'y aura pas de décision quant aux personnes."
En se défaussant sur son parti, le chancelier sortant, au pouvoir depuis l'automne 1998, a levé un peu de la pression qui pesait sur lui, tout en se ménageant une porte de sortie honorable. Son éventuel départ fait désormais partie des points négociables dans le grand marchandage auquel vont se livrer le SPD et la droite conservatrice emmenée par Angela Merkel.
Les élections anticipées du 18 septembre, convoquées un an plus tôt que prévu à la demande de M. Schröder, n'avaient pas réussi à départager les deux camps, aucun d'entre eux n'étant en mesure de former une coalition majoritaire avec leurs partenaires favoris. CDU-CSU et SPD ont donc décidé de tenter de former un gouvernement d'union, phénomène inhabituel au niveau fédéral en Allemagne mais déjà expérimenté à la fin des années 1960. Forte de son avance de 4 sièges sur le SPD au Bundestag (226 contre 222), la CDU-CSU revendique le droit de diriger le futur gouvernement.
Jusqu'à présent, M. Schröder et son parti s'y sont refusés. Ces derniers temps, et en particulier depuis le scrutin partiel tenu dimanche dans une circonscription de Dresde (Est), qui a vu la droite remporter un mandat, la pression s'est accrue sur les épaules de M. Schröder pour qu'il cède sa place. "C'est un bon résultat pour la CDU et je compte sur les éléments raisonnables du SPD pour faire en sorte maintenant que les choses évoluent de façon appropriée" , a déclaré lundi Mme Merkel.
Son camp a mis le départ de M. Schröder de la chancellerie comme condition à l'ouverture de négociations en bonne et due forme sur la formation d'un gouvernement de coalition. Les sociaux-démocrates ne l'entendent toujours pas de cette oreille. Ils souhaitent aborder les négociations sur une future coalition sur un pied d'égalité avec la CDU. Selon M. Müntefering, le SPD est "le parti le plus important au Bundestag" , la CDU et la CSU constituant, à ses yeux, deux partis différents. La partie de bras de fer engagée entre les deux camps n'est pas prête de s'achever.
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 05.10.05
L' envolée des prix des carburants et la morosité de la conjoncture n'ont pour le moment pas d'impact sensible sur les ventes de voitures neuves. En septembre, les immatriculations ont enregistré une hausse de 7,6% par rapport au même mois de 2004, selon le Comité des constructeurs français d'automobile (CCFA).
Sur les neuf premiers mois de l'année, la croissance du marché français s'établit à 4,7% par rapport à la même période de 2004. Le faible niveau des taux d'intérêt, alors que plus d'une voiture sur deux est achetée à crédit, peut expliquer la bonne tenue des ventes.
La hausse profite toutefois de façon inégale aux marques françaises, qui globalement perdent des parts de marchés, en passant de 61% à 58,8%. Citroën est la seule marque à tirer son épingle du jeu. Ses ventes sont en hausse de 20,3% en septembre et de 8,9% depuis le début de l'année. Citroën recueille ainsi les fruits du renouvellement récent de sa gamme. La C4, avec 49 200 unités vendues sur les neuf premiers mois de l'année, la C2, en progression de 8,5% et la C3, en hausse de 29% tirent les résultats de la marque aux chevrons. Quant à la C1, la petite citadine fabriquée en collaboration avec Toyota et lancée en juin, son démarrage est lent: 646 immatriculations. Sa petite cousine de chez Peugeot, la 107, fait nettement mieux, avec 1 395 immatriculations.
Globalement, les ventes de Peugeot se redressent (+ 5,4%) mais ne parviennent pas à faire mieux que le marché. Si les résultats de la 206 (– 26,8%) ne surprennent pas – son successeur, la 207, doit être lancé début 2006 – ceux de la 307 sont plus étonnants. Le modèle voit ses ventes baisser de 4,3% alors qu'il vient d'être redessiné. En revanche celles de la 607, grâce à de nouvelles motorisations, progressent de 21,6%.
La situation est beaucoup plus inquiétante pour Renault. Malgré le lancement de Clio III en septembre, la marque au losange enregistre une baisse de ses ventes de 4,8%. Cette contre-performance s'explique largement par le recul de la Megane. La version berline voit ses ventes chuter de 10,9% en septembre et de 21,5% sur les neuf premiers mois de l'année. Le Scénic baisse de 12,9%, mais reste stable depuis le début de l'année.
De son côté, Modus, le petit monospace lancé il y a un an, connaît déjà une chute de 37,5%. Enfin la Vel Satis a connu un mois de septembre calamiteux avec seulement 120 exemplaires écoulés, soit un recul de plus de 65%. "Contrairement à certains concurrents, nous n'avons pas participé à la guerre des prix, le quatrième trimestre devrait être nettement meilleur avec la montée en puissance de Clio III", explique un porte-parole de Renault.
Seule satisfaction pour la marque au losange, l'engouement pour la Dacia Logan. 860 unités ont été vendues en septembre, soit plus qu'un véhicule d'une marque comme Honda, Mazda ou Mitsubishi. La difficulté pour Renault est actuellement de coller à la demande. Sur les 10 500 commandes passées depuis son lancement en juin, seul un tiers ont été livrées.
Chez les marques étrangères, le bilan est également contrasté. Toyota poursuit son ascension: ses immatriculations ont bondi de 33,3% en septembre sur un an, alors que la nouvelle Yaris vient tout juste d'être lancée. Le constructeur japonais a vendu en septembre près de 300 Prius, portant ainsi le total des ventes du modèle hybride (fonctionnant alternativement à l'essence et à l'électricité) à 1 911 depuis le début de l'année.
Ford et Volkswagen ont connu également un bon mois de septembre avec des hausses respectives de 24,9% et de 23%. Les perdants de ce mois de septembre sont Fiat, qui avec ses marques Lancia et Alfa Romeo chute de 14,3% et Opel baisse de 9,6%.
Stéphane Lauer
Article paru dans l'édition du 05.10.05
L e marché automobile américain serait-il en train de connaître un tournant majeur ? L'envolée des prix du carburant après le passage du cyclone Katrina a provoqué en septembre une désaffection sans précédent pour les 4 × 4 et les gros véhicules de loisirs. Ford a vu ses ventes de véhicules tout-terrain chuter de 51% le mois dernier, tandis que celles de General Motors reculaient de 29%.
Les constructeurs américains, qui se sont spécialisés ces dernières années sur ce segment de véhicules au détriment des berlines classiques, subissent de plein fouet la désaffection des clients. Avec un gallon d'essence (3,78 litres) qui dépasse désormais les 3 dollars, la prise de conscience que l'énergie a un prix fait son chemin. Le gouvernement américain recommande désormais aux automobilistes d'adopter une conduite plus souple et plus économe.
En se focalisant sur les modèles qui consomment beaucoup d'énergie, Ford et GM se trouvent pris à leur propre piège. Pendant des années, ils ont laissé le champ libre aux constructeurs japonais, qui désormais dominent largement le segment des berlines.
La défection pour les 4 × 4 est d'autant plus sensible que le marché a été soutenu artificiellement par les constructeurs américains qui ont mené une politique de rabais agressifs. Un palier supplémentaire avait été franchi en juin, lorsque GM avait appliqué à ses clients les mêmes tarifs promotionnels qu'il propose à ses salariés. Ford et Chrysler avaient été obligé d'emboîter le pas au leader du marché. Les ventes des trois constructeurs s'étaient envolées cet été mais cette stratégie s'est révélée doublement perverse. D'abord elle est très coûteuse en terme de marge, et par ailleurs elle a fini par assécher la demande des consommateurs américains.
La question est maintenant de savoir combien de temps les constructeurs américains vont subir le contrecoup des rabais de l'été. Du fait de gammes insuffisament attractives par rapport à celles des japonais Toyota, Nissan et Honda, General Motors et Ford sont pris dans un cercle vicieux. En effet, pour maintenir leurs parts de marchés, les constructeurs américains sont obligés de brader leurs modèles. Or une telle politique provoque, lorsqu'elle s'arrête, l'effondrement de leurs ventes, ce qui entraîne ainsi une réaction en chaîne sur leurs résultats, sur leur capacité à s'endetter et à faire face à leurs échéances financières.
Dans la foulée des immatriculations de septembre, l'agence de notation financière Standard & Poor's a ainsi prévenu, lundi 3 octobre, qu'elle pourrait abaisser prochainement les principales notes de dette des constructeurs automobiles. L'endettement colossal de General Motors et de Ford, qui s'élève respectivement à 284 milliards de dollars (238 milliiards d'euros) et à 158 milliards, avait conduit les mêmes agences de notation financière à les reléguer au rang d'investissement à risques (junk bonds ) au printemps. Plus que jamais, le spectre du chapitre 11, la loi américaine sur les faillites, plane sur GM et sur Ford.
Stéphane Lauer
Article paru dans l'édition du 05.10.05
L' administrateur délégué de Fiat, Sergio Marchionne, a annoncé, mardi 4 octobre, que le partenariat signé en septembre avec l'indien Tata sera l'un des plus importants pour le groupe italien et pourrait être étendu à d'autres secteurs. "A moyen ou long terme, Tata sera un de nos partenaires les plus importants, y compris dans les véhicules industriels et commerciaux et dans les machines agricoles. En raison de l'accès à l'Inde mais pas seulement", a expliqué l'administrateur délégué de Fiat au quotidien italien, le Corriere della Sera.
Le constructeur automobile a signé le 22 septembre une lettre d'intention pour nouer une coopération avec Tata, sans préciser la portée de l'accord. Fiat s'était contenté d'affirmer que les deux groupes allaient évaluer les domaines sur lesquels ils pourraient travailler ensemble dans le développement, la production, l'achat et la distribution automobile.
"Nous pourrons ensemble avoir des ambitions mondiales, des alliances plus larges: cela ne me déplairait pas, par exemple, de faire un moteur commun pour le marché asiatique et de le faire en Inde", affirme aujourd'hui M. Marchione. En outre, le constructeur indien pourrait aider Fiat dans le domaine des engins agricoles et des véhicules utilitaire sur le marché chinois. Tata est leader du marché automobile indien avec 59% de parts d'un marché qui a représenté en 2004 un peu plus d'un million de véhicules.
Fiat multiplie depuis plusieurs mois les annonces de coopérations ponctuelles avec d'autres constructeurs. Le groupe italien s'est ainsi associé avec PSA-Peugeot Citroën pour fabriquer un petit utilitaire en Turquie et, début septembre, Fiat avait annoncé le développement en commun avec Ford d'une petite citadine.
Le constructeur italien en difficulté semble commencer à sortir la tête de l'eau: les trois marques du groupe, Fiat, Lancia, Alfa Romeo, ont gagné du terrain, avec 28,1% du marché italien en septembre, contre 27,7% en septembre 2004. La seule marque Fiat a enregistré une progression de 6,75% de ses immatriculations en septembre.
Stéphane Lauer
Article paru dans l'édition du 05.10.05
C' est une journée paradoxale pour la presse. L'une de ces journées que les historiens aiment, avec le recul, choisir pour lui donner toute sa valeur et son relief. Résumons: à l'occasion de la journée nationale d'action et de mobilisation organisée par les cinq confédérations syndicales représentatives, la région parisienne est quasiment privée de ses quotidiens habituels. Le journal, ce vecteur privilégié de l'information, de l'analyse et du commentaire, est absent des kiosques au moment où le corps social est invité à manifester et donc à s'impliquer encore davantage dans le combat politique.
Ce premier paradoxe est malheureusement devenu classique depuis trop longtemps. Mais il est pimenté par un deuxième paradoxe: cette fois, le mot d'ordre de grève qui affecte la presse quotidienne est à géométrie variable. Les lecteurs de La Croix ou du Parisien pourront trouver et lire leur journal; les autres en seront privés. Les lecteurs de la presse régionale trouveront leur quotidien habituel, pas les habitants de la capitale.
Ce n'est encore rien. Le troisième paradoxe de cette journée bien particulière pour la presse contribue encore à brouiller les repères. Les principaux titres de la presse nationale (Le Figaro, Libération et Le Monde) sont en effet interdits de fait par cette journée d'action et de mobilisation alors que les titres de la presse quotidienne gratuite sont pour leur part massivement distribués. C'est là une manière forte pour consacrer la victoire d'une presse qui a montré son savoir-faire, son génie du marketing et sa science de l'information en pilules. La situation est la suivante: Métro et 20 minutes mettent tous les jours à disposition de leur public l'équivalent de 800 000 exemplaires dans la région parisienne. C'est exactement la diffusion cumulée du Figaro et du Monde en France et à l'étranger.
Ces chiffres suffisent à cerner l'ampleur des difficultés de la presse quotidienne payante et les obstacles auxquels elle est sans cesse confrontée, comme cette journée d'action qui se résume pour elle à une journée d'inaction et de pertes financières. Encore ne s'agit-il là que d'une vue très partielle de la situation. En réalité, la presse quotidienne nationale est le seul média touché par le mouvement social. Tous ses concurrents sont heureusement libres d'exercer leur mission, à commencer par les radios et les télévisions.
Le quatrième paradoxe est plus riche de perspective. A chaque fois qu'une grève frappe la presse, les sites Internet des journaux se révèlent comme de puissants alliés. Ils offrent l'hospitalité aux titres incapables de paraître. Juste retour des choses puisque ces sites ont bâti leurs fondations avec la matière intellectuelle prêtée par leurs aînés.
La presse papier se prend de plus en plus à rêver aux avantages de la presse électronique. Cette terra incognita reste à découvrir. Personne n'en a fait le tour. Elle apparaît comme une promesse – – l'arrêt des rotatives n'y a pas de sens. C'est une terre de liberté.
Article paru dans l'édition du 05.10.05
Christophe Breton, gréviste ♦ 04.10.05 | 18h55 ♦ Ciel ! Le Monde ne parait pas, la perte! Confiance: la voix officielle se fera entendre ce soir, et la presse, poursuivra dans les jours à venir son travail de gommage des réalités. Cécité lénifiante des entomologistes qui nous observent. Si seulement on était sâges! Le droit de grève existe encore, dans un pays moderne ? 91 signes restants pour dire comment avoir le bon chiffre: compter, le jour même, dans la manif. J'en sais plus que les journalistes, ne leur dites pas, ils se vexeraient !
FDMLDP ♦ 04.10.05 | 18h33 ♦ Il faut rappeler que la censure de fait de la presse par la grève est, au moins en partie, l'héritage de la tradition cégétiste du monopole d'embauche du Syndicat du Livre aux NMPP, qui a même, à ses meilleures heure, pratiqué une certaine...sélection. Partout où les communistes ont eu du pouvoir, ils ont muselé la presse. Alors vive Internet, vive toutes les formes de contre-pouvoir au baillon syndical, à tous les baillons, à toutes les prises d'otages.
LibertéEquitéSolidarité ♦ 04.10.05 | 18h29 ♦ Le Monde ne critique pas la grève elle-même mais trouve étrange que, dans ces circonstances, la bonne presse ne parait pas alors que la "moins bonne" n'éprouve aucune difficulté à être distribuée ! On peut ainsi comprendre qu'un journal qui ne roule pas sur l'or en ait "gros sur la patate". En faisant paraître sur le net une édition qui "coûte" sans la moindre recette, le journal fait preuve d'une certaine élégance déontologique et certains de ses abonnés d'une grande ingratitude !
wellington ♦ 04.10.05 | 18h28 ♦ La rengaine qu'on entend en ce moment dans la rue et dans desréactions de lecteurs est consternante: le libéralosme=régression sociale? Mais où est le progrès quand le "modèle social français" provoque un chômage de masse qui touche jusqu'à 25% des jeunes, quand les facs éjectent sans diplômes 40% des jeunes qui y rentrent, quand la France régresse chaque année dans le classement des dépôts de brevets. TOUS les pays qui se développent le font sur une base libérale. C'est ainsi.
Mathieu P. ♦ 04.10.05 | 18h19 ♦ Votre édition électronique ? Elle a bien baissé dernièrement. Sous couvert d'offrit d'avantage d'articles similaire à celui envoyé par mail, vous n'envoyez plus qu'un extrait qui contraint à revenir sur votre site une fois encore pour RElire l'article dans son entier. L'interêt de s'envoyer un mail de l'article pour l'abonné que je suis n'en est plus un, sauf pour vous qui ne manquerez pas de facturer la consultation ultérieur. Etrange conception du service aux abonnés !
MARCEL G. ♦ 04.10.05 | 17h57 ♦ Le problème n'est pas la grève, mais la manière dont on la fait.L'imagation des dirigeants syndicaux n'est pas, c'est le moins que l'on puisse dire, au pouvoir sur ce point.
Frédéric C. ♦ 04.10.05 | 17h53 ♦ A l'heure où 10% (officiellement) de la population active est au chômage, certains se permettent de faire grève... S'ils sont si mécontents de leurs salaire, conditions de travail et autres, pourquoi ne cherchent-ils pas un autre travail au lieu de prendre le français moyen en otage? Et ne gagnent-ils pas assez pour se passer d'une journée de salaire? On me parlera de solidarité, mais qui est solidaire du lecteur, du travailleur sans voiture et autres victimes qui n'ont rien demandé à personne?
Eugène-Jean D. ♦ 04.10.05 | 17h44 ♦ Nul ne sait plus compter. La presse n'a jamais été l'évangile. Est-ce que les journalistes du Monde n'étaient pas eux-mêmes en grève? C'est un beau cas de discrimination, positive ou négative?
PIERRE B. ♦ 04.10.05 | 17h40 ♦ Vous regrettez, à juste titre, les conséquences de la grève sur la parution de l'édition papier, et vous vous réjouissez que grâce à Internet le Monde puisse néanmoins publier dès maintenant ses articles. Cependant, la mention « En raison du mot d'ordre de grève, "Le Monde" daté mercredi 5 octobre 2005 n’est pas paru et n’est donc pas disponible au format électronique » sur l'édition PDF ne démontre-t-elle pas que vous restez des victimes volontaires et artificielles de cet asservissement ?
Antoine D. ♦ 04.10.05 | 17h30 ♦ La grève systématique du secteur public est dérangeante. Le discours de la CGT qui tente de faire accréditer l'idée que le secteur public se mobilise pour défendre aussi les intérêts des salariés du secteur privé est une belle approche réthorique mais me laisse extrêmement sceptique. Les problèmes de la presse sont l'illustration de l'effet contre-productif de ces grèves à répétition sur l'outil de travail et la production. Est-ce une attitude responsable de la part des syndicats?
Stéphane D. ♦ 04.10.05 | 17h01 ♦ ...Oui, mais votre edition electronique serait justement bien inspirée d'essayer d'informer plutot que de relayer la propagande des différents bords...: "150 000 personnes selon la CGT", ce qui veut sans doute dire qu'on aura un "7 000 selon la préfecture" dans 2h... Est ce qu'un jour la presse française (tous bords confondus) sera capable de nous donner "<le bon chiffre> après un comptage seérieux et méthodique" ? Si les journalistes ne font pas leur travail d'INFORMATION, la presse périclite.
cohelet ♦ 04.10.05 | 16h57 ♦ Cinquième paradoxe: les grévistes et leurs sympathisants manisfestent contre les méfaits du libéralisme et des restructurations dont l'internet et les NTIC. Le Monde paraît comme si de rien n'était grâce à Internet...et à ses journalistes non grévistes. Demain: retour à pas de grève et Le Monde papier.
R.Q.K ♦ 04.10.05 | 16h10 ♦ Réagissez à cet article ! Je réagis !! La grève, c'est quoi ? C'est avant tout une prise d'otages, une atteinte inadmissible à la liberté de travailler où et quand bon vous semble, un gros tas d'argent jeté par les fenêtres par une bande d'irresponsables qui mélangent droit syndical, droit de grève, libertés individuelles et droit au travail. C'est la raison du plus gueulard à défaut d'être la raison du plus intelligent. C'est l'organisation programmée au droit de casser tout sur son passage.
sami63 ♦ 04.10.05 | 16h08 ♦ C'est vrai que cette grêve ne permet pas au Monde d'être en kiosque. Comme il est vrai que certains enfants n'on pu aller à l'école. Que des travailleurs ont préféré rester chez eux que de galerer dans les transports en commun. C'est vrai qu'une grève peut perturber la production de bien et de service...autoriser les grèves à condition qu'elles ne générent pas de perturbation; pourquoi pas! mais cela revient à interdire la grève? A demain, pour un éditorial sur les bienfaits du dialogue social
Alda B. ♦ 04.10.05 | 16h01 ♦ Difficle de concilier les droits de grève et au travail, à l'information.... Mais à quoi va donc servir cette journee de manifestation, puisque de toute façon ce gouvernement ignore les souhaits des français. Mr de Villepin écoute mais n'entend pas.
Francis M. ♦ 04.10.05 | 15h56 ♦ Bah ! L'absence du "Monde" pour un jour, c'est une excellente occasion de lire "Libération", qui a trouvé le chemin des rotatives ce matin et dont une édition PDF complète est disponible sur le site web. Au moins, la ligne éditoriale de "Libé" est claire, tandis que "Le Monde" tatonne et cherche sa voie (sa voix ?), quelque part entre Edouard Balladur et Guy Mollet.
ANTOINE S. ♦ 04.10.05 | 15h43 ♦ Si je comprends bien votre derniere phrase, l'execice du droit de grève est une entrve à la liberte de la presse.
Xavion ♦ 04.10.05 | 15h25 ♦ Je suis d'accord avec cet édito, je ne vois pas pourquoi la distribution des journaux devrait être perturbée, ni d'un point de vue économique (un journal est un produit de consommation), ni d'un point de vue "gréviste" (cela n'apporte rien au sens politique de cette grève).
Philippe B. ♦ 04.10.05 | 14h52 ♦ La presse électronique est en effet une terre de liberté, mais pour combien de temps encore? Je vous trouve bien optimiste: avant longtemps, les grévistes bloqueront non seulement vos rotatives, mais aussi vos sites internet! Ce jour-là, la liberté de la presse en aura pris un sérieux coup. Les journaux français seraient bien inspirés d'installer des sites de secours à l'étranger, au cas où...
