Longues propagandistes, série 12

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– Les longues –
                 
                 

    En extra: Les éditos du Monde    


Le Monde / Europe
M. Schröder plaide pour une grande coalition en Allemagne
FRANCFORT de notre correspondant

 L a formation du prochain gouvernement continue de susciter les passions en Allemagne. Dans un entretien à la chaîne de télévision ARD, dimanche 25 septembre, le chancelier Gerhard Schröder a assuré qu'il voulait "tout faire" pour qu'une "grande coalition" entre le Parti social-démocrate (SPD) et les Unions chrétienne-démocrate et chrétienne-sociale (CDU-CSU) aboutisse. "La question de la direction -de la chancellerie- sera réglée ; elle doit être réglée, mais raisonnablement, seulement quand il sera clair qu'ils -les deux camps politiques- veulent vraiment s'allier. Et cela ne marche qu'avec la devise : d'abord les questions de fond puis de personnes", a ajouté M. Schröder. Avec 225 députés contre 222 au SPD, la CDU-CSU revendique la chancellerie pour sa présidente Angela Merkel et pose ce principe comme condition à des négociations.

Une nouvelle séance de discussions CDU-CSU - SPD est prévue mercredi 28 septembre. Une décision sur des négociations concrètes n'est pas à attendre avant le lendemain de l'élection partielle de Dresde, dimanche 2 octobre, a indiqué le président du SPD, Franz Müntefering.

Plusieurs barons de la droite allemande, comme le ministre-président du Bade-Wurtemberg, Christian Wulff, et celui de Hesse, Roland Koch, ont demandé à nouveau, ce week-end, à M. Schröder de renoncer à la chancellerie. "Je ne pense absolument pas me laisser mettre sous pression par quelques politiciens de province de la CDU afin de faire on ne sait quelle concession", a répondu le chancelier.

CONTRE-PROPOSITION

A gauche, certains responsables évoquent cependant l'hypothèse d'une grande coalition sans M. Schröder. Interrogé sur ce scénario par le magazine Focus de lundi, le ministre-président de Rhénanie-Palatinat, Kurt Beck (SPD) estime qu'"en démocratie, on ne doit jamais dire "jamais"" . Le président des Verts, Reinhard Bütikofer, a été encore plus clair, déclarant à la Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung (FAS) du 25 septembre : "C'est bien à la CDU-CSU de fournir le chancelier ou la chancelière. Je considère comme exclu que Gerhard Schröder puisse faire accepter son aspiration personnelle au pouvoir."

Toutefois, la presse allemande se fait aussi l'écho d'un projet de contre-proposition prêté à M. Schröder : le "kanzler-sharing" ("chancellerie partagée"), appelé aussi coalition "à l'israélienne" en référence à l'accord passé en 1984 entre le travailliste Shimon Pérès et le conservateur Itzhak Shamir pour occuper à tour de rôle, pendant deux ans, le poste de premier ministre. "- Gerhard- Schröder doit rester chancelier les deux premières années", a expliqué le député social-démocrate Johannes Kahrs à Die Welt de samedi 24 septembre. Le journal Bild am Sonntag du 25 évoque un "premier signal" de concession adressé par M. Schröder à Mme Merkel : il lui proposerait – dans ce cadre – de partir dès le début 2007, avant que l'Allemagne ne prenne la présidence de l'Union européenne. Ces plans sont également évoqués par le Süddeutsche Zeitung de lundi, qui précise que Mme Merkel serait alors vice-chancelière jusqu'en avril 2007. Mais les responsables de droite, à l'image de M. Wulff, jugent pour l'instant ce scénario "ridicule" .

Adrien de Tricornot
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Opinions
Edito du Monde
Tortures américaines

 A lors qu'à Washington 100 000 manifestants protestaient, samedi 24 septembre, contre la guerre en Irak, l'organisation américaine de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW), publiait un rapport accablant pour l'armée américaine sur les tortures et sévices infligés aux prisonniers de la "guerre contre le terrorisme".

Ce rapport est important à double titre : il taille en pièces le mythe selon lequel les tortures perpétrées à la prison irakienne d'Abou Ghraib, révélées en avril 2004, auraient été le fait d'une unité isolée, et auraient pris fin avec la révélation du scandale ; et il permet d'entendre des témoignages non d'ex-prisonniers, toujours sujets à caution, mais de soldats américains.

Les techniques de torture et de sévices décrites par le capitaine et les deux sergents qui se sont confiés à HRW ne sont pas nouvelles : elles sont utilisées dans les prisons américaines en Afghanistan et en Irak, ainsi qu'au camp de Guantanamo Bay. Des enquêtes d'ONG et de médias occidentaux ont prouvé, depuis les révélations d'avril 2004, qu'elles étaient une pratique systématique. Ces enquêtes ont aussi révélé des cas d'exécution de prisonniers.

L'administration américaine n'a apporté aucune réponse satisfaisante au fait que son armée viole les lois de la guerre. Elle a suggéré – avec succès dans l'opinion publique américaine – que l'unité de police militaire qui s'était photographiée en train d'humilier des détenus à Abou Ghraib n'obéissait à aucun ordre de l'armée ou des services de renseignement. Alors que la soldate Lynndie England, qui apparaissait sur les photographies, comparaît depuis une semaine devant la justice militaire à Fort Hood, l'Amérique va-t-elle accepter la version officielle selon laquelle il s'agit de dérives de "soldats perdus" ?

Le mouvement pacifiste américain ne s'est pas saisi de ces questions. Son principal souci – louable –, à l'image d'une Cyndy Sheehan traumatisée par la mort de son fils en Irak, est de préserver la vie des soldats américains. Comme souvent dans les guerres, il est difficile d'écouter l'autre, l'étranger, l'"ennemi".

En autorisant son armée à perpétrer ce que le droit international qualifie de "graves violations des lois de la guerre", telles que la "torture" ou le "traitement inhumain" de prisonniers – et des "crimes de guerre" dans le cas d'exécutions –, les Etats-Unis se placent dans l'illégalité et desservent la cause qu'ils prétendent défendre – liberté, justice et démocratie – face aux "fous d'Allah". A chaque fois qu'un Afghan ou un Irakien est tué abusivement ou torturé, et justement parce que les Etats-Unis sont un pays démocratique, c'est une défaite pour l'Amérique et pour tous ceux qui défendent les valeurs et la morale qu'elle prétend incarner.

