![]() | Longues propagandistes, série 15 |
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En extra: Les éditos du Monde |
Q u'éprouve réellement Angela Merkel en cet après-midi du lundi 10 octobre, lorsqu'elle prend acte de la décision de ses adversaires sociaux-démocrates de lui confier la chancellerie allemande, après trois semaines de rudes négociations ? Toutes émotions contenues, cette fille de pasteur âgée de 51 ans sourit et glisse, devant la presse réunie à Berlin, qu'"il serait malvenu d'être grincheuse" un jour pareil. "Je me sens bien, mais il reste beaucoup de travail à faire", se contente-t-elle d'ajouter. Nul doute que la présidente de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), qui a dû faire des concessions pour en arriver là, mesure déjà l'ampleur de la tâche qui l'attend.
Les réformes réalisées par le chancelier Schröder, allié aux Verts, ont redonné du muscle aux entreprises allemandes. Mais le chômage frappe 11,5% de la population active, la croissance ne décolle pas, l'Etat est lourdement endetté et les finances publiques seront, cette année encore, beaucoup plus déficitaires que ne l'autorise la Commission européenne. Or, pour relancer l'économie, Mme Merkel devra composer avec ses rivaux sociaux-démocrates au sein du second gouvernement de grande coalition de l'histoire allemande depuis la guerre.
Le Parti social-démocrate (SPD) du chancelier sortant, Gerhard Schröder, et les Unions chrétiennes (CDU/CSU) de Mme Merkel ont prévu d'engager, lundi 17 octobre, des négociations officielles en vue de former un tel cabinet. Cette décision n'a pu être prise qu'après un accord sur le détenteur de la chancellerie, la répartition des ministères entre les deux partis, ainsi que sur une série de priorités pour la future action gouvernementale.
L'accord a été long à mettre au point. Il aura fallu trois réunions "entre huit yeux" – Mme Merkel et M. Schröder, flanqués respectivement d'Edmund Stoiber, le président de l'Union chrétienne-sociale (CSU), et de Franz Müntefering, le président du SPD – pour y arriver. Le principal parti de la coalition sortante a chèrement vendu sa participation. Arrivé le 18 septembre avec un petit point de retard sur les chrétiens-démocrates, le SPD, fort d'un score inespéré deux mois plus tôt (34,2%), a même refusé d'admettre sa défaite trois semaines durant.
Le chancelier sortant a finalement admis la vérité des urnes. A 61 ans, il semble prêt, selon toute vraisemblance, à renoncer à une carrière politique nationale. En contrepartie, le SPD a obtenu des concessions importantes de la part de Mme Merkel.
L'accord rendu public attribue la moitié des ministères (seize au total) aux sociaux-démocrates, dont les portefeuilles des affaires étrangères, des finances et du travail. La CDU en obtient quatre, dont l'intérieur et la défense. Lui échoient donc la chancellerie, plus le poste de ministre à la chancellerie, promis au secrétaire général du parti, Volker Kauder. Quant à la CSU, elle reçoit deux portefeuilles, dont un grand ministère de l'économie et des technologies, taillé sur mesure pour M. Stoiber, candidat malheureux de la droite en 2002.
Les noms des autres titulaires ne seront connus que plus tard. Justifiant cet équilibre, Mme Merkel a jugé "impossible que l'un parle d'une voix plus forte que l'autre".
L'accord entérine également des concessions programmatiques de la part de la droite. Ainsi celle-ci a-t-elle promis de "discuter avec les syndicats" de la possibilité de faciliter les accords d'entreprise dérogatoires aux conventions collectives, au lieu de les imposer comme elle en avait l'intention. Elle apaise ainsi un conflit ouvert avec les organisations de salariés. Ensuite, une "simplification" de l'impôt sur le revenu, qui prévoit de limiter les niches fiscales, est annoncée, mais la CDU/CSU précise qu'elle ne tient plus à son projet, très critiqué à gauche, de taxer au passage les primes de travail de nuit, de week-end et de jours fériés.
Les autres priorités inscrites dans l'accord reflètent davantage une approche consensuelle des deux camps. L'objectif de consacrer 3% du produit intérieur brut (PIB) allemand aux dépenses de recherche et de développement d'ici 2010 est réaffirmé. Il faisait consensus entre la droite et la gauche. Parallèlement, l'accent est mis sur la formation. Par ailleurs, les deux partis ont décidé de mélanger leurs propositions sur la famille, à la fois en retenant la proposition de la CDU d'augmenter le quotient familial dans l'impôt sur le revenu, et celle du SPD d'améliorer les conditions du congé parental.
Enfin, une baisse des cotisations sociales à l'assurance-chômage de deux points est bien à l'ordre du jour, comme promis par la droite. Mais la hausse de deux points de la TVA qu'elle avait annoncée parallèlement pour financer cette mesure n'est plus mise en avant, même si Mme Merkel ne l'a pas totalement exclue.
A part le retrait de la mesure fiscale sur le travail de nuit, de week-end et de jours fériés "qu'il aurait été impossible de faire adopter au SPD", tout le reste de son programme serait encore au menu des négociations, a-t-elle insisté, le soir, dans un entretien télévisée, pour rassurer ceux qui, dans son parti, s'inquiètent d'un trop grand recul face à la gauche.
Au sein de la CDU, la ligne sociale semble cependant pousser Mme Merkel à retirer ses innovations les plus libérales ou les plus impopulaires chez les salariés. Au nom du SPD, M. Müntefering n'a pas caché sa satisfaction: "Je crois que nous nous sortons très bien de cette première séance de pourparlers."
Antoine Jacob et Adrien de Tricornot
Article paru dans l'édition du 12.10.05
E n cas de formation d'un gouvernement allemand réunissant les Unions chrétiennes (CDU-CSU) et le Parti social-démocrate (SPD), l'opposition parlementaire sera réduite aux trois plus petites formations représentées au Bundestag. Les membres de ce trio – 166 sièges sur les 614 que compte le Bundestag – seront d'autant plus limités dans leur capacité d'action que leurs intérêts et leurs principes idéologiques divergent.
Avec 61 députés, le Parti libéral (FDP) sera la principale force d'opposition. C'est une maigre consolation pour son président, Guido Westerwelle. Le parti se retrouve une nouvelle fois écarté du pouvoir, bien qu'il ait réalisé l'un de ses meilleurs scores (9,8% des voix). La perspective d'une coalition entre la CDU-CSU et le FDP, sur laquelle les deux partis ont fait campagne, a effrayé une partie de l'électorat traditionnel conservateur et les indécis, en raison d'un programme jugé trop libéral. En revanche, des électeurs de droite tentés par les réformes libérales, ont apporté leurs suffrages au FDP au détriment de la démocratie-chrétienne.
M. Westerwelle a critiqué l'accord entre la CDU-CSU et le SPD, estimant qu'il ne saurait permettre au pays de sortir de la crise. Selon lui, Mme Merkel a d'ores et déjà fait trop de concessions. Aussi les députés FDP ne voteront pas pour son entrée à la chancellerie.
Le Parti de gauche est le trublion des élections du 18 septembre. Sa bonne prestation (8,7%) a coûté des voix au SPD, qu'il a largement critiqué durant la campagne pour sa "dérive néolibérale". Constituée dans l'Est du pays de membres du Parti du socialisme démocratique (PDS), héritier du Parti communiste est-allemand, et à l'Ouest, de déçus de la social-démocratie, cette formation devrait être la plus bruyante dans sa dénonciation de la politique gouvernementale. Le mariage de la droite et du SPD constitue une aubaine pour elle.
Parmi ses 54 députés figurent quelques excellents orateurs, dont Oskar Lafontaine, ancien ministre des finances de Gerhard Schröder et ex-président du SPD. La vieille rivalité entre ces deux hommes a, en partie, empêché toute possibilité de coalition à gauche. Une telle alliance n'est pas toutefois pas exclue par certains cadres du SPD pour les élections législatives de 2009.
Orphelins de leur chef de file Joschka Fischer, ministre des affaires étrangères sortant, qui a annoncé son retrait de la vie politique au lendemain du scrutin, les Verts devront se refaire une virginité politique après avoir gouverné pendant sept ans aux côtés du SPD. L'exercice du pouvoir ne les a pas trop usés puisque, avec 8,1% des voix, ils n'ont perdu qu'un demi-point par rapport aux précédentes élections législatives.
Mais ils ressentent le besoin d'une cure d'opposition pour retrouver le rôle de réservoir à idées que ce parti a souvent joué depuis les années 1980. Dans le même temps, les 51 députés Verts veulent se poser en "contrôleurs et aiguillons" de la future politique gouvernementale. Selon Rainer Bütikofer, le président du parti, les partenaires de la grande coalition ont "mal commencé" en se préoccupant davantage des questions de personnes que du contenu de la politique à mener.
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 12.10.05
O n a beaucoup glosé sur la mine déconfite d'Angela Merkel le soir des élections législatives du 18 septembre en Allemagne. Atteinte personnellement par la piètre performance des Unions chrétiennes (CDU/CSU), elle n'est toutefois plus la seule à porter les stigmates de la déception. Le rictus gouailleur de Gerhard Schröder, éclatant au lendemain du scrutin, s'est transformé au fil des jours en masque de cire creusé de rides. Le dirigeant social-démocrate a manqué le pari qu'il s'était fixé: provoquer la tenue d'élections anticipées pour mobiliser à nouveau la gauche autour de lui et obtenir une nouvelle légitimité. A 61 ans, dont sept passés à la chancellerie, l'intéressé s'apprêterait à tirer sa révérence.
Celui qui a été baptisé le "chancelier des médias" est resté muet, lundi 10 octobre, alors que le scénario contre lequel il s'est battu jusqu'au dernier moment – Mme Merkel à la tête du futur gouvernement – commençait à s'écrire en son absence. Face à ce mutisme, il faut se fier aux informations indirectes. Selon des sources émanant du Parti social-démocrate (SPD), qu'il a dirigé jusqu'en 2004, M. Schröder aurait renoncé à toute fonction dans le futur gouvernement de "grande coalition". "Cela n'entre pas dans mes projets. Ma carrière va prendre une autre direction", aurait-il déclaré, d'après ces sources.
Une collaboration avec la CDU: c'est pourtant la solution qu'il aurait souhaité expérimenter, s'il avait pu choisir, après son élection à la tête du pays, à l'automne 1998. Il s'est finalement retrouvé à la tête d'une coalition avec les Verts. Réélu de justesse quatre ans plus tard, cet ancien avocat n'a pas réussi à renouveler l'exploit au terme de sa troisième bataille électorale nationale. Ce n'est pas faute d'avoir essayé. Durant la courte campagne, il a multiplié les réunions publiques – plus de 100 – dans tout le pays. Sa voix s'est éraillée à force de répéter pourquoi il fallait le laisser achever sa politique de réformes, engagée depuis le début de son deuxième mandat. Son pouvoir de conviction a en partie fonctionné. Avec 34,2% des voix, le SPD est arrivé juste un point derrière la CDU/CSU.
Inespéré deux mois plus tôt, ce résultat, combiné au très mauvais score de la droite, signifiait, aux yeux de M. Schröder, que les électeurs souhaitaient le voir poursuivre ses réformes de l'Etat-providence. D'où son insistance à rester à la chancellerie. Au fil du temps, cette volonté s'est mue en manoeuvre visant à garantir à son parti la meilleure base possible avant de négocier avec la droite la formation d'une coalition.
Selon Franz Müntefering, le président du SPD, M. Schröder devrait participer aux pourparlers qui auront lieu dans ce but, à partir du 17 octobre. Ce proche s'est refusé à en dire plus. Mme Merkel, elle, n'a pas voulu exclure que M. Schröder devienne son ministre des affaires étrangères, même si elle n'en voudrait pour rien au monde. "C'est au SPD d'en décider", a-t-elle dit.
Selon certains médias allemands, une telle hypothèse n'est pas impossible. Ce fils de soldat de la Wehrmacht mort peu après sa naissance, en 1944, "est le seul pour l'instant à avoir la force, la popularité et le soutien du parti" pour faire avaler aux troupes sociales-démocrates la potion amère de la grande coalition, estimait, mardi, le quotidien Süddeutsche Zeitung .
Le principal concerné a répété, jusqu'à ces derniers jours, qu'il ne se retrouverait pas sous les ordres de "cette femme" – sous-entendu, Angela Merkel. On lui prête d'autres projets: conseiller de luxe pour une banque d'investissement anglo-saxonne ou une grande firme allemande, conférencier-voyageur à la Bill Clinton, auteur d'une autobiographie très attendue outre-Rhin... sans compter qu'il est mari et père de famille. Ayant adopté une petite fille russe, il avait annoncé, avant les élections, que ce serait "soit la victoire, soit Viktoria" .
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 12.10.05
L a grande coalition à l'allemande n'est pas la cohabitation à la française. Dans cette dernière, le président de la République abandonne la quasi-totalité de la politique intérieure, économique, sociale, éducative, etc., à un premier ministre venu de l'autre camp. Dans la grande coalition, les deux grands partis de centre droit (CDU-CSU) et de centre gauche (SPD) passent des compromis pour gouverner ensemble. La cohabitation est une guerre d'usure, la grande coalition un mariage de raison.
Depuis la création de la République fédérale, en 1949, l'Allemagne a été généralement gouvernée par des "petites" coalitions entre un grand parti dominant et un partenaire qui apportait l'appoint des voix nécessaires à une majorité parlementaire. Elle a cependant connu un premier cas de grande coalition entre les chrétiens-démocrates et les sociaux-démocrates, de 1966 à 1969. Cette expérience a laissé des souvenirs mitigés. Pour les uns, elle fut une réussite en permettant la relance de l'économie en une période de croissance zéro et de montée du chômage. Pour les autres, elle fut une guérilla permanente entre le chancelier Kurt Georg Kiesinger (CDU) et le vice-chancelier et ministre des affaires étrangères Willy Brandt (SPD), qui, à la fin, ne se supportaient plus. Elle eut en tout cas un résultat: l'amorce de l'Ostpolitik, la politique à l'Est, qui changea les relations entre l'Allemagne et les pays communistes.
Cette fois-ci, la grande coalition est la conséquence de l'arithmétique électorale. Le 18 septembre, les Allemands ont renvoyé l'alliance rouge-verte, au pouvoir depuis sept ans, sans donner de majorité à la droite. Il ne restait donc guère d'autre choix au SPD et à la CDU-CSU que de tenter de s'entendre. Angela Merkel va entrer à la chancellerie dans les fourgons de la social-démocratie, alors qu'elle rêvait de diriger une équipe porteuse de réformes résolument libérales.
Les sceptiques y verront une recette pour l'immobilisme. A force de rechercher un consensus entre des politiques opposées, les seize ministres – huit pour chaque camp – s'accorderont toujours sur le plus petit dénominateur commun. Ce serait la pire des hypothèses, non seulement pour l'Allemagne, qui a besoin de renouer avec le dynamisme économique, mais encore pour ses partenaires européens, confrontés à des difficultés analogues.
Les optimistes peuvent, au contraire, trouver dans la politique de la grande coalition des raisons d'espérer. Le gouvernement Schröder avait déjà commencé les réformes les plus urgentes – finances publiques, sécurité sociale, retraites, marché du travail, etc. Souvent d'ailleurs avec le soutien de la CDU-CSU, dont l'aval était indispensable à la Chambre des Etats. Le gouvernement Merkel va devoir les reprendre et les approfondir, sans toutefois recourir aux recettes du capitalisme anglo-saxon. Il montrerait alors à l'Europe tout entière que l'économie sociale de marché, qui a si bien réussi à l'Allemagne dans le passé, n'est pas incompatible avec la globalisation.
Article paru dans l'édition du 12.10.05
Paul G. ♦ 11.10.05 | 21h53 ♦ Une grande coalition favoriserait les extrêmes,dit-on,décrédibiliserait un parti candidat à l’alternance.Mais assure-t-on sa crédibilité par la surenchère verbale ou en scandant des slogans dans les manifestations?Pourquoi la précédente majorité a-t-elle été remerciée et qui peut croire qu’à son retour elle aura des solutions miracles?Dans les temps difficiles mieux vaut élaborer en commun des solutions raisonnables.C’est la démagogie et l’irresponsabilité qui font le lit des extrêmes.
Dominique L. ♦ 11.10.05 | 21h37 ♦ Ras le bol de voir tous les politiques se battre pour eux même alors qu'il y a tant à faire en matière de sociale, d'économie, d'environement, de justice, d'humanisme... Je suis persuadé que l'opinion publique est prête à un rapprochement entre les centristes et la gauche réaliste et réformiste malheureusement l'idéologie et les dogmes de la gauche radicale empèchent se rapprochement , dommage pour les francais
i2bx ♦ 11.10.05 | 21h04 ♦ Schröder, et à travers lui le SPD, a entamé une révolution dans la culture de gauche: La modernisation et la compréhension de la mondialisation et des bienfaits que l'europe peut en retirer. Blair l'a fait bien avant lui. Si le SPD accède a des postes clefs, c'est notamment parce que le SPD, tout comme Merkel, va en direction des réformes nécessaires. Le PS français est encore bien loin de cette révolution, puisqu'il envisage de toute part de tirer vers lui l'électorat d'extreme gauche...
XL ♦ 11.10.05 | 20h45 ♦ Transformer une cohabition en combat quand il y a un projet politique derrière, après tout, cela peut se comprendre, encore que refuser la sanction du pays... Mais paralyser l'action du pays de 1997 à 2002 pour mener une politique peu différente par la suite, c'est incompréhensible. Ou plutôt si: c'est une politique seulement animée par le souci de se maintenir au pouvoir. Quelqu'un pourrait il s'occuper de la France ?
françois h. ♦ 11.10.05 | 19h36 ♦ la France n'a pas besoin d'une coalition PS - UMP , mais d'une vraie scission du PS pour que le pays dispose d'une vraie offre social-démocrate opposée à une offre sociale libérale. Comme elle n'est pas à l'ordre du jour , nous restons dans le règne du n'importe quoi ...
Roger D. ♦ 11.10.05 | 18h57 ♦ Julien Dray justifie l'impossibilité en France d'une collaboration gauche-droite car, dit-il, ce n'est pas la tradition française. Drôle d'argument ! Pourquoi faudrait-il rester bêtement dans la tradition alors que les problèmes posés à notre pays devraient dépasser les clivages. Et quand Moscovici dit de Bayrou que c'est le couillon de service qui leur permettra de gagner, ça en dit long sur l'esprit des politiques plus soucieux de gagner des élections que de servir les Français.
gérard B. ♦ 11.10.05 | 18h02 ♦ D'acc avec Laurent L. La gauche modérée refuse l'idée même d'une alliance avec la droite modérée, pourtant moins diabolique que la gauche de la gauche, qui n'a pas digéré l'échec des idées marxistes pourtant explicitement non démocratiques, et ce malgré le souvenir d'un siècle de fer et de sang.Et si les Français attendaient une classe politique plus centrée, donc sociale-réformiste modérée (accessoirement plus jeune et féminine, avec des idées du XXIème )? Et si surtout, on le leur proposait ?
Etienne.Q ♦ 11.10.05 | 16h27 ♦ Impressionnant. Qui peut encore parler de victoire pour Mme Merkel ou son parti ? Elle accède certes au poste le plus prestigieux, mais à quel prix ? En tout cas, bonne nouvelle, excellente nouvelle pour l'Allemagne, qui ne basculera pas - encore - du coté obscur (càd anglo saxon) de l'économie de marché. Bravo M. Schröder !
Exemplaire ? ♦ 11.10.05 | 14h44 ♦ Question. Est ce qu'un mariage de raison met les partenaires à l'abri d'être cocufié ? La photo réunissant Sarkozy et Hollande serait une illustration du prochain scénario français à l' allemande ? Le monde en sera bouleversé.
Laurent L. ♦ 11.10.05 | 14h17 ♦ J'aimerais bien savoir pourquoi ce genre de compromis entre partis de droite et de gauche est possible en Allemagne, et complètement inenvisageable en France... Peut-être parce que chez nos voisins la politique est essentiellement du domaine de la raison, alors que chez nous elle s'apparente à une guerre de religion. Quand la France deviendra-t-elle politiquement adulte ??
D ieudonné avait annoncé ce week-end qu'il viendrait manifester dimanche devant le studio où est enregistrée votre émission. Marc-Olivier Fogiel, comment expliquez-vous qu'il ait pu envahir votre plateau aussi facilement ?
Le service de sécurité qui est en place habituellement devant le studio a vite été dépassé par les manifestants. Nous avons choisi de ne pas surenchérir dans la violence, mais aussi de ne pas être pris en otage pour faire une émission que nous ne souhaitions pas. La direction de la chaîne a donc suspendu le direct et j'ai reçu Dieudonné pour essayer de discuter avec lui et savoir ce qu'il voulait.
Que vous êtes-vous dit ?
Pas grand-chose... Il n'avait pas de revendication précise. Il m'a dit que la communauté noire "était très en colère" et qu'il allait "réfléchir" avec son entourage sur la suite à donner à cette affaire. Pour ma part, la seule chose que je lui ai indiquée était que l'antenne ne serait pas prise en otage.
Dieudonné réclame votre démission après votre condamnation, par le tribunal correctionnel de Montpellier, pour "injure à caractère racial", à propos d'un SMS diffusé dans votre émission, le 8 décembre 2003. Allez-vous démissionner ?
.Absolument pas. Ce serait totalement disproportionné. Dieudonné veut une nouvelle fois faire un coup médiatique, et il n'est pas question d'entrer dans son jeu. Quand le jugement sera effectif, et s'il est confirmé en appel, je serai de fait sanctionné, et j'en assumerai les conséquences en tant que producteur de l'émission, ne serait-ce que par l'amende que j'aurai à payer. Je dois dire que je m'interroge sur le maintien de mon appel du jugement de Montpellier. Mon avocat me dit que nous avons des arguments à défendre, mais je crains que, quel que soit le verdict, il offre une nouvelle tribune à Dieudonné pour souffler sur les braises. Je n'ai jamais proféré de propos racistes à l'antenne et la condamnation concerne le SMS que nous avons diffusé. Celui-ci a été mal compris. Il n'avait aucun caractère raciste. -Il était ainsi rédigé: "Dieudo, ça te ferait rire si on faisait des sketches sur les odeurs des blacks? Té tellement bête que ça me choque même plus "-. Il s'agissait simplement, à travers une synthèse de SMS reçus, d'interroger Dieudonné sur ce que serait sa réaction face à un humour odieux concernant les Noirs. Je regrette simplement de n'avoir pas réagi plus efficacement après le dérapage de Dieudonné -le 1er décembre 2003- .
Allez-vous porter plainte à votre tour contre Dieudonné ?
La chaîne et ma société vont saisir la justice pour l'intrusion sur le plateau.
Comment expliquez-vous l'animosité de Dieudonné envers vous ?
Je n'en sais rien. Je crois qu'il a trouvé un os à ronger et qu'il ne le lâche plus. Simplement, il se trompe. On peut dire ce que l'on veut de moi, ne pas supporter mon image médiatique, mais je n'ai pas de leçons de morale à recevoir. Depuis quinze ans que je fais de la télévision, je crois avoir montré mes convictions contre l'intolérance, le racisme et les discriminations. Ce qui me paraît le plus inquiétant est que Dieudonné a un discours très construit, qui fait beaucoup de dégâts dans les cités et les banlieues. On ne peut pas monter une communauté contre une autre en affirmant que l'une souffre plus que l'autre. A travers cette polémique, il y a des enjeux de société bien plus importants qu'une guéguerre entre "people".
Des personnalités vous ont apporté leur soutien. Comptez-vous les faire réagir ?
S'ils se sentent de le faire, tant mieux. Mais je ne veux pas instrumentaliser ceux qui me manifestent de la sympathie. Je suis capable de me défendre tout seul.
Vous sentez-vous visé par les propos de Patrick de Carolis, le PDG de France Télévisions, qui a déclaré qu'il souhaitait mettre un terme à "la location par appartements" des grilles de France 2 et France 3 ?
Pas du tout. Je n'ai pas de contrat d'affermage avec France Télévisions, je n'en ai jamais eu, je vends mes émissions une à une. Quand des émissions que je produisais pour le service public se sont arrêtées, je n'ai pas demandé de compensations. Je trouve courageux de la part de Patrick de Carolis de dénoncer les abus et de vouloir s'assurer du savoir-faire et de la créativité des producteurs. Cela étant, je ne crois pas qu'il faille jeter le système à la poubelle comme si tout était mauvais. En ce qui me concerne, la nouvelle direction de France Télévisions m'a dit qu'elle était "fière" de mon émission, même si cela n'empêche pas quelques aménagements.
Justement, On ne peut pas plaire à tout le monde a été amputée de quinze minutes par la nouvelle direction de France 3. Comment avez-vous réagi ?
Je n'ai pas contesté la décision, puisqu'elle s'inscrivait dans une politique globale de la chaîne, qui souhaitait que les émissions de deuxième et troisième parties de soirée ne démarrent pas à des heures impossibles. Cela me paraît cohérent.
Ces quinze minutes de moins ont-elles une incidence sur l'audience ?
Non. Nous nous maintenons autour des 15% de parts de marché que la chaîne nous a fixés. Mon contrat précise que si l'émission réalise moins de 15% huit fois de suite, la chaîne peut demander à réaménager le concept. Mais cela ne s'est jamais produit.
Propos recueillis par Pascal Galinier et Daniel Psenny
Article paru dans l'édition du 12.10.05
L e débat sur la récidive, récurrent, a resurgi de façon très vive. Pourquoi, selon vous ?
Jean-Yves Le Borgne: Il est probable que la récidive soit aujourd'hui plus un thème politique qu'une véritable problématique sociale. Mais on a aussi perçu, au fil du temps, que toutes les expériences judiciaires n'ont pas jugulé le problème.
Les principaux points de la proposition de loi Extension de la récidive. Jugements rapides. Limitation des sursis avec mise à l'épreuve. Bracelet électronique. |
Deux délinquances irritent nos concitoyens: la petite délinquance, qui est comme un caillou dans la chaussure, et la grande criminalité liée à des considérations psychopathologiques, pour lesquelles la réponse judiciaire ne constitue en rien un remède.
Yves Bot: Les récidives sont beaucoup plus médiatisées; ensuite, le risque est une notion de moins en moins acceptable dans nos sociétés. Les gens considèrent à juste titre que la sécurité est la condition préalable de la liberté. Dans une société moderne, organisée, policée, on doit pouvoir sortir tranquillement de chez soi. Cette aspiration explique qu'un certain nombre de débats de société se situent à l'heure actuelle autour de la sécurité. La question de la récidive est une manifestation de ce phénomène, ce n'est pas la seule.
La justice est-elle responsable de la récidive ?
J.-Y. L. B.: Le juge est un responsable facile à désigner. Mais il se borne à prononcer une peine, il n'est pas en charge des conditions de son exécution. La dimension sociothérapeutique du traitement lui échappe.
La faillite du système vient de notre conception, non démentie par la proposition de loi sur la récidive, d'une justice qui commence avec l'infraction et se termine avec la condamnation. Ce qui se passe après est assez peu actif malgré l'existence de textes nombreux. Le problème est que nous n'avons pas le personnel nécessaire: le sursis avec mise à l'épreuve est une illusion, le suivi sociojudiciaire, un voeu pieu. Le texte souligne lui-même la carence des psychiatres en espérant la pallier par des psychologues.
La faillite socio-éducative de certains milieux défavorisés candidats à la délinquance n'a rien à voir avec la question judiciaire. Le projet actuel est dans la répression. Mais si la peine a été insuffisante à créer une réinsertion, comment une peine plus longue serait-elle plus susceptible de déboucher ?
La future loi ne m'est pas antipathique puisqu'elle est le substitut des peines plancher, qui nous avaient tous fait frémir. Mais on ne peut pas dire qu'un esprit préventif et curatif préside à ce texte. La vraie réponse est dans la mise en oeuvre de moyens concrets.