LibertéEquitéSolidarité ♦ 04.10.05 | 14h29 ♦ Mélenchon, Buffet et Besancenot ont une solution simple. L'information du public doit être considérée comme un service public. Il ne reste plus qu'à nationaliser les organes de presse et exiger de l'état qu'il leur donne les moyens - qui ne seront jamais suffisants - en homme et en ressources pour accomplir cette mission de service public. Tout le monde sait que le néo, l'ultra et même le libéralisme imposent des logiques peu propices à une information vraie et non-orientée ! CQFD !
Europekipete ♦ 04.10.05 | 14h22 ♦ La presse electronique est une terre de liberte pour ceux qui peuvent la consulter, or en France plus qu'ailleurs l'acces a internet est encore un luxe inaccessible et absent de nombreux foyers. Une categorie de francais importante devient donc justement la cible d' une information ecrite tronquee qui les tient eloignes de la liberte de verite. Une censure intello- sociale orchestree par la dictature syndicale, vestige sovietique autoritaire unique a la France
treve ♦ 04.10.05 | 14h21 ♦ L'éditorial du monde est rempli de bon sens mais pourquoi n'y ai je pas lu l'expression " monopole NMPP" (dominée par la CGT). Il faut oser aller jusqu'au bout et dénoncer des grèves qui ont moins pour but de défendre les plus faibles d'entre nous que de protéger les privilèges de quelques uns Sous couvert de la défense du service public c'est du maintien d'avantages exhorbitant du droit commun qu'il s'agit: gageons que l'internet signifiera la fin de ce monopole pour le bien de tous
Beberno1 ♦ 04.10.05 | 13h53 ♦ Un édito emprunt d'une amertune bien compréhensible. Mais c'est la nature même d'une grève que de perturber (voire d'empêcher) le fonctionnement normal d'une entreprise et ce, malgré les bonnes intentions de leurs organisateurs. Sinon quel intérêt de manifester les jours ouvrés ? Heureusement, grâce à Internet, l'information reste disponible; même pendant les jours de grève. Grâce à Internet, on ne pourra pas reprocher aux grévistes de prendre le droit à l'information en otage.
aléa ♦ 04.10.05 | 13h14 ♦ "Le journal, ce vecteur privilégié de l'information, de l'analyse et du commentaire, est absent des kiosques" En définitive grâce à internet, l'édito est là et le choix d'un commentaire a bien été fait: celui de stigmatiser les grévistes qui font perdre de l'argent au journal et de vanter les machines qui ignorent les luttes sociales. Est-ce là le nouveau regard du "Monde" ?
Stéphane K. ♦ 04.10.05 | 13h12 ♦ Il sert à quoi cette éditorial ? Il ne faut donc pas faire grêve pour ne pas perturber l'édition du Monde, c'est ça ?! Pour ne pas perturber les transports en commun et les "bons" travailleurs ?! On voit pourtant où ça mène la grêve "soft", les gens crèvent en silence, c'est mieux, assurément, pour les "bons" travailleurs et le Monde ! J'espérais (folie ?) un Monde en pointe et pas en frein à ce "mouvement social". Salut, je me désabonne !
Dominique F. ♦ 04.10.05 | 13h04 ♦ L'exercice du droit de grève dans notre pays est la chose la plus anti-démocratique qui soit. Mais c'est par contre un élément essentiel de notre folklore national sans lequel, aux yeux du monde, la France ne serait qu'un pays Européen comme une autre.
L e déblocage politique est suspendu à une réunion, mercredi à 14 heures, à Berlin, entre le SPD et la CDU-CSU qui devrait durer trois heures. Elle devrait rassembler treize responsables politiques, dont Angela Merkel et le président de la CSU (aile bavaroise de la CDU), Edmund Stoiber, du côté conservateur, ainsi que Gerhard Schröder et Franz Müntefering pour le SPD.
Il s'agit du troisième tour de "consultations exploratoires" entre conservateurs et sociaux-démocrates. Ce processus se déroule dans un climat toujours conflictuel depuis que Gerhard Schröder ne laisse plus entendre qu'il pourrait renoncer à diriger un gouvernement de coalition avec les conservateurs. Il leur avait fait une fausse joie lundi en doutant de la pertinence de son maintien dans la course, créant aussitôt une émotion au sein de son parti, dont le président, Franz Müntefering, a insisté sur la candidature de l'actuel chancelier.
A bout de patience, les Unions chrétiennes (CDU-CSU), emmenées par Angela Merkel, n'excluent pas de suspendre ou même d'abandonner ces discussions préalables si les sociaux-démocrates persistent à revendiquer pour le chancelier sortant, Gerhard Schröder, la tête du prochain gouvernement. "Il n'y aura pas de négociations sur le contenu si le SPD n'accepte pas que notre candidate devienne chancelière", a réaffirmé mardi le secrétaire général de la CDU, Volker Kauder, à la chaîne publique de télévision ARD.
Les conservateurs, qui ont conforté leur avance au Bundestag (Chambre basse du Parlement) à l'issue de la législative partielle dimanche à Dresde (Est), avec 226 sièges contre 222 pour le SPD, exigent le retrait de la candidature de Gerhard Schröder à la chancellerie avant d'engager des négociations formelles en vue d'une éventuelle "grande coalition".
Le président du SPD leur a répondu qu'il souhaitait "appliquer autant que possible [le programme du SPD] dans une action gouvernementale avec Gerhard Schröder à sa tête". Outre le différend sur la chancellerie, les questions du marché du travail, du système de sécurité sociale, la situation financière difficile de l'Etat fédéral et des Etats régionaux, ainsi que le fédéralisme seront au programme de la réunion de mercredi.
La direction de la CDU veut se réunir jeudi pour faire le point. En cas de décision d'interrompre les "consultations exploratoires", la possibilité de nouvelles élections pourrait ressurgir.
LEMONDE.FR | 05.10.05 | 08h15
L es quotidiens nationaux étaient absents des kiosques, mardi 4 octobre, en raison de la journée d'action nationale lancée par les syndicats. Seuls La Croix et Aujourd'hui en France (groupe Amaury) ont pu être imprimés en région parisienne et distribués sur le grand nord de la France (du Nord-Pas-de-Calais à la région Centre, en passant par l'Ile-de-France). La Croix (groupe Bayard), imprimé par le groupe Amaury, a pu être distribué, comme Aujourd'hui en France , grâce à un plan de secours mis en place par les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP).
Les autres quotidiens nationaux n'ont pas été imprimés. Quelques milliers d'exemplaires du Figaro ont pu sortir des rotatives, mais ils étaient "réservés" aux personnes invitées à la soirée de lancement de la nouvelle formule du journal qui a eu lieu lundi soir au musée d'Orsay, à Paris. Un certain nombre d'abonnés ont été servis par porteur. Les titres hippiques et Le Monde daté de mardi ont pu être distribués normalement en province. Le Monde daté de mercredi 5 octobre, en revanche, ne sera pas distribué.
Ce mouvement dans la presse est la conséquence d'un mot d'ordre de grève de vingt-quatre heures lancé vendredi 30 septembre pour cette journée d'action du 4 octobre par le Syndicat général du livre et de la communication écrite (SGLCE), une branche du Syndicat du livre CGT très implantée dans la distribution et le pré-presse (préparation de l'impression).
La plupart des quotidiens étaient en revanche présents sur leur site Internet, avec des versions allégées. De même, certains quotidiens, à l'instar des Echos ont donné libre accès à leur site Internet ce mardi.
La presse quotidienne régionale, quant à elle, a été imprimée et distribuée normalement, notamment Le Parisien , qui était l'un des rares quotidiens disponibles à Paris.
A la télévision, les syndicats SNJ et CGT de France 3 ont déposé un préavis de grève de vingt-quatre heures qui devrait perturber la fabrication des journaux télévisés. A la radio, les programmes de France Culture ont connu, dès le matin, quelques perturbations. L'antenne de France Inter a aussi été perturbée, entre 6 heures et 9 heures, en raison d'arrêts de travail "de certaines catégories de personnels" . Toutefois, le "7-9" a été maintenu. En milieu de matinée, la direction de Radio-France n'avait pas encore procédé au "chiffrage" du nombre des grévistes sur chacune des antennes du groupe.
Article paru dans l'édition du 05.10.05
L a réunion entre les directions du SPD et de la CDU/CSU, mercredi 5 octobre, n'a pas débouché sur la nomination d'un nouveau chancelier, mais la possibilité d'une "grande coalition" semble de plus en plus retenue. Conservateurs et sociaux-démocrates tiendront, jeudi, une réunion spéciale pour déterminer l'identité de la personne qui occupera le poste de chancelier dans l'hypothèse d'une "grande coalition" entre droite et gauche en Allemagne.
MM. Chirac et Köhler: Paris et Berlin restent "moteurs de la construction européenne" Jacques Chirac a assuré à son homologue allemand Horst Köhler, reçu mercredi 5 octobre, à l'Elysée, que "l'amitié entre l'Allemagne et la France demeurerait le moteur indispensable de la construction européenne", M. Köhler affirmant à son tour que cette "amitié" perdurera quel que soit le prochain gouvernement en place à Berlin. M. Chirac a également indiqué qu'il était "convaincu que l'Allemagne, engagée dans une politique de modernisation, poursuivrait sur cette voie". |
Angela Merkel, chef de file de la CDU et candidate au poste de chancelière, a elle-même annoncé la nouvelle à l'issue de la rencontre entre les deux camps. Mme Merkel a précisé qu'elle était désormais "plus optimiste que pessimiste" sur les chances de sortir de l'impasse politique consécutive aux résultats des élections législatives du 18 septembre dernier.
Selon les sources de la CDU, la composition possible d'un futur gouvernement sera également évoquée lors de la réunion de jeudi. Les deux parties ont trouvé une "base commune" de discussions sur le fond, a noté Angela Merkel, qui s'exprimait à l'issue de la troisième rencontre exploratoire dans la perspective d'une coalition.
"L'atmosphère a montré qu'il y avait davantage qu'un plus petit dénominateur commun (...) Ce jour est plutôt un bon jour", s'est félicitée la présidente de la CDU. Les deux parties ont indiqué qu'elles considéraient les discussions exploratoires comme closes à la fin de cette troisième réunion.
Le chancelier SPD sortant, Gerhard Schröder, s'est lui aussi montré confiant, estimant, à l'instar du chef de la CSU Edmund Stoiber, qu'il existait clairement une base pour un accord sur la politique à suivre dans un gouvernement d'union nationale.
Le chancelier a déclaré qu'après la rencontre de jeudi, "la voie pourrait s'ouvrir ensuite pour des négociations officielles sur les détails" concernant une grande coalition. "Il est devenu évident que nous parlerons de toutes les questions qui vont de pair" avec une grande coalition au cours d'un tel sommet, a-t-il dit. "Je crois que l'Union (la CDU/CSU) a compris clairement que l'on ne règle pas à l'avance une question séparément, mais que c'est la structure dans son ensemble qui doit être discutée et si possible décidée, quand on organise une telle rencontre au sommet", a-t-il ajouté, faisant allusion à la question du futur titulaire de la chancellerie.
Revenant sur ses propos de lundi lorsqu'il avait déclaré "ne pas vouloir être un obstacle à la poursuite du processus de réformes qu'il a engagé et à la formation d'un gouvernement stable", M. Schröder a commenté: "Je ne l'ai pas dit sans raison." Le président du SPD, Franz Müntefering, a estimé que les pourparlers étaient "allés dans la bonne direction pour le pays" et que le futur gouvernement devrait être un gouvernement du renouveau et de la justice sociale". La réunion au sommet rassemblera, pour les sociaux-démocrates le chancelier Schröder et M. Müntefering, et pour la droite Mme Merkel et le président de l'Union sociale-chrétienne (CSU) bavaroise, Edmund Stoiber.
Mardi, les négociations semblaient dans l'impasse entre les deux grands partis allemands. Le SPD souhaitait maintenir à tout prix la candidature de Gerhard Schröder, ce que les conservateurs ne sont pas prêts à accepter.
Avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 05.10.05 | 17h46
L a CDU-CSU et le SPD campaient encore sur leurs positions, mercredi, avant de se rencontrer à 14 heures dans le cadre d'une consultation exploratoire, préalable aux négociations pour la formation d'une "grande coalition". Les deux forces politiques revendiquent l'attribution du poste de chancelier. Si elles n'arrivent pas à se mettre d'accord, ce conflit pourrait entraîner une suspension des pourparlers en cours.
Les conservateurs, sortis en tête des élections, réclament que la chancellerie soit attribuée à Angela Merkel. "Nous n''engagerons pas de négociations tant que le SPD n'aura pas reconnu les usages démocratiques, à savoir que c'est le groupe parlementaire le plus important qui présente la chancelière", a déclaré le vice-président de la CDU, Jürgen Rüttgers, à la chaîne de télévision publique ARD. Ainsi, les chrétiens-démocrates estiment que le retrait de Gerhard Schröder est une condition indispensable au début des négociations. Ils espèrent donc régler ce point mercredi, lors du troisième volet des consultations exploratoires, les discussions préalables aux vraies négociations.
Les sociaux-démocrates, eux, veulent régler cette question pendant les négociations proprement dites. Ils estiment que les électeurs n'ont pas donné de mandat clair à la droite, tout en soulignant qu'Angela Merkel a enregistré le troisième plus mauvais score des conservateurs depuis 1945. Les conservateurs ont remporté 226 sièges au Bundestag, contre 222 pour les sociaux-démocrates. "Je ne peux qu'avertir l'Union que nous irons aux négociations avec Gerhard Schröder comme candidat au poste suprême", a prévenu Franz Müntefering, le président du SPD.
VERS UNE CRISE INSTITUTIONNELLE ?
La question de la chancellerie sera donc au cœur des discussions mercredi après-midi. Treize responsables politiques sont attendus, dont Angela Merkel et le président de la CSU, Edmund Stoiber, ainsi que Gerhard Schröder et le président du SPD. Ils devraient aussi aborder les questions du marché du travail, du système de sécurité sociale, la situation financière de l'Etat fédéral et des Etats régionaux, et le fédéralisme. La consultation doit durer trois heures.
Si les deux camps n'arrivent pas à se mettre d'accord mercredi, il est possible que les négociations soient interrompues. L'Union chrétienne-démocrate et le Parti social-démocrate ont tous deux brandi cette menace. En cas de blocage, les Verts ont déjà prévenu qu'ils n'étaient pas prêts à servir d'alternative à la CDU, pour former une coalition majoritaire avec les libéraux. "Les Verts ne sont pas à la disposition des perdants des élections dans leur partie de poker", a déclaré mardi Claudia Roth, coprésidente du parti écologiste. Si les deux camps n'arrivent pas à s'entendre, l'Allemagne pourrait donc faire face à une crise institutionnelle. La possibilité de nouvelles élections pourrait alors resurgir.
Avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 05.10.05 | 13h07
S i les Français ont voulu envoyer, lors du référendum sur la Constitution européenne, un message d'hostilité à un élargissement sans limite de l'Union, ils n'ont guère été entendus. Lundi 3 octobre, les Vingt-Cinq ont non seulement ouvert les négociations d'adhésion avec la Turquie mais aussi avec la Croatie. Sans le dire ouvertement, le gouvernement autrichien, qui est traditionnellement un protecteur de son voisin catholique du Sud, avait fait du début des négociations avec Zagreb la condition de son assentiment aux pourparlers officiels avec Ankara.
L'Union européenne avait posé une condition: que les autorités croates manifestent leur volonté de livrer les criminels de guerre recherchés par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). En particulier le général Ante Gotovina, inculpé en 2001 pour les crimes commis contre les Serbes de Croatie en 1995. Jusqu'à la réunion de crise des ministres des affaires étrangères européens, le week-end dernier, la procureure du TPIY, Carla Del Ponte, s'était déclarée "déçue" par l'attitude des Croates qui affirment ne pas savoir où se trouve Ante Gotovina. Lundi, elle a changé brusquement d'avis en déclarant que le gouvernement nationaliste de Zagreb "coopérait pleinement" avec ses services. Elle a ainsi permis d'éviter une grave crise de l'Union européenne.
Le prix politique n'est-il pas trop lourd, même si les Autrichiens font justement valoir que la Croatie a autant de titres que la Turquie à s'affirmer européenne ? En cédant à ce qu'il faut bien appeler un chantage, les dirigeants de l'Union européenne se sont privés d'une arme utilisée jusqu'à maintenant avec efficacité pour obliger les candidats à l'adhésion à se conformer à un certain nombre de principes. Si pour des raisons d'opportunité, les conditions posées à la Croatie sont traitées à la légère, il ne sera plus possible dans l'avenir d'opposer aux Serbes leur mauvaise volonté à livrer leurs criminels de guerre, comme les anciens chefs politique et militaire des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et le général Mladic, pour les laisser attendre à la porte de l'Europe.
Du véritable opéra-bouffe qui s'est joué ces jours derniers à Luxembourg, on peut tirer des enseignements contradictoires. D'une part, il se confirme qu'il est très difficile de freiner l'élargissement de l'Union européenne une fois le processus mis en route. D'autre part, l'unanimité nécessaire pour toutes les prises de décision concernant l'arrivée de nouveaux membres, y compris à toutes les étapes des négociations, promet de belles empoignades entre les diplomates.
Les considérations techniques sur l'acquis communautaire ne joueront pas toujours le rôle principal. Pour satisfaire les exigences de tous les partenaires, dont celles qui n'auront rien à voir avec le sujet traité, les marchandages iront bon train. Les victimes de ces atermoiements risquent d'être les candidats, les Turcs en premier, et plus généralement l'idée européenne dont les contours et la finalité se perdent dans de médiocres tractations.
Article paru dans l'édition du 06.10.05
Sue ♦ 05.10.05 | 19h40 ♦ Je m'étonne que l'on s'étonne. Les tractations diplomatiques ont souvent ce caractère de marchandage de marchands de tapis .L'Europe c'est pour chacun- l'intérieur et l'extérieur, les affaires étrangères et les affaires internes.De cette dualité naissent souvent de drôles de fruits, nous n'en sommes plus à la mesure des légumes et autres espèces. Mais nous avons crée le référendum unique pour le pays des confins, je veux parler de Byzance bien sûr.
JEAN FRANCOIS M. ♦ 05.10.05 | 19h06 ♦ Ce texte décrit des réalités difficilement niables.Ce faisant, ne justifie-t-il pas les craintes et les frilosités que nos élites branchées reprochent tant aux Français (qui ne sont pas une exception en Europe de ce point de vue)Ce gâchis n'est-il pas le produit, depuis les débuts, d'une fuite en avant par l'élargissement permanent, faute de dépasser les intérêts nationaux étroits et de construire un véritable exécutif européen démocratiquement élu et donc légitime aux yeux des peuples?
sixcylindres ♦ 05.10.05 | 17h33 ♦ Je reconnais, comme mon prédécesseur que la finalité de l'union européenne se perd dans des tractations bien médiocres. Et il pose la question fondamentale de savoir ce qu'est la démocratie. En France ,je me demande parfois si ce n'est pas la parole à celui qui n'y connait rien, parce qu'il ne peut donc ni mentir ni tromper. et c'est pourquoi je pense qu'il appartient aux responsables que nous sommes d'informer honnétement. La démocratie reste le pire système, à l'exclusion de tous les autres!
alain sager (nogent sur oise) ♦ 05.10.05 | 17h17 ♦ "Chantage", "opéra bouffe", "médiocres tractations": diable ! Il est arrivé au "Monde" de parler d'"europhobie" pour moins que ça ! (voir un récent éditorial). Alors, va-t-il enfin être admissible pour notre journal qu'un lecteur ou un électeur puisse A LA FOIS être très critique à l'égard de l'Europe telle qu'elle se fait, et néanmoins chaud partisan de "l'idée européenne" ? Ce qui est tout de même plus subtil que la distinction "europhobes"/"europhiles".
Flying-Lolo ♦ 05.10.05 | 16h18 ♦ Tout est dit dans la conclusion: "médiocres tractations"...plus un nouvel affront fait au peuple français - qui décidément semble bien trop bête aux yeux de ses élites !! - au point d'ignorer totalement, voire en allant carrément à l'encontre de, ses desiderata... Mais qui sont ces gens qui se croient investis du pouvoir - et de la faculté ! - de décider ce que bon leur semble sans se soucier de la parole des peuples ? Les "élites" de pays démocrates ? Fichtre, c'est quoi au fait la démocratie?
monrog ♦ 05.10.05 | 15h40 ♦ Même s'il est de bon ton d'émettre de sidées divergentes des articles de référence, je fais miennes vos conclusions quand vous dites, en substance: -nous voyons bien que nous sommes désormais sur un toboggan sans frein en ce qui concerne l'admission de nouveaux membres; -à cela s'ajoute la mortelle règle de l'unanimité qui va vider toute possibilité de fédéralisme politique et d'efficacité économique. Cete règle, n'en déplaise à VGE, était encore bien présente dans le défunt traité.
I nvestir dans la recherche, le développement, l'enseignement supérieur, est devenu le leitmotiv de tout discours politique se donnant pour projet la croissance économique, notamment en Europe. Beau programme dont on ne peut que se féliciter: le savoir étant désirable en soi, l'investissement dans la connaissance est de nature à accroître le bien-être des hommes indépendamment de ses effets économiques. Il convient donc que les actes suivent les discours. Mais comment et selon quels principes ? Une conception trop naïve de la recherche, trop utilitariste aux fins d'en obtenir des résultats rapides, pourrait conduire à écarter des sources de financement les projets les plus féconds, s'ils apparaissaient les plus gratuits, les moins susceptibles d'application.
Or il est quasiment impossible d'établir a priori une correspondance entre une innovation spécifique et la recherche particulière qui l'a rendue possible, entre les effets économiques d'un projet et les motivations intellectuelles des chercheurs qui l'ont développé, du moins pour ce qui concerne les grandes innovations. L'histoire de la "révolution" des technologies de l'information et de la communication fournit une illustration éclatante de cette affirmation.