Plus pragmatiquement, l'usage de la torture est une chance en moins, pour Washington, de gagner ses guerres, car pour chaque prisonnier martyrisé, pour chaque image d'Abou Ghraib ou de Guantanamo, dix combattants se lèvent contre les Etats-Unis.

Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Société
MICHEL JOSSERAND, ancien président de Thales Engineering and Consulting (THEC)
"J'estime que Thales doit verser en commissions illégales entre 1 % et 2 % de son chiffre d'affaires"

 Q uelles pratiques avez-vous découvertes chez Thales ?
Pour bien comprendre, il faut remonter à mai 2001, lorsque j'ai été nommé PDG de Thales Engineering and Consulting (THEC). Il y avait un problème lié au fait que cette filiale versait beaucoup de commissions occultes. Elle fonctionnait de manière autonome et ne prenait pas assez de précautions, notamment à l'export, pour verser des fonds. Donc le groupe m'a demandé de remettre de l'ordre afin que THEC rentre dans le rang et applique ce qu'on appelle chez Thales le "code d'éthique".

Le groupe oppose un "démenti formel"

Le groupe Thales avait opposé "un démenti formel aux accusations de corruption française et internationale proférées à son égard par un ancien responsable de THEC (Thales Engineering & Consulting), filiale de Thales" , dans une déclaration rendue publique vendredi 23 septembre, après que Le Figaro eut publié, le même jour, un article consacré à l'affaire. La direction de la communication de Thales avait "souligné que ces accusations étaient le fait d'un ancien responsable de cette filiale, licencié du groupe pour avoir commis des irrégularités dans le cadre d'un contrat pour la réalisation du tramway de Nice" . "Le groupe a de lui-même porté plainte pour corruption dans cette affaire, avait-elle ajouté. Thales, devant la gravité du préjudice, se réserve la possibilité d'engager toute procédure en justice à l'encontre de toute mise en cause diffamatoire." Contacté lundi par Le Monde , Christophe Robin, porte-parole du groupe, a déclaré que Thales "engagerait toute action pour mise en cause diffamatoire" , dès qu'il prendrait connaissance des propos de M. Josserand.

C'est-à-dire ?
C'est l'hypocrisie poussée à son maximum. Quand on lit ce "code" , on a l'impression que Thales est propre. En fait, cela signifie faire passer toutes les commissions occultes par Thales International, qu'il s'agisse de marchés en France ou à l'étranger. Appliquer le "code d'éthique", c'est s'adapter à la convention de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) qui interdit, depuis 2000, de verser des commissions. Or il y a chez Thales un expert juridique capable de contourner la loi. Il a mis au point tout un mécanisme dans ce but.

De qui s'agit-il ?
D'un ancien magistrat, qui a fait des audits dans de nombreux pays, afin de tester la robustesse du système par rapport à d'éventuelles enquêtes policières ou judiciaires. C'est lui qui a mis au point ce "code" qui formalise le versement des commissions. Cela dit, Thales n'a fait que s'inspirer des pratiques des grandes entreprises américaines.

Quel est l'avantage du système ?
Il permet de n'avoir qu'un seul canal pour organiser les versements occultes. Les filiales n'ont plus le droit de monter leurs propres réseaux. Il n'y a plus que quelques personnes qui trempent dans le système : les responsables de Thales International et, bien sûr, la direction du groupe.

Qui serait au courant du système chez Thales ?
Rien que pour l'affaire du tramway de Nice dans laquelle je suis impliqué, sept membres du comité de direction étaient informés. La moitié du comité de direction est soit à l'origine du système, soit l'applique. Mais tout est suffisamment compartimenté pour que, en cas de problème, ce soit l'étage en dessous, quelqu'un comme moi, qui serve de fusible. Le comité et le président du groupe sont complètement "blancs". Ce montage est très professionnel. C'est ce qui va rendre le travail de la police très délicat. Pour remonter jusqu'au sommet de Thales, ça va être très compliqué.

L'embargo vers l'Irak aurait été contourné

Michel Josserand a évoqué, devant les enquêteurs de la division nationale d'investigations financières, le programme "Pétrole contre nourriture" qui avait desserré l'embargo de l'ONU contre l'Irak, entre 1996 et 2003. " Je sais qu'en Irak , a-t-il indiqué au Monde, Thales a contourné le programme "Pétrole contre nourriture", en livrant des munitions chimiques au gouvernement de Saddam Hussein." L'ancien PDG de Thales Engeneering a dit aux policiers que cette société avait participé à la construction d'une usine officiellement destinée à fabriquer du lait en poudre pour les enfants irakiens. Selon lui, cette usine aurait été vouée à la confection d'armes chimiques pour le compte du régime baasiste. Ces faits se seraient produits avant l'arrivée de M. Josserand chez THEC, en 2001. En avril 2003, l'hebdomadaire britannique Sunday Times avait déjà souligné le rôle des sociétés d'armement Dassault et l'ex-Thomson-CSF, devenue Thales, impliquées dans des ventes de matériel militaire à l'Irak, en violation de l'embargo onusien. Les déclarations de M. Josserand pourraient nourrir l'enquête du juge d'instruction Philippe Courroye, qui cherche à savoir si onze personnalités françaises auraient pu bénéficier des largesses du régime irakien.

Comment s'organise concrètement le système ?
Par l'intermédiaire de sous-traitants basés à l'étranger. En multipliant les intermédiaires, on ne peut remonter jusqu'à Thales.

Ce sont des sociétés-écrans ?
Non, pas du tout. Elles ont une consistance juridique, une véritable activité. Disons qu'elles sont "écrans" dans le sens où elles offrent une protection à Thales, mais elles sont bien réelles. L'idéal est de passer par une société industrielle. Par exemple des entreprises de BTP du Moyen-Orient que Thales va utiliser dans des contrats n'ayant rien à voir avec le BTP. On surfacture de 10 % ou 15 % tel ou tel bâtiment et le bénéfice dégagé sera reversé par l'entreprise en question aux destinataires des commissions. C'est imparable. Qui saura que Thales a trop payé ? Au pire, on répondra : "Ben oui, on s'est fait avoir, pas de chance..."  En général, on demande aux entreprises choisies de mettre en place à leur tour deux ou trois autres intermédiaires afin de brouiller encore plus les pistes.

C'était le cas à Nice ?
Oui, c'est un bon exemple. THEC est passé par des sociétés marocaines, camerounaises et libanaises afin de "sortir" les fonds destinés aux pots-de-vin.