Y. B.: Le discours sur les moyens touche aussi ses limites. On ne peut pas mettre un infirmier psychiatrique derrière chaque personne. Le propre de l'institution judiciaire est de renvoyer les gens à leurs responsabilités. Cette démarche est, en soi, éducative.
Le juge applique la loi. En matière pénale, celle-ci a une valeur expressive. Et il arrive que par une loi, la société corrige certains excès antérieurs. Le projet actuel peut être vu dans une optique de sévérité; mais les textes qui l'ont précédé se situaient dans une logique d'érosion totale de la peine, d'une remise en cause de l'autorité de la chose jugée.
Parmi les valeurs exprimées par le nouveau texte figure la volonté de condamner la violence. Cela est traduit par l'extension de la possibilité de récidive juridique d'une infraction violente à toute autre infraction de violence. C'est une nouvelle approche: on ajoute à une démarche exclusivement juridique une démarche criminologique. On considère un individu dans sa propension à la violence. S'il commet un vol avec violence et ensuite une violence sans vol ayant entraîné une incapacité de travail, il sera en récidive légale, alors qu'il ne l'était pas auparavant.
J.-Y. L. B.: Nous avons là l'illustration d'une option idéologique: celle de la répression. Celui qui est dans la récidive en matière de criminalité lucrative ne semble pas inquiéter quiconque. Pourtant, il est dans une démarche rationnelle, la productivité de son acte antisocial, qui pourrait permettre à plus de répression d'être dissuasive. Tandis que celui qui est dans la reproduction de la violence peut être dans une situation de malaise personnel ou social. L'acte violent mériterait un intérêt curatif.
Y. B.: En quelque sorte, d'après vous, ce serait: "Plus je suis violent moins je risque..." Il faut que les mesures curatives aient lieu, mais aussi qu'elles s'exécutent dans des conditions qui garantissent la sécurité de nos concitoyens.
J.-Y. L. B.: Il ne s'agit pas de se placer dans une situation d'alternative entre la répression et l'assistance éducative ou thérapeutique, mais de savoir s'il est bien raisonnable et efficace d'opter pour une répression pure et simple sans que celle-ci soit assistée, à l'intérieur de la peine. Derrière les situations de viols, il existe une vraie problématique psychopathologique. La peine n'est pas dissuasive puisque l'acte ne se place pas dans une anticipation mesurée. Cette loi est un écran de fumée pour apaiser les soucis de l'opinion sans s'attaquer aux racines du problème.
Faut-il "prendre le risque de l'inconstitutionnalité", comme l'a suggéré le ministre de la justice, pour imposer une surveillance des personnes déjà condamnées au moyen du bracelet électronique ?
J.-Y. L. B.: Quand les normes fondamentales d'une société semblent pouvoir être battues en brèche au nom de préoccupations conjoncturelles, nous sommes sur une pente dangereuse. Nous ne pouvons faire l'économie du débat sur la constitutionnalité.
Y. B.: Je conteste le qualificatif de "préoccupation conjoncturelle", appliqué à des criminels en série, violeurs et tueurs. J'attends de voir s'il y a inconstitutionnalité ou pas. Pour la surveillance électronique mobile, la référence à la mesure de sûreté est intéressante: elle concernera les personnes qui sortent de prison en fin de peine, notamment les délinquants dangereux au risque de récidive fort, qui n'auront pas été mis en liberté conditionnelle parce qu'ils refusent toute contrainte. Ces individus sont des pervers. Il est envisagé de les astreindre à un encadrement socio-éducatif. La mesure de sûreté, contrairement à la peine, est exempte de coloration morale. Elle s'appuie sur un état dangereux constaté objectivement.
Le Conseil constitutionnel a déjà tranché en validant comme une mesure de sûreté d'application immédiate le fichier des auteurs d'infractions sexuelles, qui sert à savoir où se trouvent les personnes. Porter un bracelet mobile, c'est savoir où on est en temps réel. Entre les deux, il y a une différence de degré, non de nature.
L'allongement de l'incarcération est-il une solution ?
Y. B.: On n'allongera pas la peine des récidivistes: les criminels condamnés à dix ans de réclusion n'en feront pas douze. On leur accordera moins de réductions de peine automatiques qu'aux autres. Il paraît logique que celui qui se fiche de ce qui s'est déjà passé, de ce qui lui a déjà été dit, ne sorte pas aussi vite que les autres. Le législateur entend marquer une réprobation particulière, peut-on critiquer cela ?
Dans le cas des "sorties sèches" de prison, il est en outre prévu d'imposer des mesures d'encadrement. On les trouve très bonnes quand on libère les gens avant la fin de leur peine, dans le cadre d'une libération conditionnelle. Pourquoi les trouverait-on mauvaises après ?
J.-Y. L. B.: En multipliant les cas de récidive, le texte multiplie les cas où la peine encourue est allongée. D'autres mesures prévoient un allongement de l'incarcération. C'est la seule proposition. Après avoir constaté qu'une peine déterminée n'a pas suffi à empêcher la récidive, on nous dit qu'on va prendre la peine ancienne, plus un delta indéterminé, et que tout va changer. Qui peut croire à ce miracle ?
Y. B.: La peine a plusieurs fonctions. Elle est aussi tournée vers la réinsertion et la réparation des victimes. C'est la question du contenu de la peine, du traitement pénitentiaire, qui est en dehors du projet actuel.
Le gouvernement table, avec le bracelet électronique mobile, sur une surveillance renforcée des sortants de prison. Est-ce réaliste ?
J.-Y. L. B.: Le bracelet, c'est la possibilité de déterminer où se trouvait qui à un moment précis, c'est-à-dire de dégager une probabilité de culpabilité après la récidive. La problématique est de faciliter l'enquête pour arrêter le récidiviste, pas d'empêcher la récidive.
Y. B.: Je suis d'avis contraire. Dans le cas des pervers sexuels, la certitude d'être repris est un facteur dissuasif extrêmement fort. On aurait tout résolu si on savait précisément ce qu'est le mécanisme du passage à l'acte. Il faut avoir l'humilité de dire que c'est une chose qu'on ne connaît pas. On ne peut lutter qu'à partir du moment où la personne devient responsable de ses actes. Avec les moyens dont nous disposons, et dans les cas difficiles où il y a un danger, il s'agit de dire: on va tâcher de faire en sorte que le risque de la réalisation du danger survienne le plus tard possible. C'est reconnaître que la justice a une obligation de moyens.
J.-Y. L. B.: Ce que poursuit cette loi, au fond, c'est l'idée: "Tant que ce bonhomme-là est en prison, au moins il ne recommencera pas." C'est une forme de désespérance. Une association de victimes se demandait cet été: "Ne met-on pas trop d'espoir dans l'effet dissuasif d'une punition plus sévère ?"
Propos recueillis par Nathalie Guibert
Article paru dans l'édition du 12.10.05
P our l'instant, tous les tests pratiqués en Roumanie sont toujours négatifs. Il n'y a pas de virus de la grippe aviaire en Roumanie pour l'heure", a déclaré, mercredi 12 octobre, une porte-parole du commissaire européen à la santé et à la protection des consommateurs, Markos Kyprianou."Nous ne prévoyons pas de proposer des mesures contre la Roumanie, à moins que la présence d'un virus de la grippe aviaire très pathogène ne soit détectée", a-t-elle continué.
Après l'identification du virus de la grippe aviaire en Turquie, Bruxelles avait interdit, lundi 10 octobre, l'importation des oiseaux vivants et des plumes en provenance de ce pays, et attendait des résultats, mercredi 12 octobre, pour prendre des décisions concernant la Roumanie.
La porte-parole n'a pas précisé si ses déclarations s'appuyaient sur les résultats d'analyses confiées à un laboratoire de Grande-Bretagne, qui devait se prononcer ces jours-ci.
Avec AFP
L n Turquie, les abattages de volailles ont pris fin mercredi, après la détection d'un cas de grippe aviaire dans une ferme de Kizika (nord-ouest du pays). Toutefois, la quarantaine – imposée sur un périmètre de 3 kilomètres autour du village de Kiziksa – est maintenue, a précisé le porte-parole du ministère de l'agriculture, Faruk Demirel, et "les contrôles continuent de la manière la plus stricte".
Le responsable a en outre fait savoir que les résultats d'analyse sur les prélèvements envoyés par son ministère à un laboratoire britannique chargé d'identifier le virus de la grippe aviaire étaient attendus"vers le milieu de la semaine prochaine". Ce laboratoire avait indiqué, mardi 11 octobre, qu'il pourrait déterminer d'ici quelques jours si le virus turc était le H5N1, qui a causé la mort d'une soixantaine de personnes et de millions de volatiles en Asie depuis 2003.
Pour l'heure, une désinfection massive est en cours dans la zone de quarantaine. Des équipes de vétérinaires ont abattu plusieurs milliers de volailles et les ont enfouies dans la chaux, a indiqué la chaîne d'information NTV. Pour éviter la contagion, des habitants ont consenti à livrer aux autorités leurs animaux – qui constituent souvent leur seule ressource –, après avoir reçu l'assurance d'une compensation immédiate de l'Etat.
Ankara a affirmé qu'à ce jour aucun être humain n'avait été contaminé et que la maladie était circonscrite à Kiziksa.
Avec AFP
D ominique de Villepin a convoqué une réunion interministérielle concernant la grippe aviaire, pour vendredi 14 octobre, a annoncé mardi le ministère de l'agriculture.
La France demandera en outre au comité d'experts européens, qui se réunit mercredi à Bruxelles, de "renforcer la surveillance des oiseaux migrateurs et la protection des élevages", après la découverte de cas suspects de grippe aviaire en Turquie et en Roumanie ce week-end, ajoute le ministère de l'agriculture. "Des mesures additionnelles de protection seront prises s'il est confirmé que le virus a gagné la Turquie ou la Roumanie", précise le ministère.
Par précaution, en attendant les résultats des examens complémentaires concernant les virus trouvés en Turquie et en Roumanie, la Commission européenne a interdit les importations dans l'UE de tous les oiseaux et leurs produits en provenance de Turquie. L'exécutif européen n'a, en revanche, pris aucune mesure en ce qui concerne la Roumanie qui, selon le ministère de l'agriculture français, a d'elle-même interdit les exportations.
Avec AFP
L e laboratoire pharmaceutique suisse Roche, qui fabrique le Tamiflu – traitement considéré comme le plus efficace contre la grippe aviaire –, serait disposé à autoriser d'autres sociétés à produire ce médicament, rapporte le Wall Street Journal, mercredi 12 octobre. Roche, qui prévoit de doubler sa production de Tamiflu d'ici la fin de l'année par rapport au niveau de 2004, et de la doubler à nouveau d'ici la mi-2006, cherche des sociétés de taille moyenne pour renforcer les diverses étapes de fabrication, afin d'augmenter la production totale, précise le quotidien.
Les scientifiques redoutent que le virus de la grippe aviaire – uniquement transmissible, pour le moment, à l'homme par les oiseaux – ne mute et puisse se transmettre d'humain à humain. Ils craignent en outre une pénurie de Tamiflu en cas de pandémie.
En France, près de 14 millions de traitements antiviraux seront disponibles d'ici la fin de l'année pour combattre une éventuelle pandémie humaine de grippe d'origine aviaire, a rappelé le ministre de la santé, Xavier Bertrand, mardi 11 octobre. La France dispose à ce jour de 5 millions de traitements, dont une partie en gélules et une autre, en vrac, stockée dans les pharmacies des armées. Selon Xavier Bertrand."Il faut informer sans affoler. Notre rôle, c'est de nous préparer au mieux", a résumé le ministre de la santé, réaffirmant le souci du gouvernement de"jouer la transparence".
Avec AFP
"N os tests sur les animaux ont été un succès, et nous avons formulé une demande auprès des ministères concernés" pour effectuer des tests sur les hommes, dès 2006, a affirmé un haut responsable de l'Institut national d'hygiène et d'épidémiologie du Vietnam, sous couvert de l'anonymat. Les autorités vietnamiennes ont par ailleurs commencé une campagne nationale de vaccination des volailles, dans 48 des 64 provinces du pays.
Le Vietnam doit présenter aux pays donateurs, à Hanoï, mercredi 12 octobre, un plan d'urgence pour lutter contre la grippe aviaire pour les six prochains mois, a-t-on appris de sources officielles. Le Programme de l'ONU pour le développement (PNUD), l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) ont collaboré avec les autorités pour définir les priorités. L'ensemble des mesures prises contre le virus devrait coûter environ 5 millions de dollars, selon le docteur Hans Troedsson, patron de l'OMS à Hanoï. L'initiative intervient à la veille de l'arrivée au Vietnam du secrétaire d'Etat américain à la santé, Michael Leavitt, en tournée dans le Sud-Est asiatique pour discuter des mesures pour prévenir une pandémie.
Le virus H5N1 a tué 44 personnes au Vietnam depuis la fin 2003, soit deux tiers du nombre total des victimes recensées dans le monde. Les experts internationaux craignent une mutation du virus H5N1 de la grippe aviaire, qui lui permettrait de devenir aisément transmissible entre humains et de déclencher une pandémie mondiale.
Avec Reuters
L es autorités du Caire ont pris des mesures pour prévenir la grippe aviaire – y compris l'interdiction d'importer des volailles en provenance des pays touchés par cette maladie –, a annoncé l'agence officielle égyptienne Mena. Le ministère de la santé égyptien a également décidé de mettre en place des cellules de surveillance liées à des laboratoires pour tester les cas suspects et contrôler le volailles importées, ajoute l'agence.
La Jordanie, quant à elle, a annoncé lundi avoir mis en place une équipe spécialisée pour faire face à une apparition éventuelle du virus sur son territoire, après que des cas de cette maladie ont été détectés en Turquie. De son côté, la Syrie a annoncé mardi qu'elle allait prendre des mesures de prévention contre cette maladie, tout en affirmant qu'aucun cas n'avait été signalé dans le pays, selon l'agence officielle Sana.
Avec AFP LEMONDE.FR | 12.10.05 | 12h37
C e n'est qu'un soupçon, mais terrible. Jean-Bernard Mérimée, ambassadeur de France et ancien représentant permanent du Quai d'Orsay au Conseil de sécurité des Nations unies, entre 1991 et 1995, a été placé en garde à vue lundi 10 octobre et devrait être mis en examen. A ce stade, le juge d'instruction Philippe Courroye s'interroge sur son implication dans les détournements financiers liés au programme de l'ONU en Irak, dit "Pétrole contre nourriture".
M. Mérimée n'est pas le premier diplomate inquiété. Serge Boidevaix, lui aussi élevé à la dignité d'ambassadeur de France, ancien secrétaire général du Quai d'Orsay, a été mis en examen en septembre pour "trafic d'influence et corruption" dans le cadre du même dossier.
Au-delà de ces deux personnalités, neuf autres, parmi lesquelles l'ancien ministre de l'intérieur Charles Pasqua et son conseiller diplomatique Bernard Guillet, sont visées et se voient reprocher d'avoir bénéficié des largesses de l'ancien dictateur Saddam Hussein.
En bref, la justice les soupçonne d'avoir reçu des allocations pétrolières et de les avoir revendues avec une marge bénéficiaire d'environ 30 cents de dollar par baril. M. Mérimée aurait ainsi reçu des commissions sur quelque deux millions de barils; M. Boidevaix, président de la chambre de commerce franco-arabe depuis les années 1990, aurait été l'allocataire de plus de 32 millions de barils entre 1998 et 2003.
Sans préjuger l'issue de l'instruction, ces soupçons viennent durement écorner l'image de la diplomatie française. Les plus indulgents s'interrogeront sur les dangers d'une politique pro-arabe allant parfois jusqu'à l'aveuglement. Bagdad attendait de la France et de ses plus hauts représentants qu'ils renvoient une image positive du régime irakien. En échange des services rendus, Saddam Hussein a remercié une foule de prestataires plus ou moins conscients et intéressés.
La révélation de cette affaire, l'enquête conduite aux Nations unies par la commission Volcker et l'instruction menée en France par le juge Courroye embarrassent au plus haut point depuis de trop longs mois la diplomatie française. Le respect de la présomption d'innocence lui impose le silence. Mais le respect de sa mission devrait lui donner obligation de parler haut et clair.
En l'occurrence, la diplomatie américaine ne s'est encombrée ni d'élégance ni de demi-mesures, même si certaines sociétés d'outre-Atlantique étaient concernées. Washington est à l'origine de la campagne visant les trafics d'influence qui ont prospéré dans les marges du programme "Pétrole contre nourriture". Cela entrait dans le cadre de sa lutte sans merci avec la France tandis que celle-ci brandissait l'étendard du multilatéralisme et s'opposait au projet guerrier de George W. Bush en Irak. Cela permettait aussi à la Maison Blanche d'instruire le procès de l'ONU, organisation jamais assez efficace selon les Etats-Unis.
Cela dûment établi n'excuse en rien d'éventuelles malversations des ambassadeurs de la France.
Article paru dans l'édition du 13.10.05
Europekipete ♦ 12.10.05 | 14h11 ♦ On comprend mieux la menace du veto brandie par Mr Chirac pour defendre sa "paix" deguisee en soutient pour une dictature dont aucun Francais ne voudrait mais qui allait si bien aux Irakiens. Un exploit qui a fait verser des larmes d’ emotion chez beaucoup de naifs en mal de fierte nationale, apres le discours eloquent de Mr de Villepin. L’information d’aujourd’hui revele que le fameux veto n’avait pour but que de defendre la "paix" sur l’affaire "petrole contre nourriture".
MARCEL G. ♦ 12.10.05 | 14h27 ♦ Ces informations,sont,pour ceux qui lisent aussi la presse étrangère,connues depuis longtemps. Pourquoi a-t-il fallu autant de temps pour que la presse française en parle? Et ce n’est pas le seul sujet concerné par la silence!!!! La France ne défend pas le multilatéralisme, elle défend ses intérêts face, entre autres, aux U.S.A. Il en est de la Dimoplatie comme pour la Justice, elles n’ont aucun rapport avec la moralité.
sunseeker ♦ 12.10.05 | 14h28 ♦ comme en écho à l’échec du prétendu modèle social français qui est devenu un anti-modèle avec la démagogie anti-réformes mitterrando-chiraquienne, la sincérité de la diplomatie française est remise en question...pourquoi toute cette énergie gaspillée à s’opposer à un allié les USA qui après tout allait déposer un dictateur, et pendant ce temps on ne voit pas Chirac ou Villepin s’émouvoir des noirs du Darfour massacrés par les milices arabes...peut être le vrai visage de la politique "arabe"...
jacklittle ♦ 12.10.05 | 14h36 ♦ Halte là!!!! Si vouv vous mettez à porter des jugements sur chaque pays du monde à l’aune d’affaires plus ou moins opâques où seraient mêler des diplomates ou des pseudos-diplomates,il va falloir passer en revue quasiment tous les pays de la planisphère. Gardons-nous de porter des jugements définitifs sur tout et sur rien. Sâchez,sâchons raison garder.
Edouard ♦ 12.10.05 | 14h43 ♦ Vous placez contre l’eventuelle culpabilite des francais la volonte des US de demasquer les irregularites du "food for oil". Cela n’est pas comparable. Les francais sont coupables ou pas. Et le fait que les US aient cherche a le prouver ne change rien a la realite de cette culpabilite (si elle est prouvee bien sur). De plus, on pourrait aussi dire que la position francaise anti guerre etait motivee par la necessite de cacher ces eventuelles irregularitees. L’image de la France souffre.
Thierry B. ♦ 12.10.05 | 15h40 ♦ est-ce vraiment une surprise ? Malheureusement non, et les FAITS ont finalement toujours raison.
J C. ♦ 12.10.05 | 15h46 ♦ Quelle naïveté et pourquoi s’acharner sur ces lampistes. L’instruction ayant été menée ailleurs est allé jusqu’au bout.. combien de corrompus s’en sont tiré ici parce que notre justice sait fermer les yeux. N’accablons pas ces hommes pensons aux autres, beaucoup plus gradés, qui ont échappé à cette opobre Allons un peu de sérieux
monrog ♦ 12.10.05 | 16h17 ♦ Le rôle joué par les Etats Unis dans le déclenchement de cette affaire n’en met que davantage en lumière l’aspect inquiétant: sans ce type d’"accident" déclencheur, combien d’affaires de ce genre ignorons-nous ? La France est-elle devenue un pays corrompu, signe supplémentaire, s’il en était besoin, de son profond déclin ?
Grichka10 ♦ 12.10.05 | 16h26 ♦ La compromission avec un dictateur génocidaire pendant 25 ans, les magouilles du programme Oil for Food, c’est très très dur à avaler, d’ou que cela vienne. Que ces exactions viennent du pays qui nous rabache les oreilles avec des positions morales sur l’Irak depuis 3 ans, ca navigue entre le ridicule absolu et l’innacceptable selon l’humeur du moment. Au moins les Américains ne drapent pas leurs turpitudes dans un édredon de morale-fiction.....
esteban53 ♦ 12.10.05 | 16h29 ♦ L’image de la France ne deviendra pas trouble parce qu’on a découvert une affaire de diplomates corrompus. Il y a des corrompus dans tous les pays. Mais l’image de la France risque d’être entachée pour longtemps si la justice ne fait pas son travail vite et bien. Or c’est sur l’indépendance de la justice en France qu’on peut parfois émettre des doutes.
clo.clo ♦ 12.10.05 | 17h16 ♦ Je ne pense pas que les EU visaient explicitement la France, mais visaient d’abord l’ONU. Le fait que des diplomates français soient impliqués n’est qu’un effet collatéral, heureux même dans ce cas là pour les Américains. Il ne faut pas voir du complot partout, et des diplomates corrompus il y en a eu partout, même aux EU ou ils ont été aussi poursuivis. Alors c’est somme toute une affaire banale sans interet qui n’aurait pas du faire l’objet d’un éditorial.
Le réveur ♦ 12.10.05 | 17h23 ♦ La corruption est inhérente au capitalisme et au marché. Avons-nous oublier "Elf" et ses avions renifleurs sans parler des frégates de Taïwan et autres scandales. S’il faut bien justifier "Les Paradis Fiscaux". Alors pourquoi chercher des poux dans les têtes de quelques hauts fonctionnaires corrompus qui ne sont que les comparses de quelques dignitaires de la Vème République. Après quarante sept années de monarchie républicaine il est grand temps de redonner le pouvoir aux citoyens
Flying+Frog ♦ 12.10.05 | 17h46 ♦ L’image de la France, mais entendez par là l’Etat Français, est déplorable à l’intérieur de nos frontières. L’extérieur ne fait que s’ajuster avec retard.
Sue ♦ 12.10.05 | 18h27 ♦ Où est l’information? Nous ne savons pas si ces diplomates sont corrompus, en d’autres termes nous ne savons rien de sûr. Mais le fait de vouloir montrer la corruption dans une institution: à l’ONU par exemple, dans un Etat , en France, ne relève pas du hasard, car tant que je regarde là où je dois regarder; les affaires des autres, celles de M.Halliburton par exemple continuent.Ce qui semble être l’essentiel.
XF ♦ 12.10.05 | 18h38 ♦ Cocoricooooo !!! chante le coq sur son tas de fumier.
orbi ♦ 12.10.05 | 18h42 ♦ Circulez, il n’y a rien à voir. c’est le domaine réservé du Chef de l’Etat. Il faut choisir, soit la France a une belle diplomatie flamboyante pour jouer dans la cour des "grands", soit on entre dans les détails, et là c’est la porte ouverte à toutes les mesquineries. Bientôt vous voudrez aussi des commissions d’enquêtes, des débats au Parlement, de la transparence sur les traités internationaux de défense, de coopération. Mais où irions nous? Soyons sérieux!
azebolu ♦ 12.10.05 | 18h58 ♦ Et allez!!!Les américains mènent le jeu et la France y plonge comme si elle avait qqch. à se reprocher. On a terni leur image de défenseurs de la démocratie, ils ternissent l’image des Mérimée, Boidevaix, Pasqua, Guillet et consorts, et par cela même l’image de la France. Mais bon sang, quand donc écrira-t-on des pages incendiaires sur leur comportement à vouloir imposer la paix par la guerre, sur leur racisme institutionalisé, sur leur dette extérieure, sur leur fanatisme religieux.
A ffiches placardées un peu partout sur les murs, banderoles pendues en travers de quelques avenues de Bagdad, incessants spots télévisés (payés) sur les chaînes, messages en boucle sur les radios, pages après pages de publicité officielle dans les journaux: à première vue, c'est bien une nouvelle campagne électorale qui bat son plein en Irak. L'enjeu est a priori important puisque les 15 millions d'électeurs enregistrés doivent décider, le 15 octobre, s'ils approuvent ou non le projet de Constitution laborieusement concocté, ces dernières semaines, par leurs élus, guidés par des experts américains et britanniques.
"Votez pour l'Irak, votez pour uneConstitution qui garantira vos droits", admoneste telle grande affiche aperçue sur l'avenue Al-Saadoun, au centre de Bagdad. "Votez oui, votez non, mais votez", insiste telle autre, barrée d'un stylo. "Voter, d'accord, mais sur quoi exactement ?", demande Saher Awad, un jeune ingénieur du quartier d'Al-Tourath, dans le sud-ouest de la capitale. "A quatre jours du référendum, personne, dans mon quartier, n'a encore vu le projet " – imprimé à 5 millions d'exemplaires, notait-il.
Idem à Mouaffat, à Saïdiyah et ailleurs encore. Apparemment, plusieurs centaines de milliers d'électeurs, des millions sans doute à travers tout l'Irak, sont dans la même situation. "Eh oui, ironise un journaliste local qui requiert l'anonymat, le 30 janvier, on nous a demandé de voter pour des listes de candidats anonymes et sans programme politique bien défini. La charade continue. C'est cela la démocratie à l'occidentale ?"
Rencontré dans la "zone verte", le centre-ville ultrafortifié où se sont réfugiés, derrière une bonne vingtaine de kilomètres de hauts remparts de béton, Parlement, gouvernement, ministères et autres ambassades américaine et britannique, le confrère affirme qu'une forte proportion des électeurs sait à peine lire et que le jargon du texte proposé – 52 pages – lui échapperait de toute façon. Il pense que, dans l'atmosphère polarisée qui sévit entre les communautés, les gens auront tendance à voter comme leurs leaders politiques ou leurs chefs de tribu – "rémunérés" ou non par le pouvoir – le leur diront.
Il n'empêche. A Ramadi, la capitale de la province largement sunnite d'Al-Anbar – l'un des fiefs de laguérilla multiforme qui ensanglante le pays –, plusieurs centaines de résidents ont défilé, lundi, dans la rue pour réclamer le texte de la Constitution. "Laissez-nous la lire et nous donnerons notre opinion !" proclamait une banderole. "Même si nous ne l'avons pas, nous voterons", affirmait une autre.
Beaucoup, dans cette ville de 400 000 habitants qui a énormément souffert depuis l'invasion de mars-avril 2003, aussi bien des sanglantes activités de la guérilla que des meurtrières expéditions punitives américaines, sont convaincus qu'ils sont l'objet d'une cabale de Bagdad. Omar Khalifa, le représentant local du Parti islamique, sans doute la plus grande formation politique sunnite légale de l'Irak d'aujourd'hui, le confie sans ambages: "On veut empêcher les sunnites de participer au vote parce que nous rejetons cette Constitution."
La quasi-totalité des partis arabes issus de cette branche de l'islam – qui gouvernait l'Irak depuis toujours bien qu'elle ne représente que 20 à 25 % de la population – a appelé à voter contre un projet jugé "dangereux pour l'unité du pays", puisqu'il consacre la large autonomie des Kurdes au nord et autorise la formation d'une autre grande zone autonome chiite au sud.