Au commencement, au tournant des XIXe et XXe siècles, fut un débat sur les fondements méthodologiques, philosophiques et épistémologiques de la vérité mathématique. Le XIXe siècle, période extrêmement féconde pour le développement de la discipline, fut notamment caractérisé par une fertilisation croisée entre ses différentes branches – – l'algèbre, la géométrie, la théorie des nombres, l'analyse et la logique. Le champ mathématique apparaissait de ce fait comme beaucoup plus unifié qu'on ne le pensait.
Les différents aspects du sujet ne seraient-ils que des éléments d'un tout cohérent ? Cette interrogation allait amener les plus grands mathématiciens de l'époque à réfléchir sur les fondements mêmes de leur discipline en se mettant à la recherche d'une métamathématique, d'une langue universelle dans laquelle leur science pouvait être exprimée.
Les trois volumes des Principia mathematica de Russel et Whitehead publiés entre 1910 et 1912, oeuvre considérable s'il en est, allaient fonder l'école du logicisme selon laquelle le métalangage recherché était la logique. Mais cette réduction de la discipline à la logique supposait que les mathématiques classiques étaient exemptes de contradictions.
Or de nombreuses antinomies avaient été découvertes dans la théorie des ensembles, dont le célèbre paradoxe de Russell lui-même: "L'ensemble de tous les ensembles qui ne se contiennent pas eux-mêmes comme éléments" . C'est pourquoi l'école intuitionniste fondée par Brouwer aux environs de 1908, et pour laquelle Poincaré avait grande sympathie, pensait que les mathématiques devaient être reconstruites ab initio .
A l'inverse de la conception platonicienne – implicite dans les travaux de l'école logiciste – selon laquelle les objets abstraits avaient une existence indépendante de l'esprit humain, les intuitionnistes soutenaient que les objets mathématiques étaient des créations autonomes de l'esprit. En tant que tels ils devaient être construits, un peu comme un ingénieur construit un objet, sans référence à l'infini, à l'indécidable, à la métaphysique.
En totale opposition à cette conception qui de fait conduirait à abandonner la plupart des résultats des mathématiques modernes, le grand mathématicien allemand David Hilbert énonça dans les années 1920 son programme pour les fondements des mathématiques créant ainsi l'école du formalisme. Son ambition était de formaliser l'ensemble des théories mathématiques aux fins de prouver que la science mathématique était complète, cohérente et décidable. La formalisation consiste à exprimer les théories mathématiques axiomatisées en un langage de "premier rang", quasi universel, que l'on pourrait qualifier de "mathématique des mathématiques".
En utilisant ce langage, il serait alors possible de montrer que chaque théorie est complète au sens où toute proposition peut y être prouvée ou réfutée; cohérente au sens où il serait impossible de prouver des propositions universellement fausses; décidable, au sens où il existe une procédure "mécanique" finie capable de prouver ou de réfuter toute proposition.
Hélas ! Le mathématicien tchèque Kurt Gödel allait dans deux théorèmes mathématiques célèbres – – les théorèmes d'incomplétude – – montrer que le système formel des mathématiques classiques ne pouvait être ni complet ni cohérent.
Il restait à Alan Turing, mathématicien anglais à donner un contenu à la notion de "procédure mécanique finie", connue aujourd'hui sous le nom d'algorithme, et ce faisant à prouver que le système formel des mathématiques était indécidable (1937). Il existe des problèmes mathématiques qui ne peuvent être résolus par aucune procédure mécanique formelle. Pour illustrer ce résultat, il imagina une méthode simple qui possède toutes les propriétés fondamentales d'un système informatique moderne, et qu'on appellera plus tard la machine de Turing.
Elle permettait de montrer qu'on pouvait faire tourner indéfiniment un "programme" sans parvenir à aucune solution. Il existait bien ainsi des problèmes indécidables. Les résultats de Gödel et de Turing ont ainsi fait litière des trois exigences de l'école du formalisme (complétude, cohérence, décidabilité) constitutives du programme de Hilbert. Mais de ce magnifique échange, libre, passionné, désintéressé, allaient naître les ordinateurs que nous avons sur nos bureaux, matérialisation de la machine virtuelle de Turing.
Ainsi ce que l'on considère aujourd'hui comme la deuxième révolution industrielle, celle des technologies de l'information et de la communication a pour origine un débat purement conceptuel, quasi métaphysique et dénué de toute préoccupation concrète. Comme le souligne Kumarawsami Velupillai (In Praise of Fostering Anarchy in Research ), c'est la liberté de la recherche encouragée par un environnement favorisant la spéculation pure sur des questions fondamentales qui a conduit aux résultats les plus fertiles, ceux de nature à changer la destinée des hommes.
Ce qui frappe en l'espèce, c'est à quel point la recherche pure fut inintentionnellement productive, la seule motivation de Turing étant de répondre à la question de la décidabilité posée par Hilbert dans le cadre d'un programme destiné à fonder une métamathématique !
Cela souligne, s'il en était besoin toute la complexité des politiques de recherche et développement, de leur cadre institutionnel, des critères qu'elles utilisent pour financer les différents projets. Privilégier les recherches susceptibles d'application pratique à plus ou moins brève échéance est normal pour des politiques publiques soucieuses de rentabilité sociale, mais comporte le risque d'écarter les projets les plus féconds. Fonder les critères d'excellence (des chercheurs) sur le seul nombre de publications dans des revues scientifiques de premier rang est encore plus contestable.
Une recherche peut être longue à mûrir, et le commandement "publish or perish" conduit trop souvent à favoriser le conformisme, si ce n'est la superficialité. Parce que la "valeur du gratuit", pour emprunter la belle expression de Bertrand de Jouvenel, est dans l'activité de recherche considérable, il faut savoir aussi investir dans la spéculation pure, dans des projets apparemment déconnectés de toute application concrète, dans ceux dont la motivation est la passion de la curiosité.
Jean-Paul Fitoussi
Article paru dans l'édition du 06.10.05
Franck, un chercheur expatrie ♦ 05.10.05 | 19h21 ♦ un chiffre simple devrait permettre a tout le monde, et surtout les politiques francais, de comprendre que la recherche dite 'appliquée' (et les retombées économiques qui en découlent) n'existe que grace a la recherche dite 'fondamentale': deux-tiers des articles cités dans toutes les demandes de brevets déposées aux USA, en Europe et au Japon sont issus de la recherche académique financée à plus de 80% par des fonds publiques. on ne peut pas ete plus clair je crois...
Fouad H. ♦ 05.10.05 | 18h21 ♦ En général,les chercheurs - même renifleurs- préfèrent que l'on parle de ce que l'on connaît et donc pratiquait (concrétment, quotidiennement). Notre éditorialiste, patron de l'Observatoire Economique, sort de son champ de compétence: l'économie. Ce n'est certainement pas là le meilleur exemple d'innovation ! BIEN AU CONTRAIRE: c'est déprimant pour un jeune chercheur/innovateur de voir toujours les mêmes parlent de tout ...et de rien. Surtout et de surcroît quand ce sont des penseurs critiques!
un chercheur ♦ 05.10.05 | 16h40 ♦ L'article de JP Fitoussi nous montre joliment a quel point il est difficile de prevoir les recherches qui compteront a l'avenir. La conclusion devrait donc etre "chercheurs, faites ce que vous voulez, mais faites le excellemment". Ceci me parait assez proche de l'évaluation basée sur les publications dans les meilleurs journaux scientifiques. Sinon, evaluer sur quelles bases ?
scylla ♦ 05.10.05 | 16h23 ♦ Le concept "publish or perish" encourage les effets de mode et d'annonce. Ce n'est pas ainsi que l'on obtient de la qualité.
Europekipete ♦ 05.10.05 | 15h50 ♦ Mais ce n'est pas la notion de recherche pure qui est en cause en France mais plutot son manque de qualite et d' impact international. Le concept " publish or perish" ne fait peur qu'aux chercheurs fonctionaires surproteges, mais pas aux expats Francais outre Atlantique/UK ou ce systeme a l'avantage de faire resortir les meilleurs, promus au merite et qui force les moins bons a se remettre en cause. La realite pour les meilleurs chercheurs c'est perish in France or publish in USA!
Galahaad ♦ 05.10.05 | 14h56 ♦ Jean-Paul Fitoussi a bien expliqué comment l'idée de l'ordinateur est née de simples spéculations mathématiques. Cet exemple montre bien l'inanité de ne faire que de la recherche appliquée, à court terme. D'un point de vue rationnaliste, c'est un sans-faute. Cependant le problème du développement de la recherche public est aussi un problème économique, et les rationalistes sont minoritaires dans une société où passion compte plus que raison. Cet article peut-il les convaincre ?
Beaucoup d'analystes estiment que l'arithmétique est sur le point de l'emporter: les 226 sièges des Unions chrétiennes-démocrates et sociales-chrétiennes (CDU-CSU) au Bundestag (contre 222 au parti social-démocrate SPD) devraient permettre à Mme Merkel de succéder à M. Schröder à la chancellerie.
Les deux candidats, assistés de leurs principaux lieutenants Edmund Stoiber et Franz Müntefering, sont entrés jeudi dans un cycle de négociations sur la formation d'une "grande coalition" et doivent se retrouver dimanche. Le nom du futur chancelier ne doit pas être connu officiellement avant dimanche soir au plus tôt et soumis lundi aux organes de directions des deux partis. Selon le Financial Times de samedi, qui cite d'anonymes hauts dirigeants du SPD, l'affaire serait pourtant déjà conclue au bénéfice de Mme Merkel et le chancelier sortant se retirerait finalement de la scène politique nationale. D'autres scénarios qui avaient couru dans la presse allemande ces derniers jours spéculaient sur l'attribution du double poste de vice-chancelier et ministre des affaires étrangères à M. Schröder ou bien de celui de président du Bundestag. La possibilité que le SPD recueille plus de portefeuilles que la CDU en échange du retrait de M. Schröder aurait aussi été évoquée. Elle est rejetée sur le principe par certains dirigeants de droite.
"Je pense que nous sommes en bonne voie et que nous serons en mesure de recommander la semaine prochaine à l'exécutif de notre parti que nous pouvons commencer à former un gouvernement" , a déclaré vendredi le secrétaire général de la CDU Volker Kauder à la chaîne n-tv. Dans un communiqué publié vendredi, l'aile centriste du SPD, le Seeheimer Kreis, et la gauche du parti ont cependant continué à plaider pour que M. Schröder, jugé plus à même de gérer la situation délicate du pays, reste à son poste. Le Seeheimer Kreis propose un partage de la chancellerie: deux ans pour M. Schröder et deux ans pour Mme Merkel.
Selon un sondage publié vendredi par la chaîne de télévision publique ZDF, 47% des Allemands préféreraient Mme Merkel à la chancellerie plutôt que M. Schröder. C'est la première fois depuis l'élection que la candidate CDU parvient à combler son déficit de sympathie personnelle.
Adrien de Tricornot
Article paru dans l'édition du 09.10.05
O n retiendra davantage, dans l'attribution du prix Nobel de la paix à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et à son directeur Mohamed ElBaradei, vendredi 7 octobre, les efforts incessants de l'instance onusienne pour lutter contre la dissémination des armes nucléaires que sa constance à promouvoir la production d'électricité à partir de réacteurs civils.
C'est en effet toute l'ambiguïté de l'Agence de Vienne: elle met autant d'ardeur dans sa croisade contre la prolifération des armes de destruction massive, notamment en Irak, en Corée du Nord et en Iran, que pour vanter les mérites de l'atome "propre", au grand dam des antinucléaires et des écologistes. Ce qui explique le décalage entre les réactions positives des gouvernements et les critiques des ONG.
De cet exercice d'équilibre presque schizophrénique, puisqu'un réacteur civil est une source potentielle de dissémination, M. ElBaradei s'est plutôt bien sorti, en privilégiant son rôle d'apôtre du désarmement. Avec courage, en janvier 2003, il a pris le risque, le premier, de douter des certitudes affichées par l'Amérique à propos des armes de destruction massive que Saddam Hussein était censé détenir. Le diplomate égyptien a tenu bon. Cela lui a valu la rancune tenace de Washington, qui a longtemps cherché à empêcher sa réélection à la tête de l'AIEA. M. ElBaradei avait raison, comme la suite l'a montré.
Au-delà des félicitations de circonstance, il est donc peu probable que l'administration Bush soit ravie d'une distinction qui "sanctuarise" de facto la position de son récipiendaire. Qui sait d'ailleurs si l'AIEA ne va pas s'intéresser un jour au "Docteur Folamour" américain, le secrétaire à la défense Donald Rumsfeld, chantre des "mini-nukes" ? Ces minibombes nucléaires donnent un fâcheux exemple à tous les pays qui rêvent d'ajouter la bombe atomique à leur arsenal, et affaiblissent le concept même de la dissuasion.
A l'inverse, la récompense du Nobel est un affichage clair de la volonté de la communauté internationale de ne pas tolérer l'émergence de nouveaux pays nucléaires. En se faisant le gardien de ce consensus, défendu surtout par les cinq puissances nucléaires officielles (Etats-Unis, Russie, Chine, Grande-Bretagne et France), l'AIEA se montre au minimum timorée: elle n'affiche ainsi aucune velléité de rompre le silence choquant dont bénéficient les trois pays qui possèdent la bombe en toute impunité, Israël, l'Inde et le Pakistan.
Or cette discrétion ne renforce pas l'efficacité de l'Agence, bien au contraire: les deux pays les plus "proliférants", l'Iran et la Corée du Nord, en tirent argument pour revendiquer la maîtrise de tout le cycle nucléaire. En proposant des réacteurs civils à Téhéran et Pyongyang afin de les inciter à renoncer au nucléaire militaire, l'AIEA est donc dans son rôle, fût-il singulier. Soixante ans après Hiroshima et Nagasaki, l'Agence n'en est pas à un paradoxe près, puisqu'elle reçoit un prix qui porte le nom de l'inventeur de la dynamite...
Article paru dans l'édition du 09.10.05
Claire F. ♦ 09.10.05 | 00h33 ♦ Pour moi, ce prix Nobel est une manière publique et universelle de dire à Bush et tous ses "cronies" que sa guerre en Irak ne repose que sur des mensonges et que sa dite 'guerre contre le terrorisme' ne se gagnera jamais par la force des armes.
Le nucléaire tue l'avenir ♦ 08.10.05 | 21h57 ♦ Si l'attribution du prix Nobel de la Paix à l'AIEA est indécente, ce n'est pas seulement parce que cette agence agit pour le nucléaire dit "civil", avec ses risques et ses déchets radioactifs légués aux générations futures. C'est AUSSI parce que l'AIEA porte une grande responsabilité dans la prolifération nucléaire à des fins militaires. Rappelons que le nucléaire dit "civil" produit de l'uranium enrichi et du plutonium qui permettent l'un comme l'autre de faire des bombes atomiques...
en décalage ... ♦ 08.10.05 | 20h23 ♦ cela fait longtemps, entre 20 & 30 ans, que les "nobel de la paix" sont en totale décalage. Décalage d'abord avec les idéaux de paix, puis ceux de rigueur morale, d''impartialité ...etc... et au final avec l'opinion publique. De mémoire, ont été Nobel de la paix, par example, le stalinien Le Duc To, le terroriste Arafat. Alors, une erreur de plus, ce n'est finalement pas trop grave ....
"L a chancellerie ira à l'Union chrétienne-démocrate (CDU)", a déclaré Angela Merkel lors d'une conférence de presse, lundi 10 octobre dans l'après-midi à Berlin. "Je suis heureuse, mais je sais bien que beaucoup de travail nous attend", a annoncé la future chancelière de l'Allemagne, ajoutant qu'elle voulait mener "une coalition des nouvelles opportunités". D'après les médias allemands, le SPD et la CDU-CSU sont parvenus à cet accord dimanche soir, au cours d'une réunion au sommet.
"L'Union [la CDU-CSU] et le SPD seront représentés avec un nombre égal de membres dans le gouvernement, il n'est pas possible que l'un parle d'une voix plus forte que l'autre. Nous veillerons à ce que chaque camp ait des postes-clé, que chaque parti ait au moins un portefeuille social, également que chaque parti dispose d'un poste ministériel avec une composante écologique", a-t-elle déclaré, jugeant une telle répartition "honnête et juste".
Une telle coalition n'est "pas une tradition française", pour le PS Le PS a pris ses distances, lundi, avec l'accord entre chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates pour un gouvernement de coalition en Allemagne, en déclarant qu'un tel schéma n'était "pas une tradition française". L'Allemagne vit "une situation particulière, avec des circonstances exceptionnelles. Il y a une spécificité, une tradition qui veut que dans des situations de crise grave, il puisse y avoir des gouvernements d'union nationale", a affirmé le porte-parole du PS, Julien Dray. Selon lui, "il appartient au SPD d'apprécier la réalité de cette situation, il appartient au peuple allemand, après, de juger (...). Mais c'est une spécificité allemande, ce n'est pas une tradition française, ce n'est pas quelque chose qui existe dans notre histoire". |
"Chacun des deux partis, a-t-elle dit, a montré qu'il prend au sérieux le souhait des électeurs et des électrices, qu'un effort commun doit être entrepris pour l'Allemagne et pour les gens en Allemagne. Nous savons qu'il n'y a pas d'alternative raisonnable". "La politique d'une possible grande coalition doit être une politique qui fasse en sorte que davantage d'emplois soient créés", a-t-elle ajouté. Il sera important que "cette politique soit appliquée par chaque ministre, peu importe qu'il soit social-démocrate ou chrétien-démocrate".
Angela Merkel a déclaré que la direction de son parti s'était prononcée en faveur de l'ouverture de négociations avec les sociaux-démocrates en vue de la formation d'une "grande coalition", et espérait conclure les pourparlers au plus tard le 12 novembre. Les négociations formelles devraient débuter la semaine du 17 octobre, d'après une source proche des conservateurs. De leur côté, les dirigeants sociaux-démocrates se sont également prononcés à une large majorité en faveur de l'engagement de telles négociations, a affirmé le président du parti, Franz Müntefering. Plusieurs hypothèses ont d'ailleurs déjà filtré sur la composition de ce gouvernement.
Les sociaux-démocrates obtiendraient les postes-clés, notamment les affaires étrangères, les finances, le travail et la justice, ainsi que les portefeuilles des transports, de l'environnement, de la coopération et de la santé, avançaient certains médias allemands lundi matin, citant des sources proches du parti. Pour le poste des affaires étrangères, le ministre sortant de la défense, Peter Struck, serait pressenti.
Le chancelier sortant, Gerhard Schröder, a renoncé à toute fonction dans le nouveau gouvernement de coalition, ont annoncé des sources proches de son parti. Interrogé sur son éventuel avenir dans le nouveau gouvernement par des membres de la direction du SPD, M. Schröder aurait déclaré: "Cela n'entre pas dans mes projets. Ma carrière va prendre une autre direction". Gerhard Schröder, qui dirige depuis l'automne 1998 une coalition entre SPD et Verts, "va continuer à participer aux travaux du SPD et aux négociations de coalition" en vue de la formation du nouveau gouvernement, a déclaré Franz Müntefering, lors de la conférence de presse de Berlin.
De son côté, la CDU prendrait en charge l'économie, l'intérieur, la défense, l'agriculture, la formation et la famille. Le ministre-président du Land de Bavière, le chrétien-social Edmund Stoiber, a d'ailleurs annoncé, lundi, qu'il deviendra ministre de l'économie.
Le député conservateur, Norbert Lammert, est pressenti pour succéder au social-démocrate Wolfgang Thierse au poste de président de la nouvelle Chambre basse du Parlement (Bundestag), d'après des sources proches de la CDU. En Allemagne, le président du Bundestag est dans l'ordre protocolaire le deuxième personnage de l'Etat derrière le président de la République. M. Lammert était vice-président dans la précédente assemblée, dissoute pour permettre l'organisation d'élections législatives anticipées le 18 septembre.
Avec AFP, AP, Reuters
LEMONDE.FR | 10.10.05 | 10h39
A près l'annonce, lundi 10 octobre à Berlin, d'un accord pour un gouvernement de coalition sous la direction de la conservatrice Angela Merkel, le chef de la diplomatie française, Philippe Douste-Blazy, s'est "réjoui que l'Allemagne sorte de la période d'incertitude"."La France est le partenaire le plus proche de l'Allemagne et il n'y a pas de construction européenne sans une collaboration parfaite entre [ces deux pays]", a-t-il ajouté, se disant "persuadé qu'Angela Merkel sera dans la suite des chanceliers qui l'ont précédée".
"On a beaucoup de travail à faire ensemble", a souligné le ministre. "Je connais Angela Merkel depuis longtemps, nous avons milité dans les mêmes partis depuis une quinzaine d'années", a-t-il dit. Elle devra aborder "les mêmes sujets que chez nous": "Comment on peut rendre plus flexible le droit du travail, comment on peut diminuer le chômage, comment on va aider plus les entreprises et comment on va aider en même temps ceux qui sont les plus exclus". "Une grande coalition, c'est peut-être l'occasion de faire passer les réformes" en Allemagne, a estimé le chef de la diplomatie française.
"Nous nous félicitons du fait qu'elle soit chancelier et que le parti de la réforme triomphe en Allemagne face au conservatisme de l'extrême gauche", a déclaré, de son côté, Valérie Pécresse, porte-parole de l'UMP, lors de son point de presse hebdomadaire."C'est une très bonne nouvelle pour l'Allemagne et pour l'Europe", a-t-elle ajouté.
Trois semaines après des législatives allemandes au résultat extrêmement serré, le socialiste Julien Dray évoque, quant à lui, "une situation particulière avec des circonstances exceptionnelles". "En Allemagne, devant les situations graves, il est possible d'avoir des gouvernements d'union nationale", a fait remarquer le porte-parole du PS."Il appartient au SPD d'apprécier la situation" et "aux Allemands d'en juger la valeur", a-t-il estimé, tout en soulignant que "ce n'est pas une tradition française".
Avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 10.10.05 | 18h14
J acques Chirac a adressé "tous ses vœux de succès" à Angela Merkel, lors d'un entretien téléphonique, et l'a invitée à venir à Paris "dès que ce sera possible", a rapporté le porte-parole de l'Elysée. Il a précisé que le président français "lui a redit la priorité qu'il attache aux liens entre l'Allemagne et la France et il s'est dit convaincu que se renforcera encore la tradition d'une relation fraternelle et solidaire entre nos deux gouvernements et nos deux peuples au service de l'Europe". M. Chirac a également téléphoné au chancelier sortant, Gerhard Schröder, "pour saluer l'accord intervenu entre les partis en vue de la constitution du nouveau gouvernement allemand" et "a exprimé sa confiance dans la capacité de l'Allemagne à poursuivre sur la voie des réformes". M. Chirac "a souligné l'élan exceptionnel donné aux relations" entre les deux pays "sous l'impulsion du chancelier et il lui a dit sa conviction que ce lien irremplaçable entre l'Allemagne et la France est indispensable au progrès de la construction européenne", a rapporté M. Bonnafont.
Plus tôt, le ministre des affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, s'est "réjoui que l'Allemagne sorte de la période d'incertitude", et s'est dit "persuadé qu'Angela Merkel sera dans la suite des chanceliers qui l'ont précédée". Selon lui, elle devra aborder "les mêmes sujets que chez nous": "Comment on peut rendre plus flexible le droit du travail, comment on peut diminuer le chômage, comment on va aider plus les entreprises et comment on va aider en même temps ceux qui sont les plus exclus". "Une grande coalition, c'est peut-être l'occasion de faire passer les réformes" en Allemagne, a-t-il estimé. "SITUATION PARTICULIÈRE"
"Nous nous félicitons du fait qu'elle soit chancelier et que le parti de la réforme triomphe en Allemagne face au conservatisme de l'extrême gauche", a déclaré, de son côté, la porte-parole de l'UMP Valérie Pécresse, parlant d''une très bonne nouvelle pour l'Allemagne et pour l'Europe".
Le socialiste Julien Dray a pour sa part évoqué "une situation particulière, avec des circonstances exceptionnelles". "En Allemagne, devant les situations graves, il est possible d'avoir des gouvernements d'union nationale", a fait remarquer le porte-parole du PS. "Il appartient au SPD d'apprécier la situation" et "aux Allemands d'en juger la valeur", a-t-il estimé, tout en soulignant que "ce n'est pas une tradition française".
L e président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso, s'est félicité lundi de la constitution d'un gouvernement "fort et stable pour l'Allemagne", a indiqué sa porte-parole, Françoise Le Bail.
De leur côté, le Haut Représentant pour la politique extérieure de l'UE, Javier Solana, et le secrétaire général de l'OTAN, Jaap de Hoop Scheffer, interrogés lors d'une conférence de presse commune, se sont également félicités de cette nomination. "La première chose que je voudrais faire est de la congratuler", a affirmé M. Solana en adressant ses "meilleurs vœux" à Mme Merkel, ainsi qu'"à tout son prochain gouvernement"."Je connais Mme Merkel depuis longtemps", a déclaré pour sa part M. de Hoop Scheffer. "Il est important qu'elle devienne à présent chancelière, la première femme dans l'histoire de l'Allemagne", a-t-il remarqué.
Le premier ministre britannique, Tony Blair, a, quant à lui, adressé ses félicitations à Angela Merkel et comptait lui parler d'ici à la fin de la journée.
Le chef du parti libéral polonais Plateforme civique (PO) et grand favori à la présidence, Donald Tusk, s'est déclaré "content de voir comme chancelier allemand une personne qui, aussi grâce à mes efforts, comprend les affaires polonaises mieux que son prédécesseur et qui est prête à parler sérieusement de l'amélioration des relations polono-allemandes". Invitée au mois d'août par M. Tusk en Pologne, Angela Merkel avait promis notamment que son pays n'allait pas dialoguer avec la Russie "par-dessus la tête" des Polonais. M. Tusk a aussi exprimé l'espoir que l'Allemagne appuierait les importantes demandes polonaises de fonds européens.
"N ous saluons Angela Merkel qui vient d'être désignée chancelière", a indiqué le porte-parole du département d'Etat, Tom Casey. "Nous avons une relation étroite avec l'Allemagne et avons travaillé à la renforcer sous le chancelier Schröder (...). Nous espérons poursuivre cette coopération avec le nouveau gouvernement", a-t-il dit.
Les relations entre l'Allemagne et les Etats-Unis ont été affectées lors de la guerre en Irak, quand Gerhard Schröder a refusé de fournir une aide militaire aux Américains. Mais les relations se sont progressivement réchauffées par la suite.
Mme Merkel a indiqué lundi qu'un de ses objectifs en tant que chancelière serait d'améliorer les liens avec Washington. Elle a précisé qu'elle voulait assurer de "bonnes relations transatlantiques", liant les Etats-Unis et l'Allemagne dans un climat de "confiance" mutuelle, même si des désaccords pourront subsister sur certains sujets.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 10.10.05 | 20h38
Q uelques poids lourds des Unions chrétiennes (CDU-CSU) et du Parti social-démocrate (SPD), bien connus à l'étranger, pourraient occuper les postes-clés du gouvernement d'Angela Merkel.
Pour la CDU, Edmund Stoiber, ministre-président conservateur de Bavière, a annoncé son départ pour Berlin, où il s'occupera de l'économie et des nouvelles technologies, avec éventuellement une compétence pour les affaires européennes. "Je crois que je peux tirer certains éléments de mon expérience en Bavière pour créer pour toute l'Allemagne une économie dynamique", a indiqué celui qui dirige depuis douze ans l'Etat régional le plus prospère d'Allemagne.
Wolfgang Schaüble, ex-bras droit de l'ancien chancelier de la réunification Helmut Kohl, pourrait retrouver le ministère de l'intérieur qu'il avait déjà occupé de 1989 à 1991. M. Schaüble, réputé pour ses contributions nombreuses au débat européen et international, est sur un fauteuil roulant depuis qu'un déséquilibré lui a tiré plusieurs balles dans le corps, en 1992. Son courage et la clarté de sa pensée en ont fait un des hommes politiques allemands les plus populaires et écoutés.
Horst Seehofer, ancien ministre de la santé d'Helmut Kohl, pourrait accéder aux portefeuilles de l'agriculture et de la protection des consommateurs. Celui qui passe pour un des meilleurs experts du camp conservateur en matière sociale s'était opposé aux aspects les plus libéraux du programme d'Angela Merkel.
Ursula von der Leyen, actuelle ministre des affaires sociales de Basse-Saxe, pourrait devenir ministre de la famille.
Du côté du SPD, Franz Müntefering, président du parti, jouera un rôle qui reste à déterminer. L'homme de confiance du Gerhard Schröder pourrrait devenir ministre du travail et obtenir également le poste de vice-chancelier. Ce social-démocrate catholique rhénan a repris les rênes du SPD à Gerhard Schröder en février 2004 et a été de tous les coups politiques récents du chancelier sortant, comme la convocation d'élections anticipées en mai. Il n'a pas encore dévoilé ses intentions.
Peer Steinbruck, ancien ministre-président de Rhénanie du Nord-Westphalie, un des barons de la tendance la plus modérée du SPD, pourrait recueillir le portefeuille le plus ingrat, celui de l'assainissement des finances publiques.
Peter Struck, ministre de la défense, pourrait remplacer le Vert Joschka Fischer à la tête de la diplomatie allemande. Il est respecté dans l'OTAN et a accompagné les engagements de l'armée allemande dans les Balkans ou en Afghanistan.
Ulla Schmidt, ministre de la santé, une des artisanes des réformes de Gerhard Schröder et d'un compromis sur l'assurance-maladie négociée de longue haleine avec les conservateurs, a de bonnes chances de rester à son poste, de même que Heidemarie Wieczorek-Zeul, la ministre de la coopération et du développement, membre de la gauche du SPD, et la ministre de la justice, Brigitte Zypries.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 10.10.05 | 21h14
A ngie est un oiseau rare. Malgré le faible score obtenu par son parti, la CDU, le 18 septembre (35,2% des voix avec sa petite soeur bavaroise, la CSU), la patronne des chrétiens-démocrates allemands pourrait néanmoins devenir le premier chef de gouvernement occidental originaire de l'ancien bloc communiste. Elle serait ainsi la première femme de l'histoire allemande à diriger le pays.
Née il y a cinquante et un ans, à Hambourg, dans ce qui était alors l'Allemagne de l'Ouest, la "Maggie Thatcher d'outre-Rhin" a grandi derrière le rideau de fer, sous tutelle soviétique, dans l'ancienne République démocratique allemande (RDA). C'est après la chute du mur de Berlin, fin 1989, que son "destin national" commence à prendre forme. Dès 1991, elle est ministre dans le gouvernement de l'Allemagne réunifiée. Moins de dix ans plus tard, en 2000, sa ténacité à toute épreuve alliée à des circonstances adéquates lui permet de chausser les bottes de son mentor politique, Helmut Kohl. La petite "Ossie" – comme on appelle familièrement les personnes originaires de l'Est – devient présidente du Parti chrétien-démocrate et se retrouve en position de briguer la magistrature suprême du pays.
Près de quinze ans après l'écroulement du rideau de fer, l'Allemagne voit ainsi surgir une personnalité dont l'histoire incarne à la fois l'ancienne division du pays et la volonté d'en surmonter les conséquences. Face à un Gerhard Schröder grandi sans père dans le chaos de l'après-guerre et qui a permis à l'Allemagne de se regarder à nouveau en face, Angela Merkel veut être celle qui redonnera aux Allemands, de l'Est comme de l'Ouest, un moral de gagneur.
Depuis qu'elle est apparue sur l'échiquier politique allemand en se dressant contre un Helmut Kohl, dont la stature continue d'écraser l'Union chrétienne-démocrate (CDU), l'image – mi-sardonique, mi-admirative – de Jeanne d'Arc lui colle à la peau. En 1999, "Angie" exigeait dans une tribune au Frankfurter Allgemeine Zeitung, le grand quotidien de la droite, que l'ancien chancelier assume ses responsabilités à l'égard du parti. "Il faut" , lançait-elle, qu'il réponde à la justice sur les fonds secrets qu'il admet avoir illégalement reçus entre 1993 et 1998.
Le "grand" Helmut Kohl l'avait faite ministre – de la famille et de la jeunesse en 1991, de l'environnement, en 1994. Dans la foulée de la défaite de 1998, elle devient secrétaire général du parti, mais n'a pas encore de contour précis dans l'opinion. Elle reste celle que le vieux mentor appelait "das Mädchen" , la "jeune fille", la gamine. Elue députée dès les premières élections de l'après-réunification, Angela Merkel n'était, jusque-là, qu'une discrète conseillère adjointe de presse pour Lothar de Maizière, chef chrétien démocrate du premier – et dernier – gouvernement démocratique d'une RDA qui n'avait plus que quelques mois à vivre.
Brillamment diplômée de physique à l'université Karl-Marx de Leipzig, en 1978, Angela Merkel est engagée à l'Institut central de physique et chimie à l'Académie des sciences de Berlin-Est, le meilleur de la recherche est-allemande. Huit ans plus tard, elle y passe un doctorat sur les réactions des particules élémentaires de l'hydrogène.
La chute du mur, "Angie" l'aura vécue dans une de ces confortables niches que l'Allemagne de l'Est finissante réservait à qui pouvait encore lui être utile. Même si elle ne participait pas activement au système. Elle n'a d'ailleurs jamais revendiqué la moindre activité dans les mouvements d'opposition qui fleurissaient alors en RDA, notamment dans les milieux protestants auxquels elle appartient. Elle n'a pas non plus participé, en octobre 1989, aux manifestations contre le 40e anniversaire de la RDA, dont la répression brutale fut à l'origine, deux semaines plus tard, de la chute d'Erich Honecker, l'indéboulonnable patron du Parti socialiste unifié (SED). A l'en croire, Angela ne s'est jamais sentie partie prenante du système en place.
Née à l'Ouest, elle est arrivée à l'Est âgée de trois semaines. Son père, Horst Kasner, est pasteur. Il avait décidé d'exercer "par sens du devoir" dans la partie communiste de l'Allemagne. Pour ne pas abandonner les Allemands de l'Est à leur sort. Mais aussi, sans doute, par conviction politique. Aujourd'hui encore, le père et la fille ne semblent pas sur la même longueur d'ondes. Angela aura, en tout cas, vécu une enfance agréable, au milieu de la nature et loin du monde, dans cette belle région de l'Uckermark chantée par Theodor Fontane, le grand écrivain berlinois du XIXe siècle.
A cette époque, la petite Kasner se partage entre deux mondes. La maison familiale d'abord, un îlot de liberté, de discussions et de contacts avec l'Ouest, grâce à la famille de Hambourg et, notamment, aux réseaux de l'Eglise. Là, on est loin des réalités de la "patrie socialiste" chantée à l'école: Angela doit apprendre, déjà, à composer. Ses parents la laissent rejoindre des organisations communistes, les "pionniers" puis les FDJ, les jeunesses communistes. Elle s'arrange comme elle peut de cette dualité.
Pour échapper à la suspicion, elle s'efforce de ne pas se faire remarquer. Elle apprend le conformisme et la discrétion. Elle n'entrera jamais au parti proprement dit. Mais quand la RDA disparaît, elle est encore chargée de la culture dans sa section FDJ de l'Académie des sciences. Sa vie est bien réglée: elle voyage beaucoup dans les pays de l'Est notamment en Russie, dont elle maîtrise la langue.
Comme toutes les jeunes "Ossies", elle s'est mariée très tôt, en 1977. C'est la fin de ses années universitaires. Ulrich Merkel, dont elle se séparera après quatre années de mariage mais dont elle conserve le patronyme, était, comme elle, un scientifique. Divorcée, sans enfant, elle épousera, fin 1998, Joachim Sauer, physicien de l'Est lui aussi, après être devenue secrétaire générale de la CDU.
Lors de la chute du mur, à l'automne 1989, la jeune femme de 35 ans n'échappe pas au maelström qui emporte le régime communiste. C'est une époque de grand bouillonnement politique. Angela Merkel hésite. Elle ne se sent aucune affinité avec les sociaux-démocrates renaissants de l'Est. Pas plus qu'avec le mouvement Neues Forum, qui aura, pendant quelques semaines, le vent en poupe, et dont elle n'apprécie guère, dira-t-elle, le côté "démocratie de base"; quant à la CDU locale, elle a collaboré avec le Parti communiste, alors, pas question ! "Angie" jette son dévolu sur un autre petit parti, Demokratisches Aufbruch, qui se réclame, lui aussi, de racines chrétiennes. Il a notamment été fondé par un ancien pasteur activiste, Rainer Eppelmann. On la voit alors beaucoup circuler dans l'"immeuble de la démocratie" , mis à la disposition des nouvelles formations politiques au coeur de Berlin-Est, sur la Friedrichsstrasse. Elle tient des permanences de presse dans un obscur bureau. Cheveux coupés au bol, vêtue très "ossie" , ce sont surtout ses deux grands yeux timides qui frappent les visiteurs.
Demokratisches Aufbruch appartient à la coalition mise en place pour les élections libres de mars 1990. La petite formation ne survivra pas longtemps au scandale de l'avocat Schnur – l'un de ses deux fondateurs –, qui a servi la Stasi, la police politique. Mais les capacités de travail et d'organisation de l'éphémère porte-parole du parti, pendant la campagne, sont remarquées. C'est ainsi qu'elle est appelée par le nouveau chef de gouvernement, comme porte-parole adjointe. Ce qui lui permettra d'assister, en privilégiée, à tout le processus de réunification.
Angela ne se contentera pas d'un rôle passif. Dans le débat qui oppose le premier ministre, défenseur autodésigné des intérêts de la RDA mourante, et son principal négociateur, le secrétaire d'état Günther Krause, partisan d'une réunification rapide aux conditions ouest-allemandes, la jeune Merkel, selon Jacqueline Boysen, l'une de ses biographes, "prend fermement position" pour ce dernier. Elle ne changera jamais de ligne. Mme Merkel n'aime pas la nostalgie.
Très vite, elle se présente non pas comme une Allemande de l'Est en mission, mais – nuance – "comme une politicienne pour toute l'Allemagne avec des racines est-allemandes" . Au grand regret des stratèges chrétiens-démocrates, à l'Est, beaucoup d'électeurs ne la reconnaissent pas comme une des leurs. Mais, c'est aussi parce qu'elle se voit comme "un produit de la réunification" qu'elle réussira à s'imposer à l'Ouest. Son ambition vaut pour toute l'Allemagne. Elle veut redonner du sens aux valeurs qu'elle juge "essentielles" : liberté, volonté d'entreprendre.
"Dans la concurrence des valeurs de base, nous devons aujourd'hui réaffirmer la signification de la liberté, explique-t-elle dans un livre d'entretiens paru en 2004. Nous ne devons pas oublier nos racines libérales. A celles-ci appartiennent l'autonomie de l'individu, la concurrence, la responsabilité individuelle, et beaucoup d'autres choses encore. De tout cela, ces dernières années, nous avons plutôt manqué."
A quelques semaines de l'imminente élection, nul ne s'est étonné de la voir prendre le risque de nommer Paul Kirchhof dans son équipe de campagne. L'homme professe des théories si "radicales" en matière fiscale qu'elles sont l'objet de violentes polémiques.
Au fond, Angela Merkel a beaucoup de points communs avec les nouveaux dirigeants de l'Est européen. Eux aussi sont passés par le moule communiste. Elle partage leur refus des modèles trop rigides et leur foi en l'initiative individuelle. Sur le plan extérieur, elle a aussi ce besoin de rechercher la proximité avec les Etats- Unis. Elle s'opposera d'ailleurs avec véhémence à la politique irakienne du chancelier Schröder, à son hostilité à l'invasion américaine, à son alliance avec Paris et Moscou. "Angie" veut renouer avec la tradition chrétienne-démocrate: faire l'Europe sans heurter Washington.
Mal à l'aise face aux télévisions, la présidente de la CDU a bien été obligée de se couler dans le moule, d'accepter les services de conseillers esthétiques, d'apprendre à affronter les caméras. Face à Gerhard Schröder, elle a vaillamment tenu sa place dans leur débat télévisé. Le courage est l'une de ses grandes vertus. Ses principaux atouts restent ce subtil mélange de conviction et de sincérité – frôlant parfois la naïveté –, une grande capacité à apprendre vite et à tenir bon. "On la sous-estime souvent, relève Michel Barnier, qui l'a pratiquée dans les conseils européens quand tous deux étaient ministres de l'environnement. Mais elle sait ce qu'elle veut, et négocie avec beaucoup de fermeté."
Sous-estimée, elle l'aura été constamment par tous ceux qui ne voyaient en elle qu'une fantaisie d'Helmut Kohl, soupçonné de l'avoir soutenue parce qu'elle était une femme venue de l'Est, et qu'elle ne pouvait lui faire ombrage. Angela Merkel a patiemment attendu son heure. La démission de Lothar de Maizière, fin 1991, l'a propulsée, à 37 ans, à la vice-présidence de la CDU. Le scandale des fonds secrets du parti lui a ouvert les voies de sa direction. Elle est la seule à pouvoir "tuer le père", affranchir son parti de la tutelle d'Helmut Kohl.
Soupçonnée d'aucune combine, elle saura apparaître comme "la" sauveuse d'un parti, alors en pleine débâcle. En avril 2000, le congrès d'Essen l'élit avec un score quasi soviétique: 96% des voix ! Ce ne sera pas assez pour imposer sa candidature à la chancellerie. Les préventions des grands ténors sont encore fortes. Elle passe son tour, laisse Edmund Stoiber, le ministre-président de Bavière, porter les couleurs de la formation qu'elle dirige. C'est un échec.
En 2005, "Angie" pensait son heure arrivée. Les sondages la donnaient largement en tête. Mais à l'issue du scrutin, dimanche 18 septembre, avec le net recul de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), qui comme le SPD, enregistre l'un de ses plus mauvais scores de l'après-guerre, aucun des deux partis n'obtenait une majorité claire au Bundestag. Le flou est total. Et l'échec cuisant pour Mme Merkel, au point que Gerhard Schröder, qu'elle devance pourtant de quelques sièges, peut encore l'empêcher de réaliser son rêve.
Henri de Bresson
LE MONDE | 10.10.05 | 14h11
Jean-Luc: Mme Merkel n'est-elle pas déjà dans une impasse ? Comment gouverner avec des postes-clés donnés au SPD, et un programme électoral totalement amputé ?
Daniel Vernet: Je crois qu'il faut bien comprendre que la situation et les habitudes politiques en Allemagne sont très différentes des habitudes françaises. Une alliance entre le centre droit et le centre gauche, disons entre l'UMP et le PS, paraît assez invraisemblable. En Allemagne, ce n'est pas le cas. Les deux partis vont élaborer un programme de gouvernement qui leur permettra de coopérer au moins pendant quelques années.
Ce qui est vrai, c'est que pour aboutir à ce résultat, Mme Merkel a dû renoncer à des points importants de son programme et faire des compromis.
Cohelet: La dernière coalition en RFA a duré trois ans (de 1966 à 1969), et on considère que ce fut une réussite. Cette coalition a des enjeux de réforme importants, quelle durée serait nécessaire avant le retour au jeu bipolaire et sans prendre le risque de décrédibiliser la politique ?
Daniel Vernet: Je pense que les deux partis vont se mettre d'accord pour gouverner pendant toute une législature, c'est-à-dire quatre ans. Y parviendront-ils ? C'est une autre question.
On peut raisonnablement penser que cette grande coalition ne durera pas quatre ans, parce que chacun des partenaires essaiera de trouver le moment opportun pour revenir à une coalition avec un petit parti, où il retrouvera un rôle dominant.