Le versement de commissions était systématique chez Thales ?
Pas sur tous les marchés. Mais c'est une pratique très répandue. Au total, j'estime que Thales doit verser en commissions illégales entre 1 % et 2 % de son chiffre d'affaires global -10,3 milliards d'euros en 2004- . Thales International verse les montants les plus importants. Pour les petites sommes, de l'ordre de 50 000 euros, les filiales peuvent payer.

Quels sont les critères de Thales pour verser ou non des pots-de-vin ?
Il y a des endroits où c'est inévitable, comme en Afrique, en Corée, en Grèce, en Italie... En France, cela dépend des intérêts politiques locaux ou nationaux. Mais dans tous les cas, le système est le même. Si l'on peut passer par l'étranger, c'est mieux. En fait, il n'y a guère que dans certains pays européens, en Amérique du Nord, en Australie et en Nouvelle-Zélande où il est possible d'avoir des marchés sans payer.

Des décideurs politiques se font-ils corrompre ?
Ce qui est certain, c'est que sur les très grosses affaires, le politique est toujours impliqué. En tout cas à l'étranger. En France, je soupçonne que sur la masse des commissions versées, il a pu y avoir du financement politique occulte, mais je n'ai pas de preuves.

Le groupe avait-il le choix ?
Pas vraiment. Souvent, il est même victime de racket. En Russie, dans une affaire d'aide au développement, on nous a menacés d'une importante hausse de TVA. Au Cameroun, pour un marché de transports, il y a eu un redressement fiscal parce qu'on ne payait pas assez.

Vous avez dénoncé des malversations commises à l'occasion des Jeux olympiques d'Athènes...
THEC concourait pour le marché de la sécurité des Jeux olympiques. Nous n'avons pas eu le contrat. Mais le canal mis en place nous a permis de gagner en 2003 celui des frégates. Pour ce faire, on a versé des fonds à un membre du gouvernement grec.

Et à Bordeaux ?
Sur le marché du tramway, il y a eu des irrégularités avec des employés de la mairie que j'ai dénoncées aux policiers.

Il y aurait également eu des malversations dans le marché de l'hôpital de Tours ?
Sur les marchés des hôpitaux, il y a systématiquement des ententes illicites. Le politique a souvent intérêt à ce que des entreprises locales gagnent. Alors, lorsque l'on gagne l'appel d'offres, on nous demande de favoriser telle ou telle entreprise. En région parisienne, il y a de telles ententes, notamment dans les Hauts-de-Seine ou l'Essonne.

Vous avez également évoqué, devant les policiers, le cas de l'île de la Réunion...
Oui. On a d'abord perdu le marché de construction d'une raffinerie de sucre, car on n'a pas versé assez de commissions. Le même circuit a été utilisé pour le train-tramway. Une affaire gagnée après mon licenciement. Mes équipes m'ont certifié qu'il y avait eu des financements politiques.

Vous avez aussi évoqué l'affaire "Pétrole contre nourriture"...
Oui, je sais qu'en Irak, Thales a contourné le programme "Pétrole contre nourriture" en livrant des munitions au gouvernement de Saddam Hussein.

Thales aurait par ailleurs profité d'une fraude aux fonds européens...
Pour les financements européens, c'est un simple travail de surfacturation. Toutes les filiales avaient ces pratiques. Un transfert de dépenses d'un projet à un autre, au préjudice de la Commission européenne.

Que savez-vous du colossal marché Miksa de fourniture d'équipements de surveillance, toujours en négociation avec l'Arabie saoudite ?
Pour Miksa, les montages et les intermédiaires dénoncés dans une affaire précédente, dite "Sawari 2", ont été reconduits. Dans le projet Miksa, THEC devait être l'un des fournisseurs. Il y avait une partie construction, réalisée par Thales et Vinci : postes-frontière, adaptations de bases aériennes. Dans un pays comme l'Arabie saoudite, il n'est pas possible de faire du business autrement. Je n'ai pas entendu parler de rétrocommissions, mais je n'étais pas assez proche du dossier. Je sais simplement que Thales était proche des cabinets de la place Beauvau et du ministère de la défense.

Vous êtes vous-même accusé de "corruption" dans l'affaire du tramway de Nice...
L'affaire de Nice n'est qu'anecdotique par rapport aux pratiques du groupe. Thales a choisi de saisir la justice parce que ce dossier me mettait en cause alors que je n'avais aucune preuve écrite contre le groupe. C'est pour cela qu'ils ont pris le risque de me dénoncer. Le but était de me décrédibiliser afin qu'EADS, mon employeur actuel, me renvoie.

Comment a réagi EADS ?
Ils m'ont soutenu. Je suis toujours employé d'EADS alors que, franchement, après mon passage en prison, je pensais perdre mon poste. En revanche, j'ai dû démissionner de la présidence de la filiale Défense-France. EADS m'a demandé de quitter la France en m'expliquant que c'était trop dangereux pour moi.

Vous êtes au coeur de gros enjeux...
J'en suis conscient. Je sais que je peux faire perdre plusieurs centaines de millions d'euros, voire même plus, aux actionnaires de Thales. Pour le groupe, je suis l'homme qui en savait trop.

Pourquoi avoir évoqué certains dossiers et pas d'autres. Avez-vous fait un tri ?
Non, ce sont les policiers qui, en perquisition, sont tombés sur un très grand nombre de documents – d'"éléments de preuves" , comme ils disent.

Que contiennent ces documents ?
Ils concernent à peu près une centaine de marchés entachés de malversations. On y trouve la description du marché, le numéro de l'affaire, la personne qui s'est occupée du dossier chez nous, le montant de la commission à payer, le nom de l'intermédiaire. Il y a une liste de chiffres, de montants... Ils éclairent le mécanisme qui a été utilisé pour le versement des commissions occultes. Ainsi, pour prendre un exemple, ils ont trouvé des documents sur un marché en Asie, et dedans, il y a toutes les preuves.

Pourquoi aviez-vous ces documents ?
Au fur et à mesure, ma hiérarchie m'ordonnait de détruire les preuves. je me demandais pourquoi. Je me suis dit que ma meilleure protection, c'était de les garder. Il y a une telle proximité entre Thales et les milieux de la défense nationale... Un jour, chez Thales, on m'a même proposé de placer des documents compromettants pour piéger quelqu'un, moyennant 20 000 francs. J'ai refusé.

Propos recueillis par Gérard Davet et Fabrice Lhomme
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Société
Un ex-dirigeant dénonce un système de corruption chez Thales

 C orruption, ententes illicites, menaces physiques, représailles judiciaires... Telles seraient les pratiques en vigueur chez Thales, le géant français de l'électronique et de la défense – 10,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires et plus de 55 000 employés dans le monde.