Les Kurdes et les Arabes chiites, qui représentent plus des trois quarts de la population, devant probablement voter en faveur du texte, la seule chance qu'ont les sunnites d'obtenir une réécriture de la Constitution est d'obtenir une majorité de "non", à hauteur des deux tiers des votants dans au moins trois des quatre provinces (sur dix-huit) où ils sont les plus nombreux. Une gageure d'autant plus improbable que la mouvance Al-Qaida en Irak, sous la férule d'Abou Moussab Al-Zarkaoui, rejette l'idée même d'une Constitution – "L'islam est notre Constitution", proclament ses communiqués – et menace de mort ceux qui iront voter le 15 octobre.
Patrice Claude
Article paru dans l'édition du 13.10.05
U ne poupée de collection à l'effigie d'Angela Merkel ! Avide de publicité, un fabricant de jouets allemand a annoncé qu'il en produirait bientôt un millier d'exemplaires. Si cette nouvelle relève de l'anecdote, elle n'en illustre pas moins les difficultés auxquelles se heurte déjà Angela Merkel, présidente de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), au lendemain de l'accord intervenu lundi 10 octobre pour lui confier la tâche de former un gouvernement avec le Parti social-démocrate (SPD), et d'en assumer la direction.
A peine adoubée, la future chancelière voit ses prérogatives remises en cause par ceux, chez ses adversaires mais aussi dans son propre camp, qui voudraient ne voir en elle qu'une marionnette dénuée de réels pouvoirs. Divers responsables ont ainsi mis en doute, mardi 11 octobre, la capacité de Mme Merkel à déterminer "les grandes orientations de la politique" du pays. Inscrite dans l'article 65 de la Loi fondamentale, la Constitution allemande, cette prérogative a été contestée mardi par Franz Müntefering, le président du SPD. A l'entendre, une telle attribution n'est pas adaptée à la réalité d'une grande coalition entre deux partenaires quasiment égaux. "Qui agit de la sorte sait bien que la coalition capotera", a-t-il menacé, à moins d'une semaine du début des négociations officielles sur la formation du gouvernement et son programme.
Plus étonnants sont les doutes similaires émis par l'Union chrétienne-sociale (CSU), l'aile bavaroise de la CDU. Edmund Stoiber, son président, qui a dû accepter de se placer sous la bannière d'Angela Merkel après avoir échoué de justesse à la chancellerie lors des élections de 2002, a estimé que les choses n'allaient pas de soi. "Il se peut qu'à la fin, la chancelière montre la direction, mais ce n'est possible qu'à petite dose dans une grande coalition", a déclaré le ministre-président de Bavière, qui s'est dit prêt à entrer au gouvernement à la tête d'un super ministère de l'économie et des technologies. Un de ses lieutenants, Michael Glos, a ajouté qu'il y avait "une différence" entre le droit constitutionnel et la réalité. "La grande coalition de la méfiance", titrait mercredi la Berliner Zeitung , alors qu'une éditorialiste de Bild , le grand quotidien populaire, regrettait que les hommes politiques aient autant de mal à "accepter que le pays soit dirigé par une femme".
Un autre sujet de discorde a surgi concernant les finances publiques. Depuis 2002, le pays enfreint la limite de 3 % du PIB fixée par le pacte de stabilité de la zone euro pour le déficit budgétaire. Cela devrait être encore le cas cette année. Face à ce trou, la droite voudrait faire adopter un collectif budgétaire pour 2005, afin de faire un point sur l'état des lieux et d'adopter des crédits supplémentaires.
"Nous devons montrer ce qui a mal tourné dans la planification du ministre des finances", a insisté M. Stoiber. Le titulaire du poste dans le gouvernement sortant, le social-démocrate Hans Eichel, s'y est vivement opposé. Le portefeuille des finances doit, en principe, rester aux mains du SPD.
Mme Merkel espère en avoir terminé avec les négociations d'ici au 12 novembre, pour que les partenaires soumettent leurs conclusions à leurs troupes respectives lors de congrès prévus dans la foulée. Ensuite seulement interviendra le vote d'investiture au Bundestag. Il n'est pas évident que, ce jour-là, tous les députés sociaux-démocrates se prononcent en faveur de Mme Merkel. "Les réserves sont très grandes" à son encontre, en raison de ses convictions libérales, a fait remarquer Renate Schmidt, ministre (SPD) de la famille dans le cabinet sortant.
Jusque-là, le chancelier sortant, Gerhard Schröder, continuera à gérer les affaires courantes. Vendredi, il se rendra à Paris pour rencontrer le président Jacques Chirac et discuter du sommet européen prévu à la fin du mois, auquel il participera pour l'Allemagne. Mardi, M. Schröder a, pour la première fois, laissé entendre publiquement qu'il ne siégerait pas dans le prochain gouvernement, mais il participera aux négociations en vue de sa formation. Lors d'un discours, il a affirmé qu'il ferait en sorte que "ça se passe bien. C'est comme cela que j'interprète la mission qu'on a, même si on n'appartient plus au prochain gouvernement".
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 13.10.05
E n présentant l'accord qui lui permet de devenir la chancelière d'un gouvernement de grande coalition entre les Unions démocrate-chrétienne et chrétienne-sociale (CDU-CSU) et le Parti social-démocrate (SPD), Angela Merkel s'est montrée consensuelle sur la politique extérieure de l'Allemagne, lundi 10 octobre, un signal sur le dossier de la Turquie.
"Je considère que les questions concernant la politique étrangère ne seront pas plus difficiles à résoudre que les questions de politique intérieure", a-t-elle déclaré, ajoutant qu'il existait "un accord sur les points fondamentaux" avec les sociaux-démocrates, auxquels doit revenir le portefeuille de la diplomatie allemande. Mme Merkel s'est contentée de préciser à propos des négociations sur l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne qu'elles "viennent seulement de commencer". Une façon d'en prendre acte.
Mme Merkel est personnellement à l'origine de l'idée d'un "partenariat privilégié" et non d'une adhésion pleine alors que le SPD de M. Schröder est très favorable à l'entrée de la Turquie dans l'UE.
Selon la presse allemande, Ankara ne s'attend cependant pas à une modification drastique de la position allemande, la présidente de la CDU ayant aussi indiqué dans le passé qu'elle respecterait les décisions de l'UE sur le dossier. Le président de la commission des affaires étrangères au Parlement turc, Mehmet Dulger, a noté lundi que Mme Merkel devrait tenir compte de la "nouvelle réalité" de l'ouverture des négociations. Il s'est réjoui de ce que le portefeuille des affaires étrangères en Allemagne revienne au SPD: "Je pense que la force de la pression qu'exercera l'Allemagne sur la Turquie ne sera pas aussi forte que si Mme Merkel avait eu une grande majorité."
Lundi 3 octobre, le porte-parole de la CDU pour les affaires étrangères, Friedbert Pflüger, avait indiqué que Mme Merkel soutenait la position de l'Autriche, qui bloquait l'ouverture des négociations et voulait voir mentionnée une alternative avant d'assouplir sa position. "Ce que Mme Merkel a initié avec sa position du partenariat privilégié a presque conduit à une crise profonde de l'Union européenne" , avait dénoncé le 5 octobre le vice-président du groupe parlementaire SPD, Michael Müller.
Adrien de Tricornot
Article paru dans l'édition du 13.10.05
"U nanimes", et se disant réunies "pour la première fois depuis vingt ans", treize organisations du monde judiciaire ont demandé, mardi 11 octobre, "au premier ministre et aux parlementaires" de retirer la proposition de loi sur la récidive qui doit être examinée en seconde lecture par l'Assemblée nationale, mercredi 12 et jeudi 13 octobre.
La "coordination des syndicats et associations professionnelles du monde judiciaire" (parmi lesquelles figurent l'Association des avocats conseils d'entreprises, la Fédération des jeunes avocats, le Syndicat des avocats de France, l'Association des avocats pénalistes, le Syndicat des personnels pénitentiaires de la FSU, le SNPES-PJJ, l'Union syndicale des magistrats, le Syndicat de la magistrature) "s'inquiète vivement devant la rétroactivité annoncée de certains éléments de la réforme sur la récidive, (...) , s'indigne de ce qu'un ministre de la République, de surcroît garde des sceaux, ait appelé officiellement à la violation de la Constitution, (...) et appelle à la vigilance des citoyens français sur l'avenir de leur justice". Les signataires de cet appel demandent également au président de la République,"garant de la Constitution, de prévenir toute nouvelle atteinte à l'Etat de droit" , et aux parlementaires de "ne pas céder devant les pressions".
Article paru dans l'édition du 13.10.05
D' abord, ils l'ont brutalement éjecté du taxi. Ensuite, ils l'ont roué de coups, l'ont piétiné, lui ont craché dessus avant de le laisser inconscient devant le journaliste britannique qui l'avait accompagné dans sa tournée d'un village "rebelle" de la province méridionale du Guangdong. Lu Banglie, militant de la cause paysanne chinoise, lui-même ancien maire et membre de l'assemblée populaire locale d'un district de sa province, le Hubei, revient de loin. Le 8 octobre, il a été brutalement agressé par un groupe d'hommes vraisemblablement aux ordres du chef du village de Taishi, non loin de Canton, et dont les administrés demandent le renvoi pour cause de corruption patente.
Le journaliste Benjamin Joffe-Walt, correspondant du quotidien The Guardian à Shanghaï, n'en est pas revenu d'un tel déchaînement de violences. Dans un article publié au lendemain de l'incident, il craignait que M. Lu n'ait succombé à l'agression à laquelle les autorités locales nient toute participation. Peu avant, une journaliste du quotidien hongkongais South China Morning Post, Liu Xiaoyin, et l'envoyé spécial de Radio France internationale, Abel Ségrétin, avaient eux aussi, mais de manière moins violente, été bousculés par d'autres membres de la "milice" locale. Joint par téléphone, mardi 11 octobre, Lu Banglie, rentré dans ses foyers, a indiqué "aller plutôt bien" même s'il continue de "souffrir de maux de tête et de troubles de la vision".
L'affaire est désormais presque classique dans un contexte où les paysans spoliés de leurs terres sont de moins en moins enclins à rester cois devant les injustices liées à une urbanisation qui dévore les campagnes. A Taishi, depuis plusieurs semaines, s'est développé un mouvement paysan qui a récemment dégénéré en une violente confrontation avec la police. Grèves de la faim, occupations des locaux administratifs se sont multipliés pour protester contre les agissements du chef du village, un certain Chen Jinsheng. Celui-ci est accusé d'avoir illégalement vendu les terres paysannes – propriété de l'Etat – à des promoteurs immobiliers. Le maire est un élu – seul niveau de démocratie directe en Chine – mais les villageois de Taishi demandent qu'il soit limogé pour corruption.
Venu les soutenir, Lu Banglie est l'un de ces militants-fermiers qui, raconte-t-il, a pris conscience des nécessités d'une action non violente après avoir vu un film consacré à la vie du Mahatma Gandhi. Dans le climat actuel d'une Chine où les zones rurales sont le théâtre d'une aggravation des conflits, il s'agit pour lui de privilégier le dialogue, les pétitions contre les abus de pouvoir, et l'enseignement de ses droits à la population des campagnes.
"Je me suis toujours intéressé aux questions du développement économique et aux aspects juridiques", nous a expliqué au téléphone cet homme dont la mésaventure est commentée depuis le début de semaine sur les forums de discussion Internet. Selon lui, la contestation paysanne de Taishi est "significative, quelle qu'en soit l'issue". "Si la population ne parvient pas à se débarrasser de ce chef de village élu au printemps dernier, cela lui permettra de prendre conscience de l'importance du droit de vote: la prochaine fois, les gens feront peut-être attention à la personnalité qu'ils choisissent... Ce qui se passe est un événement crucial pour le développement de la démocratie en Chine !"
Bruno Philip
Article paru dans l'édition du 13.10.05
L' ANNÉE publicitaire n'est pas encore terminée, mais, après un rebond marqué en 2004, l'heure est à la morosité sur le marché français. Et les espoirs d'une embellie restent limités.
" Le bilan n'est pas très bon cette année. Nous estimons que la croissance du marché publicitaire français, inférieure à celle des autres pays européens, devrait être comprise entre 1,2 % et 1,5 %. En euros constants, le marché français est même en légère baisse , alors que nos prévisions en début d'année tablaient sur une progression de 3,1 % ", constate Bruno Delecour, PDG d'OMD, filiale de conseil média de l'américain Omnicom."
Pour expliquer ce tassement, les regards se tournent vers les marques de grande consommation. Attaquées par les progrès du hard discount et des marques de distributeurs, et mises sous pression par la réforme de la loi Galland, elles ont coupé leur budget de communication.
La télévision en pâtit. Selon OMD, ses revenus publicitaires devraient stagner en 2005. Sur les neuf premiers mois de l'année, ils sont en retrait de 1 %, selon TNS Media Intelligence. L'affichage est en légère baisse, de grandes enseignes, comme Carrefour, ayant réduit leur budget. La presse quotidienne nationale souffre aussi. OMD s'attend à une baisse de 3 % à 4 % de ses revenus publicitaires. TNS chiffre la réduction du nombre de pages de publicité à 11 % sur les neuf premiers mois. Internet, lui, continue sur sa lancée, et l'évolution de la radio reste positive. "Pour 2006, nous tablons sur une progression du marché publicitaire de 2,5 %" , conclut M. Delecour.
Laurence Girard
Article paru dans l'édition du 13.10.05
L a mise en examen, mercredi 12 octobre, de deux journalistes de L'Equipe a été suivie de celle, jeudi 13 octobre, de trois de leurs collègues du Point – Christophe Labbé, Olivia Recasens et Jean-Michel Decugis. Selon des sources judiciaires proches du dossier, instruit au tribunal de Nanterre, ils sont soupçonnés de "recel de violation du secret de l'instruction" pour avoir publié, avant même leur versement au dossier de l'instruction, des écoutes téléphoniques des coureurs et soigneurs de Cofidis, à la suite de l'enquête sur un trafic présumé de produits dopants au sein de cette équipe cycliste.
Les journalistes du Point "ont fait, et bien, leur travail. Cette procédure est une atteinte à la liberté de la presse", ont dénoncé les avocats de l'hebdomadaire, Mes Renaud Le Gunéhec et Xavier Normand-Bodard. Les directeurs de publication des deux médias ont estimé que l'affaire posait le problème de la défense du métier de journaliste et d'un de ses éléments, la protection des sources. "On va mener la bataille, car on a le sentiment de mener un combat pour l'ensemble de la profession et les racines mêmes du métier", a martelé Franz-Olivier Giesbert, directeur du Point.
"Cette mise en examen nous permet sans doute d'obtenir une avancée sur le principe intangible à notre profession sur le secret des sources", avait pareillement déclaré Claude Droussent, directeur des rédactions de L'Equipe. "Les enquêteurs cherchent les sources et ne les ont pas trouvées. C'est l'essentiel pour nous. Mais comme ils ne ramènent rien dans leurs filets, ils ramènent des journalistes", a estimé une source proche des rédactions concernées, qui affirme que les journalistes ont été placés sur écoutes par l'inspection générale des services (IGS, police des polices), chargée de l'enquête. Le parquet de Nanterre n'a ni confirmé ni infirmé cette information.
Le parquet de Nanterre avait ouvert, début 2004, une information judiciaire pour violation du secret de l'instruction, après un article du Point du 22 janvier, dans lequel était publiée l'intégralité des transcriptions d'écoutes téléphoniques de coureurs et soigneurs de Cofidis, puis la publication dans L'Equipe, le 9 avril 2004, de larges extraits des procès-verbaux d'audition de plusieurs coureurs de Cofidis.
En janvier 2005, l'affaire avait soulevé un tollé dans le monde de la presse à la suite des perquisitions menées dans les locaux du Point et de L'Equipe, ainsi qu'aux domiciles des deux journalistes du quotidien sportif, entraînant des saisies de disques durs d'ordinateurs et d'agendas.
Aux yeux de la justice, qui emploie très rarement de telles méthodes contre des journalistes, l'affaire est particulière. Les publications des procès-verbaux d'écoutes téléphoniques sont, en effet, intervenues avant leur versement par la police au dossier d'instruction Cofidis. L'origine policière des fuites est donc évidente aux yeux des juges de Nanterre.
La violation du secret de l'instruction, auquel sont tenues les personnes qui "concourent à la procédure" (magistrats, greffiers, enquêteurs) mais pas les journalistes, est éventuellement caractérisée en cas de transmission et de publication de documents de l'enquête. Le juge doit cependant identifier la source des journalistes pour être à même de poursuivre. Mais la loi accorde aux journalistes le droit de refuser de livrer cette source.
Concernant l'affaire Cofidis elle-même, le juge d'instruction Richard Pallain a clos son instruction en août, et mis en examen neuf personnes – coureurs ou ex-coureurs cyclistes, soigneur et directeur sportif – pour "infraction à la législation sur les produits stupéfiants et infraction à la législation sur les substances vénéneuses". En octobre 2004, la mise en examen pour dopage du coureur de l'équipe Cofidis Cédric Vasseur fut annulée, après l'apparition dans le dossier d'instruction de faux procès-verbaux d'interrogatoires du coureur. La brigade des stupéfiants fut dessaisie de l'enquête, finalement close en septembre dernier.
Avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 13.10.05 | 15h36
D ès que le commissaire européen chargé de la santé et de la protection des consommateurs, Markos Kyprianou, a annoncé avoir "reçu confirmation que le virus trouvé en Turquie est celui de la souche hautement pathogène H5N1", la Commission a étendu à la Roumanie l'interdiction d'exporter, pendant six mois renouvelables, vers l'UE des volailles vivantes, des plumes et de la viande, une mesure déjà en vigueur à l'encontre de la Turquie.
Bruxelles, qui s'était pourtant voulu rassurante sur la situation en Roumanie, mercredi, a effectué un revirement, déclarant jeudi que la grippe aviaire était finalement détectée dans ce pay. La Commission a précisé que des tests supplémentaires étaient en cours "pour certifier que le virus en question appartient à la souche H5N1", évoquant le virus qui a causé la mort d'une soixantaine de personnes en Asie, depuis la fin de l'année 2003. Le laboratoire agréé par l'UE pour les analyses sur la grippe aviaire devrait pouvoir confirmer ou exclure jeudi ou vendredi la présence en Roumanie du H5N1.
Un train de mesure a été mis en place, jeudi, afin d'éviter la propagation de l'épizootie. Il s'agit notamment de surveiller les élevages, d'isoler les poulets et les canards des oiseaux migrateurs et d'avertir immédiatement les services sanitaires si des cas suspects se présentent. Les élevages concernés devront être mis en quarantaine et toutes les volailles détruites par incinération. La Commission européenne déconseille également aux gens qui se rendent en Roumanie et en Turquie de fréquenter des élevages.
Le mot d'ordre de M. Kyprianou est simple: "Nous ne voulons pas créer de panique." "S'il y a une pandémie, il y aura un très grand nombre de morts", a expliqué le commissaire. "Personne ne sait quand cela peut arriver. Certains scientifiques le présentent comme possible, d'autres le prédisent comme certain." Il s'agit donc de préparer des stocks de médicaments antiviraux et de vaccins contre la grippe classique, dont l'injection limitera les risques."C'est un virus hautement pathogène, mais l'Union européenne a l'expérience nécessaire pour gérer cela", a-t-il estimé.
Certains pays, dont la Belgique, ont exhorté la Commission à coordonner les demandes de médicaments, dans la mesure où les laboratoires ont tendance à privilégier les énormes commandes des grands pays au détriment des "petits". L'institution s'est déclarée prête à assumer ce rôle, à condition que les Etats membres le lui confient.
Dans le même temps, Bruxelles demande de tout mettre en œuvre pour accélérer la recherche d'un vaccin contre la grippe aviaire le jour où l'on aura isolé un virus qui se transmettrait entre humains.
Enfin, les experts vétérinaires de l'UE réunis jeudi à Bruxelles ont discuté des propositions de la Commission visant à "réduire le risque de contact entre les oiseaux sauvages et les volailles dans des zones telles que les marécages ou les zones de passage des oiseaux migrateurs", selon un communiqué. Les Etats membres devraient définir ces zones à risque et y mettre en place les mesures nécessaires, qui pourraient aller jusqu'à "garder les volailles à l'intérieur".
Les experts européens des oiseaux migrateurs décideront vendredi, lors d'une réunion d'urgence, de la mise en place de telles mesures. Mais il n'est pas question, pour l'instant, d'interdire la chasse.
Avec AFP et Reuters
L a Commission européenne a annoncé, jeudi 13 octobre, que le virus de la grippe aviaire détecté en Turquie était bien le virus H5N1, qui a entraîné en Asie la mort d'une soixantaine de personnes depuis fin 2003.
"Nous avons maintenant reçu la confirmation que le virus trouvé en Turquie est le virus de la grippe aviaire H5N1 hautement pathogène", a annoncé le commissaire européen à la santé et protection des consommateurs, Markos Kyprianou, précisant qu'"il y a une relation directe avec les virus trouvés en Russie, en Mongolie et en Chine".
Plus tôt dans la journée, la Commission européenne avait confirmé que l'interdiction touchant les importations d'oiseaux vivants et de plumes de Turquie était repoussée jusqu'au mois d'avril 2006. Depuis le 10 octobre, un embargo frappe la Turquie, où un foyer d'infection a été découvert dans un élevage du Nord-Ouest. Cette interdiction ne frappe pas les volailles vivantes. A l'exception de certaines viandes, dont le traitement par la chaleur tue le virus de la grippe aviaire, ces volailles et les produits qui en sont issus étaient déjà interdits en raison d'autres problèmes vétérinaires.
Le ministre de la santé turc, Recep Akdas, a cependant voulu se montrer rassurant, déclarant qu'il n'y avait pas de raison de se laisser gagner par la panique."Grâce à l'intervention bien préparée et adéquate du ministère de l'agriculture, le foyer épidémique est sous contrôle dans une zone bien précise, a-t-il dit aux journalistes. Naturellement notre pays se doit d'être prudent et prêt [pour une possible pandémie], mais il n'y a rien pour l'instant."
Les autorités ont procédé à l'abattage de quelque 8 500 animaux – poulets, dindes, oies, pigeons et canards –, selon un responsable du ministère de l'agriculture, Beytullah Okay, alors que le foyer de la maladie est sous quarantaine.
Avec AFP et AP
D es tests pratiqués en Roumanie ont confirmé la présence d'un virus de la grippe aviaire, a indiqué la Commission européenne, dans la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 octobre. Il s'agit du premier cas signalé en Europe.
"Les trois experts du laboratoire européen envoyés en Roumanie ont confirmé que le virus H5 de la grippe aviaire a été détecté dans deux échantillons, provenant d'un poulet et d'un canard, prélevés dans une ferme suspecte du delta du Danube", a précisé la Commission dans un communiqué. De son côté, Bucarest a confirmé ces tests."Nous avons finalement isolé le virus de la grippe aviaire dans des échantillons", a déclaré Ion Agafitei, le chef des services vétérinaires nationaux.
L'UE a interdit dans la journée les importations de volaille en provenance de Roumanie. La Commission européenne a en outre annoncé qu'elle "travaillait avec la supposition" que ce virus était le H5N1, comme en Turquie, en attendant d'en avoir la confirmation ou le démenti, vendredi.
Le ministre de la santé roumain, Eugen Nicolaescu, a annoncé avoir "contacté un grand producteur international" qui a assuré l'arrivée lundi de 25 000 doses d'antiviraux, et de 20 000 autres doses dans dix jours. Il a aussi décidé d'acheter 5 000 doses d'antiviraux auprès de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui s'est, de son côté, dit prête "à fournir gratuitement à la Roumanie 1 000 doses d'antiviraux".
"En l'absence d'un vaccin spécifique contre la grippe aviaire, la vaccination antigrippale est très importante car elle contribue à un accroissement de l'immunité", a précisé une porte-parole du ministère. De fait, plus de 15 000 personnes de la région du delta du Danube ont jusqu'alors été vaccinées contre la grippe commune.
La Roumanie va par ailleurs organiser prochainement un appel d'offres international, pour l'achat d'un million de doses de vaccin antigrippal, alors que la plupart des pharmacies du pays ont déclaré être en rupture de stocks.
Avec AFP, Reuters
L es échantillons testés positifs en Roumanie ont été prélevés non loin de la frontière bulgare, mais ce pays semble pour l'instant épargné. Les premiers tests menés en Bulgarie sur une possible présence du virus sont négatifs, a indiqué jeudi 13 octobre le ministre de l'agriculture, Nihat Kabil. "Les résultats des tests de laboratoire effectués jusqu'à présent à Plovdiv (Sud) sur cinq ou six oiseaux trouvés morts sont négatifs pour la grippe aviaire", a-t-il déclaré à la télévision nationale.
Dimanche, les autorités bulgares avaient appelé la population à remettre pour analyse chaque oiseau mort. Les cadavres d'une poule, d'une cigogne et d'un héron ont été notamment découverts lundi dans la région de Pleven (Nord), non loin de la Roumanie."Des oiseaux meurent tous les jours pour des tas de raisons", a souligné M. Kabil.
Aucune mortalité accrue de volailles n'a été détectée à ce jour en Bulgarie, mais la vigilance reste de mise. "La Turquie et la Roumanie", où des cas de grippe aviaire ont été détectés, "sont des pays voisins", a précisé le ministre de l'agriculture. La Bulgarie a interdit, lundi 10 octobre, les importations de volaille et de produits aviaires de Roumanie et de Turquie. La chasse aux oiseaux migrateurs est aussi prohibée. Par ailleurs, les autorités sanitaires s'apprêtaient jeudi à distribuer 40 000 brochures de prévention aux éleveurs de volaille.
Avec AFP
L a mobilisation internationale face à la menace de la grippe aviaire s'est traduite, jeudi 13 octobre, en gestes financiers concrets. Deux aides bilatérales d'importance ont été accordées à l'Indonésie et au Laos, et le Vietnam a obtenu un soutien à son plan d'urgence établi pour les six mois à venir. Au total, presque 18 millions de dollars (15 millions d'euros) ont été promis en l'espace d'une journée en Asie du Sud-Est, le principal réservoir du virus H5N1 de la grippe aviaire. Une soixantaine de personnes ont été tuées par ce virus – dont les deux tiers au Vietnam – depuis décembre 2003.
A Hanoï, les promesses de dons des bailleurs de fonds et ambassades étrangères se sont élevées à 6,9 millions de dollars (5,75 millions d'euros), au lendemain de la présentation d'un arsenal de mesures d'urgence avant l'hiver. "Ce jour marque un pas en avant significatif dans la coordination des efforts pour le contrôle et la prévention de la propagation de la grippe aviaire", s'est réjoui le ministre de l'agriculture vietnamien, Cao Duc Phat. Trois agences onusiennes ont participé à l'élaboration du plan vietnamien – le Programme de l'ONU pour le développement (PNUD), l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).
Les autorités vietnamiennes savent que le virus réapparaîtra sans aucun doute dans les élevages de volailles et chez les humains d'ici au mois de décembre. Le pays est considéré comme l'un de ceux dans lesquels le danger de mutation du virus est le plus important. Les experts craignent qu'il puisse devenir aisément transmissible entre humains, avec le potentiel de provoquer alors une pandémie responsable de millions de morts.
Par ailleurs, Canberra a annoncé une aide supplémentaire de 10 millions de dollars australiens (6,25 millions d'euros) à l'Indonésie, autre pays où la lutte contre la maladie est compliquée du fait de l'éparpillement des volailles dans les élevages individuels, et de la faiblesse des structures vétérinaires et administratives."Cette enveloppe va aider l'Indonésie à améliorer sa capacité de riposte à une éventuelle épidémie dans des secteurs-clés", a déclaré le cabinet du ministre des affaires étrangères, Alexander Downer, actuellement en Indonésie.