Nb: Le seul ministère significatif (l'intérieur et la défense étant plutôt des ministères "droitiers") qu'a obtenu Angela Merkel est l'économie (et encore pour son rival Stoiber). Mais elle est amputée du ministère du travail, dépendante des finances (attribués tous deux au SPD) et soumise au vote d'un majorité de gauche au Parlement. En voulant préserver à tout prix sa place de chancelière, Mme Merkel ne s'est-elle pas fait rouler dans la farine ?
Daniel Vernet: C'est difficile de le dire aujourd'hui, mais il est vrai que le rapport de force n'était pas a priori très favorable à Mme Merkel. Et pour obtenir la chancellerie, elle a dû faire des compromis, non seulement sur son programme, mais aussi sur les ministres. Elle a dû concéder la moitié du gouvernement aux sociaux-démocrates, parce que ceux-ci ont fait pratiquement jeu égal avec elle aux élections.
Karl: L'équipe Schröder avait déjà beaucoup engagé l'Allemagne sur la voie du néo-libéralisme, notamment en matière de mesures sur le chômage, l'accès à la santé, etc. Croyez-vous que la chancelière Merkel disposera de beaucoup plus de marge de manoeuvre pour gouverner ?
Daniel Vernet: C'est difficile de dire que M. Schröder a engagé l'Allemagne sur une voie néolibérale. Il a fait des réformes des systèmes sociaux pour tenter de sauver la sécurité sociale, les retraites, l'assurance-maladie. Mme Merkel devrait continuer dans cette voie. Ce sera plus facile pour elle, car son gouvernement aura la majorité dans les deux chambres du Parlement.
Dinulu: Quel sera le futur de la politique étrangère de l'Allemagne après l'élection d'Angela Merkel comme chancelière de ce pays ? L'Allemagne va-t-elle respecter les traités signés avant cette date et toutes ses promesses ?
Daniel Vernet: En ce qui concerne les traités, bien sûr, l'Allemagne respectera ceux qu'elle a signés. Dans toutes les démocraties, ça se passe comme ça, les gouvernements ne remettent pas en cause la parole donnée.
Deuxièmement, on peut considérer que la politique étrangère de l'Allemagne sera plus "classique" qu'avec M. Schröder, notamment en ce qui concerne les relations avec les Etats-Unis. Mais le ministère des affaires étrangères est promis au SPD, ce qui laisse à penser qu'on assistera à une certaine continuité.
Nb: Savez-vous qui sera ministre des affaires européennes et les implications qui en découlent ?
Daniel Vernet: Pour l'instant, on n'a pas la liste des ministres. On dit qu'Edmund Stoiber, le chef du parti bavarois, hériterait d'un grand ministère de l'économie qui comprendrait aussi les affaires européennes.
Si c'est le cas, on peut penser que l'euro-scepticisme en sera renforcé en Allemagne, à moins que le fait de s'occuper des affaires européennes rende M. Stoiber plus enthousiaste pour l'intégration de l'Europe.
Sd: Quelle sera l'attitude des Verts à l'égard de cette nouvelle coalition ?
Daniel Vernet: Les Verts et les libéraux sont perdants, évidemment, puisque les libéraux pensaient venir au gouvernement avec Mme Merkel et les Verts avaient fait campagne pour continuer à gouverner avec le SPD.
Tinrol: Les Verts et le libéraux sortent-ils perdants ? Quelle va être l'opposition alors que le FDP a fait campagne avec la CDU et les Verts avec le SPD ?
Daniel Vernet: Je crois cependant que les libéraux perdent plus que les Verts. En contrepartie, une grande coalition est plutôt favorable aux petits partis d'opposition, qui peuvent profiter du mécontentement vis-à-vis du gouvernement, et donc des deux grands partis au pouvoir.
Pomodora: Pourquoi dites-vous que les libéraux perdent plus que les Verts ?
Daniel Vernet: Parce que les libéraux comptaient beaucoup sur leur alliance avec Mme Merkel, parce qu'ils ont fait un bon score aux élections du 18 septembre, et ils pouvaient espérer jouer un rôle dans le gouvernement. Ensuite, parce qu'ils sont écartés du pouvoir maintenant depuis sept ans, et que c'est un parti qui n'a pas l'habitude d'être dans l'opposition. Enfin, parce que le Parti libéral s'est présenté avec un programme de réformes assez radical qui ne sera pas repris par la grande coalition.
Hektor: Qui est dans l'opposition ? Quid du FDP et des Verts ?
Daniel Vernet: L'expérience de la première grande coalition de 1966 à 1969 a montré que les extrêmes profitaient de cette situation politique. C'est la période où s'est formée l'opposition extraparlementaire dans les milieux universitaires et où, à l'extrême droite, le parti néo-nazi a connu sa plus forte popularité, popularité qui cependant n'a pas dépassé quelques pour-cent.
Lazar: Peut-on attendre un changement de politique franco-allemande avec la nomination de Mme Merkel à la tête de la chancellerie ?
Daniel Vernet: Je ne crois pas. Je pense que la coopération franco-allemande va continuer comme ces dernières années. En revanche, je ne pense pas non plus à de grandes initiatives franco-allemandes, car la marge de manœuvre française est limitée par la perspective de l'élection présidentielle de 2007.
Helmut: Comment la CDU et le SPD pourront-ils concilier leurs positions sur la politique extérieure ?
Daniel Vernet: La politique extérieure allemande fait l'objet d'un consensus assez large entre les deux grands partis, avec deux ou trois exceptions. Premièrement, la guerre en Irak, et, deuxièmement, l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.
Sur le premier point, les chrétiens-démocrates ont critiqué la manière de Gerhard Schröder, mais ils étaient eux-mêmes opposés à l'envoi de soldats allemands en Irak.
Deuxièmement, à propos de la Turquie, les négociations seront sans doute plus difficiles, mais dans la mesure où elles dureront une dizaine d'années, ce ne sera pas un sujet de discorde immédiat.
Bia: Pensez-vous vraiment que l'euro-scepticisme pourrait gagner du terrain en Allemagne ?
Daniel Vernet: Non, je disais que M. Stoiber est ce qu'en France on appellerait un euro-sceptique qui vient aux affaires européennes, et je ne pense pas qu'il manifeste un grand enthousiasme pour donner de nouveaux pouvoirs à Bruxelles.
Refet: Quel sera, d'après vous, le rôle de M. Schröder dans cette grande coalition ? Nous avons lu aussi qu'il pourrait se retirer de la scène politique ?
Tinrol: S'il reste en retrait du gouvernement, va-t-il continuer d'exercer un leadership sur le SPD ?
Pomodora: Qu'en est-il de l'avenir de Schröder ?
Daniel Vernet: Ce sont trois questions très difficiles, car je ne connais pas les intentions de M. Schröder. Il semble qu'il ne fera pas partie du nouveau gouvernement, mais son obstination au cours des dernières semaines a certainement permis au SPD d'obtenir une place importante dans le nouveau gouvernement et son parti devrait lui en savoir gré.
Pomodora: Pourquoi, selon vous, les Allemands sont-ils si favorables à une grande coalition ?
Daniel Vernet: Les sondages étaient assez divers sur cette question, mais je crois que s'ils sont favorables à une grande coalition, c'est parce qu'ils ont le goût du consensus et du compromis, et ils pensent que les deux grands partis, de droite et de gauche, peuvent s'entendre pour faire les réformes nécessaires.
Aujourd'hui, la décision a été prise de confier la chancellerie à Mme Merkel, mais les négociations sur les questions concrètes, politiques, vont durer encore quelques semaines en Allemagne, et donc il ne faut pas s'attendre à voir un nouveau gouvernement en place avant quelque temps.
Chat modéré par David-Julien Rahmil et Stéphane Mazzorato
LEMONDE.FR | 10.10.05 | 17h36
"U ne grande coalition toute petite" , analyse, lundi 10 octobre, Der Spiegel: pour le grand hebdomadaire allemand, l'atmosphère des négociations entre chrétiens-démocrates (CDU-CSU) et sociaux-démocrates (SPD) sur la formation du gouvernement montre que l'air du temps n'est plus aux grandes réformes. La rupture libérale en matière d'impôts, de marché du travail ou de santé sur laquelle la présidente de la CDU-CSU, Angela Merkel, a fait campagne, serait devenue minoritaire au sein même de son parti.
Impôts. Pour ramener le déficit du budget fédéral sous la barre des 3% du produit intérieur brut (PIB), objectif affiché par la CDU-CSU, on a ressorti un projet de compromis élaboré en 2003 par les ministres-présidents de Hesse et de Rhénanie du Nord-Westphalie. La liste "Koch-Steinbrück" préconisait la suppression de nombreuses subventions et exemptions fiscales. CDU-CSU et SPD s'étaient également entendus, en mars, sur la baisse de l'impôt sur les sociétés de 25% à 19%. Les deux grands partis ont en revanche défendu des points de vue différents sur la taxation des plus hauts revenus, le programme de la CDU-CSU défendant un recul du taux marginal de 42% à 39% alors que le SPD voulait, lui, imposer une surtaxe de 3 points.
Privatisations. Un consensus se dessine sur un projet de privatisation des autoroutes et l'introduction d'une vignette autoroutière pour les voitures, selon le Bild am Sonntag du dimanche 9 octobre, qui évoque une "coalition péage". Un abonnement annuel pour les voitures de 100 euros, sous la forme d'une vignette, rapporterait parallèlement 3 milliards d'euros de recettes annuelles.
TVA sociale. La CDU-CSU souhaitait augmenter de 2 points (de 16% à 18%) le taux normal de TVA afin de diminuer les cotisations sociales. Mais elle est en minorité. Le SPD a contesté vivement cette mesure, également dénoncée par les libéraux.
Marché du travail. La CDU-CSU souhaitait faciliter les licenciements dans les PME ou des accords d'entreprise dérogatoires. Elle favorise une approche négociée plutôt que par la loi. Droite et gauche se sont opposées sur la garantie par la loi des salaires minima de branches. Mais aucun des deux camps n'a proposé de revenir radicalement sur la réforme des allocations chômage.
Santé. Le SPD défend la Bürgerversicherung , un projet de couverture maladie universelle. La CDU envisageait au contraire une assurance forfaitaire quels que soient les revenus. Les deux camps pourraient revenir à l'esprit de leur réforme commune de la santé de 2004: les patients contribuent davantage, mais sans changer de système de soins.
Retraites. La réforme votée sous la précédente législature prévoit de poser la question de l'âge minimum de la retraite en 2008. De nouvelles économies pourraient se révéler nécessaires auparavant.
Nucléaire. La loi de sortie du nucléaire d'ici à 2020, imposée par les Verts, pourrait être remise en question. La CDU-CSU veut prolonger davantage la vie des centrales nucléaires.
Politique étrangère. Mme Merkel défend le retour à une relation plus traditionnelle avec les Etats-Unis, se refusant à choisir entre le lien transatlantique et les relations avec la France. La CDU s'est opposée, pendant la crise irakienne, au front antiaméricain que le chancelier a formé avec Paris et Moscou. Mme Merkel a refusé, pendant la campagne, de critiquer la gestion de l'administration Bush après l'ouragan qui a dévasté La Nouvelle-Orléans. Elle a reproché l'absence de réserves face à la Russie de Vladimir Poutine ou à la situation des droits de l'homme en Chine.
Turquie. Les positions des deux partis sont aussi éloignées que possible sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Le porte-parole de la CDU pour les affaires étrangères, Friedbert Pflüger, l'a rappelé en soutenant l'obstruction de l'Autriche à l'ouverture des négociations entre l'UE et Ankara. Vienne insistait pour que soit mentionnée dans l'accord l'hypothèse d'une solution alternative. Mme Merkel est à l'origine de l'idée d'un "partenariat privilégié".
Société. Droite et gauche se sont opposés sur la transposition de la directive européenne sur la lutte contre les discriminations. La CDU-CSU a bloqué l'adoption du projet de loi du gouvernement Schröder, jugé trop contraignant pour les entreprises.
Famille. Deux programmes s'affrontent: augmenter un système d'abattement fiscal qui se substitue pour les hauts revenus aux allocations familiales et donner aux parents un bonus de cotisations retraites pour la CDU-CSU; améliorer le système de congé parental et créer 230 000 places de crèche, de garde et de jardin d'enfants d'ici à 2010 pour le SPD.
Adrien de Tricornot
Article paru dans l'édition du 11.10.05
E lle rêvait d'être élue dans un fauteuil à la chancellerie allemande et ainsi d'entrer, la tête haute, dans les annales à double titre: comme la première femme, et la première personne ayant grandi dans l'ex-République démocratique allemande (RDA) à avoir jamais dirigé le pays. Si Angela Merkel a désormais toutes les chances, à 51 ans, de prendre la tête du prochain gouvernement, elle a dû se contenter d'une consécration nettement plus modeste.
Contrairement à ses attentes et aux pronostics des sondages, les élections législatives du 18 septembre n'ont attribué que 35,2% des voix à son parti, l'Union chrétienne-démocrate (CDU), et à sa petite soeur bavaroise (CSU). C'est un dixième de point de mieux que le score enregistré, en 1998, par le parain politique de Mme Merkel, Helmut Kohl, alors que celui-ci était poussé vers la sortie, après seize ans de règne.
De son ancien mentor, dont elle s'était distanciée en 1999 après un scandale sur le financement secret de la CDU, elle tient une bonne dose d'obstination. Il lui en aura fallu au sein d'un parti a priori peu ouvert aux femmes et aux conceptions familiales fort traditionnelles. Son ascension n'aura pas été aisée, parmi les barons chrétiens-démocrates qui piaffaient d'impatience dans l'ombre de M. Kohl. C'est pourtant cette femme au sourire triste qui s'est imposée, alors que bien peu lui accordaient une chance réelle. "Qui sous-estime Angela Merkel a déjà perdu", confia un jour un cacique du parti.
Elle est née le 17 juillet 1954 à Hambourg, ville de l'Allemagne de l'Ouest que son père, pasteur, quitta pour aller s'installer à l'Est. C'est là qu'elle a grandi, s'est mariée une première fois et a travaillé pour l'Institut central de physique et chimie, à l'Académie des sciences de Berlin-Est. Après la chute du Mur, M. Kohl, en mal de personnalités est-allemandes pour son gouvernement, est allé chercher cette députée fraîchement élue aux premières élections de l'après-réunification, pour la nommer ministre de la famille et de la jeunesse en 1991.
Celle qu'il avait surnommée "das Mädchen", la gamine, était désormais sur orbite politique. Trois ans plus tard, elle prenait le portefeuille de l'environnement. Puis elle devenait secrétaire général de la CDU après la défaite de 1998. Les circonstances ont souvent joué en sa faveur mais elle a aussi fait preuve d'un tempérament de fer, ce qui lui vaudra d'être comparée à Margaret Thatcher.
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 11.10.05
L a décision en passe d'être annoncée, lundi 10 octobre à Berlin, était attendue avec de plus en plus d'impatience par la population allemande. Les manoeuvres dilatoires du Parti social-démocrate (SPD) du chancelier sortant, Gerhard Schröder, ont fni par irriter un nombre grandissant de citoyens, y compris parmi chez ceux qui avaient voté pour lui lors des élections législatives du 18 septembre. Il aura fallu trois semaines pour que la direction du parti reconnaisse sa défaite, en acceptant que la chancellerie revienne à la candidate du camp adverse, Angela Merkel, la présidente de l'Union chrétienne-démocrate (CDU). Cette attitude, qualifiée de "putsch contre la réalité" par l'hebdomadaire Der Spiegel, aura surtout mis en lumière les faiblesses du SPD.
Le soir même du scrutin, le chancelier sortant avait dérouté par son comportement. Lors d'une émission télévisée, il avait dénié à sa rivale, en des termes inhabituellement cassants pour ce maître du verbe, le droit de diriger le prochain gouvernement. De même avait-il écarté toute éventualité de participer à une grande coalition (CDU-CSU et SPD) dirigée par Mme Merkel. De telles prises de position tranchées allaient pourtant à l'encontre de la volonté des électeurs, qui avaient placé le SPD en deuxième position, derrière la CDU et son aile bavaroise, l'Union chrétienne-sociale (CSU).
Certes, le chancelier sortant, au prix d'une campagne très personnalisée et combative, avait permis à son parti d'éviter la débâcle annoncée, après qu'il eut provoqué la tenue d'élections anticipées, un an plus tôt que prévu. Avec 34,2% des voix, le SPD limitait la casse. Certes, la CDU-CSU, elle, avait non seulement échoué à obtenir la majorité absolue avec son allié libéral, le FDP, mais elle avait encaissé un énorme revers. Son score de 35,2% des suffrages est le troisième plus mauvais jamais enregistré par ce parti depuis la seconde guerre mondiale. Un désaveu pour Mme Merkel, dont la campagne électorale aux accents très libéraux avait effrayé des électeurs qui semblaient a priori mûrs pour un changement d'équipe à la tête du pays.
La faiblesse du résultat de la CDU-CSU a incité M. Schröder à se proclamer le vainqueur moral du scrutin. Les résultats sortis des urnes le donnaient pourtant arithmétiquement battu. Le SPD accusait un retard de plus de 400 000 voix et de trois sièges, bientôt porté à quatre à la faveur d'un scrutin partiel tenu le 2 octobre à Dresde. Bien que son retard fut nettement moindre, le candidat de la droite à la chancellerie en 2003, Edmund Stoiber, le président de la CSU, avait rapidement admis sa défaite face à M. Schröder.
Après l'avoir détesté pour avoir entamé des réformes impopulaires et peu conformes aux idéaux traditionnels de gauche, bon nombre de militants et responsables sociaux-démocrates ont resserré les rangs derrière M. Schröder après le scrutin du 18 septembre. "Nombreux sont ceux qui croient qu'il peut marcher sur l'eau et j'en fais partie ", n'a pas hésité à déclarer Sigmar Gabriel, ancien ministre-président SPD du Land de Basse-Saxe, qui, naguère, l'avait pourtant critiqué. Vendredi dernier encore, l'aile gauche du SPD, peu tendre avec M. Schröder ces derniers mois, s'est alliée à une de ses sections les plus conservatrices pour exiger son maintien au poste de chancelier. Celui-ci s'était entre-temps habilement défaussé sur la direction de son parti en affirmant, le 3 octobre, qu'il respecterait sa décision concernant l'identité du prochain chef de gouvernement.
En ayant fait monter les enchères jusqu'à ces derniers jours, les dirigeants du SPD risquent désormais de décevoir la partie de leurs troupes qui espérait encore en un cabinet de coalition dirigé par M. Schröder. Même si ces revendications ont été formulées essentiellement pour des raisons tactiques, en vue d'obtenir le plus de concessions possibles de la part de la droite, il sera difficile de faire accepter un gouvernement d'union avec cette dernière.
En outre, la formation d'un tel gouvernement pourrait faire le jeu du Parti de gauche. Cette nouvelle formation, qui regroupe anciens communistes de l'Est du pays et déçus de la social-démocratie à la mode Schröder, a déjà réussi à s'imposer comme le quatrième groupe parlementaire avec 8,7% des voix. Son irruption a modifié la donne à gauche, empêchant le chancelier sortant d'être réélu pour un troisième mandat. Nul doute que ce parti attirera tous ceux qui estimeront que le SPD a encore plus perdu de son âme en gouvernant avec la droite.
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 11.10.05
T rois semaines après des élections législatives à l'issue inattendue, Angela Merkel, présidente de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), était en passe, lundi 10 octobre, de devenir chancelière, à la tête d'un gouvernement de grande coalition comprenant la CDU, son aile bavaroise, la CSU, et le Parti social-démocrate (SPD). Après une nouvelle réunion au sommet entre les trois formations, dimanche soir, un projet d'accord faisait l'objet, lundi matin, d'ultimes mises au point.
La décision a été annoncé avant les dernières réunions dans la matinée par la chaîne de télévision publique allemande ZDF et l'agence de presse DPA, citant des sources proches de la CDU. Des porte-parole des deux camps se refusaient, lundi matin, à confirmer l'information, sans toutefois la démentir. Deux conférences de presse distinctes étaient prévues à 14 h 30, après les réunions des instances dirigeantes des partis concernés et une ultime rencontre entre leurs plus hauts responsables.
Avant d'entamer des négociations de fond en vue d'arrêter un programme de gouvernement, les dirigeants de deux camps – Mme Merkel et Edmund Stoiber, président de la CSU, d'un côté, M. Schröder et Franz Müntefering, le président du SPD, de l'autre – étaient convenus de régler l'épineuse question de l'identité du prochain chancelier et de l'équilibre des postes au sein de la future coalition. Après une première rencontre de plus de quatre heures, à huis clos, jeudi soir, suivie d'une deuxième, dimanche soir, les quatre intéressés sont finalement parvenus à un accord, selon les médias locaux.
Les quatre dirigeants devaient également annoncer, lundi, la répartition des forces au sein du probable gouvernement de leur grande coalition. Selon une source au sein du SPD citée lundi par la ZDF, le SPD aurait obtenu huit ministères sur seize, dont celui des affaires étrangères, des finances et du travail, en contrepartie de l'abandon par M. Schröder de ses prétentions et de l'obtention du poste de président du Bundestag à la droite. En face, la CDU occuperait six ministères, en comptant Mme Merkel au poste de chancelière, et la CSU deux autres, selon l'hebdomadaire Focus paru lundi.
Si elles s'avèrent exactes, ces informations mettraient fin à trois semaines d'intense suspense politique. M. Schröder et son parti ont longtemps contesté à Mme Merkel le droit de devenir la première femme à gouverner le pays, bien que son parti, associé à la CSU, soit arrivé en tête du scrutin. L'accord ouvrirait grand la porte à un gouvernement de coalition réunissant deux camps qui, s'ils se sont livrés une bataille électorale sans merci, ne sont pas opposés par des divergences de fond insurmontables.