Ces graves accusations émanent d'un ancien haut dirigeant du groupe, Michel Josserand, et sont jugées "crédibles" par les policiers et les magistrats qui en ont eu connaissance. Les enquêteurs s'attachent maintenant à vérifier la réalité des faits dénoncés. Dans l'entretien qu'il a accordé au Monde, M. Josserand, ancien PDG de Thales Engineering and Consulting (THEC), licencié par Thales en janvier 2004 – et passé depuis à "l'ennemi", EADS –, reprend l'essentiel des déclarations qu'il a faites à la justice et à la police.

L'affaire commence à la fin du mois de mai, à Nice. Michel Josserand est alors incarcéré depuis plus d'un mois et demi. Il est mis en examen pour "corruption" et "abus de biens sociaux" en sa qualité d'ancien PDG de THEC, une filiale du groupe Thales à la tête de laquelle il avait été nommé quatre ans auparavant. Le juge niçois Christian Guéry, saisi d'une plainte déposée par le groupe lui-même, enquête sur le trucage du marché du tramway de Nice, dont THEC a obtenu la maîtrise d'ouvrage en juillet 2002. L'enquête, qui a provoqué la mise en examen d'une dizaine de personnes – dont un conseiller municipal –, est accablante pour les dirigeants de THEC, soupçonnés d'avoir "acheté" le marché.

Lorsqu'il apprend, courant mai, que les policiers ont saisi des documents compromettants qu'il avait mis à l'abri dans un coffre, Michel Josserand décide de parler. Selon lui, l'affaire du tramway de Nice n'est qu'un petit exemple des pratiques en vigueur chez le géant de l'électronique de défense. Le juge Guéry n'étant saisi que des faits relatifs au tramway, c'est le procureur adjoint de Nice, Gilles Accomando, qui va recueillir ses confidences, au cours de quatre auditions marathon.

Les révélations de M. Josserand ont provoqué l'ouverture d'une enquête préliminaire par le parquet de Paris, qui a confié le dossier à la division nationale des investigations financières (Le Monde du 15 septembre). Ces dernières semaines, M. Josserand a précisé, devant les policiers, au cours de plusieurs auditions, ses accusations. Il a évoqué une centaine de marchés, en France et à l'étranger, qui auraient été obtenus dans l'illégalité. M. Josserand a évoqué, pêle-mêle, les marchés des tramways de Bordeaux et de Saint-Denis de la Réunion, ceux des hôpitaux de Tours et de Papeete, des contrats en Grèce, en Argentine et en Asie. Tous auraient donné lieu au versement de pots de vin.

M. Josserand, qui a aussi dénoncé une fraude aux fonds européens, un contrat suspect passé avec la direction générale de l'armement (DGA) et des malversations dans le cadre de programmes d'aide au développement au Cambodge et au Togo, affirme également que Thales a contourné l'embargo onusien pour livrer du matériel militaire à Saddam Hussein. Le groupe, via sa filiale THEC, aurait permis au régime irakien de s'approvisionner en armes chimiques à la fin des années 1990.

"UNE MANIPULATION"

M. Josserand, qui dit aujourd'hui craindre pour sa vie, affirme aussi avoir eu à connaître des dossiers encore plus sensibles. Il a notamment évoqué, devant la police judiciaire, le marché "Miksa" de surveillance des frontières de l'Arabie saoudite.

Thales s'active depuis près de quinze ans pour décrocher ce faramineux contrat évalué à 7 milliards d'euros. De fortes tensions politiques sont apparues en arrière-plan des négociations menées afin de faire aboutir le projet. L'Elysée était ainsi intervenu brutalement, en décembre 2003, pour écarter le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, et ses conseillers des pourparlers en cours avec son homologue de Riyad. L'entourage de M. Chirac avait soupçonné, derrière le contrat saoudien, l'existence d'un réseau destiné à recueillir d'importantes commissions (Le Monde du 15 avril 2004).

Pour l'avocat de M. Josserand, Me François Lastelle, son client "savait beaucoup trop de choses" . "C'est pour cela que l'on a voulu l'écarter de Thales . On a sorti un dossier contre lui, celui du tramway, pour le faire tomber. Je suis aujourd'hui convaincu qu'il s'agit d'une manipulation, et l'enquête le prouvera" , estime l'avocat.

La plupart des faits dénoncés par M. Josserand auraient été commis en violation d'une loi entrée en vigueur en juillet 2000, qui transpose en droit français deux conventions, l'une européenne, signée à Bruxelles le 26 mai 1997, l'autre signée par les Etats membres de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), à Paris, le 17 décembre de la même année. Ces deux textes visent à sanctionner la corruption de fonctionnaires de l'Union européenne ou d'Etats membres de l'UE, dans le premier cas ; celle d'"agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales", dans le second cas.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Société
La chute d'un cadre brillant dénoncé par sa hiérarchie

 C entralien, 48 ans, une carrière rectiligne et prometteuse... En avril, Michel Josserand, directeur de la branche télécommunications professionnelles d'EADS, s'apprête à boucler l'acquisition de l'activité PMR (Professional Mobile Radio) de Nokia. Ses patrons lui proposent une nomination à la tête d'EADS-défense France. La promotion est d'importance, d'autant que M. Josserand n'a rejoint le groupe franco-allemand qu'en décembre 2004.

Mais propulser un ex-dirigeant de Thales à un poste de prestige chez EADS, sur fond de rumeurs de rachats et de guerre de tranchées entre les deux sociétés, c'est déclencher les grandes manoeuvres. Michel Josserand en paie-t-il aujourd'hui le prix ? C'est en tout cas sa version de l'affaire.

Il faut remonter au mois d'avril 2001 pour mieux comprendre le mécanisme infernal qui va précipiter sa perte. A cette époque, après avoir, pendant trois ans, géré les ventes internationales de Thales-communications, il prend les rênes de THEC (Thales Engineering and Consulting). "Mon prédécesseur à THEC était empêtré dans l'affaire des frégates de Taïwan, se souvient-il. On lui a demandé de quitter précipitamment le groupe, et j'ai été nommé en toute urgence." THEC pèse 100 millions d'euros de chiffre d'affaires et emploie 600 personnes. Cette société est spécialisée dans cinq domaines : le bâtiment, le transport, l'industrie, l'aide au développement et le conseil.