Le Laos, mystérieusement épargné par le virus depuis mars 2004, a de son côté signé avec les Etats-Unis un accord de coopération dans lequel Washington débourse 3,4 millions de dollars (2,83 millions d'euros). Le secrétaire à la santé américain, Michael Leavitt, qui mène dans quatre pays du Sud-Est asiatique une délégation comprenant aussi le patron de l'OMS, Jong Wook Lee, était jeudi 13 octobre à Vientiane pour signer l'accord. Il est attendu au Vietnam dans l'après-midi, pour une visite de trois jours, dernière étape d'un périple d'une semaine entièrement consacré à la maladie.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 13.10.05 | 13h07
L e futur gouvernement allemand de coalition gauche-droite dirigé par la conservatrice Angela Merkel portera la marque de Gerhard Schröder. Sur les huit ministres sociaux-démocrates dont les noms ont été annoncés jeudi 13 octobre, deux postes-clés reviennent à des proches du chancelier sortant.
Ainsi, le président du Parti social-démocrate (SPD), Franz Müntefering, va devenir vice-chancelier chargé des affaires sociales et du travail, et Frank-Walter Steinmeier occupera le poste de ministre des affaires étrangèresdans le futur gouvernement de grande coalition d'Angela Merkel. M. Steinmeier est un personnage "très efficace", a affirmé Michael Glos, un dirigeant de l'Union-chrétienne sociale (CSU), branche bavaroise de l'Union chrétienne-démocrate (CDU) présidée par Angela Merkel. Il succédera au Vert Joschka Fischer, qui occupait ce poste depuis l'arrivée au pouvoir de Gerhard Schröder, à l'automne 1998. Proche conseiller de Gerhard Schröder depuis 1993, il était ministre à la chancellerie depuis 1999.
Peer Steinbrück, ancien chef de gouvernement social-démocrate de la région de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, va succéder à Hans Eichel au poste de ministre des finances allemand. "Peer Steinbrück fera cela très bien, j'en suis sûr", a déclaré M. Eichel à la presse. M. Steinbrück aura pour mission d'assainir les finances. La première économie européenne enfreint en effet le pacte européen de stabilité et de croissance depuis trois ans déjà, et est sous la haute surveillance de Bruxelles. M. Eichel, qui a décrit la situation financière du pays comme "dramatique", prévoit un déficit budgétaire au-delà de la limite des 3 % jusqu'à 2007 inclus.
Trois ministres femmes du gouvernement Schröder conservent leurs portefeuilles : Ulla Schmidt garde le dossier sensible de la santé publique, Heidmarie Wieczorek-Zeul, celui de la coopération internationale et du développement, et Brigitte Zypries, celui de la justice. Wolfang Tiefensee sera à la tête du ministère des transports. L'environnement revient à Sigmar Gabriel, ancien chef du gouvernement de Basse-Saxe.
En annonçant dès jeudi 13 octobre l'envoi de "poids-lourds" garants de la poursuite des réformes dans le futur gouvernement, les sociaux-démocrates ont devancé les Unions chrétiennes CDU-CSU, qui communiqueront, lundi 17 octobre, les noms de leurs ministres.
Avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 13.10.05 | 14h15
G erhard Schröder s'en va. Mais l'équipe que le Parti social-démocrate (SPD) a désignée, jeudi 13 octobre, pour faire partie de la grande coalition que dirigera la présidente de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), Angela Merkel, est constituée de beaucoup de ses proches.
Les yeux rougis, le chancelier allemand a confirmé, mercredi 12 octobre, devant les syndicalistes de la chimie et des mines, réunis en congrès dans sa ville de Hanovre, qu'il ne siégerait "définitivement pas" dans le prochain gouvernement. "Ce n'est pas facile pour moi", a-t-il expliqué sans pouvoir cacher son émotion. "J'aimerais bien rester avec vous. Je sais d'où je viens et je sais à qui j'appartiens", a confié aux syndicalistes ce bouillant sexagénaire issu d'un milieu modeste, désormais en réserve de la République.
Comme pour mieux dissiper l'impression de vide suscitée dans ses rangs par ce départ, le SPD a précipité l'annonce des huit ministres qu'il veut voir siéger dans la future coalition. Le poste de vice-chancelier ira au président du SPD, Franz Müntefering, qui prendra également le ministère du travail, confirmait-on, jeudi dans la matinée, auprès du SPD à Berlin. Vieux soudard du parti, il a été à la manoeuvre aux côtés du chancelier depuis le déclenchement des élections anticipées après la défaire électorale du parti, en mai, dans son fief de Rhénanie du Nord-Westphalie.
Les finances échouent au modéré Peer Steinbrück, qui dirigeait le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie jusqu'en mai. Les affaires étrangères reviendraient à un homme de l'ombre, Frank-Walter Steinmeier, chef de la chancellerie depuis sept ans, qui a été le grand coordinateur des réformes engagées par le chancelier.
Dès le soir des élections législatives, le 18 septembre, Gerhard Schröder avait indiqué qu'il ne siégerait pas dans un gouvernement dirigée par Angela Merkel. Il a résisté aux appels d'une partie de la base pour accepter de rester. Mais il a joué un rôle essentiel pour forcer les dirigeants de droite à des concessions sur les portefeuilles que détiendra le SPD dans le futur gouvernement. Et il participera encore aux négociations qui doivent commencer lundi pour préciser les contours de la grande coalition.
Gerhard Schröder, qui s'est dit prêt, à Hanovre, à "vraiment" aider le futur gouvernement à moderniser le pays, continuera à gérer les affaires courantes à la tête du pays tant que Mme Merkel n'aura pas été investie par le Bundestag, où son camp possède quatre petits sièges d'avance sur le SPD. Cela devrait prendre au moins un mois.
D'ici là, le chancelier sortant n'entend pas se priver de distiller messages et avertissements en guise de testament. Au grand dam des médias britanniques, il a annoncé qu'il prendrait part au sommet informel des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne, convoqué fin octobre par Tony Blair pour débattre de l'avenir de l'Europe. Pour préparer cette échéance, il rencontrera, vendredi soir à Paris, son vieux complice Jacques Chirac. "La relation franco-allemande est centrale, quel que soit le gouvernement" siégeant à Berlin, a-t-il énoncé mercredi. Il en va de "la défense du modèle social européen" , a-t-il déclaré devant les syndicalistes, en soulignant que les politiques économiques "anglo-saxonnes" n'ont "aucune chance" de s'imposer en Europe. En direction du président américain George Bush, qui a appelé, mercredi, Angela Merkel pour la féliciter, M. Schröder a lancé une pique acérée à propos de sa lenteur à réagir après l'ouragan Katrina, symptomatique, selon lui, des dérives d'une société libérale. Jeudi matin, le chancelier sortant était à Ankara pour réaffirmer son appui au premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, après la décision de l'Union de lancer les négociation d'adhésion avec la Turquie.
Antoine Jacob, avec Henri de Bresson à Paris
Article paru dans l'édition du 14.10.05
N altchik, la capitale de Kabardino-Balkarie, République à dominante musulmane du Caucase du Nord, dans le sud de la Russie, a été, jeudi 13 octobre au matin, la cible d'un assaut de plusieurs dizaines d'hommes armés qui aurait fait au moins 20 morts dans cette ville, qui compte 300 000 habitants. Des tirs et des explosions ont été entendus et se poursuivaient en fin de matinée. Les hommes armés ont pris d'assaut des bâtiments du ministère de l'intérieur, du FSB, le commissariat de police et une colonie pénitentiaire. La prise de l'aéroport aurait échoué après avoir été repoussée par les forces de l'ordre.
Des hommes armés seraient entrés dans une école primaire, selon un témoin interrogé par téléphone par l'AFP depuis Vladikavkaz. Un fonctionnaire de la ville, a vu plusieurs enfants en pleurs fuir de l'école n°5. Une fillette lui a dit que des hommes armés étaient entrés dans l'école et qu'une fusillade y avait éclaté. L'information a été démentie par le Kremlin et par le maire de la ville interrogé par la radio Echo Moscou. "Il n'y a rien de tout cela, les cours continuent calmement" , a-t-il déclaré.
Dans le même temps, selon un responsable de l'administration régionale, sous couvert de l'anonymat, le centre de Naltchik était cerné par la police et des voitures munies de haut-parleurs appelaient les habitants à évacuer le quartier. Les forces spéciales évacuaient les écoles.
Des tirs avaient également lieu sur le marché central. Selon un membre des forces de l'ordre, une attaque a eu lieu contre un magasin d'armes. Plusieurs voitures étaient retournées et certaines ont explosé. Aucun chiffre n'est encore connu sur le nombre de victimes civiles. Les habitants n'avaient aucune information de leur télévision locale, seulement par les chaînes fédérales et la radio moscovite. Par ailleurs, les liens téléphoniques étaient coupés, y compris les lignes administratives. Il était impossible de joindre la ville par portable. Le centre Mégafon, l'un des trois principaux opérateurs de Naltchik, a explosé.
Des mesures ont aussitôt été prises pour fermer la ville. Les frontières entre l'Ossétie du Nord, république voisine, et la Kabardino-Balkarie ont été fermées. Tous les vols ont été interdits.
Interrogé pour savoir qui pouvait être à l'origine de ces attaques, le premier ministre de Kabardino-Balkarie Guennadi Goubin, a déclaré "c'est difficile à dire, mais visiblement ces gens ont un lien avec l'attaque de la direction du contrôle du trafic de drogue en décembre 2004" . A l'époque, quatre employés du département de contrôle des drogues avaient été tués, des dizaines d'armes avaient été volées.
Dans le même temps, une opération spéciale de police tentait de neutraliser des groupes religieux extrémistes selon les agences Itar-Tass et Interfax. Il s'agirait d'extrémistes religieux wahhabites (partisans d'un islam radical). Selon Itar-Tass, trois "extrémistes religieux" ont été tués au cours de cette opération, tandis que, selon Interfax, plusieurs "wahhabites" ont été arrêtés et les combats en cours ont été engagés par leurs camarades venus tenter de les libérer. Le nombre d'hommes armés et de victimes restait inconnu.
Madeleine Vatel
Article paru dans l'édition du 14.10.05
L es lignes qui suivent sont à déconseiller aux esprits fragiles et aux âmes mal trempées. Il y est question d'un monde insaisissable et vertigineux, d'un univers aux dimensions multiples: 10 au bas mot, à moins que ce ne soit 11, ou même... 26 ! Inconcevable pour un cerveau normalement constitué.
Pour le commun des mortels, il n'existe que quatre dimensions, trois spatiales et une temporelle. Encore percevons-nous volontiers le temps comme le faisait Newton, c'est-à-dire comme un paramètre absolu, un axe immuable. Nous savons bien sûr, depuis Einstein et la relativité générale, qu'espace et temps sont en réalité indissociables, que le temps est élastique et les longueurs contractables. Il n'empêche que le continuum espace-temps demeure, pour l'entendement ordinaire, un concept relativement flou...
Et voilà que les physiciens inventent de nouvelles dimensions, à en donner le tournis. Pour comprendre ce qui les amène à cette construction improbable, il faut rappeler que la physique moderne avance sur deux jambes.
D'un côté, la relativité générale d'Einstein. Décrivant le comportement des corps soumis à la gravitation, ou gravité, elle s'applique à la structure à grande échelle de notre univers. A l'autre extrémité, la mécanique quantique rend compte du comportement des particules élémentaires à une échelle infinitésimale.
La mécanique quantique a donné naissance, dans les années 1970, à un superbe modèle, le "modèle standard". Il postule, vérifications expérimentales à l'appui, que l'univers est formé, en tout et pour tout, de 12 particules de matière, 6 quarks et 6 leptons, et de 4 particules porteuses de forces. Mais ce modèle n'intègre que trois de ces forces, celles qui interviennent à l'échelle atomique ou subatomique: la force électromagnétique liant les électrons aux noyaux et deux forces à l'oeuvre à l'intérieur des noyaux, la force faible et la force forte. Le modèle laisse de côté la quatrièmeforce, la gravité, aux effets négligeables à l'échelle des particules élémentaires mais qui, aux échelles plus importantes, domine pourtant.
Jusqu'à présent, les physiciens n'ont pas réussi à faire marcher ces deux jambes du même pas. Si bien que leur représentation de l'Univers claudique. C'est ici qu'intervient la théorie des cordes, qui se propose de réconcilier relativité générale et mécanique quantique. De réaliser la "grande unification". Bref, de livrer la clé ultime de l'univers.
La porte a été entrouverte par l'Italien Gabriele Veneziano. C'était en 1968. Il travaillait alors sur les interactions nucléaires fortes. "Nous avons mis en évidence une propriété un peu bizarre, une dualité comparable à la double nature – ondes et particules – de certains constituants de la matière, relate-t-il. Et nous nous sommes aperçus que cette propriété supposait l'existence de particules dont le spectre d'excitation ressemblait au spectre de fréquences d'une corde musicale." La théorie des cordes était née. Elle allait connaître plusieurs rebondissements. A partir du milieu des années 1970, le succès du modèle standard l'éclipse. Seule une poignée de physiciens dans le monde continuent à s'y intéresser.
Par un renversement conceptuel dont la science est friande, la théorie des cordes effectuera un retour, non plus à partir de l'étude des interactions fortes, mais de la gravitation. Plus exactement, comme "théorie quantique de la gravitation". Elle suppose en effet l'existence de plusieurs particules de masse nulle, dont le graviton, lequel porterait la force de gravité jusqu'alors exclue du modèle standard. La jonction entre mécanique quantique et relativité était faite. "Le rêve poursuivi toute sa vie par Einstein, commente Gabriele Veneziano , – était – enfin réalisé."
La théorie des cordes suscite, à partir du milieu des années 1980, un engouement qui ne se démentira plus. Elle s'enrichira d'une théorie des supercordes. Et se déclinera en cinq versions, dont subsiste aujourd'hui une principale, dite théorie M, comme "mystère".
Que dit cette théorie ? Que les constituants ultimes de la matière – les quarks ou, s'il en existe, des particules encore plus petites – ne ressemblent pas à des points, mais à des cordes vibrantes, c'est-à-dire à des objets unidimensionnels étendus dans l'espace, pouvant être ouverts ou fermés en boucle.
Inutile de chercher à voir ces vibrionnants choristes: la taille d'une corde serait de l'ordre de 10 – 34 mètre. Elles ne peuvent s'exprimer, disent les équations, que dans un univers comptant, au minimum, 6 dimensions spatiales supplémentaires par rapport aux 3 que nous connaissons. Ce qui porte à 10 le nombre de dimensions du monde des cordes. Certains physiciens en ajoutent une, ce qui mène à 11... C'est beaucoup, mais bien moins que les 26 dimensions un moment supposées, avant que la théorie des supercordes ne fusionne des cordes interagissant entre elles pour obtenir un nombre moins extravagant.
Comment se représenter l'inimaginable ? Pas question, ici, d'univers parallèles. Les dimensions supplémentaires s'apparenteraient plutôt, décrit Gabriele Veneziano, à des boucles microscopiques. Leur taille, qu'elle reste de l'ordre de celle des cordes elles-mêmes ou atteigne 1 millimètre, les rend inaccessibles à nos sens. Pour que nous percevions ces infimes circonvolutions de notre espace-temps, il faudrait être à leur échelle.
Si spéculative soit-elle, la théorie des cordes séduit un nombre croissant de physiciens. Aujourd'hui, plusieurs milliers de "cordistes" sur la planète rêvent de valider ces hypothèses dans le nouveau grand collisionneur de particules du CERN de Genève ou en observant les traces d'un hypothétique pré-Big Bang, quand l'espace-temps avait peut-être la taille d'une corde. "Le modèle standard a mis des dizaines d'années avant d'être formalisé, dit Gabriele Veneziano. Patience !" Façon de donner du temps à l'espace-temps multidimensionnel.
Pierre Le Hir
Article paru dans l'édition du 14.10.05
E space-temps, théorie des cordes, relativité générale, mécanique quantique... Alors que la vulgarisation de telles notions paraît improbable, de nombreux chercheurs relèvent le défi. Parmi eux, Stephen Hawking, célèbre, aussi, pour sa maladie de Charcot, et Brian Greene se distinguent en raison du succès planétaire de certains de leurs livres. Une brève histoire du temps , publiée en 1988 par le premier, se serait vendue à quelque 25 millions d'exemplaires. L'Univers élégant , édité par le second en 1999, doit se contenter, pour l'instant, d'avoir dépassé le million de copies, selon l'éditeur Robert Laffont. En revanche, trois documentaires d'une heure chacun ont été réalisés à partir de l'ouvrage de Brian Greene, avec un budget de 3,5 millions de dollars et diffusés sur la chaîne américaine Nova (Le Monde du 15 octobre 2004).
la science à la fête La 14e Fête de la science a ouvert ses laboratoires. Cette année, elle se déroule en même temps que la seconde édition de la Fête du livre de science et que le premier festival international du film scientifique, Pariscience. Fête de la science 2005: jusqu'au dimanche 16 octobre. http://www.fetedelascience.education.gouv.fr Fête du livre de science: du vendredi 14 au dimanche 16 octobre. Cité des sciences et de l'industrie de La Villette à Paris. http://www.lire-en-fete.culture.fr Pariscience, festival international du film scientifique: du jeudi 13 au samedi 15 octobre. Museum nationale d'histoire naturelle http://www.pariscience.fr |
Les deux auteurs continuent à alimenter ces "lecteurs" dont beaucoup ont l'honnêteté de reconnaître qu'ils n'ont pas dévoré de tels ouvrages "jusqu'au bout". D'où l'idée de Stephen Hawking de faire un pas de plus vers eux, histoire d'améliorer le nombre de lecteurs parmi les acheteurs.
Cette motivation a conduit l'auteur à publier Une belle histoire du temps (A Briefer Story of Time, en anglais). Version du texte de 1988 allégée et mieux illustrée, le livre est également complété. Avec, par exemple, l'exposé des progrès récents de la théorie des cordes, sans pour autant qu'un crédit particulier lui soit accordé. Stephen Hawking s'interroge même: "Se pourrait-il qu'il n'existe pas de théorie unifiée ?" Il n'écarte pas totalement cette hypothèse. Et il glisse, en conclusion, du comment au pourquoi: "La théorie unifiée serait-elle dotée d'une telle force qu'elle se mettrait au monde elle-même ?" Rejoignant les questions d'Einstein, le chercheur s'interroge sur "le pourquoi de notre existence et de notre univers" . Le livre s'achève sur le mot "Dieu" .
Dans la même veine des rééditions, paraît A l'image des géants , une version allégée et illustrée de Sur les épaules des géants , publié par Stephen Hawking en 2003. Brian Greene, lui, ne fait pas dans l'amaigrissement avec La Magie du Cosmos et ses 600 pages de texte. Mais son talent de vulgarisateur est unique. Après la théorie des cordes de L'Univers élégant , il élargit son propos en parcourant l'ensemble de la physique du XXe siècle.
Les analogies, les historiettes illustratives s'enchaînent, mobilisant Achille Talon et Gaston Lagaffe ou Scully et Mulder, les héros de la série télévisée "X Files", pour ne jamais laisser le lecteur décrocher. Ce qui ne l'empêche pas de publier une page entière de chiffres en développant 101878, le nombre de combinaisons des pages de Guerre et paix en proie au désordre d'une forte entropie.
La Magie du Cosmos , de Brian Greene, éd. Robert Laffont, 672 p., 24 €.
Une belle histoire du temps , de Stephen Hawking, éd. Flammarion, 188 p., 23 €.
A l'image des géants , de Stephen Hawking, éd. Dunod, 244 p., 29 €.
Michel Alberganti
Article paru dans l'édition du 14.10.05
L a discussion en deuxième lecture à l'Assemblée nationale de la proposition de loi sur la récidive pénale s'est ouverte, mercredi 12 octobre, dans un climat paradoxal. Alors que le gouvernement et la commission des lois s'apprêtent à introduire de nouvelles dispositions plus contraignantes, la gauche, et particulièrement le PS, adopte un profil plutôt conciliant. "Entre les deux lectures, nous avons travaillé ", expliquait le président du groupe PS, Jean-Marc Ayrault, à la veille de l'ouverture du débat. "Nous n'avons pas l'intention de passer pour laxistes."
En défendant à la tribune l'exception d'irrecevabilité, Christophe Caresche (PS, Paris) devait confirmer cette volonté de "traiter ce sujet grave de façon responsable" , rappelant notamment la loi sur la surveillance électronique votée en 1997 sous le gouvernement de Lionel Jospin. Le porte-parole du PS s'est volontairement écarté d'une opposition systématique. "Nous ne récusons pas le bracelet électronique mobile" , a précisé d'emblée le député de Paris, qui avait déclaré auparavant ne pas avoir d'objection de principe: "Ce n'est pas la solution miracle, mais nous n'y sommes pas hostiles."
M. Caresche a cependant exprimé des "réserves" sur les propositions du ministre de la justice, Pascal Clément, concernant la surveillance judiciaire dans le cadre des réductions de peine. Ainsi le PS propose-t-il d'assortir la sortie de prison, "même après réduction de peine" , d'un suivi médical contraignant pour les condamnés à de longues peines. "Tout condamné, notamment en matière de délinquance sexuelle, devrait bénéficier, pendant et après sa peine, d'un suivi médico-psychologique" , a estimé M. Caresche, approuvé par M. Clément.
Selon le garde des sceaux, c'est la "certitude de la peine" qui doit être au coeur du texte. Ainsi le mot "punition" entre-t-il dans le code pénal. Celui-ci sera complété pour affirmer que les peines sont fixées "de manière à concilier la protection effective du condamné, la punition du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l'amendement du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions" . Le mot "réinsertion", présent dans les décisions du Conseil constitutionnel sur le sens de la peine, lui, disparaît.
Avant l'ouverture des débats, la commission des lois avait accepté une série de nouveaux amendements. Les députés ont adopté en séance, mercredi soir, celui défendu par Georges Fenech (UMP, Rhône), interdisant toute réduction de peine aux personnes condamnées pour des crimes ou délits de nature sexuelle ayant refusé un suivi socio-judiciaire ou un traitement qui leur auraient été proposés en détention.
Les députés ont également adopté un amendement du rapporteur, Gérard Léonard (UMP, Meurthe-et-Moselle), restreignant l'application de la loi Kouchner qui prévoit une suspension de peine pour les condamnés dont l'état de santé est incompatible avec le maintien en détention. L'amendement propose que la suspension de peine puisse être refusée dès lors qu'elle est "susceptible de provoquer un trouble exceptionnel à l'ordre public ou s'il existe un risque particulièrement élevé de récidive du condamné" . Selon M. Léonard, cette mesure relève d'"une exigence de simple morale" .
La commission des lois a par ailleurs accepté, sur la proposition du rapporteur, un amendement autorisant le placement d'un mineur en centre éducatif fermé, pour une durée de quatre mois renouvelable une fois, "dès lors que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes un risque d'une exceptionnelle gravité" . La proposition défendue à l'origine par Thierry Mariani (UMP, Vaucluse), qui tend à aligner la détention des mineurs sur celle des personnes majeures, suggérait que le placement puisse être renouvelable sans limitation de durée.
Nathalie Guibert et Patrick Roger
Article paru dans l'édition du 14.10.05
A ucun chiffre ne permet à lui seul d'embrasser la réalité de la récidive: c'est un risque très variable, moins de 0,5 % pour les meurtriers, 75 % pour les voleurs agissant sans violence. Le garde des sceaux, Pascal Clément, a buté sur cette difficulté en livrant, le 27 septembre, un chiffre faux sur le nombre de condamnés potentiellement récidivistes auxquels pourrait être imposé le bracelet électronique.
Le chercheur du CNRS Pierre Tournier, auteur avec Annie Kenzey des principales études statistiques françaises sur la récidive ( Le Monde du 29 juin), a démontré que les comptes du ministre de la justice étaient complètement erronés. "Quand vous avez 55 000 détenus (...), que vous avez grosso modo 40 % de ces détenus qui sont en prison pour délits ou crimes sexuels, même si la statistique est de l'ordre de 2 % à 2,5 % de récidivistes potentiels, vous vous apercevez que c'est 600 à 800 détenus qui, une fois dehors, pourraient commettre un nouveau crime sexuel", avait affirmé M. Clément sur France-Info. Le nombre d'agresseurs sexuels susceptibles de récidiver dans les cinq ans suivant leur sortie de prison s'établit en réalité à 40 par an.
La première erreur procède du calcul lui-même: un taux de 2,5 % de récidivistes parmi 40 % de détenus auteurs d'infractions sexuelles, sur une population emprisonnée de 55 000, donnerait 550 personnes potentiellement concernées et non de 600 à 800. Mais le nombre des détenus, au 1er septembre, s'établissait à 56 600. Parmi eux, on ne comptait pas 40 %, mais 20 % de condamnés pour infractions sexuelles. "La proportion de personnes détenues plus précisément pour "viols et autres agressions sexuelles" n'est connue que pour les condamnés" , précise M. Tournier, "et elle s'établit à 20,8 % au 1er juillet."
La troisième erreur vient du taux de récidive. Le taux de nouvelles condamnations pour crime, cinq ans après la libération, est de 1 % pour les sortants de prison initialement condamnés pour viols et autres agressions sexuelles criminelles sur mineur, et de moins de 0,5 % pour les auteurs d'agressions délictuelles sur mineurs. "Nous n'avons pas de données sur les condamnés pour viols et autres agressions sexuelles sur majeur" , poursuit le chercheur, mais ils représentent moins de 30 % de l'ensemble des détenus condamnés pour ces motifs. M. Tournier retient donc le taux de 1 %. Ce qui donne donc: 56 600 × 20 % × 1 % = 113 personnes.
En retenant un taux de 2,5 %, fourni par la sous-direction statistique du ministère de la justice, le garde des sceaux évoque, en fait, la part des condamnés d'une année donnée qui ont des antécédents judiciaires au moment de leur condamnation. Il s'agit d'un regard vers le passé et non d'une indication pour le futur du risque de récidive. "Avec ces chiffres, on peut pour l'essentiel étudier la façon dont les juridictions de jugement tiennent compte, dans le choix de la peine, du poids du passé judiciaire" , ajoute M. Tournier.
La dernière erreur vient d'une confusion entre les stocks de détenus et les flux des sortants de prison: "Pour évaluer le nombre de sortants de prison qui vont de nouveau commettre un crime, il faut raisonner en flux de sortants et non en stocks de présents." La durée moyenne effective de détention des condamnés pour viols et agressions sexuelles est de 2,6 ans. Le nombre de sorties annuelles est le rapport entre le stock de prisonniers et la durée de détention: ce calcul débouche sur 43 récidivistes potentiels, chaque année, chiffre que le chercheur corrige à 40 pour tenir compte du fait que certains prisonniers, placés en détention provisoire, ne seront pas condamnés.
"Notre estimation est 20 fois plus faible que celle du garde des sceaux, conclut Pierre Tournier. "Il reste que ces 40 sortants qui vont récidiver représentent un défi pour l'appareil judiciaire et pour l'ensemble de la société, d'autant que chacun peut faire nombre de victimes".
N. G.
Article paru dans l'édition du 14.10.05
![]() AP/MIGUEL GOMEZ
L'écrivain sud-américain Mario Vargas Llosa a été journaliste à l'Agence France-Presse. |
P nina, née à Jérusalem pendant la guerre de six jours, en 1967, fille d'un couple de juifs religieux à vocation de pionniers, a toujours été ravie de parler espagnol. C'est pourquoi, sitôt achevées ses deux années de service militaire, elle est allée à Salamanque se perfectionner, puis a voyagé en Argentine, au Brésil et au Chili, avant de rentrer en Israël. Elle travaillait comme guide touristique quand elle a connu celui qui est maintenant son mari, l'ophtalmologue colombien Isaac Aizenman. Celui-ci faisait un voyage d'agrément et n'avait jamais pensé vivre en Israël, mais l'amour changea ses plans et l'incita à faire son alyah - littéralement "montée vers Israël" en hébreu -. Pnina et Isaac se sont mariés et ont eu, en 1997, leur premier enfant, une fille qu'ils ont appelée Gal, et le second trois ans après, Saggi.