Des négociations officielles en vue de la formation d'un tel cabinet d'union devraient en principe s'ouvrir dans les prochains jours. Elles auront pour but de finaliser une plate-forme commune en vue de gouverner ensemble pendant quatre ans. Une telle configuration politique a déjà été expérimentée à une reprise au niveau fédéral, à la fin des années 1960, et fonctionne actuellement dans trois régions (Länder) du pays. Si ces négociations officielles aboutissent, Mme Merkel deviendra alors, à 51 ans, la première personnalité venant de l'ex-République démocratique allemande (RDA) à gouverner le pays.
Selon la ZDF et la DPA, M. Schröder aurait donc finalement renoncé au poste de chancelier, qu'il occupait depuis 1998, lorsqu'une coalition entre le SPD et les Verts avait chassé la droite du pouvoir après seize ans de règne. Jusqu'à ces tout derniers jours, la direction social-démocrate, remontée par un score moins catastrophique que prévu (34,2%) et par l'énorme déconvenue électorale de la CDU/CSU (35,2%), avait affirmé que M. Schröder devait rester à la tête du pays et poursuivre les réformes qu'il avait engagées. La droite, elle, estimait que le poste de chancelier lui revenait automatiquement, puisqu'elle avait obtenu le plus important groupe parlementaire (226 sièges contre 222 au SPD).
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 11.10.05
P ar ces temps de pétrole cher, il ne fait pas bon être membre du club des pays pauvres et, de surcroît, importateur net d'or noir. De l'Afrique sub-saharienne à l'Amérique centrale et à l'Asie du Sud-Est, la flambée des cours du brut – le baril a clôturé à 61,84 dollars, vendredi 7 octobre, à New York – a plongé un grand nombre d'entre eux dans un véritable état de choc pétrolier. L'alourdissement de leur facture pétrolière risque même d'annuler les effets bénéfiques de l'effacement récent de la dette multilatérale de 40 milliards de dollars (33 milliards d'euros) de dix-huit pays pauvres. Et de compromettre encore plus l'"objectif du Millénaire", fixé par l'ONU, de réduire par deux en 2015 le nombre de personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour.
L'Asie est particulièrement dépendante du pétrole. "La hausse des cours commence à peser sur la croissance" , et "le premier pays à être touché est l'Indonésie" , souligne une étude du département recherche d'Ixis CIB. Comme dans la plupart des pays pauvres ou émergents, l'Etat y prend à sa charge l'écart entre les cours mondiaux du brut et les tarifs à la pompe. Quand il ne fait pas assurer la charge par ses compagnies pétrolières, comme en Chine. C'est le seul moyen de rendre gazole, essence et fioul accessibles à des populations très démunies.
Las, à chaque flambée du brut, ce mécanisme entraîne de lourdes charges budgétaires, un déséquilibre accru de la balance des paiements, parfois une hausse de l'inflation et une baisse de la monnaie, comme en Indonésie. Lors de la dernière réunion des institutions de Bretton Woods à Washington, fin septembre, le gouverneur de la Banque d'Algérie a invité le Fonds monétaire international (FMI) a "se tenir prêt à soutenir les balances de paiement des pays en développement importateurs de pétrole" .
S'ils n'augmentent pas leur déficit budgétaire, les pays puisent dans les budgets consacrés à la santé ou à l'éducation pour payer la facture pétrolière. Mais ils sont de plus en plus nombreux à recourir, ces derniers mois, au même remède, poussés par le FMI et les pays du G8: la baisse des aides de l'Etat, qui entraîne une hausse des prix à la pompe et des tarifs des transports. Certains y recourent pour limiter une consommation effrénée de pétrole, à l'image de l'Iran, qui dépense 11 milliards de dollars par an en subventions à l'essence.
Pourtant productrice d'or noir, l'Indonésie a annoncé, le 30 septembre, des augmentations allant de 87,5% pour l'essence à 186% pour le combustible de cuisine. Autre puissance pétrolière, le Nigeria a fait de même. Comme le Sénégal, les Comores, le Burkina Faso, le Niger, le Yémen, la Jordanie, la Malaisie ou plusieurs pays d'Amérique centrale. Au Nicaragua, ce sont les transporteurs qui ont suspendu leur activité jusqu'à ce que l'Etat accepte de débloquer une subvention exceptionnelle évitant la hausse des tarifs. Les grèves se multiplient ces dernières semaines, et la colère monte, débouchant parfois sur des explosions de violence.
Au total, le poids de la facture énergétique peut dépasser 5% du produit intérieur brut (PIB) – niveau de la France en 1981 –, comme en Asie, alors qu'il oscille autour de 2% dans les pays de l'OCDE (1,75% pour la France en 2004). Ces surcoûts sont aussi dus à une efficacité énergétique médiocre, mesurée par la quantité d'énergie primaire nécessaire à la production d'un point de PIB: il en faut 42% de plus au Brésil qu'à un pays de l'OCDE, 132% de plus à la Chine et 188% de plus à l'Inde, a calculé l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
D'autres raisons structurelles expliquent la surexposition des pays en développement à la flambée des cours. Certains sont en phase d'industrialisation, et donc très énergivores, alors même que l'absence de sources d'énergie alternatives (hydraulique, nucléaire...) accroît leur dépendance au pétrole. Enfin, ils ont peu de moyens pour faire des économies d'énergie.
Une meilleure intégration régionale permettrait aux pays pauvres ou émergents de mieux gérer ces chocs. L'Union économique et monétaire ouest-africaine, qui regroupe huit pays, plaide pour une "politique énergétique communautaire" (réseaux de pipelines, dépôts...). En Amérique centrale et dans les Caraïbes, de plus en plus d'Etats acceptent les facilités de paiement des hydrocarbures accordées par le président vénézuélien, Hugo Chavez, dans le cadre du projet Petrocaribe lancé en juin, en échange d'accords politiques destinés à réduire l'influence des Etats-Unis dans cette zone.
Jean-Michel Bezat
Article paru dans l'édition du 11.10.05
L es industriels de la chimie européenne partagent le même cauchemar: Reach. Ce sigle anglais (Registration, Evaluation, Authorization of Chemicals) désigne un processus initié, en 2003, par la Commission européenne, et dont la finalité est d'aboutir à une sorte d'autorisation de mise sur le marché pour les molécules chimiques anciennes et à venir. Reach, qui doit entrer en application en 2006, consiste à mettre en place un registre pour évaluer la toxicité environnementale et sanitaire des substances chimiques dont la production est supérieure à 1 tonne dans l'Union européenne (UE).
Sur 100 000 molécules chimiques en circulation dans l'UE, seules les plus récentes (5 000 environ) ont fait l'objet d'études. Reach a donc pour but premier de recenser et évaluer, d'ici 2012, les 30 000 plus importantes molécules en circulation.
Dans les trois premières années, toutes les molécules dont le volume commercialisé dépasse 1 000 tonnes devront figurer en priorité au catalogue.
Reach est la conséquence de l'échec de différentes tentatives d'évaluation menées au niveau national. A partir d'un Livre blanc paru en 2001 (Stratégie pour la future politique dans le domaine des substances chimiques ), la Commission européenne a lancé un processus d'effacement des législations nationales et européennes (près de 40 directives disparaîtront). La gigantesque base de données que Reach vise à constituer sera gérée par une Agence européenne des produits chimiques, basée à Helsinki, en Finlande.
Comme on pouvait s'y attendre, les industriels de la chimie ont d'abord tenté de tuer Reach dans l'oeuf. Puis, comprenant qu'ils n'y arriveraient pas, ils ont trouvé plus habile d'accompagner le processus... pour mieux tenter de l'amender chaque fois que l'occasion leur en était donnée.
La critique principale émise par les organisations professionnelles de la chimie est d'ordre économique. Toutes regrettent que l'Europe seule se préoccupe de la toxicité des produits alors qu'en Chine ou en Inde, de puissants compétiteurs ont émergé qui se déploient sur les principaux marchés sans avoir à assumer le coût de telles dispositions légales.
Le second volet de leur argumentation est la conséquence du premier: les coûts supplémentaires induits par Reach vont réduire la compétitivité de l'industrie chimique européenne pour les décennies à venir. Les 28 milliards d'euros que les industriels prévoient de débourser, si l'on en croit l'étude du cabinet Mercer commandée par l'Union des industries chimiques, entraîneraient une perte de compétitivité qui "obligerait" les industriels à supprimer 360 000 emplois et à délocaliser massivement. Côté Commission, on minimise ces chiffres: le coût final serait de 2,5 milliards à 5,2 milliards d'euros. Soit une charge absorbable sur la durée par les multinationales européennes.
Au-delà de cette polémique sur les coûts, les industriels de la chimie ont mobilisé leurs experts pour tenter d'alléger le dispositif. Ils ont ainsi développé toute une série de contre-propositions qui vont de la définition même de Reach jusqu'au fonctionnement de la future Agence européenne des produits chimiques en passant par le champ d'application de la future réglementation, ses procédures d'enregistrement, le partage des données, les autorisations et interdictions, l'innovation et la substitution d'une molécule par une autre.
Discuter en profondeur chacune de ces contre-propositions ferait courir le risque d'étirer interminablement le processus de décision. Mais un rejet en bloc aurait un autre inconvénient: aggraver le sentiment des chimistes européens d'être de plus en plus mal-aimés en Europe. Avec le risque, réel cette fois, de voir les nouveaux investissements bénéficier uniquement aux pays dont les réglementations sont plus souples.
Yves Mamou
Article paru dans l'édition du 11.10.05
D es cadres en bois, 33 au total, ont été apposés sur les murs de la petite chapelle de Saint-Leu-Saint-Gilles, rue Saint-Denis, à Paris (1er arrondissement). Ils portent les noms, les dates de naissance et de mort de SDF "tombés" dans la rue. Cette église est depuis longtemps le lieu de rassemblement et de refuge de nombreux marginaux de ce quartier.
Qu'il s'agisse de Lahcene Derwiche, Patrick Vanderbrouke, Georges Meliniotis ou René David, tous ont eu droit à une reconnaissance à titre posthume. Une statue de Saint-Benoît-Labre, patron des marginaux, qui avait fait voeu de pauvreté pour être plus proche de Dieu, veille sur eux. "Tout a commencé cet été après la mort de trois des nôtres quand un copain s'est plaint qu'il n'y ait pas de lieu de mémoire", raconte Ch ristophe Louis, responsable de l'antenne Paris-centre de l'association d'Aux captifs, la libération, à l'origine de ce projet.
Jusqu'à maintenant, les amis des SDF défunts devaient se rendre au cimetière de Thiais (Val-de-Marne) dans lequel sont inhumés les indigents. Après avoir reçu l'autorisation du Père Geoffroi, Christophe Louis a imaginé de consacrer une chapelle de l'église à la mémoire de tous ceux qui sont morts dans la rue, faute d'avoir un abri. Le projet est d'autant mieux accueilli que, dans cette église, "les frères de la rue", comme on les appelle ici, sont perçus comme faisant partie de la famille. Grâce à la générosité des habitants, des fonds sont très vite débloqués. Dominique et Michel, deux anciens ouvriers du bâtiment, réalisent les travaux en moins de deux semaines. Un travail à domicile en quelque sorte, "bien loin des regards souvent hautains que nous portent les gens à l'extérieur", souligne Michel.
"Il faudrait que l'initiative soit reprise et pas seulement dans les églises", ajoute le président de la section locale qui souhaiterait une action des municipalités sur le modèle des monuments aux victimes des guerres. "Si la reconnaissance des morts est une chose importante, ce qui compte avant tout c'est la santé des vivants ", souligne Michel. Et il déplore l'aggravation des conditions de vie des SDF, l'augmentation du nombre de femmes dans les queues des soupes populaires et le manque de moyens des travailleurs sociaux. Un pessimisme qu'il tempère ainsi: "Si même les guerres ont une fin alors il doit bien être possible de ne plus à avoir à inscrire des noms sur des murs."
Jonathan Ittah
Article paru dans l'édition du 11.10.05
E lle n'en dort plus la nuit. Depuis quelques semaines, Claude Finkelstein est "déchirée" entre l'espoir de voir aboutir un projet qu'elle a longtemps porté et la crainte qu'il soit récupéré et vidé de sa raison d'être. Claude Finkelstein, c'est la voix de la psy, l'énergique présidente de la Fédération nationale des associations de patients en psychiatrie (Fnap- psy), un petit bout de femme qui porte depuis près de huit ans la parole des personnes souffrant de troubles psychiques.
BIOGRAPHIE 1947 Naissance à Ermont (Val-d'Oise). 1989 Début d'une grave dépression. 1998 Présidente de la Fédération nationale des associations d'(ex) patients en psychiatrie (FNAP-psy). 2005 Journée mondiale de la santé mentale, le 10 octobre. |
En août, le ministère de la santé, reprenant une de ses idées, a entériné la création de 300 groupes d'entraide mutuelle (GEM), sortes de clubs gérés par les patients, où ils peuvent se retrouver entre eux pour discuter et se soutenir dans la maladie. Depuis, des crédits ont été débloqués et les projets se multiplient un peu partout en France, mais la plupart sont portés par des professionnels du soin et non par des patients. "Je sens bien la volonté du soignant plein d'amour qui veut créer son GEM pour aider les malades, soupire Mme Finkelstein. Mais nous, on ne veut pas de ça, on veut pouvoir se prendre en charge nous-mêmes, qu'on nous reconnaisse cette aire de liberté." Si elle tient tant à ce que ces nouvelles structures n'échappent pas aux patients, c'est qu'elle sait d'expérience combien "le soutien des pairs" peut-être décisif quand on est plongé dans la maladie. Dans son cas, cette aide lui a permis de rester en vie, en l'aidant peu à peu à sortir d'une dépression qui la ravageait depuis des années.
Issue d'une famille modeste, Claude Finkelstein a le sentiment " d'avoir toujours connu la violence, d'avoir toujours voulu réparer tous les désordres familiaux". A 42 ans, après avoir été successivement agent immobilier, vendeuse dans une boutique d'art puis caissière chez C & A, elle est tombée malade à la suite de graves difficultés conjugales.
Ignorant tout de la psychiatrie et de sa propre pathologie, elle a erré de généraliste en généraliste. Ils lui donnaient du Prozac, un antidépresseur qui ne lui "faisait rien" mais qui multipliait les effets secondaires: prise de poids, douleurs musculaires, accès de violence...
Peu à peu, elle s'est enfoncée dans la maladie jusqu'à vivre recluse dans son appartement avec sa fillette de 5 ans. Pendant des semaines, elle n'a fait que manger et dormir. "Je m e levais le matin, je mettais un manteau sur ma chemise de nuit, j'emmenais ma fille à l'école, je rentrais et je me couchais, raconte-t-elle, mécanique. Je me relevais à 4 heures de l'après-midi pour aller la chercher, je l'installais devant la télé, et je me recouchais."
De cette période confuse, entrecoupée de plusieurs tentatives de suicide, elle retient l'image d'un yaourt renversé près du canapé, qui est resté plusieurs semaines en l'état, comme pour la narguer. "Je passais devant et, dans mes moments de lucidité, je me disais: il faut que tu le ramasses. Mais je ne pouvais pas le faire !"
Si elle devait définir la dépression, cette chose "incompréhensible pour qui ne l'a pas vécue" , Claude Finkelstein dirait qu'elle est "comme un oeuf de verre épais dans lequel on est enfermé . Vous voyez au travers, c'est légèrement déformant, mais vous n'entendez rien. Et surtout personne ne peut vous toucher", ajoute-t-elle. Elle ne serait sans doute pas sortie de cette forteresse, si elle n'avait finalement rencontré un "psychiatre humble, humain" qui a su, enfin, la soigner.
En 1995, ce praticien l'oriente vers Le fil retrouvé, une association de patients et d'ex-patients dans laquelle elle trouve enfin le soutien dont elle avait besoin. "J'ai alors compris qu'on pouvait s'en sortir au contact de gens formidables qui avaient été malades comme je l'étais, et qui pouvaient comprendre la souffrance que je ressentais , se souvient-elle. C'est comme ça que j'ai été reprise dans la roue de la vie."
L'ancienne déléguée syndicale de C & A trouve alors un sens à sa trajectoire. Tout en reprenant des études de gestion et de ressources humaines, elle décide de porter la voix des patients en psychiatrie, jusqu'ici disqualifiée par les médecins ou étouffée par les familles. Elue en 1998 présidente de la Fnap-psy, qui compte 4 500 adhérents, elle tourne le dos aux anciens discours antipsychiatriques des associations de malades et s'allie aux psychiatres de la Conférence des présidents de commissions médicales d'établissement ainsi qu'aux familles de l'Union nationale des amis et familles de malades psychiques (Unafam). Avec eux, elle signe, fin 2000, la Charte des usagers en santé mentale, première pierre de la reconnaissance des patients en psychiatrie.
Au ministère de la santé, on apprend progressivement à compter avec cette militante hyper-active que les adhérents de sa fédération ont surnommée "la cheftaine". En 2002, elle obtient, contre l'avis des psychiatres, l'accès au dossier médical des patients souffrant de troubles psychiques, inscrit dans la loi du 4 mars sur le droit des malades. En 2005, elle parvient à faire reconnaître, avec l'Unafam, la notion de handicap psychique pour les personnes malades au long cours, qui a été inscrite dans la loi sur le handicap du 11 février. Le même texte reprend, sous l'appellation de GEM, son idée de clubs de patients.
"Par son courage et sa ténacité, Claude a entraîné une véritable mutation en psychiatrie, en ouvrant un espace de parole à des personnes qui étaient disqualifiées ou dans la honte, analyse le docteur Yvan Halimi, président de la Conférence des présidents de CME. Mais son travail est fragile et dérange beaucoup de personnes dans le milieu psychiatrique."
Avec la mise en place des GEM, Claude Finkelstein se retrouve à un moment crucial: à l'occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, lundi 10 octobre, elle aimerait définitivement prouver que les patients en psychiatrie peuvent se prendre eux-mêmes en charge, mais craint une régression dans le regard porté sur eux si son pari échoue. "Les professionnels du soin voudraient nous posséder alors que nous cherchons un partenariat avec eux, explique-t-elle. Il faudra bien admettre que nous, les patients, nous puissions être libres malgré la maladie."
Cécile Prieur
Article paru dans l'édition du 11.10.05
H uit mille quatre cents jours de captivité. Assis dans ce sordide café de Casablanca où il est arrivé en boitant, le regard sombre fixé dans le vide, Abdellah Lamani, 52 ans, en a gros sur le cœur. Il aimerait tant que son pays, que la terre entière sache enfin de quel enfer il est revenu, lui, le petit employé d'une fabrique d'allumettes emporté par le courant de l'histoire dans une des guerres les plus méconnues, celle du Sahara occidental. Un conflit qui oppose depuis 1975, et malgré le cessez-le-feu de 1991, le Maroc et les indépendantistes de l'ancienne colonie espagnole soutenus par l'Algérie.
Les anciens détenus se réjouissent, certes, que le Front Polisario, le mouvement nationaliste sahraoui, ait libéré au mois d'août 404 prisonniers de guerre marocains – les derniers sur presque un millier, selon les comptes officiels. Mais tous savent que l'euphorie sera courte. Car commencer une nouvelle vie dans une société qu'ils ne reconnaissent plus et qui ne les reconnaît pas est une épreuve supplémentaire à laquelle ils ne s'étaient pas préparés.
![]() BERNARD BOUYE
Houcine Tarrada. |
"Nous souffrons du complexe du vétéran, explique Driss El-Yazami, 52 ans, pilote de Mirage F1, libéré en février 2004 après vingt-trois ans de détention. En revenant au pays, on s'imagine que tout le monde est au courant de ce que l'on a fait, on voudrait être considérés comme des héros." Houcine Tarrada, 57 ans, ne comprend toujours pas, lui, pourquoi leur pays ne les a pas encore décorés. "Je suis toujours soldat de deuxième classe depuis 1981, année de mon enlèvement. Les amis qui se sont engagés en même temps que moi sont aujourd'hui adjudants ou adjudants-chefs, c'est injuste."
C'est pour les civils que le retour est le plus cruel. " Mon travail, ma maison, mes terres... J'ai tout perdu, confie Abdellah, locataire d'une chambre de 25 m2, près du stade Mohammed-V à Casablanca. Je n'ai plus de famille. Mes parents sont décédés pendant ma captivité, il ne me reste que ma sœur. Je n'ai pas de pension, je loue pour 2 500 dirhams par mois [227 euros] une licence de taxi. Cela ne suffit pas pour que je puisse vivre avec ma femme. J'ai l'impression d'avoir commis un crime. Le suicide, oui... Depuis mon retour, j'y ai pensé. Mais je suis déjà revenu de si loin..." Du centre de détention de Rabouni, à 25 km de Tindouf, au sud-ouest de l'Algérie, précisément.
"Charger et décharger des camions de munitions, creuser des tranchées, courir avec des briques sur le dos... On travaillait jour et nuit, raconte Abdellah. La première année, je me souviens de ne pas avoir dormi pendant soixante jours. Je ne savais pas si je rêvais ou si j'étais mort." Houcine, Jamaâ, Mohammed et Hamid, ses compagnons de torture, l'écoutent attentivement autour d'un thé berbère. Tous ont la même histoire à raconter.
Des années dans le même treillis, des semaines sans se laver, sans se raser, avec des poux jusque dans la bouche. Un quotidien rythmé par les coups, les humiliations et la faim. "Nous avions droit matin et soir à une ration de riz, témoigne Houcine Tarrada. Il s'agissait souvent du riz tombé des sacs, que les gardes ramassaient au sol avec toutes les saletés, du sable ou des bouts de verre."
![]() BERNARD BOUYE
Abdellah Lamani. |
Hamid Lébène, 49 ans, hoche sa tête de gamin indiscipliné. Il se souviendra toujours de ce 18 juillet 1981. "Avec deux autres prisonniers, nous étions tellement affamés que nous avons essayé de voler un peu de nourriture. La punition fut terrible. Nous devions courir en pleine chaleur et il faisait au moins 50 °C à l'ombre. Des gardes nous poursuivaient en nous donnant des coups avec des fouets fabriqués avec des câbles métalliques, jusqu'à ce que nous tombions. Ils nous ont ensuite attaché les pieds et les mains et frappé avec une lame de ressort de camion, raconte-t-il en tendant deux moignons, vestiges de doigts laissés sous les sévices. A 15 heures, mes deux camarades sont morts." D'un geste sec et nerveux, il enlève son pantalon pour montrer les cicatrices couvrant ses jambes, souvenirs cuisants des câbles.