"On m'a dit qu'il fallait que je redresse les comptes , se rappelle M. Josserand, car la boutique perdait de l'argent." A le croire, on lui donne aussi un second objectif : rationaliser le versement des pots-de-vins versés pour décrocher des contrats. M. Josserand établit une liste d'une centaine d'opérations ayant donné lieu à des malversations. Désormais, il faut faire passer tous ces versements par la maison mère, Thales International, destinée à servir de "maillon protecteur" . Plus question de laisser une autonomie aux filiales. "Quand j'ai terminé mon travail, assure M. Josserand, j'ai envoyé un courrier à ma direction, l'informant que tout était propre et que la société était prête pour un audit, à partir d'octobre 2003. Ensuite, en raison d'un conflit avec mes supérieurs, j'ai perdu mes fonctions en novembre 2003, et été licencié en janvier 2004."

L'enchaînement est brutal. Au sein de la société, personne ne se risque à le défendre. "J'étais chez Thales l'un des rares exemples de personnes parties de la base pour arriver proche du sommet. Je ne faisais partie d'aucun des clans qui dirigent le groupe. Je ne suis ni énarque ni franc-maçon. Je n'étais soutenu par personne..." Dès lors, Thales et Michel Josserand se livrent une lutte à couteaux tirés. L'ex-dirigeant assigne le groupe aux prud'hommes. Puis M. Josserand décide de rejoindre EADS. Thales aurait alors, selon lui, décidé de le "couler".

"J'ai rejoint EADS le 1er décembre 2004 et Thales a déclenché les hostilités début janvier 2005. C'est à ce moment-là qu'ils ont parlé aux commissaires aux comptes de malversations sur le marché niçois. Ensuite, j'ai eu une promotion imprévue, en étant nommé à un poste où j'aurais pu m'occuper du rachat de... Thales ! Quelques semaines plus tard, Thales déposait plainte contre moi à Nice. "

Selon M. Josserand, dès sa nomination à la tête d'EADS-défense France, l'attitude de Thales s'est durcie. "J'ai été menacé de représailles physiques par l'un des membres du comité de direction de Thales. Et puis on m'a fait comprendre qu'il y aurait des suites judiciaires. C'était un chantage à la démission. J'ai hésité pendant deux ou trois jours. J'avais toujours chez moi les documents, j'ai pensé qu'ils bluffaient..." Thales porte plainte contre lui, en mars 2005, déclenchant l'enquête sur le tramway de Nice.

"JE CRAINS POUR MA VIE"

"Ils avaient trouvé la bonne affaire, dans laquelle je n'avais aucune preuve écrite contre eux. Cela permettait de me décrédibiliser auprès de la justice et d'EADS. J'apparais alors comme un coupable, un pourri..." Il est accusé d'avoir versé des commissions lors de la passation du marché d'offres du tramway de la ville de Nice. Il effectue deux mois de détention provisoire. Son nom dans les journaux, accolé au mot "corruption", les voisins qui se détournent...

Poursuivi pour "corruption" et "recel d'abus de biens sociaux" , Michel Josserand assure que "la justice a pu établir que je n'étais pas à l'origine de la corruption, car cela avait été décidé avant mon arrivée chez THEC. Je ne suis pas blanchi pour autant. Mais je ne faisais qu'obéir aux ordres" .

M. Josserand décide de se confier, en mai, à un magistrat niçois. En perquisition, les policiers viennent de saisir des documents sensibles qu'il avait conservés : la liste d'une centaine d'opérations suspectes.

Aujourd'hui, il passe son temps entre l'Allemagne, où il s'occupe de la réorganisation d'EADS à Munich, et Nanterre, où il est interrogé par les policiers de la division nationale des investigations financières (DNIF). Il dit ne pas comprendre. "Thales, pour prendre de tels risques, doit penser que je sais des choses graves. Les pièces que j'ai fournies à la police, c'est la partie émergée de l'iceberg. J'ai dû me trouver au mauvais endroit, au mauvais moment." Et puis, il dit avoir peur. "Certains pensent sans doute, à tort, que je n'ai pas tout dit à la police." On lui a proposé de prendre un garde du corps, il a refusé. "Dans la scène politique française, il y a des enjeux qui se croisent, des conflits d'intérêts, au détour des affaires. Oui, je crains pour ma vie."

Gérard Davt et Fabrice Lhomme
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / France
Même plafonnées, les niches fiscales continuent à se multiplier

 E n décidant de plafonner les réductions d'impôt dont bénéficient certains contribuables, à 8 000 euros plus 750 euros par personne à charge, dans le cadre de la réforme de l'impôt sur le revenu, le gouvernement pensait trouver un moyen de lutter contre ces niches fiscales. Celles-là même que bon nombre de ses prédécesseurs ont renoncé à supprimer. Il y a dix ans, Alain Juppé, alors premier ministre, avait dû faire machine arrière devant l'hostilité générale.

Pour Thierry Breton, le ministre de l'économie, le plafonnement devait permettre de limiter certains excès auxquels se livrent certains contribuables qui, disposant de moyens et étant bien conseillés, cumulent les exonérations fiscales en tous genres. Quelque 10 000 foyers fiscaux seraient ainsi concernés.

A peine annoncée, cette mesure semble avoir du mal à être mise en application. Et fait déjà l'objet d'entorses dans son application. Ainsi, les investissements réalisés dans les DOM-TOM, qui ouvrent le droit à des réductions d'impôt, ne devraient pas être soumis au plafonnement. D'autres dispositifs pourraient subir le même sort.

Prudemment, Jean François Copé, le ministre délégué au budget, a récemment indiqué que la liste des niches fiscales concernées par le mécanisme de plafonnement "sera connue, publique, elle sera amendable notamment par les parlementaires" . Ces derniers devront résister aux pressions exercées par les professions qui voient d'un mauvais oeil le plafonnement d'avantages dont ils bénéficient plus ou moins directement. Les promoteurs de fonds communs de placements en innovation (FCPI) regrettent ainsi être visés par cette mesure. Et font déjà valoir que les ressources qu'ils collectent permettent de créer des emplois.

En privé, les parlementaires de la majorité jugent que le gouvernement a mal pris le problème. Ils estiment qu'il faut mesurer l'efficacité de chaque dispositif fiscal dérogatoire et le faire disparaître, le cas échéant, s'il n'apporte rien à la collectivité. Pis encore, certains d'entre eux font remarquer qu'au lieu de plafonner les avantages fiscaux, le gouvernement serait bien inspiré de ne pas en créer de nouveaux. Ils se sont "amusés" à dresser la liste des dispositifs dérogatoires qui ont été créés ou étendus lors de la dernière législature.