Sur l'auteur Mario Vargas Llosa est né à Arequipa, au Pérou, en 1936. Il a pris la nationalité espagnole en 1993. Il est depuis les années 1950 l'un des chefs de file de la littérature latino-américaine, avec des romans tels que La Ville et les chiens, La Maison verte, Tante Julia et le scribouillard. Il publie fin octobre Le Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine chez Plon. |
Pnina parle un espagnol parfait, avec un accent chantant colombien; c'est, à 38 ans, une très belle femme, mais il y a dans ses grands yeux et son teint si pâle quelque chose de glacé, une tristesse qui semble être sa seconde nature. A en juger d'après les photos qu'elle nous montre, sa fille, Gal, était, elle aussi, très jolie: boucles dorées, yeux verts, sourire coquin, joie de vivre. Elle apprenait la danse et aimait se déguiser en Mickey.
Le mercredi 19 juin 2002, Noa, la mère de Pnina, qui travaillait dans le jardin d'enfants d'une implantation proche de Ramallah, à Ofra, avait invité sa fille et ses deux petits-enfants à un spectacle qu'elle avait organisé.
"C'était l'époque de l'Intifada et on ne pouvait aller nulle part, à cause des attentats, dit Pnina. J'ai quitté Maalé Adoumim - colonie juive à la lisière de Jérusalem-Est - à deux heures de l'après-midi, avec mes deux enfants, et nous sommes allés à l'arrêt de French Hill, où nous avons pris un autobus blindé qui nous a conduits à Ofra. Saggi et Gal ont été enchantés par le concert. Nous sommes rentrés à Jérusalem avec Noa, ma mère, qui voulait me donner un coup de main à la maison. Nous avons repris l'autobus blindé qui nous a laissés au même arrêt que l'après-midi. Là, nous devions retrouver Isaac et rentrer chez nous, à Maalé Adoumim."
Nous bavardons sur une terrasse de Jérusalem, par une matinée ensoleillée, entourés de pierres dorées qui semblent scintiller. Je dis à Pnina de ne pas m'en dire plus, si c'est trop douloureux pour elle. "Non, non , me répond-elle sur le champ, vous devez savoir." Mais en vérité, ce qu'elle veut dire c'est: "Le monde, l'univers doivent savoir." "Nous traversions en direction du coin de rue où avait dû stationner Isaac. Ma mère marchait devant, tenant la main de Gal, et moi derrière, avec Saggi, au milieu d'une foule de gens. Je ne me souviens de plus rien."
Elle s'est réveillée des heures plus tard à l'hôpital, avec des brûlures sur le corps et une très forte douleur à la tête. On avait pratiqué sur elle la respiration artificielle. Gal et sa grand-mère Noa furent deux des sept personnes tuées par l'explosion de la bombe du terroriste-suicide, un militant des Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, liées au Fatah d'Arafat. Il y eut beaucoup de blessés, parmi lesquels le petit Saggi, que la police découvrit assis par terre, muet et paralysé de terreur, entouré de restes humains sanguinolents. Pour faire plus de mal, la bombe avait été remplie de pointes et de clous, dont quelques-uns s'étaient incrustés dans le corps de l'enfant qui, heureusement, put être sauvé.
"Quand Isaac m'a dit que ma mère et ma fille étaient mortes, quelque chose est mort aussi au fond de moi, dit Pnina. J'ai voulu disparaître, m'évaporer. Mais, en faisant un énorme effort, Isaac et moi avons décidé que non, qu'il fallait vivre, pour Saggi, pour mon père. Et nous avons eu deux autres enfants. La petite s'appelle Noga, une synthèse des prénoms de ma mère et de ma fille: Noa et Gal." Pnina a publié un livre de poésies pour enfants, intitulé Poèmes à Gal.
L'une des conséquences de cet attentat, c'est qu'elle vit depuis lors toujours accompagnée par "l'ombre de la terreur". Saggi aussi souffre de crises de peur panique. Quant à elle, son rapport à Dieu a changé. "Je suis fâchée avec Lui, maintenant je ne peux plus allumer les bougies, dit-elle, avec une sérénité glaciale encore plus émouvante que si elle pleurait ou criait. Je me demande toujours: où est, où était Dieu ce jour-là ? Isaac, en revanche, est devenu beaucoup plus religieux depuis, et c'est pour cela que nous respectons le shabbat."
Comme Pnina, Ariel Scherbakovsky est né à Jérusalem, il y a vingt-cinq ans, mais il vit maintenant à Tel-Aviv, où il me reçoit dans son petit appartement bohème et joyeux dont le balcon est envahi par un ficus. Venant de cette ville accablée d'histoire, oppressante et réactionnaire qu'est Jérusalem, Tel-Aviv représente le visage le plus ouvert, moderne et démocratique d'Israël. Fils d'Argentins immigrés, Ariel parle l'espagnol expressif de Buenos Aires. Il me dit que sa vie a commencé vraiment à 13 ans, quand il a découvert les Beatles. Il a su, grâce à eux, que sa vocation était la musique.
C'est un garçon de haute taille et un peu timide, à l'évidence un chic type, avec quelque chose de limpide et de généreux. Il vit avec une jeune femme toute mince, au beau sourire, également musicienne, d'origine australienne: Sagit Shir. Il nous raconte qu'il se trouvait la nuit du 30 avril 2003 dans un lieu connu de tous les noctambules et amateurs de jazz à Tel-Aviv, le pub Mike's Place, sur la Promenade maritime, où son ami batteur Shai Iprach et lui dirigeaient une jam-session très courue. C'était une époque d'attentats qui avaient vidé la vie nocturne d'Israël, mais au Mike's Place beaucoup de jeunes continuaient de venir.
Il était une heure et demie du matin, et Ariel se rappelle que, dans le local bondé, il y avait un vieux qui distribuait de la marijuana à l'assistance. A cette heure-là, il se sentit exténué et sortit respirer l'air de la mer, à la porte du Mike's Place. "Cette jam est fort mauvaise, je ne jouerai plus jamais de blues", dit-il à sa fiancée. A cet instant, la bombe explosa.
Le terroriste se trouvait à l'extérieur. Peu avant, il était entré pour explorer l'établissement et avait bu une bière. Il était sorti puis avait tenté de rentrer de nouveau, mais l'agent de sécurité l'en avait empêché. Ils en étaient venus aux mains et c'est alors que le terroriste a fait exploser la charge qu'il portait sous ses vêtements. Il y eut trois morts et une cinquantaine de blessés, parmi lesquels Ariel et Sagit. Les blessures de la jeune femme n'étaient pas graves, mais lui eut une grande partie du corps brûlé, avec beaucoup de clous et d'esquilles incrustés. Il ne perdit pas connaissance, ou seulement quelques secondes.
Il se rappelle qu'il cherchait Sagit, hébété, et il se rappelle aussi la peur panique, totale, qui s'était emparée de lui. Une photo le montre baignant dans son sang et l'air hagard, comme s'il ne savait pas où il se trouvait, qui il était, ni ce qui s'était passé. Ce n'est que pendant son transfert à l'hôpital que la douleur devint insupportable. Il resta un mois et demi en soins intensifs, trois semaines endormi et sous respiration artificielle. Alors qu'il était en convalescence, il apprit que les terroristes étaient deux musulmans britanniques, d'origine pakistanaise, qui vivaient à Londres et avaient été recrutés et entraînés par le Hamas.
"Je n'ai pas eu beaucoup de séquelles et aucun traumatisme, dit-il, comme pour s'excuser. Seulement une grande tristesse, que rien ne pouvait me faire passer. Un des morts était un grand ami, un guitariste. Une tristesse pour tout le monde, qui devient parfois comme quelque chose de physique. Et je ne peux plus m'exposer au soleil, parce que j'ai la peau abîmée. Ce qui m'a fait du bien c'est de me remettre à la basse et, surtout, dès que j'ai pu marcher, de refaire de la musique, la nuit, au Mike's Place."
Ariel ne s'est jamais intéressé à la politique. Il n'éprouve pas de haine, pas même pour le terroriste qui a failli les tuer, Sagit et lui. "C'est un monde fou , dit-il. Je ne comprends pas ces gens qui considèrent la terre comme quelque chose de sacré, et que la terre rend fanatiques. Je soutiendrai tout accord qui apporterait la paix, même s'il fallait rendre aux Palestiniens une partie de Jérusalem. Je sais qu'on a commis à leur égard beaucoup d'injustices."
Il n'y a pas une once d'affectation dans ses propos, il parle avec la sincérité désarmante d'un garçon qui voudrait que la vie soit moins brutale et compliquée qu'elle ne l'est parfois en Israël pour ces jeunes qui doivent passer trois, et parfois quatre de leurs meilleures années, à faire une guerre qui n'a souvent rien d'héroïque, et qui peut être très sale.
Qui sont les terroristes qui, depuis le début de la deuxième Intifada, entre 2001 et 2005, ont assassiné près d'un millier d'Israéliens et blessé et traumatisé plusieurs milliers d'autres dans des attentats-suicides, comme ceux dont ont été victimes la fille et la mère de Pnina ou bien Ariel et Sagit ? Beaucoup – peut-être la majorité mais sûrement pas tous – sont des fanatiques religieux, convaincus par les prédications d'imams extrémistes que cette forme d'immolation est le plus haut service que peut rendre le croyant à Allah, ce dont profitent politiquement les organisations radicales comme le Hamas et le Djihad islamique.
Mais la folie et la stupidité du fanatisme religieux n'expliquent pas la conduite de tous les terroristes-suicides. Cela m'a été affirmé, par exemple, par plusieurs Palestiniens qui, comme les docteurs Haidar Abd Al-Shafi ou Mustapha Barghouti, condamnent avec toute leur énergie cette pratique horrible. Pour eux, ce qui pousse le plus souvent à commettre ces crimes aveugles s'appelle le désespoir, la frustration, la misère et, surtout, la conviction que leurs vies ne sortiront jamais du puits noir où elles languissent.
Le docteur Mahmoud Sehwail, un psychiatre qui dirige un centre pour victimes de tortures à Ramallah – et avait suivi ses études médicales à Saragosse –, m'assure lui aussi que seul un petit nombre des kamikazes est animé par le fanatisme religieux. "Dans bien des cas, il s'agit de gens désespérés, parce qu'ils ont perdu leurs parents, leurs frères, leurs enfants, ou sont restés sans travail et voient mourir de faim leur famille, sans pouvoir rien faire. Le Hamas et le Djihad islamique se servent de l'effondrement moral, du ressentiment et de la haine que provoquent ces situations extrêmes, pour fabriquer le terroriste-suicide."
Quelques jours après cette conversation, je suis informé d'un cas, arrivé à Ramallah, qui corrobore cette thèse. Un jeune Palestinien a essayé de se faire exploser en se lançant contre l'une des barrières militaires israéliennes installées dans le mur qui, peu à peu, entoure la ville. Mais la dynamite qu'il portait sur lui n'a pas explosé.
Ce n'était pas un religieux pratiquant. Il sortait d'un camp de réfugiés. Il avait planifié son action pour qu'après sa mort les organisations islamiques aident financièrement sa famille qui, jusqu'à présent, dépendait de lui, et que, faute de travail, il n'était plus en mesure d'aider. Il ne prétendait pas servir Dieu par sa mort, ni même la cause palestinienne. Seulement apporter un peu de pain à ses parents, frères et soeurs.
La première terroriste palestinienne fut Wafa Idris, une infirmière de 29 ans, de Ramallah, qui avait obtenu son diplôme professionnel trois mois à peine avant le 27 janvier 2002, où elle s'est fait sauter rue Jaffa, à Jérusalem, tuant une personne et en blessant près de 140. Elle vivait au camp de réfugiés d'Amari, qui existe depuis 1948 dans la banlieue de Ramallah.
Comme tous les camps de réfugiés que j'ai visités, c'est un labyrinthe de ruelles étroites et jonchées d'ordures, où les baraques en terre et en bois, certaines en matière noble mais presque toujours inachevées, se chevauchent et s'incrustent les unes dans les autres, dans un désordre indescriptible. Quelque 6 000 personnes vivent là. Et de tous côtés surgissent des gosses qui assourdissent le matin de leurs cris aigus.
La pauvreté est générale, mais dans ce camp il y a moins de découragement et de ruine morale que ce que j'ai vu dans ceux de Gaza. Tous les habitants que j'interroge m'assurent qu'ils n'auraient jamais imaginé que leur amie Wafa Idris aurait pu faire ce qu'elle a fait.
C'est ce que me dit aussi sa mère, une dame de 70 ans. Les murs de son logement sont couverts de diplômes, de photos et de souvenirs de sa fille, ainsi que de drapeaux du Fatah et d'affiches qui rendent hommage "à l'héroïne et à la martyre" . Ni elle ni ses trois enfants ne se sont doutés de ce que Wafa Idris se proposait de faire. Elle n'était pas très religieuse et ne s'habillait même pas avec la modestie exigée pour les croyantes pratiquantes. En effet, sur maintes photos on la voit vêtue à l'occidentale, et cheveux au vent. C'était une jeune femme orgueilleuse et d'une grande dignité, c'est pourquoi elle n'avait pas pleuré ni ne s'était plainte quand son mari l'avait répudiée en raison de son incapacité à lui donner un fils. Mais, au fond d'elle-même, quelque chose s'était brisé et la tourmentait depuis. Etait-ce peut-être ce drame qui la poussa à s'offrir au Fatah comme "martyre" ?
Sa mère semble hébétée, plongée dans un vertige, et laisse de longs intervalles de silence avant de répondre. "Elle l'a peut-être fait pour son frère Jaleel, mon fils, qui est resté huit ans détenu et que les juifs ont torturé en prison" , dit-elle enfin. Quand elle a vu à la télévision le visage de sa fille et a su ce qu'elle avait fait, elle s'est évanouie. Elle s'est réveillée à l'hôpital et a beaucoup sangloté. Maintenant, elle a cessé de pleurer. Elle dit que si elle avait su ce que sa fille prétendait faire, elle l'aurait peut-être empêchée. Mais elle ne regrette pas qu'elle l'ait fait. "C'est une guerre. Ils tuent et il faut les tuer aussi. Les bombes aident le peuple." C'est une femme presque sans yeux, deux rainures d'où toute lumière a disparu. Elle parle comme si elle récitait une prière. "Ma fille est maintenant au paradis. Je la verrai bientôt là-bas."
Toute analyse sur le conflit israélo-palestinien doit aujourd'hui donner une importance névralgique aux attentats-suicides, sans lesquels il serait difficile de comprendre l'impasse et l'hostilité réciproque auxquelles il est parvenu. Les attentats ont causé d'immenses souffrances mais aussi paranoïa, peur, rancoeur, désirs de vengeance. Et, en dernier lieu, ils ont apporté sur un plateau le prétexte rêvé aux extrémistes de la droite israélienne pour justifier des mesures de répression et d'intimidation contre la population palestinienne, mesures qui, en d'autres circonstances, auraient difficilement reçu l'approbation d'une société qui se flattait d'être la seule démocratie du Moyen-Orient.
*
LES croyants absolus m'ont toujours agacé, sans laisser d'éveiller en moi une certaine envie. Aussi dans la maisonnette d'Ezequiel et d'Odeya, avec leurs trois enfants tout mignons qui batifolent autour de nous, je ne me sens pas très à l'aise bien que mes hôtes soient des plus accueillants: ils ont préparé des rafraîchissements et des petits gâteaux et se prêtent de bonne grâce à mes questions, même les plus impertinentes.
Nous sommes dans une des coquettes demeures de l'implantation israélienne de Mitspé Jéricho, sur la rive occidentale, qui rassemble 300 familles – quelque 1 500 personnes parmi lesquelles des militants du mouvement de colons religieux du Goush Emounim ("Bloc de la foi"), qui compte des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes, défend le nationalisme, le messianisme et l'orthodoxie dans leur expression la plus extrême. L'écrivain Amos Oz estime, très justement, que ce Bloc représente une "extrême dangerosité" pour le futur démocratique d'Israël.
Et pourtant, à condition de ne parler ni politique ni religion, nul ne prendrait pour un fanatique le jeune, affable et délicat Ezequiel Lifschitz, 27 ans, né d'un père israélien et d'une mère américaine. Souriant, sympathique, il est attentif à ses enfants et tolère leurs turbulences avec une infinie patience. Sur ses lèvres reviennent constamment les mots "bonté" et "amour" . Mais dans ses yeux clairs, presque liquides, il y a le regard de ceux qui se pensent détenteurs de la vérité et ne doutent jamais.
Il est ingénieur informaticien et, comme beaucoup de colons de Mitspé Jéricho, travaille à Jérusalem, à une demi-heure de là. "Nous, les croyants, voyons les choses différemment, me dit-il. Dieu a assigné un but à chaque nation. La Torah a dit que nous, les juifs, reviendrions en Israël et nous y voilà. Le but pour les juifs est de reconstruire le pays que nous avons perdu. De la sorte, Israël contribuera à l'existence d'un monde meilleur que celui d'aujourd'hui. Cette terre, Dieu nous l'a donnée et Israël ne saurait remplir sa mission sans la récupérer tout entière, sans le moindre découpage, en incluant la Judée, la Samarie et Gaza. Il est possible que cela n'arrive pas dans l'immédiat, mais tôt ou tard cela se fera. Nous avons tout le temps devant nous. Je prie beaucoup pour que la prophétie s'accomplisse au pl us vite."
Ezequiel et Odeya reviennent de Gaza où, comme plusieurs milliers de colons, ils sont allés manifester leur solidarité avec leurs compagnons des 21 implantations que Sharon a ordonné d'évacuer. Les parents d'Odeya – elle, une jeune femme mince et timide qui semble comme noyée dans ces amples vêtements qui cachent les formes des femmes orthodoxes – sont restés vingt-quatre ans au Goush Katif - implantation juive au sud de Gaza -. Cela a été pour eux, dit Odeya, un déchirement douloureux. Et ce n'est pas la première fois que cela leur arrive. Il y a vingt-quatre ans, ce même Sharon, alors ministre de la défense du gouvernement de Menahem Begin, les avait délogés de l'implantation de Yamit, dans le Sinaï, parce qu'elle faisait partie des territoires qu'Israël rendait à l'Egypte.
A Gaza, les parents d'Odeya, entre les pleurs et les prières, espéraient encore il y a quelques semaines que Dieu apparaisse pour mettre fin à cette injustice inouïe: "Des juifs retirant la terre aux juifs." Mais Dieu n'est pas apparu et ils ont quitté les lieux sans opposer de résistance aux soldats.
"A nous, qui sommes de bons croyants, qui aimons notre nation et notre armée, ce qui s'est passé à Gaza nous fait beaucoup de mal, ajoute Ezequiel. Avant, quand je voyais un soldat israélien, j'avais envie d'embrasser son uniforme. Plus maintenant. Mais les choses changeront. Notre obligation est de faire comprendre à nos frères qu'ils sont dans l'erreur. Au Goush Katif, à Gaza, la communauté à laquelle appartenaient les parents d'Odeya était admirable. On honorait Dieu tout le temps."
Curieusement, Ezequiel et les autres colons, pour défendre la légitimité qu'ils disent posséder sur les terres qu'ils occupent, avancent rarement comme argument le travail qu'ils y ont effectué (...). Ils n'ont sur les lèvres que la thèse divine: "Cette terre est à nous parce que Dieu nous l'a donnée." Une raison qui n'est donc valable que pour des croyants.
"Nous ne voulons tuer personne, affirme Ezequiel. Moi, personnellement, je donnerais de l'argent aux Arabes et leur dirais "au revoir". Ils nous enseignent qu'il faut savoir mourir pour la terre qu'on considère comme sacrée. L'idée qu'il y ait deux Etats, ici en Israël, va contre la Torah: elle est aussi sacrilège que d'allumer du feu le jour du shabbat. Notre politique doit être inflexible: les Arabes qui acceptent le fait que c'est une terre juive, qui ne sera jamais à eux, peuvent rester travailler ici, pour nous. Ceux qui ne l'acceptent pas doivent s'en aller. Et ceux qui se révoltent et veulent combattre doivent savoir que nous les tuerons. Ce n'est que si Israël accomplit ce que dit la Torah que ce sera une nation utile au reste du monde."
Ezequiel et ses trois enfants se déchaussent à l'intérieur de la maison. Pour les religieux ultraorthodoxes, ce n'est pas seulement montrer ses cheveux et les formes de son corps qui est considéré comme obscène pour une femme, mais aussi de laisser entrevoir la cheville et le coup de pied, aussi les femmes portent-elles aux pieds deux grosses paires de chaussettes. Pour ce qui concerne l'épouse de Nafiz Azzam, contrairement à celle d'Ezequiel, je ne pourrai jamais la rencontrer: pour les islamistes messianiques, la femme est un objet qui ne doit pas être exposé à la contemplation publique.
Les deux hommes ne pourraient être plus différents ni des ennemis plus irréconciliables. Pourtant, entre le jeune colon israélien et l'extrémiste musulman, dirigeant du Djihad islamique, qui me reçoit dans un ténébreux édifice de la ville de Gaza, et dans une pièce pleine d'affiches noires proclamant "Allah est le plus grand", il y a un dénominateur commun: tous deux sont des croyants absolus et intransigeants, au regard froid, et tous deux ont, face à tous les problèmes, des réponses simples et catégoriques.
Le Djihad islamique est peut-être moins puissant que l'autre mouvement islamiste et terroriste, le Hamas, mais il est encore plus radical que celui-ci et moins disposé à faire la moindre concession. Nafiz Azzam, 47 ans, fait beaucoup plus que son âge. Il s'habille avec modestie et a une expression dure qui ne s'adoucit que lorsque son plus jeune enfant, qui lui tient compagnie pendant toute notre conversation, grimpe sur ses genoux et joue avec sa barbe et ses cheveux. Alors, son terrible regard se fait attendri.
Il est né à Rafah, en 1958, et a étudié la médecine en Egypte, avec le fondateur du mouvement, Fathi Al-Shikaki. En 1981, il fut capturé et déporté à Gaza. Ensuite, il passa huit ans dans une prison israélienne, où il eut une main estropiée, mais où on ne parvint pas à lui briser le moral. En effet, il ne cessa d'organiser des grèves et de mobiliser ses compagnons. En 1994, il se maria et est aujourd'hui père de six enfants, cinq garçons et une fille. "Nous n'avons rien contre les juifs, m'assure-t-il. Dans le Coran, Dieu encourage les musulmans à être généreux envers ceux qui ne sont pas croyants. Mais que sont venus faire les juifs ici, sur notre terre ? Les Israéliens ont importé un million de Russes et leur ont donné nos maisons et nos villages. Tout le monde sait que, pour la moitié d'entre eux, ils ne sont pas juifs. Et nous, les Palestiniens, enfermés à l'intérieur de barbelés, nous devons leur demander la permission de sortir, ne fût-ce que quelques heures, de ces prisons. Quel peuple tolérerait cela ?"
Il parle très vite, en regardant dans le vide, comme quelqu'un qui récite, et mon traducteur a du mal à le suivre. "Le retrait des occupants de Gaza est une bonne chose, ajoute-t-il, mais c'est seulement un point de départ. Ils ne sont pas partis de leur propre gré, mais contraints par la lutte et le sacrifice des Palestiniens. Pour le moment, le problème numéro un qui se pose à nous n'est pas celui-ci, mais que la paix et la collaboration règnent entre nous, les Palestiniens. C'est seulement unis que nous vaincrons Israël."
Quand je lui dis que l'image du Djihad islamique dans le monde est très négative en raison des attentats terroristes que son mouvement pratique, il s'impatiente: "Les actions de nos martyrs sont une réponse aux tueries qu'Israël commet contre nos enfants, nos vieillards et nos femmes. Nous leur avons proposé de cesser nos actions s'ils en faisaient de même. Mais ils n'ont même pas répondu."
Quand je lui raconte avoir eu l'occasion de parler, autant à Gaza qu'à Ramallah ou à Hébron, avec des Palestiniens selon lesquels la solution du problème israélo-palestinien passerait par un Etat laïque, binational, où juifs et musulmans coexisteraient et se mêleraient, il me jette un regard de pitié, comme on regarde les débiles mentaux. "C'est un rêve impossible, dit-il, avec un rire sarcastique. La Palestine sera une république islamique, où les croyants des autres religions, chrétiens et juifs, seront tolérés, à condition qu'ils acceptent de vivre sous les préceptes du Coran." Le Djihad islamique désarmera-t-il ses combattants, en répondant à l'appel lancé par le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, à la suite de l'évacuation de Gaza ? "Nous ne déposerons jamais les armes."
Malgré le secret effroi que produit chez moi le personnage, je ne peux m'empêcher d'éprouver une certaine pitié en prenant congé de lui, car j'ai la certitude absolue que, tôt ou tard, il sera une des victimes des assassinats ciblés par lesquels Sharon veut venir à bout des extrémistes islamistes.
Que ces derniers n'aient pas la moindre intention de renoncer aux armes, je le vérifie sur le vif quelques jours plus tard, en assistant, sur un terrain vague en bordure de la ville de Gaza, à une parade militaire des comités de la Résistance populaire, une organisation de combattants qui rassemble des militants du Djihad islamique, du Hamas et du Fatah pour des actions concrètes contre Israël. Tout le spectacle consiste en une apothéose exaltée de la guerre et de la terreur.
Avec, indéniablement en toile de fond, une irresponsabilité totale de la part des organisateurs: des centaines de gosses, certains tenant à peine sur leurs jambes courent joyeusement au milieu des tirs tandis que, stimulés par des chansons guerrières diffusées par des haut-parleurs assourdissants, par des louanges frénétiques à Allah et des versets du Coran, les combattants déchargent leurs fusils, pistolets, lance-grenades et missiles sur des cibles en carton où l'on a peint des drapeaux israéliens.
Au cours du spectacle auquel j'ai assisté, les combattants des comités de la Résistance populaire faisaient exploser avec des obus un tank – de carton-pâte –, dynamitaient une maison, enlevaient un individu dont ils prenaient la voiture après avoir exécuté son chauffeur et ses gardes du corps, s'emparaient d'une colline avec des grenades offensives et, clou du numéro, des hommes volants se laissaient tomber du toit d'un immeuble de plusieurs étages, en déchargeant leurs mitraillettes en même temps qu'ils se précipitaient dans le vide accrochés à des cordes. En voyant ricocher ces balles sur le sol, à quelques pas de l'endroit où nous nous pressions, je me suis souvenu d'un essai d'Edward Saïd où, non sans raison, il déplorait le goût de ses compatriotes pour ces mascarades guerrières, les masques, les coups de feu en l'air, les pistolets, les exhibitions vociférantes de machisme qui ne servent qu'à discréditer leur juste cause.
Pour que tout cela fût encore plus absurde, il y avait, à peu de distance, au-dessus de nos têtes, un dirigeable israélien enregistrant et filmant sans doute le spectacle.
(Traduit de l'espagnol par Albert Bensoussan, septembre 2005)
Mario Vargas Llosa
Article paru dans l'édition du 14.10.05
![]() ALAIN KELER/IMAGEANDCO.COM
Un défilé du Hamas à Gaza, le 16 septembre. |
![]() MORGANE VARGAS LLOSA
Ezequiel Lifschitz, militant du mouvement des colons religieux du Goush Emounim, et sa famille, à Mitspé Jéricho. |
![]() MORGANE VARGAS LLOSA
La mère de Wafa Idris, première femme kamikaze palestinienne, posant chez elle, dans la banlieue de Ramallah, avec des photos de sa fille. |
Q ue le ministre britannique des affaires étrangères, Jack Straw, triomphe est légitime. L'ouverture des négociations d'adhésion avec la Turquie marque la victoire de la diplomatie anglaise, appuyée par le renfort téléphonique de Mme Condoleezza Rice. Ont disparu: les conditions ultimes que paraissait vouloir imposer, encore au mois d'août, le gouvernement français, c'est-à-dire la reconnaissance préalable de la République de Chypre et du génocide arménien par la Turquie. La moindre des choses à exiger d'un candidat à l'Union, c'est qu'il admette l'existence de tous les Etats membres de celle-ci. Et reconnaître la vérité historique, aussi cruelle soit-elle, est une exigence de la conscience européenne.