Hamid, le rebelle au sourire édenté, est devenu une icône de la résistance. Son nom circule avec respect parmi les prisonniers, comme celui d'Ali Najab. Le capitaine de 62 ans, pilote de F-5, est resté vingt-cinq ans aux mains du Front Polisario, qu'il surnomme avec insolence "Front Algesirario" . Pour avoir refusé d'insulter Hassan II, s'être interposé entre un garde et un prisonnier, et avoir tenté de s'évader, le brillant officier formé dans les écoles militaires françaises a subi la torture et les mêmes humiliations que ses soldats. "Toutes les constructions au sud de Tindouf ont été faites par des prisonniers, à coups de fouet , dénonce-t-il. Les hommes étaient traités comme des animaux, à piétiner la boue pour faire des briques. Les mieux portants devaient donner leur sang pour les hôpitaux. Certains devenaient de véritables vaches à sang." A l'instar d'Hamid et d'Houcine, pompés jusqu'à dix fois par mois.
"Pendant six ans, nous avons vécu dans une fosse rectangulaire creusée au milieu de la cour à Rabouni, poursuit le capitaine d'un ton dur. Entassés parfois jusqu'à quarante, sans toit, exposés été comme hiver à la chaleur, au froid, à la pluie. Nous étions des moins que rien, touchés dans notre dignité. On nous faisait ramper en slip devant nos soldats. Nous n'avions pas non plus de toilettes. Nous allions dans la nature. Une punition récurrente consistait d'ailleurs à ramasser les excréments à main nue."
![]() BERNARD BOUYE
Mohammed Hadri. |
Accusé de tentative d'évasion, le lieutenant Mohammed Adri, 50 ans, pilote de Mirage F1, a connu un tout autre genre de punition. "Je suis resté enfermé trente-trois jours dans un conteneur, avec un bidon d'eau, du pain, des lentilles ou du riz, relate-t-il. Et, la nuit, un garde m'empêchait de dormir en frappant régulièrement sur le conteneur. Pour tenir, je pensais à ma femme et à ma fille de dix mois. Mais, le plus dur, c'était d'entendre les autres prisonniers gémir toute la nuit."
Car les pires souvenirs des prisonniers ne sont pas liés à leur histoire, la plus grande torture n'étant pas celle qu'ils subissaient mais celle infligée à leurs camarades. "J'a i vu un garde mettre en marche une bétonneuse alors qu'un prisonnier avait la tête dedans, témoigne Ali Najab. Et un autre rouler sur un détenu qui s'était couché sous un camion pour se reposer." Abdellah ne compte plus les exécutions auxquelles il était obligé d'assister. "Je ne sais pas combien j'ai vu de soldats attachés à un arbre, la tête en bas, frappés à coups de manche de pioche, de barre de fer, de pied... jusqu'à ce que mort s'ensuive."
Chaque matin, Mohammed Allali priait Dieu pour que la journée se passe sans plus de 40 coups de câble, la moyenne quotidienne. "Je préférais la faim aux coups" , avoue-t-il en montrant l'épaisse cicatrice qui traverse son crâne rasé, marque indélébile d'une crosse de kalachnikov. "Moi aussi , ajoute Hamid. Même lorsque les gardes du Polisario nous jetaient des bouts de pain pendant la prière."
Plus qu'à leur endurance physique, les détenus qui s'en sont sortis sans devenir fous doivent leur survie à un mental d'acier, entretenu par le souvenir de leurs proches. "On vivait presque en famille, se rappelle l'adjudant chef Driss El-Yazami. Quand nous recevions des photos ou des lettres de nos familles, nous les regardions ensemble. Au fil des ans, on voyait grandir les enfants. Nous fêtions même leurs anniversaires. Quand j'ai appris la mort de ma mère, Ahmed, mon ami, a pleuré plus que moi..."
L'arrivée du CICR (Comité international de la Croix-Rouge) dans les camps, en 1994, a amélioré les conditions de détention. C'est ainsi que les prisonniers ont pu recevoir des lettres et des colis. "Il fallait tenir pour nos familles , souligne Ali Najab. Nous n'avions pas le droit de les priver de notre retour."
Latifa Johari n'a jamais cru en la mort de son mari, Ahmed Ben Boubker, le premier pilote capturé, le 21 novembre 1976. "Son avion abattu, il fut porté disparu. On m'envoya un certificat de décès et les condoléances du roi, mais je ne pouvais me résigner à sa mort , jure-t-elle, les larmes aux yeux. Deux mois plus tard, en allumant la radio, j'ai reconnu sa voix. Il déclinait son identité dans une émission... Mais le plus beau jour de ma vie est certainement celui où j'ai reçu le coup de fil m'annonçant sa libération."
Pour conjurer l'attente interminable, Atika, la femme d'Ali Najab, professeure retraitée d'histoire-géographie, a repris ses études et publié un livre, 25 ans dans la vie d'une femme de prisonnier, recueil de tous les poèmes rédigés à son époux absent. "Tous les moyens étaient bons pour entrer en contact avec lui, souligne-t-elle. Je demandais aux journalistes qui me sollicitaient de lui porter mes lettres. Je suis même allée jusqu'à Paris pour récupérer des photos de lui."
Une photo, c'est tout ce qu'il restait à Siham Laghrassi pour se construire sans son père, Mohammed, un mécanicien enlevé alors qu'il rentrait du travail dans la région de Tan-Tan et libéré en 2002, après vingt-quatre ans de détention. Une photo et le souvenir de ses mains. "Parce qu'il m'emmenait souvent sur sa moto, et je ne voyais que le guidon, raconte la jeune femme de 29 ans en riant. Nous sommes restés sans nouvelles pendant dix ans jusqu'à ce que ma mère reçoive une de ses lettres. Pour nous élever, elle a enchaîné des petits boulots. Je me dis que cela a dû être très dur. Elle n'y voit quasiment plus aujourd'hui. Sans doute d'avoir trop pleuré."
A leurs yeux, l'homme qu'elles aimaient est resté le même. Les traits plus creusés, bien sûr. Les cheveux plus gris, sans doute. Le bilan médical est moins romantique. Diabétiques, rongés par l'arthrose, les mains tremblantes et les dents gâtées, les jeunes hommes dans la force de l'âge sont devenus des quinquagénaires amaigris, à la santé précaire.
![]() BERNARD BOUYE
Jamaâ Ayyoub. |
Jamaâ Ayyoub, 56 ans, regarde avec tristesse sa jambe gauche, plus courte de 8 centimètres. Le vigoureux soldat qui participa à la guerre du Kippour entre Israël et la Syrie, en 1973, n'existe plus. Le presque vieillard déplace difficilement ses 60 kilos à l'aide d'une béquille, impuissant face aux gamins qui l'imitent dans la rue. S'ils savaient. "Je suis tombé sur le champ de bataille, une balle dans le genou, explique-t-il. Après six jours dans le désert, à me nourrir de broussailles, j'ai perdu connaissance. Quand le Front Polisario m'a retrouvé, ils ont essayé de soigner l'infection en me plâtrant jusqu'au cou. Je suis diminué physiquement , admet-il, mais je souffre surtout moralement. Sans calmants, je n'arrive pas à dormir."
Les cauchemars et les rêves d'évasion contrariés n'épargnent aucun ex-détenu. Ils se savent plus irritables, plus impatients, et culpabilisent d'imposer cela à leurs proches. "Avec ma fille, on essaie de cohabiter, mais nous avons des problèmes de communication, confesse Mohammed Adri. Les psychologues de la Croix-Rouge nous avaient prévenus que la réinsertion serait difficile, que nous n'étions plus comme les autres." Entre un stage Internet à la base militaire de Sidi Slimane et les activités à la ferme qu'il loue avec son ami Driss El-Yazami, le pilote tente de renouer avec cette société qui a avancé sans lui.
Abdellah Lamani, de son côté, a entrepris de rassembler les victimes civiles pour réclamer des indemnités et la libération de la poignée de prisonniers qui, selon lui, n'auraient pas été recensés par le CICR et resteraient détenus. Dans le même esprit, Ali Najab monte une association de prisonniers de guerre. Des célibataires se sont mariés et certains ont déjà un enfant. Une façon de rattraper le temps perdu, de tourner la page vers un futur qu'ils voient se dessiner avec incertitude. Et, quelque part, de pardonner.
" Au mois de mars, j'ai rencontré un des soldats qui m'avaient enlevé et torturé , raconte Abdellah d'un air serein. Nous nous sommes reconnus. Il avait l'air tellement gêné. Finalement, nous nous sommes embrassés et nous avons ri. Oui, j'ai déjà pardonné à mes tortionnaires. Mais c'est aux familles des victimes qu'il faut demander cela. Car ce sont les morts qui doivent pardonner. Pas les survivants."
Mélanie Matarese
Article paru dans l'édition du 11.10.05
N ous nous sommes revus lors du dixième anniversaire du génocide de Srebrenica. Par-delà la douleur et le souvenir de ces crimes honteux, nous nous sommes associés aux débats organisés à Sarajevo autour de cette date terrible du 11 juillet. Nous étions également à Srebrenica pour écouter les mea culpa des représentants de la communauté internationale: le président de la Banque mondiale, le représentant du secrétaire général de l'ONU (Annan manquant une fois de plus l'occasion de se racheter auprès des Bosniaques), le ministre britannique Jack Straw (qui oublia de dire qu'il parlait au nom des Vingt-Cinq), Javier Solana (qui s'est exprimé par le biais d'articles de la presse britannique).
Tous ont demandé pardon. Mais ces mea culpa n'ont rien apporté de substantiel au "plus jamais ça" répété à chaque fois que cela arrive à nouveau. Autour de nous, les familles des 8 400 personnes assassinées qui supportèrent, avec une patience infinie, ces discours de culpabilité convenus. Face à nous, les derniers 610 cadavres identifiés qui avaient été extraits des fosses communes.
Nos réflexions nous ont amenés à certaines conclusions que nous tenterons d'exposer. La diversité de nos origines (selon les termes de "Dayton", Haris est musulman, Dany est juif et José Maria est chrétien) et de nos parcours ne nous a pas empêchés de converger sur l'essentiel des conclusions.
Nous avons appuyé sans réserve le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Au fil du temps, ce tribunal a transformé une grande partie des crimes commis en faits prouvés, il en a déterminé la nature et la portée (crimes de guerre et contre l'humanité, génocide...) et continue à déterminer le champ de leur application. Nous reconnaissons également l'importance des accords de Dayton [signés le 14 décembre 1995 et mettant fin à la guerre en Bosnie] à un moment où le processus de destruction yougoslave remplissait la Bosnie-Herzégovine de fosses communes et couvrait de honte une communauté internationale lâche, activement ou passivement complice, comme le laissèrent transparaître, de manière maladroite et incomplète, les discours de la commémoration. Il fallait donc en finir avec la mort systématique pour seul horizon et la souffrance comme factum .
Pour toutes ces raisons et au nom du "plus jamais ça" qui nous anime, il nous apparaît indispensable d'évaluer, dix ans plus tard, le contenu d'accords imposés (certes bienvenus à l'époque) qui correspondent plus à un texte de cessez-le-feu qu'à un accord constitutionnel garantissant un futur viable à une Bosnie-Herzégovine enfin démocratique et homologable aux standards requis non seulement pour être candidate à l'Union européenne mais également membre digne du Conseil de l'Europe.
La partition ethnique régissant le partage du pays en entités, qui sous-tend ces accords, constitue en fait la meilleure garantie pour la domination des partis nationalistes. Dix ans plus tard, certains sont surpris par la difficulté de faire émerger des formations s'affirmant selon les valeurs de la démocratie et de la citoyenneté et non en fonction des idéologies ethniques et religieuses. Les co-premiers ministres, les présidences tournantes (entre musulmans, orthodoxes et catholiques...) ne font que renforcer les pires options pour le futur d'un pays qui aspire, ou, pour le moins, devrait aspirer à rejoindre l'Europe citoyenne. De plus, il s'agit d'un sabotage permanent pour les partis représentant une alternative à la logique qui a conduit à la guerre. Assez curieusement, une même question a fini par émerger tant chez nous que chez les interlocuteurs que nous avons rencontrés: "Pourquoi pas un président judéo-bosniaque ?" La Bosnie-Herzégovine est le seul pays en Europe qui l'interdise en vertu d'accords souscrits avec la bénédiction, l'appui et l'impulsion de la communauté internationale. Même un renégat agnostique n'appartenant à aucune des trois ethnies et religions reconnues dans Dayton ne pourrait donc accéder à cette fonction.
Autre piège terrible dont les répercussions sont évidentes en termes de corruption: le critère appliqué lors du processus de privatisation promu par les organismes internationaux. Ce critère n'est autre que l'équilibre ethnique. Non, ce n'est pas une blague ! On ne s'attache ni à l'efficacité, ni aux aptitudes, ni à l'infrastructure, ni même à l'honnêteté, mais à la pondération entre entités ethniques. Et quels sont les représentants de ces entités ? Les partis fondés sur les ethnies.
A l'heure actuelle, nous pouvons donc dire que Dayton a été le meilleur accord possible contre les génocides (peut-être pas pour leurs victimes). Néanmoins, ces accords comportent des mécanismes qui autorisent leurs actuels bénéficiaires (pour des raisons de pourcentages au niveau de la représentation) à bloquer l'application des clauses permettant de les modifier.
Qui, dans la République serbe de Bosnie, prendrait l'initiative de changer un texte lui permettant d'exercer le monopole du contrôle sur 49% du territoire ? Dayton inclut des mécanismes de sabotage permanent: les Serbo-Bosniaques peuvent donc empêcher tout changement de la lettre de Dayton sans se sentir obligés de respecter ces accords, que ce soit selon la lettre ou selon l'esprit (c'est le cas pour le retour des réfugiés des autres groupes). En fin de compte, cet enchevêtrement pervers de textes et d'esprit des textes rend le Parlement et les institutions étatiques parfaitement inutiles.
Alors que nous ne cessons de répéter que le terrorisme islamiste ne changera pas notre modèle citoyen, démocratique, laïque..., nous continuons à défendre, pour la Bosnie, un modèle basé sur les concessions au génocide (tel que le définit le TPI, organisme des Nations unies) et aux génocidaires. Bel exemple !
Dayton contient des dizaines de mécanismes pour que rien ne change, mais aussi quelques-uns pour évoluer. Ce sont précisément ceux-là que nous devons exploiter avec un appui sans faille des démocraties. Nous, c'est-à-dire avant tout les citoyens de cette Europe unie et confuse qui ne sait pas très bien où elle va, bien que certains d'entre nous sachent parfaitement jusqu'où elle ne doit pas aller. Et surtout pas vers des options ethniques ou religieuses au détriment des libertés citoyennes.
Nous pouvons et nous devons concevoir une vision d'ensemble pour le futur de la région, sans pour autant tout confondre. La Bosnie n'est pas le Kosovo. Et certains arguments "subtils" du type "la Bosnie en échange du Kosovo" ou "le Kosovo en échange de la Bosnie" nous donnent la chair de poule. Et nous espérons être plusieurs millions à partager cette réaction. La communauté internationale, et l'UE en particulier, ne doit pas conforter une séparation ethnique et religieuse complètement folle qui rend extrêmement difficile l'expression de forces modernes, européennes, démocratiques. Aujourd'hui, ces forces sont pénalisées par des accords qui furent bienvenus à un moment donné, mais qui, dix ans plus tard, représentent surtout la garantie que rien ne changera.
Il est temps de remettre en cause leurs fondements afin d'arriver à une Bosnie-Herzégovine adaptée au modèle que nous prétendons défendre en Europe. A moins de croire que jamais ses tribus n'accéderont au statut de citoyens européens. Si tel est le cas, tant pis pour nous, nous ne ferons qu'alimenter l'argumentaire des fanatismes.
Si, au contraire, nous pensons qu'il n'existe ni facteur génétique ni déterminisme divin, nous devons agir afin d'éviter que ne se consolident les déterminismes ethniques et nous orienter vers une Bosnie-Herzégovine démocratique qui démontrerait aux autres territoires de l'ex-Yougoslavie qu'ils peuvent et doivent accéder à une citoyenneté européenne de plein droit, et devenir des membres de cette Europe qu'avec tant d'efforts et de soubresauts nous nous engageons à construire.
Daniel Cohn-Bendit est président du groupe des Verts au Parlement européen.
José Maria Mendiluce a été coordinateur pour la mission humanitaire de l'ONU en ex-Yougoslavie ainsi que député européen socialiste.
Haris Silajdzic fut premier ministre et ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine.
par Daniel Cohn-Bendit, José Maria Mendiluce, Haris Silajdzic
Article paru dans l'édition du 11.10.05
La privatisation de la Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM) est de loin la plus brûlante. Le conflit entre le gouvernement et les syndicats – CGT d'un côté, avec des marins sur une ligne oppositionnelle à Bernard Thibault, Syndicat des travailleurs corses (STC) de l'autre, radical et nationaliste – est dans l'impasse depuis trois semaines. La grève sur le port autonome de Marseille a été suspendue, mais les tensions restent lourdes. Le conflit a basculé plusieurs fois dans la violence, attisé par des nationalistes qui tentent de s'en saisir pour retrouver quelque crédit.
Inutile d'alourdir encore des coûts, sociaux, économiques et politiques, déjà très élevés. Il est temps de trouver une issue. M. de Villepin a envoyé lundi 10 octobre à Marseille, avec Thierry Breton et Dominique Perben, ses messagers de la dernière chance. Ils devaient essayer d'arracher un accord avec des syndicats qui veulent à tout prix éviter le dépôt de bilan de la SNCM.
M. de Villepin et M. Thibault sont dans un jeu de rôles ayant un intérêt commun à trouver une sortie honorable à la SNCM. Le premier ne veut pas écorner son image sociale toute fraîche. Le second joue son autorité – voire sa place, à six mois du congrès de la CGT, en avril 2006 – et s'emploie à résister à ses "durs", qui réclament une "généralisation" du conflit. Les contacts du week-end ont amené la CGT à faire une concession importante. M. Thibault et les marins cégétistes n'exigent plus que le capital de la SNCM soit détenu à 51% par l'Etat. Ils évoquent le "maintien dans le giron du service public" et la pérennité des missions de celui-ci. M. de Villepin a répondu dans le même esprit d'ouverture.
Cette recherche de "deal" avec la CGT pourrait s'étendre à d'autres privatisations en cours. Pour le réseau autoroutier, où l'affaire a été aussi très mal engagée, le premier ministre va surtout devoir composer avec sa majorité, braquée par sa méthode. Il en va autrement à EDF. Quand l'ouverture de capital avait été engagée, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'économie, avait cherché à négocier un passage en douceur avec la CGT.
M. de Villepin est confronté à la même nécessité aujourd'hui. Alors qu'une assemblée générale est prévue le 11 octobre, la décision d'introduire EDF en Bourse n'est pas définitivement prise. Le 6 octobre, sur France 2, le premier ministre n'a pas caché son hésitation, y mettant même des conditions. M. de Villepin va-t-il reculer sur cette "privatisation" emblématique ? La question est de savoir si sa majorité acceptera qu'il ait l'air de perdre la face devant la CGT.
Article paru dans l'édition du 11.10.05
henrikardo ♦ 11.10.05 | 13h52 ♦ De toute façon, aujourd'hui ce sont les "marins"de la SNCM, demain ce seront les cheminots de la SNCF après-demain les aviateurs de AIR FRANCE, ensuite les profs de L'EN, puis viendront les postiers des ex PTT, EDF ne devrait pas être en reste, en attendant que le RATP ne prenne le relais... bref l'ensemble du pays réel,exposé,créateur de richesse, de commerce extérieur et d'emplois...confronté aux dures réalités des lendemains incertains, du chomage qui guette et des retraites non garanties...
Y.G ♦ 11.10.05 | 12h26 ♦ Au vu de ca qui se passe à Marseille ,peut-être aura t-on un jour le courage de montrer que la CGT est un syndicat destructeur d'emplois, le mur de Berlin sépare- t'il encore certains hémisphères cérébraux ?
MICHEL F. ♦ 11.10.05 | 11h53 ♦ Lorsqu'une société publique est confrontée à la concurrence, on s'aperçoit de suite du gâchis économique de la gestion de celle-ci et des surcoûts qui sont à la charge des citoyens par les impôts...Si l'on regarde du côté de l'administration, où il n'y a pas de concurrence, ça doit être le même gâchis et donc un " scandale "... Le Monde devrait davantage explorer ces questions fondamentales pour l'avenir. Efficacité des services publics ? Peut-on encore se poser cette question en France ??
robert m. ♦ 11.10.05 | 11h31 ♦ Comme le syndicat CGT surpuissant des messageries parisiennes, le syndicat surpuissant des SNCM, depuis des decennies, fait de la surenchere et, au final, plombe sa propre entreprise avec le resultat que l'on sait. La defense des travailleurs est une chose, l'irresponsabilite demagogique en est une autre
Jean-Michel D. ♦ 11.10.05 | 11h29 ♦ certes les pouvoirs publics sont coupables d'avoir laissé s'édifier une forteresse CGT-Corsico-maffieuse, mais il faut maintenant en finir. Ne nous apitoyons pas sur les "terribles horaires de travail" des marins SNCM: ce sont ceux de tous les marins du monde et crevons cet abcès que la continuité territoriale ne justifie en rien.
henrikardo ♦ 11.10.05 | 10h34 ♦ Quand l'Etat a depuis des décennies pris l'habitude d'exercer sa mission de puissance publique en se réglant sur le degré de nuisance infligé par ceux qui sont censés le servir, personne ne peut s'étonner qu'une fois de plus, quelques énergumènes d'une autre époque puissent mettre en danger la marche normale de la société.
azebolu ♦ 11.10.05 | 09h55 ♦ D'un côté la SNCM, 2500 employés-fonctionnaires, de l'autre SARDINIA, 1500 employés du secteur privé, tout cela pour le même tonnage, les mêmes liaisons, les pratiquement mêmes navires, en tout cas les mêmes prestations. D'un côté la SNCM déficitaire, de l'autre la SARDINIA qui dégage des bénéfices. Il est évident que la CGT défend encore une fois une bande de fainéants irresponsables et saccageurs. La grève dure, le déficit se creuse. C'est la honte !!!
karine b. ♦ 11.10.05 | 00h42 ♦ Je m'effare encore que l'on puisse opposer ainsi "lois des marchés" et Service Public dans un conflit qui montre, comme pour le référendum du 29 mai dernier, l'attachenment collectif au bien public, qu'il soit de déplacement, de fourniture en énergie ou de santé... Il n'y a pas à opposer ainsi, sauf à le faire de manière rhétorique, le bien public et la propriété privée, car ce qui m'appartient (privé) n'est jamais qu'une parcelle d'un bien public que je m'octroie...