En 2002, le gouvernement s'est montré raisonnable dans ce domaine puisque, selon le recensement fait par ces parlementaires, seules deux mesures ont été prises : l'élévation du plafond annuel des dépenses éligibles à la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile et la reconduction du crédit d'impôt pour les dépenses de gros équipement dans l'habitation principale. Cependant, dès 2003, il s'est montré beaucoup plus prolifique avec pas moins de six nouveaux dispositifs fiscaux dérogatoires. Ce score a été quasiment atteint en 2004 avec cinq nouvelles mesures.

L'année 2005 aurait pu marquer une inflexion dans l'imagination créatrice du gouvernement dans le domaine de l'exonération fiscale. Las, le premier ministre lui même vient, en moins d'un mois, d'annoncer presque une demi-douzaine de mesures de ce type. Elles concernent, pêle-mêle, la voiture propre, les chaudières à condensation, les matériaux isolants, les prêts des grands parents à leurs petits enfants ou les gardes d'enfant...

Joël Morio
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Entreprises
Les employés de Tréofan préfèrent être licenciés que vendus
MANTES-LA-VILLE (Yvelines) de notre correspondant

 D es salariés qui demandent leur licenciement : l'histoire a de quoi surprendre. C'est pourtant le cas à Mantes-la-Ville, où depuis deux semaines les 160 salariés de Tréofan, un fabricant de film d'emballage, sont en grève et occupent leur usine pour obtenir des indemnités de licenciement convenables.

"Depuis des mois, nous entendions des rumeurs sur une reprise possible de l'usine par Sodefilm. Et nous n'en voulons pas" , explique Jean-Paul Nivaggioli, élu CFDT et secrétaire du comité d'entreprise. Installé au Mans, le fabricant d'emballage Sodefilm n'a, à leurs yeux, pas la surface financière nécessaire à une reprise. "On ne voit pas comment une boîte de 25 salariés peut en reprendre une autre de 160 , résume le responsable syndical. Demander à être licencié, cela peut paraître fou pour un délégué syndical, mais c'est la décision de tous. Une reprise par Sodefilm aurait de toute façon signifié une fermeture à terme. Là, nous pouvons espérer des indemnités."

L'histoire leur a appris la prudence. Dernier vestige de l'ancienne Cellophane, fermée en 1984, l'entreprise fabrique du film d'emballage du plus simple au multicouche, plus complexe. Cédé au groupe américain Celanese, après la fusion entre Hoechst et Rhône-Poulenc, puis revendu à un groupe israélien, Dor, Tréofan est finalement tombé dans l'escarcelle de la banque américaine Goldman Sachs.

RAPATRIEMENT EN ALLEMAGNE

Aujourd'hui, Tréofan se présente comme l'un des leaders mondiaux de la fabrication de film d'emballage. Ce groupe revendique une production annuelle de 280 000 tonnes, par onze sites sur quatre continents. L'usine de Mantes-la-Ville produit trois types de films : un polypropylène biextrudé, un classique dont la matière première est un dérivé du pétrole ; un multicouche dit film "étiquettes" ; et un nouveau produit, le "biophane", fabriqué, lui, à partir d'amidon de maïs, totalement biodégradable et transformable en compost. Dans la nature, il disparaît en quarante-cinq jours, ne laissant que des particules de dioxyde de carbone et de l'eau. Un avantage séduisant dans un marché sensible aux arguments écologiques.

Or l'usine de Mantes-la-Ville est la seule en Europe à fabriquer du multicouche et du biophane, deux qualités que Tréofan voudrait rapatrier en Allemagne, où se trouve son siège. Les raisons en restent mystérieuses. Peter Briggs, le directeur exécutif de Tréofan, qui refuse tout contact avec la presse, évoque simplement dans un communiqué "un processus de restructuration" et confirme "des discussions avec des repreneurs potentiels" .

"Mais les Allemands ne sont pas capables de sortir ces films, ils ont encore besoin de plusieurs mois" , affirme M. Nivaggioli. Or la demande est là. Un atout pour les grévistes, qui ont fait appel à un cabinet d'avocats pour se faire entendre. Des négociations ont commencé entre les juristes des deux parties et devaient se poursuivre lundi. S'ils ont bon espoir d'obtenir des indemnités, les salariés ne se font pas d'illusions. "Si nous obtenons un accord, nous reprendrons le travail, mais on sait qu'on en aura pour six mois au plus."

Patrick Wassef
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Médias
Le Parlement européen s'interroge sur les rapports entre blogs et médias
BRUXELLES de notre bureau européen

 L es médias traditionnels sont-ils menacés par les pages personnelles mises en ligne, les blogs, qui se développent sur la Toile à une vitesse vertigineuse ? Le Parlement européen a invité des journalistes à débattre de cette question à l'occasion du lancement de son nouveau site (www.europarl.eu.int).

Guido Baumhauer, rédacteur en chef à la radio allemande Deutsche Welle, a rappelé qu'"il existe 31 millions de blogs sur Internet et qu'il s'en crée 80 000 par jour" . Beaucoup d'auteurs les ont lancés dans le but de compléter ou de contredire les informations de la presse traditionnelle, qu'elle soit écrite, audiovisuelle ou même, désormais, électronique.

L'eurodéputé travailliste Richard Corbett a expliqué qu'il a créé son blog, en 2003, parce qu'il ne voulait plus que ses propos "soient déformés" ou simplement "triés et filtrés" par une presse "eurosceptique". "Quand les gens surfent sur Internet, ils trouvent au moins quelque chose de proeuropéen !" , a-t-il ajouté. Des journalistes présents ont admis qu'ils se sont parfois servis des blogs pour s'informer, "notamment pendant le tsunami, où l'on ne disposait pas d'informations de la part des autorités thaïlandaises" , a indiqué une Finlandaise.

Adrian White, le secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes, a estimé que "les sites Internet des organes de presse traditionnels tels que la BBC ou CNN seront toujours sollicités, parce que les gens veulent avoir une information fiable et crédible" , ce qui n'est pas le cas des blogs, a-t-il précisé, beaucoup mélangeant information et publicité ou n'indiquant pas l'origine de leurs informations.