Encore aurait-il fallu ajouter deux autres conditions: le respect, dans les faits, de l'égalité des femmes et des hommes, principe fondamental de l'Union européenne, et la disparition effective de tout traitement inhumain dans les locaux de police et les établissements psychiatriques en Turquie. La torture sous toutes ses formes est incompatible, non seulement avec l'adhésion, mais avec la candidature à l'Union européenne.
Car il ne faut pas se leurrer. Depuis trente ans, aucun Etat candidat à l'adhésion n'a été refusé par l'Union européenne. Parler de "négociations d'adhésion" est trompeur: il s'agit plutôt d'une longue mise en conformité de la législation du pays candidat avec les règles et exigences communautaires. Une fois la décision de principe prise, en l'occurrence le 3 octobre, le processus, laborieux, se déroule et, tôt ou tard, le candidat finit par satisfaire aux conditions fixées.
Pourquoi la Turquie manquerait-elle à cette obligation, elle qui a un tel intérêt économique, social, culturel à intégrer l'Union européenne, et espère que les fonds européens l'aideront substantiellement à transformer ses régions les moins favorisées et à moderniser ses infrastructures ? Le processus d'intégration prendra dix ou douze années. Au terme de ce délai, si court au regard de l'Histoire, sauf bouleversement politique en Turquie – que nul ne doit souhaiter –, celle-ci deviendra membre de l'Union. Ainsi, le désir constant du président Chirac de faire entrer la Turquie dans l'Union européenne sera satisfait.
Pourquoi cet acharnement, cette obstination ?
Ce n'est pas pour des raisons militaires: la Turquie, au sein de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), est notre alliée et celle des Etats-Unis. Elle n'envisage pas d'en sortir.
Ce n'est pas pour des raisons économiques: la Turquie est liée à l'Union européenne, depuis 1963, par un accord de libre échange ! Et le marché turc est ouvert aux entreprises européennes, notamment françaises, dont les investissements vont croissants.
Ce n'est pas pour combattre le chômage. Le salaire moyen des travailleurs turcs est inférieur à celui pratiqué dans l'Europe des Quinze, et leurs avantages sociaux très limités. Le risque d'accroître les délocalisations au sein du marché unique en sera plutôt accru.
Ce n'est pas pour favoriser l'agriculture française. La population agricole en Turquie représente environ le tiers de la population. La moyenne, dans l'Union européenne, est de 5 %. La politique agricole commune (PAC) devra donc nécessairement être transformée pour permettre aux agriculteurs turcs de subsister ou de se reconvertir dans d'autres activités.
Ce n'est pas non plus pour améliorer ou équilibrer le budget européen. Le coût de l'intégration de la Turquie sera au moins égal à celui des dix nouveaux adhérents à l'Union européenne.
Ce n'est pas, enfin, pour renforcer la sûreté de l'Union européenne et de ses peuples. Rien ne justifie que l'Union européenne s'installe en Asie mineure, sur un territoire plus vaste que celui de la France, et établisse des frontières communes avec l'Arménie, la Géorgie, l'Iran, l'Irak et la Syrie. Il n'y a pas de région du monde plus chargée de tensions et de menaces que celle-là. L'Union européenne a vocation à contribuer à sauvegarder la paix et à protéger les populations menacées, plutôt que de se trouver directement impliquée dans des conflits régionaux où la Turquie serait partie.
Alors, pour quels motifs irrésistibles l'Union européenne devrait-elle intégrer en son sein la Turquie, comme membre à part entière, plutôt que d'entretenir avec elle des liens étroits et privilégiés dans les domaines politique, économique, culturel et scientifique ?
Deux raisons sont avancées: la première est que l'adhésion de la Turquie la contraindra à respecter scrupuleusement les règles de la démocratie et les droits de l'homme. Mais ceux-ci doivent être respectés parce qu'ils ont une valeur morale universelle et qu'ils assurent aux peuples une condition meilleure, qu'il s'agisse de leur sûreté, de leur dignité, ou de leur liberté.
La Turquie est membre du Conseil de l'Europe depuis un demi-siècle. Le Conseil, appuyé sur la Cour européenne de Strasbourg, est le foyer des libertés et des droits de l'homme en Europe, plus que l'Union européenne, dont la vocation est d'abord politique et économique. Certes, l'Union européenne offre à ses membres des avantages considérables. Mais, faut-il, pour que la Turquie respecte les droits et les libertés, particulièrement des femmes, qu'elle bénéficie des fonds structurels de l'Union européenne ? Il suffit à la Turquie d'honorer scrupuleusement les engagements qu'elle a contractés en adhérant au Conseil de l'Europe. Et cette condition-là, essentielle à nos yeux, n'a pas à être la contrepartie de quelque avantage que ce soit, lié à l'entrée dans l'Union européenne.
Aussi, un autre motif est invoqué pour justifier ce choix: l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne nous protégerait contre le risque qu'elle ne bascule dans le camp des islamistes. Le propos est singulièrement injurieux pour le peuple turc. Musulmane et laïque, liée à l'Union européenne et aux Etats-Unis par des rapports étroits d'alliance et d'intérêts économiques, pourquoi la Turquie sombrerait-elle, dans les années à venir, dans l'islamisme radical ?
Les Turcs sont un grand peuple qui a marqué l'Histoire. Ses élites intellectuelles n'ont rien de commun avec l'obscurantisme des prédicateurs fanatiques. Et, s'il y avait le moindre risque que la Turquie puisse rallier la bannière de l'islam intolérant, alors le président Chirac aurait dû refuser toute perspective d'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Car, qu'adviendrait-il de celle-ci si un des Etats membres, le plus peuplé de tous et jouissant de tous les droits que lui accordent les traités européens, devenait un jour la proie des islamistes radicaux ? Quelle erreur, si une telle perspective avait quelque fondement, que d'admettre dans l'Union un Etat qui serait porteur de telles menaces !
En vérité, l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne apparaît à ses plus chauds partisans comme un geste symbolique de confiance à l'égard de tous les peuples musulmans. Il leur paraît avantageux, pour la France, qu'elle bénéficie de la sympathie que cet acte susciterait autour de la Méditerranée. Mais, si la Turquie, grande puissance musulmane d'Asie mineure est admise dans l'Union européenne, pourquoi les autres Etats musulmans, ceux-là arabes du pourtour de la méditerranée et du Proche- Orient, ne l'ambitionneraient-ils pas ? Le projet d'une Union euroméditerranéenne apparaît ainsi en filigrane dans le choix d'ouvrir l'Union européenne à la Turquie. Ce serait là une erreur stratégique.
Il ne s'agit pas de constituer l'Union européenne en un "club chrétien". L'Union est une organisation laïque et compte vingt millions de musulmans en son sein. La Bosnie et l'Albanie, Etats à majorité musulmane, sont vouées, le jour venu, à devenir membres de l'Union. Mais ce qui s'inscrit dans la perspective de l'entrée de la Turquie, c'est une Europe indéfinie, aux limites incertaines, vouée à n'être qu'un espace marchand toujours plus étendu.
Ce n'est pas l'Europe puissance, apte à jouer un grand rôle sur la scène du monde, rêvée par les pères fondateurs et les grands hommes d'Etat européens d'hier. Dans le choix du président Chirac se mêlent la mélancolie du renoncement et la fin d'une grande espérance.
Robert Badinter, ancien ministre de la justice, ancien président du Conseil constitutionnel, est sénateur (PS) des Hauts-de-Seine.
Article paru dans l'édition du 14.10.05
Bernard C. d'Ankara ♦ 13.10.05 | 21h01 ♦ Toutes les frontières sont une cicatrice de l'histoire, un gaspillage et annonce un crime. Entre la Turquie et l'Iraq la frontière s'appelle la "ligne de Bruxelles" depuis le 27 octobre 1924, jour où elle y a été validée lors d'une réunion de la SDN! La plupart des frontières "reconnues" du Moyen-Orient ont été tracées par les Européens. L'Europe c'est d'abord un processus de dépassement des nationalismes stériles. La Turquie dans l'Europe ce sera la fin de la 1ère guerre mondiale, enfin!
vévé ♦ 13.10.05 | 20h59 ♦ L'entrée de la Turquie c'est à quitte ou double, "ca passe ou ça casse". Elle peut faire exploser l'Europe, comme lui conférer une supériorité politique sur les Etats-Unis. De même, cela peut abattre la "bête immonde" du nationalisme ou l'inverse (son réveil) ! Maintenant, si Mr Badinter pense comme Bush que la Turquie empêchera l'Europe politique, il se peut que ce soit tout le contraire. Conclusion, "qui risque rien n'a rien" et c'est tant mieux pour l'Europe.
JEAN-CLAUDE G. ♦ 13.10.05 | 18h54 ♦ Robert Badinter, vous avez cent fois raison. A supposer que, dans n années les Français refusent l'adhésion (mais comment sera-ce possible après tant et tant d'années de chantage implicite permanent?) quelle sera/serait dès lors la réaction de la Turquie, lanternée depuis des decennies? A remettre à plus tard un NON raisonné, à pratiquer une lâche fuite en avant nous ne pratiquons que l'apparence d'une politique européenne.
Galahaad ♦ 13.10.05 | 18h26 ♦ Qu'est-ce qu'on apprend dans cet article? Rien, ou presque. M. Badinter nous explique qu'il est contre l'entrée de la Turquie parcequ'il est contre l'entrée de ta Turquie. Aucun argument original n'est développé, le débat n'avance pas d'un micromètre. On a connu M. Badinter mieux inspiré.
destripadore ♦ 13.10.05 | 18h03 ♦ On a promis à la turquie sont entrée dans l'Europe il y a plus de 40 ans. Mais qui? Le peuple? en France jamais la question européene n'as été posé à part Mastrich et le 29 mai! Et la reponse au referundum n'etais pas non à l'Europe mais oui a une europe des peuples. Le peuple se rend compte de l'importance de cette construction et veut donner sont avis. Reste que une promesse a été faite au nom de ce peuple dans un pays democratique! On ce reveil un peut tard!
Jean-Claude B ♦ 13.10.05 | 17h56 ♦ Tout est dit. Du grand Badinter. Bravo
Roger Dumont ♦ 13.10.05 | 17h55 ♦ Un référendum n'est-il pas prévu, en France en tout cas, pour l'adhésion de la Turquie à l'UE ? Et la décision finale ne doit-elle pas être prise à l'unanimité ? Les négociations ne signifient donc pas automatiquement adhésion dans 10 ou 15 ans.
doudou ♦ 13.10.05 | 17h28 ♦ A Philippe M.: très bien, il n'y a pas de vérité géographique de l'Europe. Alors je vous pose la question: où s'arrête-t-on ? On ne s'arrête pas ? Ok, mais alors l'ONU existe déjà. Retenez bien ceci: plus l'UE contient d'avis divergents, plus elle se vide de son sens et de son poids politique. Il faut avoir le courage de le dire. On le voit tous les jours, l'UE des 25 n'a déjà plus aucun avenir, si ce n'est d'être une vaste zone de libre échange. Oubliez l'harmonisation sociale et fiscale !
Marre du nationalisme ♦ 13.10.05 | 17h13 ♦ D'un "ancien ministre, ancien président du Conseil Constitutionnel", on attendait un peu plus d'ouverture d'esprit. L'argumentation anti-Turquie n'est qu'un avatar de l'effet "plombier polonais": l'UE, oui à la rigueur si cela procure des avantages à la France, et peu importe le reste. Et si l'UE apportait la paix et la stabilité, accomplissant son projet fondateur, en dehors de la petite europe géographique, où serait le mal? Et renoncer à 1% de croissance en serait-il un prix excessif?
Groquik ♦ 13.10.05 | 17h11 ♦ Quel serait le critère qui justifierait que, bien que la Turquie soit membre du Conseil de l'Europe, elle ne soit pas membre de l'UE. Je pense que la crainte qui est ressentie par la majorité des opposants à l'entrée de la Turquie dans l'UE résulte d'une éventuelle intégration politique. Ne serait il pas temps, dans ces conditions, d'envisager une intégration politique, non plus avec tous les membres de l'UE, mais seulement avec les pays qui le veulent vraiment?
henrikardo ♦ 13.10.05 | 17h11 ♦ Le problème c'est que les mariages forcés, en général on sait où ça mène: Yougoslavie de Tito, URSS de Staline... quand on force les peuples à cohabiter sans leur consentement, on doit s'attendre à ce qu'ils expriment peut-être un jour leur rejet et pas forcément pacifiquement. D'autre part le " club chrétien " correspond à quelque chose: un espace où les gens partagent des valeurs qu'ils ont mis des siècles à mettre en place - et souvent dans la douleur -, ça crée effectivement des liens ...
Pierre L. ♦ 13.10.05 | 17h10 ♦ Au final Badinter essaie de démontrer en quoi c'est inutile, mais pas en quoi cela pose probleme. Comparer le cas de la Turquie a celui des autres pays arabes est une erreur à la fois historique, ethnique et culturelle (et non, les Turcs ne sont pas des arabes !) et montre bien que c'est la religion qui fait peur. Effectivement la perspective d'une Europe politique est difficile avec la Turquie, mais c'est déja le cas depuis les 25: seules les coop renforcées restent possibles.
Groquik ♦ 13.10.05 | 17h05 ♦ L'UE est déjà en Amérique du sud puisque la France y possède la Guyane, elle est également en Afrique (Mayotte) et j'en passe... Pourquoi ne pourrait elle pas avoir dans ces conditions frontière commune avec l'Irak? Les troubles dans cette région du globe sont suffisemment aiguës pour que nous en ressentions déjà les effets même en n'étant pas un pays limitrophe.
gérard B. ♦ 13.10.05 | 17h03 ♦ Dans 15 ou 20 ans, la Turquie integrera l'UE, en ayant reconnu tous les autres Etats membres, Chypre compris, et le génocide des Arméniens, ce qu'aucune autre politique ou institution n'avait réussi à faire, l'ONU et le Conseil de l'Europe compris.Rappelons les différends de frontière entre Pologne et Allemagne, encore d'actualité vers 1992... et réglés grâce à ce projet sans âme et purement économique qu'est l'UE;Bon, il faudra peut-être changer le "E" de UE: ce serait beau si on arrrivait à M
Denis P. ♦ 13.10.05 | 16h56 ♦ Je trouve les arguments de M. Badinter tres convaincants. L'injure que l'on fait a la Turquie, c'est de lui faire croire qu'elle ne sera democratique et respectueuse de valeurs universelles qu'au terme de marchandage, en contrepartie d'avantages economiques. L'injure que l'on fait a l'Europe, c'est de ne voir en elle qu'un ligue marchande et un "club chretien" alors que sans la Turquie, elle est deja un immense brassage cultures, de religions et de races.
PhilippeM ♦ 13.10.05 | 16h46 ♦ Il n'y a pas de vérité géographique de l'Europe. L'Europe n'est pas l'Australie, c'est un bout de l'Eurasie dont les contours sont arbitraires et ont connu plusieurs traçés, toujours suffisamment imprécis pour permettre des arrangements: qu'on m'explique autrement pourquoi Chypre serait européenne et pas l'Anatolie ! Ceux qui se plaignent des futures frontières avec l'Iran exigent-ils aussi l'abandon de la Guyane, frontalière du Brésil, ou de la Polynésie française ? Et que dire de Ceuta ?
BERNARD C. ♦ 13.10.05 | 16h35 ♦ Dans l'article de Robert Badinter comme dans les réactions des lecteurs il n'est jamais questions de l'avis des turcs ! Or depuis la naissance de la Turquie moderne avec Ataturc en 1923, le changement de l'alphabet, la laïcité de l'Etat etc, les turcs se veulent et se sentent européens, ou du moins la grande majorité d'entre eux et la quasi totalité des élites. Nous avons certes notre mot à dire sur leur intégration mais n'oublions pas leur volonté.
Roger B. ♦ 13.10.05 | 16h02 ♦ M. Badinter a raison. Il faut reconnaître la vérité historique. Il faut aussi, à mon sens, reconnaître la réalité géographique. L'Europe de l'Atlantique à l'Oural est déjà large, mais c'est une notion admise parce que raisonnable. Pousser sa limite est jusqu'au lac de Van, puis - pourquoi pas tant qu'on y est - jusqu'à l'Himalaya et bientôt la Mer de Chine, c'est nier l'évidence géographique dans tous ses aspects, et c'est vider la notion d'Europe de son sens.
Fefoley ♦ 13.10.05 | 15h51 ♦ Les arguments sont nombreux mais faibles et à courte vue. Le principal: une Europe sans limite et sans puissance. Il regrette en fait l'élargissement aux 10 Nouveaux, et aurait préféré un appronfondissement politique, pourtant très aléatoire (et refusé par les Français le 29 mai avec tout le reste). Pourtant, avec ou sans la Turquie, l'UE comptera bientôt 30-35 membres. L'Europe Politique doit donc être une nouvelle construction (coopération renforcée?). Mais la France en a-t-elle la volonté?
Jean-Luc C. ♦ 13.10.05 | 15h44 ♦ On aurait attendu d'un spécialiste de droit constitutionnel qu'il nous explique s'il y avait un moyen de faire enfin cesser l'exception monarchique française (bien expliquée hier par Mr Duhamel dans Libération) qui permet à un seul homme de prendre des décisions gravissimes sans qu'aucun contre-pouvoir ne puisse apparemment s'y opposer
doudou ♦ 13.10.05 | 15h31 ♦ Monsieur Badinter, vous êtes un grand homme d'Etat. Rares sont les hommes de gauche qui ont le courage de s'opposer à l'entrée Turquie dans l'U.E. Et pourtant il le faut. Comme vous le dites, quel est le sens d'une Europe ayant des frontières avec l'Iran? Pq ne pas alors intégrer l'ensemble du pourtour midéterranéen? L'U.E. à 25 est déjà à la ramasse, avec tous ces marchandages de bas étage. Ne peut-on pas être amis sans faire partie de la même famille? La seule option: les coop renforcées,vite!
orbi ♦ 13.10.05 | 15h23 ♦ Pour l'Union euroméditéranéenne, il s'agit d'un filigrane, mais pour l'Union Eurasie jusqu'à la muraille de Chine,c'est presqu'une réalité, puique nous devrons compter avec l'Agence de Coopération Turcophone; (TIKA). D'ailleurs l'Azerbaidjan fait déjà partie du Conseil de l'Europe. Alors oui, nos chefs construisent un Nouvel Empire Européen. Pourquoi faire? là est la question. Mais enfin les "grands conquérants" n'ont jamais demander à leurs peuples s'ils étaient d'accord avec quoique ce soit!!.
AHMET D. ♦ 13.10.05 | 14h42 ♦ Au contraire, l'entrée de la Turquie donnera un caractère universel et non seulement chrétien à l'UE. La position stratégique de la Turquie, l'importance qu'elle joue dans la stabilité régionale et dans un proche futur - sinon déjà - l'approvisionnement en conbustible de l'Europe, confèrera à l'Europe une place de puissance mondiale. Par ailleurs affirmer que le coût de l'intégration de la Turquie serait égale à celui des dix nouveaux adhérents est de la simple spéculation.
L a décision prise en décembre 2004 d'ouvrir avec la Turquie les négociations en vue de l'adhésion à l'Union européenne est désormais mise en oeuvre. Elle fut en son temps une décision intelligente, utile et sage. Elle a offert à ce grand pays des perspectives d'avenir qu'aucune autre ne saurait remplacer.
Plus de dix années de relations suivies avec les Turcs, dont quatre dans leur propre pays, m'autorisent aujourd'hui à écrire qu'au regard de l'Histoire cette décision restera comme l'un des faits majeurs de la construction de l'Union européenne au même titre que la résolution de Messine, en 1956, ou la ratification de l'Acte unique européen, en 1986, par le Parlement français.
En effet, cette décision est d'abord l'aboutissement d'une réflexion intelligente sur ce qu'est la Turquie contemporaine. Façonnée par quatre-vingt-deux ans de laïcité, mettant scrupuleusement en vigueur les principes de séparation des pouvoirs entre le spirituel et le temporel, la Turquie est un modèle de lutte contre les communautarismes. Tout en respectant à la lettre le traité de Lausanne et les minorités juive, orthodoxe et arménienne qui vivent en Turquie, l'Etat turc contient l'islam dans des limites juridiques suffisamment coercitives pour empêcher sur son sol toute dérive islamiste. Il refuse les activités religieuses qui mettraient en cause les fondements de la République. Le pouvoir politique élu démocratiquement il y a trois ans n'a modifié la Constitution et les lois que dans le sens demandé par l'Union européenne, pour rendre le corpus juridique turc euro-compatible. Il n'y a pas un seul exemple de changement législatif qui trahisse une dérive islamiste.
Cette décision d'ouverture des négociations est utile: elle offre aux économies européenne et turque des perspectives qui renforceront le partenariat privilégié. Celui-ci existe déjà grâce à l'Union douanière ratifiée au Parlement européen, en décembre 1995. Après 2001, j'ai été pendant quatre ans le témoin privilégié de l'imbrication progressive des économies européenne et turque, avec souvent le sentiment que les Français auraient pu faire plus et mieux.
Les négociations vont porter en grande partie sur le calendrier de la mise en oeuvre de la politique agricole commune, puisque celle-ci n'était pas concernée par l'Union douanière. Cela va ouvrir un marché très solvable de 71 millions de consommateurs à nos producteurs. Idem pour tout ce qui concerne les services: les grandes enseignes françaises encore absentes de Turquie, rassurées par le dialogue ouvert, prendront conscience du potentiel de ce pays.
Il s'agit enfin d'une décision sage: le chemin à parcourir pour les Turcs sera long et semé d'embûches, car les structures économiques de nos pays restent encore très divergentes. La sagesse imposait que l'on mette autour d'une table les experts européens et turcs pour identifier les problèmes que poserait une adhésion. L'Europe fonctionne ainsi depuis 1952. Pourquoi la candidature des Turcs échapperait-elle à cette règle ? Le moment venu, dans dix ou quinze ans, les responsables politiques d'alors prendront les décisions qui conviennent. Ayons confiance dans la jeunesse de nos pays.
Dans une négociation constructive avec ce pays ami depuis cinq siècles, la France aurait pu jouer un rôle majeur. Malheureusement, elle est dans une phase de repli sur elle-même. Pour "répondre aux inquiétudes des Français sur la montée de l'islamisme", il est assez commode de trouver une tête de Turc prédestinée à l'emploi. Les Turcs, à qui rien n'échappe, comprendront vite que la route de Berlin, de Londres ou de Bruxelles est plus porteuse que celle de Paris.
Jean-Antoine Giansily, ancien député (UPE-RPR) au Parlement européen, était chef de la Mission économique française à Istanbul de septembre 2001 à août 2005.
Article paru dans l'édition du 14.10.05
gérard B. ♦ 13.10.05 | 18h49 ♦ Nous ne sommes peut-être pas amis avec la Turquie depuis cinq siècles, mais il est vrai que François Ier et Louis XIV s'allièrent avec les Ottomans contre le reste de l'Europe, qui s'en trouva fort choquée: déjà, la France, visionnaire s'affranchissait du fardeau du christianisme... (vision personnelle). La laïcité turque est clairement soeur de la nôtre: nous partageons donc beaucoup de choses avc les Turcs, y compris, hélas, quelques remontrances de la CEDH. ILs ont donc leur place dans l'UE!
Gustave A. ♦ 13.10.05 | 17h41 ♦ Badinter a très bien expliqué les en jeux. L'entrée de la Turquie signifie la fin de l'Europe en tant qu'entité politique et sa transformation en une vaste zone de libre-échange. L'Angleterre jubile, car elle a enfin vaincu De Gaulle! Le cheval de Troie est entré, l'Europe politique, sociale et militaire est tombée. Congratulations Brits! You are the best! As asual...
doudou ♦ 13.10.05 | 17h16 ♦ Ce texte montre bien que l'adhésion turque est surtout désirée par certains pour des raisons économiques (agrandissement de la zone de libre échange, débouchés commerciaux,...). Les aspects éthiques (Chypre, l'Arménie, droits de l'homme), socio-culturels (pq la Turquie est-elle plus européenne que d'autres ?) et surtout politiques sont tus. Adieu Europe politique ! Bonjour grand marché libre échangiste sans harmonisation sociale ni fiscale ! Désespérant... Les coopérations renforcées, vite !!!
henrikardo ♦ 13.10.05 | 16h37 ♦ " ce pays ami depuis 5 siècles ... " qu'est-ce que c'est que cette leçon d'histoire de politique aveuglé ? Mais alors on a été aussi ami-ami avec les Allemands depuis Charlemagne , avec les Anglais depuis Guillaume Le Conquérant et avec les Espagnols... donc dans pas longtemps, on aura aussi été copains avec Ben Laden, les militants du " Sentier Lumineux " ... bref avec tout le monde puisque ce qui compte c'est la vision qu'on a de l'histoire et pas sa réalité
L e projet d'accord "relatif à l'emploi des seniors" conclu dans la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 octobre devrait amener des changements dans la vie des salariés et des chômeurs âgés. Mais il renvoie nombre de dispositions à la décision des pouvoirs publics ou à de futures négociations, comme celle de la convention Unedic qui doit débuter le 8 novembre.
Prévu par la loi sur les retraites d'août 2003 et destiné à améliorer le taux d'emploi des plus de 55 ans, l'un des plus bas d'Europe avec 36,8 %, ce texte contient une série de mesures sur "l'évolution des représentations socioculturelles" , "la sécurisation des parcours professionnels" , "le retour des seniors dans l'emploi" ou encore la "fin de carrière" . L'objectif du projet d'accord, qui comporte 27 articles, est d'atteindre un taux d'emploi des 55-64 ans "de 50 % à horizon 2010, soit une progression de deux points par an" . Un premier bilan sera effectué fin 2007.
"Nouveau" CDD pour les plus de 57 ans : un contrat à durée déterminée (CDD) de 18 mois maximum, renouvelable une fois, pourra être conclu avec un chômeur de 57 ans "inscrit comme demandeur d'emploi depuis plus de trois mois ou en convention de reclassement personnalisé (CRP)" , "afin de lui permettre d'acquérir par son activité, des droits supplémentaires" pour liquider sa retraite à taux plein.
La durée maximale actuelle d'un CDD est de 18 mois, renouvellement compris. Avec une durée totale de 36 mois, ce CDD aménagé, qui suppose toutefois l'intervention du législateur, permettrait à un chômeur de 57 ans, "éloigné structurellement de l'emploi" , d'atteindre 60 ans et de compléter ses annuités pour un départ à taux plein. Ce point a rencontré l'hostilité de tous les syndicats, opposés à la création d'un nouveau contrat, a fortiori d'un "contrat vieux" comme l'avait baptisé la CGT.
Dispense de recherche d'emploi : la suppression éventuelle de la dispense de recherche d'emploi pour les chômeurs seniors, réclamée par le patronat, est remise à plus tard. Dans le cadre de la négociation Unedic, syndicats et patronat étudieront des "dispositifs susceptibles de favoriser le retour dans l'emploi des seniors" .
Contribution Delalande : la suppression de cette contribution, réclamée par le Medef, et refusée par les syndicats, est renvoyée aux pouvoirs publics. A charge pour eux d'étudier "les effets" du dispositif et d'apporter, "après consultation des partenaires sociaux, les correctifs éventuels qui pourraient favoriser l'emploi des seniors".
Instituée en 1987, cette contribution payée par les entreprises qui licencient un travailleur de plus de 50 ans rapporte quelque 250 millions d'euros par an à l'Unedic, une somme que les syndicats ne sont pas prêts d'abandonner au vu du déficit de l'assurance-chômage qu'ils cogèrent avec le patronat. Cumul emploi-retraites : ce dispositif a été critiqué par tous les syndicats. "Les chômeurs, notamment les seniors, ne comprendraient pas que l'on organise le maintien dans l'activité de salariés pouvant partir à la retraite" , a remarqué Michel Coquillion, le représentant de la CFTC. Les pouvoirs publics sont donc invités à "réduire notamment les inégalités de traitement entre salariés" engendrées par le cumul emploi-retraites.