LibertéEquitéSolidarité ♦ 10.10.05 | 22h48 ♦ Quel est le rôle exact de l'extrème-gauche dans le conflit corsico-marseillais qui dépasse de loin le pire des scénarii ? Veut-elle faire perdre la face à la CGT et à son secrétaire général, prêt à négocier pour sauver l'entreprise ? Villepin cherche-t-il à "aider" ce syndicat menacé sur sa gauche par l'infantilisme gauchiste ? Comme si la société française avait bien besoin de syndicats, non seulement faibles et divisés mais de plus en plus déconsidérés ! Une menace pour notre démocratie ?
MARCEL G. ♦ 10.10.05 | 21h21 ♦ La SNCM c'est l'arbre qui cache la forêt. Le vrai problème c'est la réforme de l'Etat qui attend depuis longtemps et qui attendra encore 19 mois,au moins!!!!.De toute façon que peut-on espérer de gens qui sortent de la même école de fonctionnaires et, en plus, de la même promotion comme hollande et de Villepin?
Repman ♦ 10.10.05 | 18h41 ♦ Ces palinodies sur la SNCM jettent une lumière crue sur l'incapacité de nos gouvernants à prendre des décisions courageuses pendant qu'il est encore temps, avant que la situation ne devienne explosive. Quand on voit la façon dont ce dossier, somme toute mineur, a été géré, on a froid dans le dos quand on pense aux sujets autrement plus complexes que sont le déficit de la Sécurité sociale ou les 1100 milliards d'euros de la dette publique qu'on « traîne » depuis des années.
monrog ♦ 10.10.05 | 18h26 ♦ Le Premier ministre affiche sa détesation de la rupture, qui fait selon lui couler le sang. Mais à vouloir être libéral et social à la fois on court le risque de l'immobilisme. Trop d'action trend impopulaire mais trop d'inaction tue politiquement. Choix difficile.
vorslov ♦ 10.10.05 | 17h03 ♦ A lolo, vous avez tout faux,votre propos est à l'envers. Butler sort de l'ENA et est un ancien des cabinets gouvernementaux. On ne voit vraiment pas des US s'interresser à la SNCM qui est typique de l'exception économique française;de même que la Corse est typiquement de tradition culturelle française!et la conclusion c'est ne pas privatiser pour sauvegarder les intérêts privés(=des salariés)
vorslov ♦ 10.10.05 | 17h03 ♦ A lolo, vous avez tout faux,votre propos est à l'envers. Butler sort de l'ENA et est un ancien des cabinets gouvernementaux. On ne voit vraiment pas des US s'interresser à la SNCM qui est typique de l'exception économique française;de même que la Corse est typiquement de tradition culturelle française!et la conclusion c'est ne pas privatiser pour sauvegarder les intérêts privés(=des salariés)
Flying-Lolo ♦ 10.10.05 | 15h51 ♦ L'axiome du libéralisme à l'oeuvre: privatiser est forcément gage de meilleure gestion, de meilleur efficacité, etc... Idéologie et malhonnêteté intellectuelle, quand tu nous tiens...Que l'on demande aux dirigeants de la SNCM ce qu'ils ont fait - ou pas fait !! - pendant des années pour mettre cette société en difficulté alors que des fonds de pensions américains s'y intéressent encore... ?!Et si cette mise en déroute n'avait qu'un but: privatiser au service d'intérêts particuliers...!!!
cohelet ♦ 10.10.05 | 15h39 ♦ En conclusion: la question serait aussi de savoir si le Premier Ministre perdrait la face s'il emportait l'adhésion de la CGT sur une légère ouverture du capital d'EDF (sauf la production nucléaire)tout en restant ferme et sans concessoins sur la SNCM avec une CGT qui accepte les 25%Etat et 9% salariés pour la privatisation de la SNCM.
jacklittle ♦ 10.10.05 | 14h51 ♦ L'Edito du Monde nous dit privatisation,alors qu'il n'y en a aucune:SNCM,c'est passer la "patate chaude"dans d'autres mains,autoroutes c'est confier la concession des autoroutes au secteur privé,pour se faire de l'argent frais,EDF c'est peut-être une légère ouverture de capital,vous pourrez parler de privatisation quand le ou les gouvernements auront cédé plus de 51% du capital d'EDF,en ce qui concerne le parc nucléaire,il pourra être cédé à une Sté idoine créée pour que l'Etat contrôle le parc
L e mot de mondialisation, qui suscite aujourd'hui l'indignation de tant de bons et de moins bons esprits, date de 1949, mais il a changé de sens. Il était né de la campagne du "citoyen du monde" Garry Davis, qui avait renoncé à son passeport américain en faveur d'un gouvernement mondial. Les habitants de la planète étaient invités à s'inscrire sur un registre et les communautés territoriales à se mondialiser.
Appuyée par Albert Einstein, Albert Camus, David Rousset, Vercors, André Breton, la campagne avait eu un assez large succès, diverses villes du Midi et l'île de Sein s'étant jointes au mouvement, et le département du Lot était en train de célébrer sa mondialisation, le 25 juin 1950, lorsque les Coréens du Nord envahirent leur soeur du Sud, portant un coup fatal aux illusions "mondialistes". Mais l'idée qu'exprime aujourd'hui le mot de mondialisation, en anglais globalization , est bien antérieure.
Sans remonter jusqu'à Alexandre le Grand, qui ambitionnait de soumettre à son sceptre, au IVe siècle avant J.-C., la totalité de l'écoumène, autrement dit l'ensemble des terres habitées, et réussit à étendre son empire de la Macédoine aux rives de l'Indus, comment ne pas rappeler que les Habsbourgs s'étaient donné pour devise "A E I O U": "Austriae est imperare orbi universo" ("Il appartient à l'Autriche de commander l'univers") et que, à l'époque de Charles Quint, elle ne fut pas loin d'y parvenir ?
C'est à bon droit que Serge Gruzinski donne à la première partie de son superbe ouvrage Les Quatre Parties du monde (éd. La Martinière), dans laquelle il retrace l'impact de la conquête de l'Amérique, le titre de "Mondialisation ibérique".
Marx et Engels ne l'avaient pas attendu pour écrire dans le Manifeste du parti communiste , en 1848: "La grande industrie a fait naître le marché mondial, que la découverte de l'Amérique avait préparé. Le marché mondial a donné une impulsion énorme au commerce, à la navigation, aux voies de communication..." Il y en a plusieurs pages sur ce ton, où se trouve tout à la fois exalté et dénoncé le rôle de la bourgeoisie, aussi néfaste à leurs yeux qu'indispensable à l'accomplissement de leur prophétie.
Déjà, dans L'Idéologie allemande , rédigée trois ans plus tôt, grand-père Karl avait écrit: "Le prolétariat ne peut exister qu'en tant que réalité "historique et mondiale", de même que le communisme, action du prolétariat, n'est concevable qu'en tant que réalité "historique et mondiale" (...) Cela veut dire que ces individus (les acteurs de ces transformations) mènent une existence qui se rattache directement à l'Histoire universelle."
La deuxième partie du XIXe siècle et le début du XXe, âge d'or de l'expansion coloniale et de l'impérialisme, "stade suprême, selon Lénine, du capitalisme", ont largement confirmé cette approche, et 1914 voit le déclenchement de la première des guerres "mondiales". Trois ans plus tard, les deux futures superpuissances poseront quasi simultanément leur candidature à l'hégémonie également "mondiale", Lénine ne doutant pas que la révolution ferait rapidement tache d'huile en Europe et en Asie et le président Wilson s'imaginant rendre, avec la Société des nations et sa charte inspirée de la Constitution des Etats-Unis, le monde "sûr pour la démocratie" . Très vite cependant il est désavoué par le Congrès, tandis que l'Union soviétique, épuisée par la guerrre civile, porte à sa tête, en la personne du redoutable Staline, l'avocat du "socialisme dans un seul pays".
La crise de 1929, "mondiale" s'il en fut, ruine les calculs des Briand, des Stresemann et autres disciples de Kant qui croyaient à la paix perpétuelle, et l'Europe qu'ils voulaient fédérer se hérisse de canons, en attendant qu'Hitler la plonge dans une guerre que Pearl Harbor, deux ans plus tard, achèvera de rendre encore plus "mondiale" que la précédente.
De Gaulle, en apprenant la nouvelle, confie au chef de ses services secrets, le colonel Passy, sa crainte que la prochaine étape, une fois acquise une victoire alliée qui pour lui ne fait désormais plus de doute, ne soit une grande guerre entre l'Amérique et la Russie. Cette guerre a bien eu lieu et, même si tout le monde l'appelle "froide", elle a fait beaucoup plus de victimes que celle de 1914-1918: de la Corée à l'Indochine, de l'Ethiopie à l'Afghanistan elle a été encore plus "mondiale" que celle de 1939-1945. Mais l'existence des armes nucléaires a retenu les deux champions d'en venir directement aux mains et, en dépit de phases de tension extrême, la "coexistence" a pris petit à petit la place de l'affrontement.
Dès 1968, le sociologue canadien Marshall McLuhan n'hésite pas à parler de "Global Village", de village planétaire. L'expression reflète bien la prodigieuse transformation des rapports internationaux qu'a introduite la véritable révolution numérique intervenue dans des domaines aussi variés que la progression démographique, passée en quelques années de 1,1% à 1,6%, la durée de la vie, la production tant industrielle qu'agricole, ou la puissance de destruction: les deux bombes utilisées à Hiroshima et à Nagasaki représentaient l'équivalent des deux tiers des bombes jetées sur l'Allemagne pendant toute la guerre, et la première bombe thermonucléaire, celle d'Eniwetok, en 1952, l'équivalent de deux cents Hiroshima.
Même constatation à propos des moyens de communication, des avions et des fusées qui effacent les distances, du téléphone et de l'Internet et, plus encore peut-être, de l'audiovisuel, qui permet à des centaines de millions d'humains de vivre ensemble les mêmes événements sportifs, politiques ou culturels. L'espèce humaine a vu bouleverser ses horizons familiers, dévaluant prodigieusement la notion de frontières, et le boxeur soviétique, épuisé, a fini par jeter l'éponge.
L'URSS avait encore deux petites années à vivre quand Francis Fukuyama, alors chef-adjoint du bureau de planification du département d'Etat, a constaté dans son célèbre article sur "La fin de l'Histoire" la totale "exhaustion des alternatives systématiques viables au libéralisme occidental ". Le fait est qu'elle a abandonné son énorme glacis, et renoncé au communisme, avant de purement et simplement se décomposer.
Tous les pays qui ont alors recouvré leur indépendance ayant opté pour l'économie de marché, la Chine et le Vietnam lui faisant une large place tout en maintenant la dictature du Parti communiste, la mondialisation apparaît moins comme une doctrine ou une politique que comme un fait, ou au moins un processus, difficilement réversible.
Mais mondialisation ne veut pas dire unification, et le fait de vivre dans le même village, planétaire ou pas, ne suffit pas à garantir la bonne entente de ses habitants. Il y faudrait un maire énergique et compétent. Que George W. se soit cru un moment qualifié pour exercer ce rôle ne fait guère de doute, et il est allé jusqu'à prononcer un discours dans lequel il conseillait à ses alliés de le laisser s'occuper de leur défense, mais la chute de prestige que lui vaut, après la grande désillusion irakienne, la lenteur de sa réaction à la catastrophe de Louisiane diminue singulièrement, c'est le moins qu'on puisse dire, son autorité.
Si donc la mondialisation demeure le décor des échanges économiques, il n'y a pas de "gouvernance" mondiale digne de ce nom. Le non français et hollandais au traité constitutionnel, l'incapacité des membres de l'UE à agir en commun sur la plupart des défis de l'actualité, et notamment sur ceux qui viennent de la Chine, la parfaite vanité du débat sur la réforme des Nations unies, le réalisme tous azimuts du cher Poutine, la nostalgie du communisme qui se fait jour en Europe de l'Est, la misère de trop de pays d'Afrique, la persistance du terrorisme, les ambitions nucléaires de la Corée du Nord et de l'Iran, pour ne pas parler du nouveau choc pétrolier et de l'effet de serre, on n'en finirait pas d'énumérer les domaines où, faute d'institutions efficaces, le monde souffre, à bien y réfléchir, d'une insuffisance plutôt que d'un excès de mondialisation.
André Fontaine
Article paru dans l'édition du 11.10.05
AGNES L. ♦ 11.10.05 | 13h33 ♦ Bien sur qu'il manque une gouvernance mondiale qui mettrait un frein aux excès des capitaux flottants..,mais le risque de déléguer à des echelons toujours plus hauts et supérieurs n'est il pas aussi du recul de la démocratie? Un complément indispensable ne serait il pas le développement de la démocratie participative à l'echelon locale ,ce qui suppose un engagement et une responsabilisation de chacun de nous envers son propre contexte: participationsyndicale,politique,sociale?
esteban53 ♦ 11.10.05 | 11h45 ♦ Avec sa clarté habituelle, André Fontaine montre quelles sont les ambiguïtés de l'élargissement de l'UE. Si nous cherchons des affinités historiques, nous retournons inévitablemnt à l'Europe des rois catholiques espagnols et de Charles-Quint, à la découverte et à la colonisation par NOUS des Amériques. Un jour ou l'autre, face aux puissaces asiatiques, ne serons-nous pas obligés de serrer les rangs entre Européo-américains? Nous allons vers la constitution d'un grand empire...
JEAN CHRISTOPHE C. ♦ 11.10.05 | 10h56 ♦ Oui, bon rappel historique qui evite toutefois de souligner que la mondialisation que nous vivons a seulement une dimension mercantile; 2 milliards d'individus sont dans une detresse totale et 2 milliards de plus survivent dans ce merveilleux systeme probablement incontournable pour quelques decennies; lorsque l'on parle de mondialisation pourrait-on SVP eviter de raisonner en regardant notre nombril de priviligies.. sortez du microcosme par pitie!!
DOMINIQUE36330 ♦ 11.10.05 | 07h01 ♦ Cher monsieur Fontaine, ce rappel historique est fort intéressant et intructif. Il nous rappelle bien que la mondialisation est volontairement limitée aux échanges commerciaux en absence de toute éthique. L'époque du "citoyen de monde" est bien lointaine et la mondialisation que nous subissons, n'a rien à voir avec celle souhaitée par Garry Davis et bien d'autres.
Xavier R. ♦ 10.10.05 | 23h18 ♦ Aux limites de la mondialisation je propose d'ajouter le scandale du SIDA. Les médicaments existent et des dizaines de millions d'Africains sont condamnés à mort à court terme. La trithérapie est trop chère pour eux. C'est pour lutter contre ce fléau qu'il manque un gouvernement mondial. Est-ce inimaginable, délirant, utopique de mettre en place une structure internationale pour produire les médicaments vitaux en dehors des lois du marché? Peut-on poursuivre le marché pour génocide passif?
LibertéEquitéSolidarité ♦ 10.10.05 | 22h55 ♦ L'article "Dire oui à la Turquie, au Mahgreb et aux autres," par Eric le Boucher constitue un début de réponse aux questions que se pose A Fontaine !
Jacques E. ♦ 10.10.05 | 22h33 ♦ Mondialisation ? Oui une mondialisation des marchands au profis des seuls nantis dont nous, français faisons bien sur parti. Le terme de domination est presque presque plus adapté, la mondialisation n'étant qu'un moyen au service de l'argent. Alors un gouvernement mondial? vous n'y pensez pas et si les pays deshérités s'en servait pour déféndre leur avenir leur culture et leur vie. Nous savons ce qui a été fait avec les Amérindiens... Le génocide peut s'appliquer à d'autres peuple... hélà
LibertéEquitéSolidarité ♦ 10.10.05 | 22h23 ♦ dans "La mondialisation et ses ennemis, Daniel Cohen nous montre que la mondialisation trouve ses limites dans les déceptions qu'elle engendre; elle ne peut en effet satisfaire toutes les attentes qu'elle avait suscitées. Pour le moment encore, chaque état-national tente de sauvegarder son "modèle social" menacé par la globalisation. C'est aussi une explication de la difficulté à mettre en place une gouvernance mondiale. Comment réagiront les populations riches au moment des sacrifices à venir?
CLAUDE B. ♦ 10.10.05 | 21h19 ♦ Cet article ne prouve rien, si ce n'est que le pouvoir est aujourd'hui entre les mains des oligarchies financières et qu'on est revenu aux thèses d'Adam Smith qui pensait sérieusement que la somme de tous les égoïsmes individuels npouvait faire bavancer le genre humain ! Une autorité mondiale aurair du mal à se libérer de ce carcan de la finance qui ne pourra éclater que lorsque le monde commencera à régresser dans tous les domaines et la seule mondialisation qui se réalisera sera la catstrophe
ALAIN V. ♦ 10.10.05 | 19h28 ♦ Killy est bien impatient... avant le gouvernement mondial, il y a l'Europe plus proche,qui a atteint un stade de paix relative et de développement économique enviés, grâce au marché (oui!) ouvert par les politiques; voilà de quoi espérer...Mais il faut aller plus loin,en replaçant désormais au premier plan les valeurs de notre "modèle social" européen,bien vivant:dialogue, tolérance, humanisme dans les rapports sociaux, et non imitation servile des sherifs d'un Far West aujourd'hui démystifié!
Stephane - San Francisco ♦ 10.10.05 | 19h17 ♦ La notion d' "autorite morale incontestee, independante, et humaniste" est une utopie naive, franchouillarde et soixante-huitarde. Votre vision utopique est sans doute mise a mal par la realite de la nature humaine. En fait, tout le monde il est pas beau et tout le monde il y pas gentil. Desole. Si vous croyez a l'evolution naturelle, alors peut-etre croirez vous que la mondialisation economique gagne du terrain parce qu'elle marche mieux que toutes les mondialisations alternatives
killy ♦ 10.10.05 | 18h26 ♦ ca manque d'un gouvernement mondiale... ok... donc en cas de d'election universelle mondiale. Etes vous pret a ce que les opinions francaises ne pesent que 1% ? (les francais sont 1% de la population mondiale) et que l'inde, la chine, et le bresil (ou la russie) ensemble depassent les 50% ?? ou bien doit on donne plus de poid a l'ONU ou tout n'est que marchandage et ou les dictateurs peuvent voter???? rien n'est simple des que l'on touche au politique d'ou la mondialisation de l'eco en premier.
tokaido ♦ 10.10.05 | 18h01 ♦ belle analyse en effet, mais cela fait des années que l'on imagine des demains glorieux où tout le monde tirerait dans le même sens , où chacun serait fier d'être humain. Hélas !
KATHERINE T. ♦ 10.10.05 | 17h45 ♦ Brillantissime ! Hélas, trois fois hélas, la seule mondialisation que l'on nous propose est celle des marchands. Alors que les problèmes, comme le souligne très justement André Fontaine relèvent précisément de choix politiques. Pour un véritable gouvernement mondial ll faudrait "au sommet" une autorité morale incontestée, indépendante et humaniste: Bush est disqualifié d'office...
Laurent L. ♦ 10.10.05 | 17h12 ♦ Bel article effectivement... mais qui ne montre en rien que, comme le prétend AM, "la seule mondialisation qui marche est celle du business financiarisé". Il montre au contraire que la mondialisation est un phénomène bien plus ancien qu'on le dit et aux facettes multiples, même si aujourd'hui les aspects économiques sont dominants. Bel exemple d'interprétation tendancieuse, trop fréquente malheureusement...
Chris ♦ 10.10.05 | 16h38 ♦ Oui, bel article. La mondialisation est un terme "épouvantail", qui cache la réelle complexité du monde économique et politique aujourd'hui. Le débat actuel sur la mondialisation nous masque, à nous pays riches, toute l'histoire de notre impérialisme, et nous sommes soit des autruches, soit des Don Quichotte.
AM ♦ 10.10.05 | 16h15 ♦ Bel article qui montre bien que la seule mondialiation qui marche est celle du business financiarisé. Laquelle en détruit par la promotion des valeurs d'individualisme forcéné toutes les autres formes...
ALAIN V. ♦ 10.10.05 | 15h13 ♦ Oui,M.Fontaine, le monde souffre bien d'insuffisance de mondialisation, au sens politique où des hommes représentant réellement les aspirations du plus grand nombre de leurs compatriotes, non des groupes financiers, subordonneraient au développement humain les échanges économiques,culturels, etc. Bien au contraire,la concurrence et la liberté de la jungle financière sont érigés en valeur en prétendant très naïvement que le bonheur général en sortira par la vertu de quelque "main invisible"!!!
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En extra: Les éditos du Monde |
[*] «Longues propagandistes» parce qu'il existe aussi, dans cette rubrique, des «brèves propagandistes» reprenant surtout des dépêches de l'AFP. Ici, on trouvera pour l'essentiel des articles parus dans Le Monde, qui par le fait, sont beaucoup plus longs…