PAS DE CADRE ÉTHIQUE

Le problème devient délicat car nombre de journalistes sont eux-mêmes devenus des blogueurs : ils éditent des informations qui ne paraissent pas dans leur organe de presse, faute de place. Menacent-ils alors celui-ci ? M. White répond par la négative, à condition que ces informations complémentaires aient le même sérieux que les autres. "Le problème des blogs, c'est qu'ils n'ont pas pour l'instant de cadre éthique" , a-t-il observé. Sa consœur, Karlin Lillington, de l'Irish Times, a constaté que les journalistes sont soumis à des "règles déontologiques strictes, en matière de diffamation, notamment, alors que les blogueurs peuvent se comporter comme au Far West".

Ces journalistes se sont opposés aux propos de Thomas N. Burg, consultant spécialisé dans le développement de logiciels, qui considère les blogs comme de simples "vecteurs de conversation libres de toute contrainte" . Le Parlement européen a réclamé l'instauration d'un droit de réponse sur les médias électroniques, mercredi 7 septembre. Il l'a fait à la demande de l'UDF Marielle de Sarnez, qui déplore que "rien ne soit prévu quand vous êtes victime d'une diffamation ou d'une atteinte à votre vie privée".

Rafaële Rivais
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Horizons
Enquête
A bas la "grossophobie" !
Le centre pédiatrique et de rééducation de Bullion (Yvelines) accueille des enfants et adolescents obèses. | SIPA PRESS/FLORENCE DURAND
SIPA PRESS/FLORENCE DURAND
Le centre pédiatrique et de rééducation de Bullion (Yvelines) accueille des enfants et adolescents obèses.

 E ncore quatre petits kilos à perdre et Laurent Ournac aura retrouvé son poids "normal" : 117 kg. Pour le héros cathodique de l'été, le plus dur est fait. "Je suis redescendu à 121 kg, alors que j'ai été à 135 pendant le tournage", se félicite-t-il, dans une brasserie chic de Paris. Laurent Ournac est ce comédien de 25 ans qui a incarné le rôle-titre de "Mon incroyable fiancé", une émission de télé-réalité sur TF1. Diffusée en deuxième partie de soirée, cette adaptation d'une émission américaine a atteint des taux d'audience inespérés : 6 millions de téléspectateurs en moyenne.

Mi-jeu, mi-fiction, le "divertissement" reposait sur un scénario a priori saugrenu : Adeline, une jeune femme svelte de 24 ans, devait faire accepter par ses proches son "faux" fiancé en faisant croire qu'elle voulait se marier avec lui. Adeline espérait de TF1 une sorte de prince charmant. Surprise : ce fut Laurent Fortin (alias Laurent Ournac), un être "lourd, odieux, vulgaire, affreux" – dixit la publicité de l'émission – et par surcroît prolifique en éructations et gaz de toutes sortes. L'ingénue Adeline, qui ignora tout du long que Laurent était comédien, réussira malgré tout à convaincre ses parents d'accepter le mariage avec le prétendant. Elle empochera pour cela 200 000 euros.

Malgré son succès, l'émission n'a pas été du goût de tout le monde, notamment des gros de France et de Navarre. Allegro Fortissimo, qui est la plus importante association d'obèses du pays, avec près de 500 adhérents revendiqués, a écrit au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Elle dénonce un programme qui a fait "l'amalgame entre obésité, vulgarité, grossièreté, saleté. (...) Les producteurs ont évité de choisir un fiancé pour lequel d'autres associations auraient pu porter plainte". Pour racisme, par exemple. Le CSA a décidé d'ouvrir une "instruction".

Laurent Ournac en hausse les épaules de dépit. Oui, l'acteur reconnaît en avoir fait des tonnes pendant l'enregistrement. Oui, il a dû prendre 18 kg en dix semaines pour avoir le rôle, la production le trouvant "trop léger" lors du casting. Mais le gaillard conteste fermement avoir participé à une campagne de "racisme anti-gros" . Lui préfère retenir "la vraie morale qui s'est dégagée à la fin de l'émission", à savoir que les parents d'Adeline ont dû vaincre leurs préjugés pour accepter le mariage de leur fille avec ce véritable Shrek qu'il incarnait. Cela posé, Laurent Ournac en convient : si un comédien noir, plutôt que gros, avait été embauché pour le rôle, "on serait allé au scandale. Alors qu'avec un gros"... Ça passe.

"Mon incroyable fiancé" a aussi montré que, au moment où ils n'ont jamais été aussi nombreux en France, il est désormais possible de railler les obèses. D'après les derniers chiffres de l'Insee, en juin, l'obésité touche désormais 10,1 % des hommes, 10,5 % des femmes et 12 % des moins de 18 ans. Paradoxe, la loi du nombre ne semble pas empêcher la stigmatisation. On a même plutôt l'impression du contraire.

"Cette stigmatisation prend des proportions inouïes", estime le psychiatre Gérard Apfeldorfer, créateur, en 1998, du Groupe de réflexion sur l'obésité et le surpoids (GROS). Pour lui, le succès de l'émission n'a pas été une surprise, mais un signe supplémentaire de la recrudescence de ce qu'on appelle la "grossophobie". Phénomène propre aux cultures occidentales, selon lui. "L'obèse est devenu le bouc émissaire de la société de consommation. Comme nous sommes honteux de consommer l'essentiel des ressources de la planète, nous reportons cette honte sur celui qui incarne le mieux ce 'péché', c'est-à-dire l'obèse, le super-consommateur."

Pour avoir une idée des discriminations dont sont victimes les personnes rondes, rien de tel qu'un petit surf sur Internet. Les sites des associations d'obèses regorgent de témoignages anonymes, tous plus douloureux les uns que les autres. La majorité relate des expériences malheureuses avec le corps médical. Comme ces femmes qui se sont entendu dire qu'on ne fait pas d'enfant quand on est "si grosse". Il y a aussi celles qui sortent des consultations avec des régimes non demandés. Et puis, il y a cette dame dont on a refusé le sang lors d'une collecte parce qu'on craignait qu'il soit "empoisonné" au diabète...

Ailleurs, il est question de l'angoisse qui saisit tout obèse dès qu'il doit prendre le métro. De la difficulté à trouver une robe de mariée quand on pèse 100 kg. Des primes d'assurance-vie qui s'envolent. On imagine mal la somme de problèmes rencontrés par les gros dans leur vie de tous les jours. Jusque dans la mort parfois. Comme cet homme de 170 kg qui a dû récemment être "inhumé contre sa volonté" car "aucun crématorium de la région parisienne n'avait de four assez grand pour son cercueil hors normes".