Aujourd'hui, ce dispositif interdit à un salarié reprenant un emploi de dépasser le niveau de son dernier salaire en cumulant sa pension et la rétribution de sa nouvelle activité. Un scénario jugé défavorable aux bas salaires et favorable aux cadres.
Epargne salariale : toute référence à la possibilité d'un déblocage anticipé de l'épargne salariale a été enlevée à la demande des syndicats.
Travaux pénibles : un nouvel article a été rajouté, à la demande de la CFTC, établissant le lien avec la négociation sur la pénibilité au travail, dont la prochaine séance est prévue le 2 novembre : "Les aménagements de fin de carrière liés à la pénibilité seront négociés dans un accord spécifique sur la pénibilité."
Formation : L'accord propose d'autres mesures, concernant notamment le "droit individuel à la formation" que l'employeur ne pourra plus désormais refuser à une personne âgée de plus de 50 ans. Chaque salarié se verra aussi reconnaître le droit à l'âge de 45 ans, puis tous les cinq ans, à un "entretien de deuxième partie de carrière" destiné à faire le point sur ses compétences, ses besoins de formation et son évolution professionnelle.
Rémi Barroux
Article paru dans l'édition du 14.10.05
L a cour d'appel de Lyon a condamné, vendredi 14 octobre, à six mois d'emprisonnement avec sursis l'ancien imam de Vénissieux.
L'imam Abdelkader Bouziane était poursuivi pour ses propos favorables au châtiment corporel des épouses infidèles. Il avait été relaxé en première instance. M. Bouziane, jugé en son absence en raison de son expulsion en Algérie en octobre 2004, a également été condamné à 2 000 euros d'amende. La peine prononcée par la cour d'appel va au-delà des réquisitions de l'avocat général qui avait demandé une peine d'"amende significative".
Agé de 53 ans, l'imam salafiste, polygame et père de seize enfants, était poursuivi pour "provocation directe, non suivie d'effet, à commettre l'infraction d'atteinte volontaire à l'intégrité d'une personne" à la suite de ses propos publiés en avril 2004 dans le mensuel Lyon Mag.
"Battre sa femme, c'est autorisé par le Coran, mais dans certaines conditions, notamment si la femme trompe son mari. (...) Mais attention, l'homme n'a pas le droit de frapper n'importe où. Il ne doit pas frapper au visage, mais viser le bas, les jambes ou le ventre. Et il peut frapper fort pour faire peur à sa femme, afin qu'elle ne recommence plus", avait-il déclaré.
L'avocat de M. Bouziane, Me Mahmoud Hebia, a aussitôt annoncé son intention de se pourvoir en cassation. M. Bouziane avait été relaxé le 21 juin par le tribunal correctionnel de Lyon, mais le parquet avait fait appel. Deux associations lyonnaises de défense des droits des femmes, Regards de femmes et Femmes contre les intégrismes, qui s'étaient constituées parties civiles, ont été déboutées de leurs demandes de dommages-intérêts par la cour.
"Cette condamnation est un message à tous les imams autoproclamés qui prétendent que le Coran est supérieur à la loi", s'est félicitée Michèle Vianès, présidente de Regards de femmes, après l'énoncé de l'arrêt. Cela confirme que "personne ne peut battre une femme sous quelque prétexte que ce soit", a-t-elle ajouté.
Abdelkader Bouziane a été expulsé vers l'Algérie à la suite d'une décision du Conseil d'Etat de mettre fin à la suspension d'un arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 14.10.05 | 15h29
L a présence du virus de la grippe aviaire en Roumanie a été confirmé sur deux nouveaux échantillons provenant de Maliuc, un village proche du premier foyer détecté dans le delta du Danube, au sud-est de la Roumanie, a annoncé vendredi 14 octobre, le ministère de l'agriculture roumain. Les deux échantillons ont été prélevés les 9 et 10 octobre sur un cygne et une poule, selon la même source.
Attendus vendredi, les autres résultats concernant l'identification du virus de la grippe aviaire en Roumanie – s'agit-il du H5N1, qui a causé la mort d'un soixantaine personnes en Asie depuis 2003 ? – ne seront pas disponible avant samedi, a annoncé la Commission européenne.
Les échantillons doivent être envoyés au laboratoire de référence communautaire, en Angleterre. Mais, en raison des "procédures douanières appliquées au transport de matière dangereuse", un retard a été pris, a précisé la Commission dans un communiqué. Ces échantillons devraient ainsi arriver "tard dans la journée de vendredi" au laboratoire, et les résultats sont attendus pour samedi après-midi,"pas avant".
La Commission européenne a confirmé, jeudi 13 octobre, la présence en Turquie du redoutable virus H5N1 de la grippe aviaire. Les experts vétérinaires de l'UE, ainsi que des spécialistes des routes migratoires, des oiseaux sauvages et de la chasse se réunissent à Bruxelles, vendredi 14 octobre toute la journée, pour étudier d'éventuelles nouvelles mesures de prévention afin de limiter les contacts entre les oiseaux sauvages et les volailles. Ils pourraient décider en fin de journée des actions à mener.
L e chef du gouvernement a réuni, vendredi 14 octobre, pendant une heure à l'hôtel Matignon huit ministres autour du dossier de la grippe aviaire (intérieur, défense, affaires étrangères, transports, santé, agriculture, écologie, budget). La présence du virus aux portes de l'Europe renforce les craintes d'une épidémie à grande échelle. Mais, dans un communiqué publié à l'issue de cette réunion, le premier ministre a "rappelé qu'à ce stade, il s'agit d'une maladie qui touche les volailles". "Si l'on dénombre en Asie quelques cas de transmission des volailles à l'homme, il n'y a en revanche à ce jour aucun cas de transmission d'homme à homme: nous ne sommes pas en situation de pandémie", a-t-il assuré.
Le premier ministre a donné les deux priorités du gouvernement dans ce dossier: "prévenir, en étroite coordination avec nos partenaires européens, la propagation de l'épizootie en Europe" et "protéger la santé des Français". M. de Villepin a "fait le point sur l'approvisionnement de la France en masques et en médicaments antiviraux, ainsi que sur les réservations de vaccins".
Les ministres des affaires étrangères de l'UE devraient se réunir à Luxembourg, mardi 18 octobre, pour évoquer la grippe aviaire et des négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), a-t-on appris de sources diplomatiques,vendredi 14 octobre.
L' Organisation mondiale de la santé (OMS) a estimé que l'arrivée en Europe du virus de la grippe aviaire était une source de préoccupation. L'OMS a également demandé aux pays concernés de renforcer la surveillance à la fois des volatiles et des êtres humains.
Mais, dans un communiqué diffusé dans la nuit via son site Internet [ www.who.int ], elle souligne que tous les indices montrent que le virus H5N1 ne se transmet pas aisément des oiseaux à l'être humain. En attendant les résultats des laboratoires chargés d'identifier le mal, l'OMS n'a pas relevé son niveau d'alerte (trois sur une échelle de cinq) en vue d'une éventuelle pandémie affectant les humains.
Toutefois,"l'OMS recommande aux pays touchés par des épidémies concernant les volailles de respecter certaines précautions, notamment lors des opérations d'abattage, et de surveiller les personnes à risque pour tout symptôme respiratoire ou de fièvre".
A près que le virus eut été identifié comme étant le H5N1, la chasse à tous les oiseaux sauvages a été interdite jusqu'à nouvel ordre", indique le ministère de l'environnement turc dans un communiqué, vendredi 14 octobre. Les autorités demandent à tous les chasseurs de respecter cette interdiction et surtout d'éviter tout contact avec les volatiles migrateurs qui vivent dans les marais à travers le pays, situé sur trois axes de migration.
Dans les Balkans, les autorités croates ont annoncé, jeudi 13 octobre, avoir engagé une vaste opération de prélèvement d'échantillons sur des oiseaux sauvages dans tout le pays afin de déterminer s'ils sont porteurs du virus de la grippe aviaire. "Dans le cas où on découvrirait la présence du virus, les premiers résultats des tests seront connus dans quelques jours", a déclaré un responsable de l'Institut croate des volailles, Vladimir Savic, cité par l'agence Hina. Les tests vont être effectués, notamment sur des oies, des canards et des mouettes, a-t-on indiqué de même source.
S elon le magazine économique suisse Cash, le groupe pharmaceutique Roche est submergé de commandes de Tamiflu, un médicament qui combat la grippe aviaire. Pour répondre à cette demande, Roche va multiplier le chiffre de sa production de 2003 par huit ou dix d'ici à 2006, a indiqué un porte-parole du laboratoire suisse, interrogé par le journal. Au début de l'année 2005, Roche avait déjà décidé de doubler sa capacité de production de Tamiflu.
Cependant, le géant suisse du médicament n'a pas les capacités d'assurer par lui-même cette notable hausse de la production. Il sera obligé de sous-traiter partiellement avec des entreprises chimiques telles que Lonza ou Clariant, ajoute le journal. Parmi les importants commanditaires du médicament, Roche est en pourparlers avec les Etats-Unis, qui veulent commander une grande quantité de Tamiflu. L'antiviral est aussi recherché par les entreprises pour protéger leur personnel.
Le Tamiflu devrait rapporter cette année 1 milliard de francs suisses (660 millions d'euros) de chiffre d'affaires pour Roche. Le médicament, vendu sur ordonnance, coûte près de 59 euros en Suisse (87,50 francs suisses). Selon un responsable de l'institut suisse d'immunologie, des pharmacies en ligne proposent le médicament pour 87,50 euros, soit presque 50 % plus cher.
S ne souche du virus H5N1 résistante au Tamiflu, le médicament antiviral stocké à travers le monde en cas d'apparition d'une pandémie de grippe d'origine aviaire, a été identifiée par une équipe de chercheurs, a rapporté, vendredi 14 octobre, l'hebdomadaire scientifique britannique Nature.
Cette souche a été identifiée chez une jeune fille de 14 ans au Vietnam. Cette dernière aurait pu contracter la grippe d'origine aviaire par le biais de son frère, et non pas directement par des oiseaux infectés.
Le décodage du génome de cette souche particulière a montré qu'elle avait subi une mutation qui la rendait résistante à l'oseltamivir, le nom de laboratoire du Tamiflu, le médicament commercialisé par le laboratoire suisse Roche.
Des essais en laboratoire sur des animaux ont cependant montré que ce virus était sensible à une autre substance appelée zanamivir, et commercialisée par le britannique GlaxoSmithKline sous le nom de Relenza.
Ces conclusions "suggèrent qu'il pourrait être utile de stocker du zanamivir en plus de l'oseltamivir en cas de pandémie provoquée par le virus H5N1", selon l'équipe de chercheurs dirigés par Yoshihiro Kawaoka, de l'université de Tokyo et de l'université de Wisconsin à Madison.
L'antiviral Tamiflu est jugé par les experts susceptible de réduire la gravité et la durée des symptômes, voire la mortalité, en cas de grippe gravissime.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 14.10.05 | 13h09
V enus saluer à Paris son "ami" Jacques Chirac, Gerhard Schröder a assuré vendredi 14 octobre au soir que la France et l'Allemagne "lutteront contre tous ceux qui veulent sacrifier" un modèle européen alliant "l'efficacité économique et la cohésion sociale". Deux éléments qu'il juge "capitaux et qui font que ce modèle qui nous tient à coeur doit à tout prix être préservé", lors d'un point de presse au côté du Président français.
Le chancelier allemand sortant s'est également dit "convaincu" que le gouvernement de coalition gauche-droite dirigé par la conservatrice Angela Merkel poursuivrait une "étroite coopération entre l'Allemagne et la France".
A propos du lien franco-allemand, il s'est dit "convaincu que tout gouvernement allemand sait déjà ou apprendra rapidement que le progrès en Europe n'est possible que s'il est fondé sur une étroite coopération entre l'Allemagne et la France".
"Le chancelier et moi, l'Allemagne et la France avons la même vision, le même projet pour l'Europe de demain". C'est "une Europe à la fois politique et sociale, une Europe organisée, une Europe fondée sur la solidarité, les politiques communes et une démarche d'harmonisation", a souligné pour sa part, Jacques Chirac.
Enfin, il a ajouté qu'il allait examiner lors du dîner avec M. Schröder les "différentes initiatives" qu'ils pourraient soutenir ensemble, notamment pour la recherche et l'innovation, les liaisons transeuropéennes, l'énergie, la démographie et la défense.
Avec AFP
LEMONDE.FR | 14.10.05 | 20h38
L e "tsunami politique" de l'élections présidentielle de 2002 "n'a pas été purgé", a estimé, vendredi 14 octobre, le ministre de l'intérieur."Je ne suis pas persuadé que nous avons apporté toutes les réponses à ce choc politique", a-t-il déclaré en se référant à l'arrivée du candidat d'extrême droite Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection.
Selon lui, la victoire massive du non le 29 mai dernier, lors du référendum sur la Constitution européenne, avait été "un autre choc politique d'une très grande ampleur". "Si vous ajoutez à cela qu'un Français sur deux, grosso modo, ne vote plus, vous avez un troisième choc politique", a-t-il renchéri lors d'un déjeuner débat avec le club d'entrepreneurs Croissance Plus.
Il a justifié par cette situation les déclarations qu'il avait faites en juin dernier dans une cité de la Courneuve, en banlieue parisienne, et qui avaient provoqué un tollé dans l'opposition, et l'embarras dans la majorité. Après la mort d'une enfant de 11 ans tué par balle, il avait dit vouloir "nettoyer la Courneuve au Kärcher".
"Quand j'emploie des mots comme ceux que j'emploie, c'est pour être sûr de me faire comprendre (...) de ceux qui vivent dans ces quartiers et qui ont le sentiment que la République les a abandonnés", a-t-il expliqué. "Quand je vais à la cité des 4000 – où je ne vous conseille pas de vous rendre sans être accompagnés –, et que je dis 'il faut nettoyer ces quartiers profondément des trafics et des trafiquants', je ne veux pas être compris des CSP (catégories socio-professionnelles) plus plus plus qui regardent ces quartiers avec une jumelle", a-t-il ajouté. "Je veux être compris de ceux qui y vivent."
De plus, et quoi qu'en pense le premier ministre, l'idée de rupture plaît à Nicolas Sarkozy. "La rupture est profondément nécessaire avec les graves échecs de la politique économique et sociale des trente dernières années", a lancé le ministre de l'intérieur, vendredi 14 octobre, à Paris, appelant à "rompre avec les réformes bancales" et les "prudences hypocrites".
"C'est ma responsabilité d'homme politique que de proposer aux Français de sortir de la spirale des mauvais résultats dans laquelle notre pays s'est enlisé depuis près de trente ans", a-t-il encore affirmé.
Le numéro deux du gouvernement va plus loin en déclarant: "La rupture que je souhaite est donc aussi une rupture avec la méthode et le rythme des réformes." "Rompre avec ce qui ne marche pas n'a jamais voulu dire faire table rase de la société (...) La rupture que j'appelle de mes vœux passe résolument par les réformes. Nous ne romprons avec la croissance molle, la dérive des finances publiques et notre chômage endémique, qu'en mettant en œuvre rapidement les changements dont le pays a besoin", a martelé le ministre de l'intérieur.
"Qui peut aujourd'hui soutenir honnêtement que la situation de l'économie française n'est pas préoccupante ou que les piètres résultats de notre système social n'invitent pas d'urgence au sursaut ? Qui peut oser prétendre qu'il n'y a, après tout, que quelques ajustements, quelques rustines, quelques retouches à apporter ? Qui peut affirmer que le cap économique de notre pays est le bon et qu'il faut continuer comme ça ?", a demandé le ministre, avant d'affirmer "l'avenir appartient à ceux qui le préparent".
Par ailleurs, le ministre de l'intérieur a jugé "indispensables" des modifications de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), bien que le premier ministre, Dominique de Villepin, ait déclaré que ce n'était pas, pour le moment, la priorité du gouvernement.
"Je ne serai jamais de ceux qui proposeront la suppression de l'ISF et je pense d'ailleurs que, quand on a plus d'argent que les autres, il est normal de payer plus d'impôts que les autres", a-t-il déclaré. "En revanche, quand cet impôt, l'ISF, justifie des délocalisations, prive le pays de richesses et empêche la création d'emplois, alors je dis: on doit pouvoir en débattre calmement et simplement", a-t-il poursuivi.
"Je ne supprimerai pas l'ISF et je ne le demanderai pas. Les modifications de l'ISF, je crois qu'elles sont indispensables, et le plus tôt sera le mieux", a ajouté le président de l'UMP.
Avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 14.10.05 | 16h55
L a polémique n'en finit pas de rebondir au sujet des restes appartenant à une petite femme, haute de 1 mètre et vieille de 18 000 ans, mise au jour sur l'île de Flores en Indonésie, en 2003, par une équipe australo-indonésienne. Un article dans la revue Nature et deux autres parus dans Science relancent un débat qui avait provoqué, lors de son annonce, en octobre 2004, un véritable séisme dans le monde de la paléoanthropologie. L'une des grandes interrogations concerne la capacité cérébrale du petit être, évaluée à 380-400 cm3, plus proche de celle du chimpanzé ou de l'australopithèque Lucy (3,2 millions d'années).
Lors de leur découverte, l'équipe de chercheurs, dirigée par Peter Brown et Mike Morwood (université de Nouvelle-Angleterre, Australie), ont estimé que le petit " Hobbit" n'était pas un être atteint de microcéphalie ou de nanisme pathologiques, mais qu'il appartenait à une nouvelle famille humaine, baptisée Homo floresiensis . Sa petite taille, estimaient-ils, était due à un nanisme insulaire, déjà connu chez les mammifères herbivores (cervidés, hippopotames, éléphants et mammouths). La nouvelle espèce humaine aurait évolué pendant des millénaires, isolée sur l'île de Flores, à partir d'un ancêtre Homo erectus arrivé sur l'île il y a 800 000 ans.
Depuis, Peter Brown et Mike Morwood, avec des chercheurs indonésiens du centre d'archéologie, ont poursuivi leurs fouilles sur l'île de Flores en creusant jusqu'à 11 mètres de profondeur. Ils ont découvert – comme ils l'indiquent dans la revue Nature du 13 octobre – des fossiles complémentaires du premier squelette dénommé LB1 (humérus droit, radius et cubitus), la mandibule d'un second individu (LB6), ainsi que des restes d'autres Hobbits, l'ensemble des ossements appartenant à neuf individus.
Les nouvelles observations confirment la petitesse d'Homo floresiensi s (environ 1 mètre de haut) et montrent qu'il chassait des animaux, tel le stégodon nain (une espèce d'éléphant), savait fabriquer des outils lithiques et connaissait le feu. Mais surtout, expliquent Peter Brown et ses coéquipiers, ces nouveaux fossiles "démontrent que LB1 n'est pas un individu aberrant ou pathologique, mais qu'il est représentatif d'une population présente sur l'île entre - 95 000 et - 12 000 ans".
Les chercheurs australiens et indonésiens reviennent néanmoins sur l'hypothèse initiale selon laquelle Homo floresiensis serait issu de Homo erectus . Car, écrivent-ils dans Nature, "les caractéristiques morphologiques des nouveaux spécimens confirment que cette population d'hominidés ne peut se référer à Homo erectus ou à Homo sapiens . La taille des dents et la morphologie faciale dictent, certes, l'inclusion de cette espèce dans le genre Homo , mais la stature et les proportions du corps sont similaires à celles des australopithèques". Au total, concluent les chercheurs, "la généalogie de Homo floresiensis demeure à ce jour incertaine" .
Daniel Lieberman, du Peabody Museum (université Harvard, Etats-Unis), dans la même édition de Nature, estime "indispensable de trouver d'autres fossiles pour supprimer toute ambiguïté concernant l'hypothèse microcéphale et dire avec certitude si les ancêtres d'Homo floresiensis ressemblaient à Homo erectus ou à autre chose".
Jean-Jacques Jaeger, professeur de paléontologie des vertébrés à l'université Montpellier-II précise, pour sa part, que la nouvelle publication de Nature "met fin à la polé mique, car l'idée de nanisme ne tient pas la route avec les nouvelles découvertes ". En revanche, le paléoanthropologue français juge "qu'il est très difficile, voire impossible , de reconstituer l'ancêtre de ces petits êtres sans fossiles intermédiaires . En cas de nanisme insulaire, précise-t-il, "la puissance de l'évolution est telle qu'elle change les caractères ancestraux. Dans l'affaire qui nous concerne, l'ancêtre peut être aus si bien un Homo erectus, qu'un pré-erectus, ou encore un Homo sapiens, car certains caractères peuvent être contraints par l'évolution, comme on le constate couramment chez des mannifères victimes de nanisme insulaire".
Cependant, la petite taille du cerveau de LB1 pose encore problème. En mars 2005, Dean Falk (département d'anthropologie de l'université d'Etat de Floride) avait établi que le cerveau d'Homo floresiensis était très proche de celui d'Homo erectus (Le Monde du 5 mars 2005) après avoir comparé les endocrânes (intérieur du crâne) d'australopithèques, de plusieurs Homo erectus , d'humains contemporains, de gorilles, de chimpanzés, d'une femme pygmée adulte et d'une personne atteinte de microcéphalie.
Mais le débat rebondit dans la revue Science du 14 octobre. Jochen Weber (département de neurochirurgie de l'hôpital Leopoldina à Schweinfurt en Allemagne) et deux autres chercheurs allemands ont observé le crâne de dix-neuf microcéphales modernes, et s'estiment "en complet désaccord avec Dean Falk , car on ne peut exclure complètement l'hypothèse de la microcéphalie". La réponse vigoureuse de Dean Falk, parue dans le même numéro de Scienc e, reproche aux scientifiques allemands d'avoir établi leurs conclusions sans avoir observé le crâne du petit Hobbit, LB1. A suivre...
Christiane Galus
Article paru dans l'édition du 15.10.05
T ous les singes, les grands singes (chimpanzés, bonobos, gorilles, orangs-outans) et les hommes partagent des caractères anatomiques et biochimiques avec un groupe de primates fossiles disparus depuis longtemps, appelés anthropoïdes. Ces primates seraient nés en Asie, il y a 55 millions d'années. Puis, ils se seraient disséminés en Afrique, réalisant cependant, au cours des siècles, des allers-retours fréquents entre les deux continents.
Une dent, vieille de 45 millions d'années et appartenant à un primate africain, Algeripithecus, a été découverte en Algérie dans les années 1990. Il était donc nécessaire de découvrir des indices plus probants.
Une équipe menée par Elwyn Simons (Duke Primate Center, Durham, Etats-Unis) a trouvé des fossiles de primates plus complets datés de 32 et 35 millions d'années dans la dépression du Fayoum, en Egypte, située à une centaine de kilomètres au sud-ouest du Caire. Cette zone contient les dépôts sédimentaires d'un ancien delta, atteignant 300 mètres de profondeur, où sont représentés des terrains de l'époque de l'éocène (–53 à –34 millions d'années) et de l'oligocène (–34 à –23,5 millions d'années). Elle est, de ce fait, extrêmement riche en fossiles de toutes sortes.
Elwyn Simons, aidé d'Erik Seiffert (université d'Oxford, en Grande-Bretagne), et des spécialistes américains et égyptiens viennent de remonter le temps en annonçant, dans la revue Science du 14 octobre, la découverte de deux minuscules primates anthropoïdes africains vieux de 37 millions d'années, dont le poids est évalué à environ 300 grammes.
Ces fossiles, dénommés Biretia fayumensis et Biretia megalopsis, trouvés sur le site de Birket Qarun, dans le Fayoum, sont représentés par des morceaux de mandibule, des dents et un morceau d'orbite. Ce qui laisse plus de latitude aux paléontologues pour étudier leurs affinités phylogénétiques et leur adaptation au milieu. Curieusement, l'un des fossiles possède une orbite très large, ce qui laisse supposer que Biretia menait une vie nocturne.
Selon Jean-Jacques Jaeger, professeur de paléontologie des vertébrés à l'université Montpellier-II, qui signe avec Laurent Marivaux (Institut des sciences de l'évolution, à Montpellier) un commentaire dans le même numéro de Science , "la morphologie dentaire de ces fossiles offre un éclairage sur les premiers moments de l'évolution des anthropoïdes africains". Les deux chercheurs estiment que la nouvelle découverte du Fayoum "ouvre la voie à une compréhension plus approfondie des relations phylogénétiques entre les premiers anthropoïdes asiatiques et africains" . Ce qui devrait permettre de mieux connaître, à terme, l'origine de nos très lointains ancêtres.
Christiane Galus
Article paru dans l'édition du 15.10.05
L A COUR de cassation a rendu un arrêt, jeudi 13 octobre, qui précise les contours du délit de "mendicité avec enfant". Depuis la promulgation de la loi pour la "sécurité intérieure" en mars 2003, le fait de maintenir un mineur de moins de 6 ans sur la voie publique "dans le but de solliciter la générosité des passants" constitue une "privation de soins" , réprimée par le code pénal. Les peines encourues peuvent aller jusqu'à 7 ans de prison et 100 000 euros d'amende.
L'affaire soumise à la haute juridiction concerne une Roumaine âgée d'une trentaine d'années, interpellée à deux reprises, en mai et en août 2003, alors qu'elle mendiait dans le quartier des Champs-Elysées à Paris, en compagnie de son fils en bas âge. Poursuivie pour cette nouvelle infraction instaurée par la loi "sécurité intérieure" , la jeune femme avait été relaxée en première instance puis en appel (Le Monde du 13 janvier). Pour les juges, la prévenue ne pouvait pas être condamnée car elle avait démontré que la santé de son enfant n'avait pas été altérée. Le parquet fit appel de cette décision.
Lors de l'audience, mercredi 12 octobre, l'avocate générale de la Cour de cassation, Dominique Commaret, avait estimé que l'arrêt de la cour d'appel devait être infirmé pour "contradiction et insuffisance de motifs" . "Le juge répressif ne saurait se satisfaire du simple constat d'une absence d'altération actuelle de la santé de l'enfant" , avait-elle notamment fait valoir. La justice doit, au contraire, "vérifier in concreto l'existence ou l'absence de danger réel et certain de compromission de la santé et physique et psychologique du jeune enfant". Une telle démarche suppose d'analyser dans le détail les "circonstances factuelles qui entourent l'exposition de l'enfant": y a-t-il un lien de filiation entre lui et celui ou celle qui l'amène à faire la manche ? Quel est l'âge du mineur ? Est-il scolarisé ? Où et depuis combien de temps sollicite-t-il les passants ? A-t-il ingéré des "psychotropes" ?
La Cour de cassation n'a pas suivi l'avis de Mme Commaret et a rejeté le pourvoi du parquet. Les motivations de la décision ne seront connues que dans quelques jours.
B. Bi.
Article paru dans l'édition du 15.10.05
S UR LES 22 000 cancers du sein découverts chez des femmes âgées de 40 à 65 ans, 650 à 1 200 (soit entre 3% et 6% d'entre eux) sont imputables au traitement hormonal substitutif de la ménopause (THS). Cela représente une incidence comprise entre 35 et 55 cas pour 100 000 utilisatrices.
Cette estimation figure dans le rapport rendu public, jeudi 13 octobre, par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Ce document évalue aussi la part des infarctus du myocarde imputable au THS (entre 3,5 et 9 cas pour 100 000 utilisatrices) et celle des accidents vasculaires cérébraux (entre 16 et 29 cas pour 100 000). Entre 1 850 000 et 2 415 000 femmes âgées de 40 à 65 ans ont recours en France au THS.
Des médecins dénoncent la "précipitation" L'Association française pour l'étude de la ménopause (AFEM), qui regroupe des médecins dont beaucoup ont été les promoteurs du traitement hormonal substitutif (THS), s'"étonne", dans un communiqué publié jeudi 13 octobre, de ce que l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) ait organisé avec "précipitation" une conférence de presse, le même jour, au cours de laquelle a été rendu public le rapport sur le THS demandé à un groupe d'épidémiologistes. L'AFEM reproche à l'Agence de ne pas avoir attendu les résultats de deux études sur des femmes françaises, dont les résultats seront présentés le 21 octobre lors d'un congrès international sur la ménopause. Selon elle, cela risque de conduire à "la délivrance d'informations contradictoires à quelques jours d'intervalle". L'AFEM y voit un "manque de considération pour les praticiens", qui n'avaient pas été informés de la tenue de cette conférence de presse. Elle tiendra elle-même une conférence de presse le 15 novembre, au cours de laquelle elle apportera "une information complète et objective". |
Les résultats de plusieurs études, en 2002 et 2003, ont fait apparaître une augmentation des risques de cancer du sein et d'événements cardio-vasculaires graves chez les femmes ayant recours à différents types de THS. L'Afssaps avait alors recommandé de restreindre ces prescriptions, en excluant "les femmes en bonne santé qui ne présentent pas de syndrome climatérique -signes gênants à la ménopause, comme les bouffées de chaleur, la sécheresse vaginale...- , ni de facteur de risque d'ostéoporose", du fait d'un "rapport bénéfice-risque défavorable" (Le Monde du 5 décembre 2003).
L'Agence a actualisé en 2004 ses recommandations. Elle réserve le THS, à la dose minimale efficace et pour la durée la plus courte possible, aux femmes ayant des manifestations cliniques de la ménopause, sans antécédent cardio-vasculaire ou de cancer du sein, avec une réévaluation annuelle de la nécessité de poursuivre le traitement.
L'Agence a mis en place, en mars 2004, un groupe de travail destiné à fournir des données sur le niveau d'exposition et de risque de la population, ainsi qu'à mesurer l'impact des recommandations. Placé sous la direction de Dominique Costagliola, une spécialiste d'épidémiologie, le groupe a travaillé à partir des "sources de données les plus représentatives de la population des femmes françaises" .
La répartition selon le type de THS prescrit montre une forte prédominance de l'association estroprogestative: 24,5% d'utilisatrices d'un THS à base d'oestrogène et de progestérone micronisée, et 58,4% pour les formes combinant oestrogène et un des autres progestatifs, contre 17,1% de femmes sous oestrogène seul. Le risque de cancer du sein est accru avec les associations estroprogestatives sauf celles à base de progestérone micronisée. Les oestrogènes seuls n'augmentent pas le risque de cancer du sein mais accroissent celui de cancer de l'utérus.
La durée médiane d'utilisation est de 8,3 ans pour les utilisatrices ayant commencé le THS avant 50 ans et de 5,4 ans pour celles ayant entamé ce traitement après 50 ans. Aucune durée d'utilisation ne met à l'abri des trois risques étudiés.
Les experts ont bâti un modèle à partir des données disponibles, en tenant compte de l'âge au début de la prise du THS et de la durée d'utilisation, et sur la base du risque relatif mis en évidence dans les différentes études. Ce modèle a permis d'estimer pour une année donnée au cours du pic de l'utilisation, de 2000 à 2002, le nombre de cas de cancers du sein, d'infarctus et d'accidents vasculaires cérébraux (AVC).
Entre 60 et 200 cas d'infarctus du myocarde sur les 3 500 survenant dans la tranche de la population féminine âgée de 40 à 65 ans, soit entre 2% et 6%, sont attribuables au THS. La proportion est de 300 à 650 cas sur les 5 000 AVC ischémiques touchant des femmes de 40 à 65 ans, soit 6,5% à 13,5%.
Ces estimations concernent des populations et non des individus. "Le nombre de cas chez les femmes exposées à un THS comprend les cas attribuables au THS et d'autres non attribuables. Ainsi, il est impossible au niveau individuel de savoir si le THS est ou non la cause de l'événement considéré" , prévient le rapport des experts.
L'inquiétude qu'ont soulevée les différentes études a conduit plus d'un quart des femmes sous THS à interrompre ce traitement depuis 2004. Le rapport précise que "les recommandations publiées en 2003 et 2004 et leur médiatisation ont été associées à une baisse d'au moins 40% des événements attribuables, voire 50% pour certains d'entre eux. Il appartient aux autorités en charge de la santé d'évaluer si cette réduction est suffisante ou si d'autres interventions sont nécessaires" , concluent les experts.
Paul Benkimoun
Article paru dans l'édition du 15.10.05
D eux journalistes du quotidien L'Equipe et trois de l'hebdomadaire Le Point , ont été mis en examen, mercredi 12 et jeudi 13 octobre, pour "recel de violation du secret de l'instruction ". A l'origine de ces décisions, une juge d'instruction de Nanterre, Katherine Cornier, cherche à identifier les sources de ces journalistes chargés par leurs journaux de l'investigation sur l'affaire Cofidis, une équipe cycliste soupçonnée de dopage.
La justice leur reproche d'avoir publié des comptes rendus d'écoutes téléphoniques et des procès verbaux d'auditions, pièces de l'enquête du juge de Nanterre Richard Pallain, sur un trafic présumé de produits dopants au sein de l'équipe Cofidis. Ouverte au lendemain de l'arrivée du Tour de France 2003, cette dernière information judiciaire a abouti à la mise en examen de neuf personnes par le juge Pallain, qui a transmis son dossier au Parquet en septembre (Le Monde du 3 octobre)
Pour sa part, Mme Kornier avait, dans un premier temps, convoqué les journalistes, qui avaient refusé de livrer leurs sources. Puis, en janvier, les locaux du Point et ceux de L'Equipe avaient été perquisitionnés.
L'ensemble de la profession a condamné les mises en examen de journalistes. "Tenter une nouvelle fois de remettre en cause ce droit -de ne pas révéler ses sources- , c'est remettre en cause le droit d'informer", estime, dans un communiqué, la Société des journalistes de L'Equipe , qui "assure de son soutien " les journalistes incriminés..
Le Forum permanent des sociétés de journalistes, qui rassemble les sociétés de journalistes de treize titres de presse, dénonce une "dérive très inquiétante ", qui "touche l'essentiel de notre métier qui est de pouvoir garantir à nos informateurs qu'ils ne seront jamais identifiés ".
"Cette situation est inacceptable et ne sera pas acceptée" , souligne de son côté la Fédération nationale de la presse française (FNPF) et du Syndicat de la presse magazine et d'information (SPMI). "L'intimidation des journalistes ira-t-elle jusqu'à leur garde à vue et à leur détention ? "
Du côté des parties, on se dit cependant satisfait de pouvoir aller devant la justice. "C'est l'occasion de réaffirmer les grands principes qui régissent la profession, notamment le respect des sources ", a souligné Claude Droussent, directeur des rédactions de L'Equipe . "Ce sera un grand débat qui devra régir toute la profession", renchérit Basil Ader, avocat du journal. La direction du Point , dit préférer " garder ses effets de manche pour les tribunaux ". " Nous allons plaider sur les principes qui concernent l'ensemble de la profession ", dit Me Renaud Le Gunéhec, avocat de l'hebdomadaire.
Et chacun de rappeler que l'article 109 du code de procédure pénale français, ainsi que l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, garantissent aux journalistes le droit de ne pas révéler leurs sources. " Le droit au secret des sources journalistiques est une des pierres angulaires de la liberté de la presse ", affirme la Cour européenne des droits de l'homme dans l'arrêt Goodwin de mars 1996, sur lequel s'appuie Me Ader. Selon lui, " les perquisitions sont contraires à la jurisprudence de la Cour européenne ".
L'arrêt Roemen et Schmidt de la Cour européenne, qui date de février 2003, souligne que " des perquisitions ayant pour objet de découvrir les sources des journalistes, même si elles restent sans résultats, constituent un acte plus grave que la sommation de divulguer ses sources faite à un journaliste ".
Le Forum des sociétés de journalistes dénonce justement " les moyens disproportionnés mis en oeuvre par la justice ", citant " une série de perquisitions menées dans les journaux concernés mais aussi au domicile de certains journalistes, après une série d'écoutes téléphoniques les visant ".
" La justice tranchera et L'Equipe se pliera à sa décision, écrit le quotidien dans son éditorial de vendredi 14 octobre. Il est toutefois souhaitable que cette affaire, peu commune, permette de réaffirmer de manière très forte et symbolique le respect de la règle absolue et intangible du secret des sources."
Un débat qui a beaucoup agité la profession cet été aux Etats-Unis, où une journaliste du New York Times , Judith Miller, avait été emprisonnée pour avoir refusé de découvrir l'identité de la personne qui, au sein de l'administration Bush, lui avait révélé le nom d'un ancien agent de la CIA. Mme Miller a finalement été autorisée par sa source à témoigner devant un grand jury.
En France, cette "affaire dans l'affaire" Cofidis pourrait trouver un prolongement législatif. Le SPMI et la FNPF interpellent une nouvelle fois le ministre de la justice, Pascal Clément, " pour que soit réexaminée sans plus attendre la législation, à seule fin de protéger réellement le secret des sources ". Les deux organisations rappellent que "la Belgique nous a récemment montré la voie en renforçant considérablement le secret des sources ".
Laurence Girard et Pascale Santi
Article paru dans l'édition du 15.10.05
D ans la liste des scandales ayant secoué la Bourse de New York au cours des dernières années, les malversations de Refco devraient figurer en bonne place. Deux mois après son introduction en Bourse, le 11 août, le courtier spécialisé dans les matières premières et marchés à terme a avoué que ses comptes étaient faux depuis des années.
Jeudi 13 octobre, les cours ont été suspendus et la société a annoncé interrompre "pour quinze jours" les activités de sa filiale de courtage en instruments financiers, Refco Capital Markets, faute de liquidités. Le groupe aura du mal à échapper à la faillite. Les révélations se succèdent depuis le début de la semaine avec la démission précipitée du PDG de Refco, Phillip Bennett, après la découverte d'un trou de 430 millions de dollars (358 millions d'euros) dans le bilan de la société.
Sur le modèle d'Enron, dont la banqueroute à la fin de l'année 2001 a été suivie d'une vague de scandales comptables sans précédent aux Etats-Unis, Refco dissimulait des dettes hors du périmètre de la société. Elles étaient la conséquence de pertes enregistrées sur les marchés lors de la crise des pays émergents en 1997. A la fin de chaque trimestre, ses créances irrécupérables étaient transférées à une entité contrôlée directement par M. Bennett qui en échange recevait un prêt d'une somme équivalente. Le fonds spéculatif, Liberty Corner, servait d'intermédiaire et de paravent.
Après la découverte du montage par le conseil d'administration de Refco, M. Bennett a remboursé immédiatement au début de la semaine les 430 millions de dollars de prêts. Il a pu le faire après avoir transféré cette somme en euros d'une banque européenne. Selon ses avocats, M. Bennett a obtenu un crédit gagé sur ses actions Refco.
M. Bennett, 57 ans, citoyen britannique, a été arrêté mardi soir sur ordre du procureur fédéral de Manhattan, Michael Garcia. Des enquêteurs avaient enregistré une conversation dans laquelle il annonçait son intention de partir en Europe dans les quarante-huit heures. Après avoir été inculpé mercredi de fraude boursière, il a été remis en liberté mais confiné dans son appartement à Manhattan sous surveillance électronique. Il a aussi été contraint de trouver six personnes pour garantir une caution de 50 millions de dollars, remettre les titres de propriété de son appartement new-yorkais et de sa maison du New Jersey et apporter directement 5 millions de dollars.
Surnommé le "finisseur" sur les marchés de matières premières, M. Bennett a pris la tête de Refco en 1998 et en a fait le premier courtier indépendant américain. Il est l'un des deux principaux actionnaires du groupe avec 34% du capital derrière le fonds d'investissement Thomas H. Lee Partners LP de Boston qui en détient environ 43%.
Depuis le début de la semaine, le cours des actions Refco s'est effondré. Introduites à 22 dollars, elles étaient montées jusqu'à 27 dollars et s'échangeaient jeudi avant la suspension, dans les transactions d'avant séance, à moins de 8 dollars. Plus de 2 milliards de dollars de capitalisation boursière sont partis en fumée. Les obligations émises par la société se traitaient, jeudi, à la moitié de leur valeur faciale. "Le fait que les titres à taux fixes s'échangent à 50 cents pour 1 dollar montre qu'il y a une chance sur deux pour que la société disparaisse", souligne l'analyste Kevin Starke de Weeden & Co.
Si faute de confiance des banques, des clients et de ses contreparties Refco fait faillite, les conséquences pourraient être sérieuses. Les clients du courtier (entreprises, banques, fonds spéculatifs) ont des positions évaluées à près de 5 milliards de dollars sur les marchés à terme de métaux, de produits agricoles ou de bons du Trésor. "Ce qui compte aujourd'hui est de savoir si on peut encore avoir confiance en eux. Si ce n'est pas le cas, tout va s'effondrer", prédit Robert Bushman, professeur de comptabilité à l'université de Caroline du Nord.
Trois ans après la série de scandales comptables qui a ébranlé le capitalisme américain, les autorités boursières et les commissaires aux comptes semblent à nouveau pris en faute. Ils ont laissé Refco être coté à Wall Street sans s'apercevoir de sa situation financière réelle.
La Securities and Exchange Commission (SEC), l'autorité des marchés, a ouvert une enquête. Plusieurs plaintes ont été déposées par des actionnaires pour diffusion de fausse information lors de l'introduction en Bourse. Des procès pourraient être aussi intentés contre les banques responsables de la mise sur le marché, Bank of America, Crédit suisse First Boston et Goldman Sachs et contre les autorités de marché et même la Bourse de New York (NYSE). Les actionnaires lésés pourraient demander des centaines de millions de dollars.
Eric Leser
Article paru dans l'édition du 15.10.05
L a pression est désormais sur les épaules d'Angela Merkel, après l'annonce rapide, par le Parti social-démocrate (SPD), des noms des ministres qu'il compte envoyer dans la future coalition gouvernementale allemande. La présidente de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), à qui reviendra la chancellerie, n'aime guère être bousculée. La voilà obligée d'accélérer la manoeuvre. Les choix de l'adversaire social-démocrate ont été plutôt bien accueillis, y compris à droite. A Mme Merkel de jouer, sous le regard circonspect de ses propres troupes. La tâche est délicate, puisqu'elle dispose d'un nombre de ministères à pourvoir inférieur à celui du SPD (cinq contre huit). Le couperet devrait tomber lundi, jour du début des négociations en vue de former le prochain gouvernement.
C'est "une équipe respectable" , a estimé le secrétaire général de la CDU, Volker Kauder, en découvrant la liste des noms présentés, jeudi, par le président du SPD, Franz Müntefering. Ce dernier, à qui revient le poste de vice-chancelier et de ministre du travail, a eu "la main heureuse" , selon l'hebdomadaire Der Spiegel , pourtant peu tendre avec le SPD au cours des derniers mois.
Les "ministrables" sociaux-démocrates ne sont pas tous connus du grand public, en particulier Frank-Walter Steinmeier, qui prendra la succession du populaire et médiatique Joschka Fischer (Verts) à la tête de la diplomatie allemande. Mais, à l'image de ce grand commis de l'Etat qui accompagne depuis quinze ans Gerhard Schröder, le chancelier sortant, ils passent pour être compétents. C'est "quelqu'un de très efficace" , a dit de M. Steinmeier un cacique de l'Union chrétienne-sociale (CSU), la petite soeur bavaroise de la CDU. Ce n'est pas le moindre des compliments de la part d'un parti dont le chef, Edmund Stoiber, briguait lui aussi le portefeuille des affaires étrangères.
Du côté du patronat, on s'est félicité de la nomination de M Müntefering au travail et de Peer Steinbrück aux finances. Celui-ci, ancien chef du Land de Rhénanie-du-Nord - Westphalie, est "un homme très compétent et capable de s'imposer" , a commenté Dieter Hundt, président de l'organisation des employeurs allemands. Il a toutefois regretté la scission du ministère de l'économie et du travail.
Selon M. Müntefering, le fait qu'il ait lui-même accepté d'entrer dans le futur gouvernement signifie que son parti prend la "grande coalition" très au sérieux. Certains journaux estimaient, vendredi, que le SPD donnait l'impression d'avoir stabilisé la situation après le départ de son champion, Gerhard Schröder, annoncé deux jours plus tôt. Celui-ci participera néanmoins aux négociations, qui débutent lundi, sur la formation du prochain gouvernement, un mois après les élections législatives qui n'avaient donné qu'un très léger avantage à la CDU/CSU.
D'ici lundi, Mme Merkel devra peaufiner la liste des ministres de son parti. Avec cinq places disponibles, sans compter son propre poste de chancelière, il lui faudra faire preuve de doigté. Respecter l'équilibre entre les régions; ne pas oublier l'est du pays; tenir compte des vieilles rivalités, des promesses faites aux uns et des critiques émises par les autres; inclure au moins une autre femme: les priorités sont multiples. Les spéculations vont bon train. La CSU, elle, sait d'ores et déjà qu'un de ses deux postes dans le prochain gouvernement sera occupé par M. Stoiber, qui quittera son fief de Munich pour prendre un ministère de l'économie et des technologies.
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 15.10.05
À 49 ans, l'homme-orchestre de Gerhard Schröder, Frank-Walter Steinmeier, sort de l'ombre pour prendre en charge la diplomatie allemande à la place du Vert Joschka Fischer. Jovial, d'une parfaite courtoisie, cet entremetteur efficace, chargé à la chancellerie de mettre en musique la politique du chancelier et de dénouer les conflits, devra maintenant s'entendre avec la chancelière Angela Merkel pour conduire la politique étrangère et européenne de la future "grande coalition".
Frank-Walter Steinmeier ne figure dans aucun des baromètres politiques de popularité publiés en Allemagne. C'est à peine si son nom est vraiment connu du grand public. Il n'a jamais eu de mandat électif, et pourtant il a été l'un des hommes essentiels des deux mandats de la coalition des sociaux-démocrates et des Verts qui a gouverné l'Allemagne pendant sept ans. Chef de la chancellerie, avec rang de secrétaire d'Etat, depuis 1999, il a sa place à la gauche de M. Schröder à la table du conseil des ministres. Rien de ce qu'a à connaître le chancelier ne lui échappe.
Contrairement à son prédécesseur, volontiers visionnaire et moins enclin à aller jusqu'au fond des dossiers, le futur ministre des affaires étrangères aime avoir les mains dans le cambouis. C'est le rôle qui a toujours été dévolu à ce juriste de formation depuis qu'il est aux côtés de Gerhard Schröder, déjà à l'époque où il n'était encore que ministre-président de Basse-Saxe.
La mise en oeuvre de l'"Agenda 2010" pour la modernisation sociale de l'Allemagne, c'est lui; le renforcement de l'autorité de la chancellerie, lors du second mandat du chancelier, sur la politique européenne, c'est encore lui. Frank-Walter Steinmeier a vu passer tous les dossiers les plus délicats. A ses attributions d'homme-orchestre s'ajoute aussi la coordination des services secrets allemands.
Dans un discours prononcé en septembre à Berlin à la Fondation pour la science et la politique, le futur ministre a longuement insisté sur les liens entre la politique extérieure et les réformes intérieures pour permettre à l'Allemagne de peser sur les évolutions en Europe et dans le monde. Nul doute que cet homme du concret s'attachera à prendre des initiatives pour relancer l'Europe, si possible avec la France. A peine le choix du SPD connu, il s'entretenait au téléphone, jeudi, avec son homologue français Philippe Douste-Blazy, pour affirmer son attachement à une relation étroite avec la France. Dans une Union européenne en prise avec le doute de ses citoyens, il lui faudra cependant, pour réussir, faire preuve de nouveaux talents de communicateur qu'on ne lui connaît pas encore.
Henri de Bresson
Article paru dans l'édition du 15.10.05
L es sourcils noirs en accent circonflexe derrière de fines lunettes, le verbe facile et un sens de l'humour parfois grinçant: Franz Müntefering est en passe de s'imposer comme le nouveau visage du Parti social-démocrate (SPD), après la décision de Gerhard Schröder de prendre ses distances avec la politique. Les Allemands avaient appris à le connaître lorsque le chancelier, en difficulté, avait confié la présidence du parti à ce fidèle lieutenant en 2004. A 65 ans, il va désormais devenir incontournable, avec sa triple casquette de président d'un des deux partis siégeant dans le nouveau gouvernement de coalition droite-gauche, de vice-chancelier et de ministre du travail.
Habile manoeuvrier et fin connaisseur des arcanes du SPD, dont il est un pur produit, M. Müntefering jouit d'une réelle popularité dans son parti. Il parle davantage la langue de la rue que M. Schröder, avec lequel il partage des origines modestes. Ce fils d'ouvrier catholique a fait ses gammes dans l'organisation du parti en Rhénanie-du-Nord-Westphalie à partir de 1966. Doté d'une formation de représentant, il a ensuite grimpé les échelons au niveau fédéral, se taillant peu à peu une réputation d'homme des coups durs. Monté de sa région de Basse-Saxe, M. Schröder a toujours pu compter sur lui. D'abord pour l'aider à mettre fin à seize ans de règne de Helmut Kohl, en 1998. Puis pour passer du baume sur les dissensions internes au SPD, où la politique menée par le nouveau chancelier a toujours suscité des remous. Après une année à la tête du ministère des transports, "Münte", comme on le surnomme outre-Rhin, est devenu secrétaire général du parti. A ce poste, il a joué les pompiers volants pour calmer les ardeurs anti-Schröder. Le SPD ne lui en a pas tenu rigueur, puisqu'il a été élu avec 95% des voix à sa présidence, en mars 2004.
En dépit de ses futures fonctions gouvernementales, l'homme à l'écharpe rouge – il ne la quitte pasl'hiver durant – briguera, en novembre, un nouveau mandat à la tête du parti. Il devrait l'obtenir sans problème, tant cette formation a besoin de panser ses plaies après la défaite électorale du 18 septembre. Parce qu'il collaborera avec la droite, M. Müntefering devra se méfier, sur sa gauche, d'une nouvelle coalition d'ex-communistes et de déçus de la social-démocratie. C'est en partie pour prévenir un départ des militants vers ce parti de gauche qu'il s'en était pris, il y a quelques mois, aux "sauterelles" capitalistes.
Antoine Jacob
Article paru dans l'édition du 15.10.05
L a scène, rapportée par l'hebdomadaire Die Zeit, a lieu lors de la campagne des élections régionales de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, en mai. Le ministre-président sortant, Peer Steinbrück, ancien ministre des finances du Land, discute avec le responsable d'une association. Il lui lance: "Vous êtes aussi responsable des finances ? C'est un job de m... J'ai déjà fait un truc dans ce genre-là..."
Propos prémonitoire ? C'est ce réformateur de l'aile droite du Parti social-démocrate (SPD) qui va succéder, au ministère des finances, à son ami de parti Hans Eichel, avec pour mission de redresser le budget de l'Allemagne. Economiste, haut fonctionnaire passé en politique, M. Steinbrück, 58 ans, a la pratique du consensus et des idées. Quand il dirigeait la Rhénanie-du-Nord-Westphalie (NRW), il s'était associé à l'actuel ministre-président chrétien-démocrate de Hesse, Roland Koch, en septembre 2003, pour proposer un compromis budgétaire visant à réduire le déficit public de 16,4 milliards d'euros en trois ans. Intitulé "Suppression de subventions dans le consensus", leur programme détaillé sur 115 pages prévoyait de réduire progressivement une batterie d'aides et de déductions, y compris sur l'exploitation du charbon. Une proposition courageuse dans sa région, où se trouve la Ruhr.
Durement touchée par le chômage, la région la plus peuplée d'Allemagne a basculé à droite lors des élections de mai, conduisant lechancelier Gerhard Schröder à provoquer les élections législatives anticipées du 18 septembre.
Peer Steinbrück, dont les talents de gestionnaire sont reconnus, était depuis en attente. Né à Hambourg, il se fait appeler "le Cabillaud" mais il est devenu rhénan, par amour, depuis vingt ans. Après avoir travaillé à la représentation de la République fédérale d'Allemagne (RFA) à Berlin-Est au début des années 1980, il a occupé des fonctions ministérielles dans le Schleswig-Holstein avant de se faire élire dans sa région d'adoption à la fin des années 1990. Il en avait pris la tête en 2002, succédant à Wolfgang Clement, appelé par le chancelier Gerhard Schröder à Berlin comme super-ministre de l'emploi.
Adrien de Tricornot
Article paru dans l'édition du 15.10.05
L a future chancelière a prévenu elle-même Jacques Chirac que Gerhard Schröder représenterait l'Allemagne au sommet informel européen organisé à Hampton Court, près de Londres, le 27 octobre, pour tenter de sortir l'Europe de l'impasse. Angela Merkel, qui ne sera officiellement investie qu'à la mi-novembre, n'a rien appris au président, mais c'était une bonne manière.
MM. Chirac et Schröder dînent donc à l'Elysée, vendredi 14 octobre, pour préparer le sommet européen. Evidemment, c'est un peu plus qu'une réunion de travail ordinaire et le chef de l'Etat devrait profiter de l'occasion, après ces années de travail commun, pour rendre hommage à son "ami". Pourtant, si le couple franco-allemand change de partenaires, Paris compte bien que sa solidité n'en soit pas affectée.
Le président connaît assez peu la future chancelière, qu'il a reçue cependant à plusieurs reprises, notamment en juillet pendant la campagne électorale. Mais il a soigneusement préparé cette transition. Mme Merkel, dont le mentor a été l'ancien chancelier Helmut Kohl, est présentée à l'Elysée comme une européenne convaincue. "Schröder est devenu européen en accédant à une responsabilité nationale, Merkel l'est de formation" , observe un proche de M. Chirac.
A quelques années de distance, MM. Chirac et Schröder ont accompli le même virage. Et ils font aujourd'hui à peu près la même analyse, après le double non français et néerlandais à la Constitution européenne. Pour le président, la vague d'euroscepticisme qui traverse à des degrés divers le continent n'est pas un non à l'Europe elle-même, mais un non à "une certaine façon de fonctionner, donnant l'impression aux citoyens qu'elle ne les protège pas assez contre la mondialisation", comme le dit l'un de ses collaborateurs.
Aux yeux de M. Chirac, les électeurs allemands n'ont pas dit autre chose en refusant une vraie victoire à Mme Merkel, qui présentait un programme très libéral. Il ne l'a cependant pas dit publiquement, pour ménager l'avenir et éviter d'envenimer certaine querelle intérieure avec Nicolas Sarkozy, qui s'affiche comme proche de la future chancelière et de ses idées.
La consigne est même tombée en conseil des ministres, mercredi 21 septembre: "Evitez les commentaires sur les élections allemandes; la situation est déjà assez compliquée comme cela et nous n'avons pas à faire d'ingérence", a fermement recommandé le président à tous les ministres, alors que de longues et complexes tractations avaient lieu outre-Rhin après un résultat électoral mitigé.
Le chef de l'Etat est resté discret, tout en discutant beaucoup: notamment avec deux observateurs avertis de l'Allemagne, Jean-Claude Juncker et Guy Verhofstadt, les premiers ministres du Luxembourg et de Belgique. Mais aussi avec son ministre des affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, qui revendique aussi une proximité avec Mme Merkel. "Nous sommes de la même famille démocrate-chrétienne", rappelle le ministre, ancien de l'UDF.
M. Chirac n'a pas trop d'inquiétudes sur les relations avec l'Allemagne en général et avec Mme Merkel en particulier: l'habitude de travail viendra, ne serait-ce qu'en raison des rencontres régulières entre les dirigeants des deux pays. Et la future chancelière, contrainte de diriger une large coalition, sera tenue par un programme de gouvernement que les proches de M. Schröder entendent bien marquer de leur empreinte.
Béatrice Gurrey
Article paru dans l'édition du 15.10.05
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En extra: Les éditos du Monde |
[*] «Longues propagandistes» parce qu'il existe aussi, dans cette rubrique, des «brèves propagandistes» reprenant surtout des dépêches de l'AFP. Ici, on trouvera pour l'essentiel des articles parus dans Le Monde, qui par le fait, sont beaucoup plus longs…