Donner une réalité statistique à la "grossophobie" n'est pas simple. Aux Etats-Unis, de nombreuses enquêtes ont montré que les obèses ont "un taux d'accès à l'enseignement supérieur plus faible", qu'"ils trouvent plus difficilement un emploi" ou que "leur niveau de revenus est significativement plus bas", comme le rappelle l'anthropologue-sociologue Jean-Pierre Poulain dans son ouvrage le plus récent (Sociologies de l'alimentation, PUF, 2002). En France, les travaux sont encore rares.

Début 2005, l'Observatoire des discriminations a intégré un comédien obèse à un test aveugle consistant à présenter de faux demandeurs d'emploi à de vraies offres professionnelles. Six candidats à l'embauche représentant chacun un profil différent – un homme blanc, un homme noir, une femme maghrébine, un handicapé, un homme âgé, un obèse – ont répondu à 325 offres d'emploi pour des postes de niveau bac + 2. Résultat : l'acteur dont la surcharge était apparente sur la photo de son CV a obtenu "entre deux et trois fois moins de réponses positives en vue d'un entretien que le candidat [blanc] de référence pour un poste de commercial", indique Jean-François Amadieu, le directeur de l'Observatoire. Pour des postes de télévendeurs – – donc sans contacts directs avec la clientèle –, l'écart est moindre, mais reste élevé.

Mais ces discriminations au travail sont également palpables en matière de promotion professionnelle. "Tant que vous êtes au bas de l'échelle dans une entreprise, on se fiche pas mal de savoir si vous êtes gros. Mais si vous voulez devenir cadre, ce n'est plus pareil. Vous représentez alors l'image de la boîte. Et là, pas question d'être obèse", déplore Béatrix de Lambertye, qui n'a pas pu obtenir, dans le secteur de l'export où elle était employée, les responsabilités auxquelles ses diplômes d'études supérieures lui permettaient de postuler.

"Les préjugés sont terribles, poursuit cette femme de forte corpulence. Dans l'esprit des gens, les gros sont forcément paresseux, sales, grossiers, stupides. S'ils sont gros, c'est évidemment de leur faute." Or "tout le monde oublie de dire que les régimes sont des échecs dans 95 % des cas, souligne Catherine Lemoine, la présidente de Pulpclub, un magazine en ligne consacré aux personnes enrobées. Dans l'inconscient collectif, le gros reste fautif. Il n'est pas comme le Noir qui est né comme ça et qui ne peut pas changer. Le gros, lui, peut modifier son apparence".

A en croire les associations d'obèses, si un véritable "climat anti-gros" s'est installé en France, celui-ci a été alimenté par les différentes campagnes de prévention contre le surpoids. "On a parfois le sentiment que la lutte contre l'obésité tourne à la lutte contre les obèses", s'inquiète Viviane Gacquière, la présidente d'Allegro Fortissimo. Qu'il s'agisse du Programme national nutrition-santé (PNNS) lancé en 2001 par le ministère de la santé, des cris d'alarme des associations de spécialistes (pédiatres, cardiologues) ou encore des programmes nutritifs imaginés par certains géants de l'agroalimentaire, l'obèse est souvent perçu comme le dernier des pestiférés.

Les projections épidémiologiques, c'est vrai, sont plutôt alarmantes. La prévalence de l'obésité chez l'enfant double ainsi tous les quinze ans. A ce rythme, la France aura rejoint vers 2020 le taux d'obésité infantile des Etats-Unis. Partant de là, quel discours tenir ? Comment dire "mangez mieux" sans crier "haro sur les gros" ? "Le problème est que le grand discours nutritionnel d'aujourd'hui ne fait que paniquer les mangeurs, relève le docteur Apfeldorfer. On leur explique comment manger sur un mode cartésien, sans tenir compte des sensations que procurent les aliments. Une pizza n'est plus une portion d'Italie, mais une couche d'acides gras agrémentée de morceaux de protides. Résultat : les mangeurs sont angoissés en mangeant. Ce qui a pour effet de les faire grossir."

C'est encore à la télévision que la stigmatisation est la plus visible. Certaines publicités n'y vont pas avec le dos de la cuillère, comme celle de Flunch où des super-héros ne sont plus bons à rien parce qu'ils ont pris du poids. Mais c'est aussi à la télévision que le "morphologiquement correct" est battu en brèche avec le plus d'intensité. Plusieurs animateurs de forte corpulence sont ainsi devenus, ces dernières années, des personnages familiers du petit écran : Guy Carlier sur France 3, Laurence Boccolini sur TF1, Marianne James sur M6. Tous ont été recrutés pour leurs qualités professionnelles, aucun n'incarnant le "joufflu de service", qu'il n'est pourtant pas rare de trouver sur certains plateaux.

La dernière venue s'appelle Magalie. Cette lycéenne de 18 ans fait partie de la nouvelle promotion de la "Star Academy" (TF1). Elle aussi a été sélectionnée pour son talent – – certains font d'elle la favorite – – et non pour ses kilos, que la production de l'émission trouve quand même un peu "superflus". Passons. "Enfin on montre les gros à la télé !, s'enthousiasme Laurent "l'incroyable fiancé". Jusque-là, on ne les voyait que pour animer des émissions de cuisine, comme Maïté ou Jean-Pierre Coffe. C'est le début d'une nouvelle ère."

A la télévision, toujours, peut-être verra-t-on un jour un film sobrement intitulé Gros. Il est pour l'heure à l'état de scénario. Son auteur s'appelle Jean-Jacques Jauffret. Scénariste-réalisateur, cet homme a été, en août, la victime d'un épisode ubuesque. M. Jauffret s'en revenait de vacances en Inde. Apprenant que son vol de retour était complet, quelle ne fut pas sa surprise de voir un employé d'Air France lui mesurer d'autorité l'abdomen avec une bande adhésive ! L'intéressé put finalement regagner Paris, mais il dut s'acquitter d'un deuxième billet sur lequel quelqu'un avait pris soin d'inscrire son tour de taille (172 cm) et son poids estimé à la louche (180 kg). La chose ne manqua pas de sel puisque M. Jauffret ignore lui-même combien il pèse. Sa balance personnelle ne dépasse pas les 160 kg. Quand il a besoin de mesurer ses fluctuations pondérales, il se rend sur le pèse-bagage de la Sernam, à la gare de l'Est.

S'il n'avait pas déjà bouclé son scénario, cette scène de l'aéroport de New Delhi aurait mérité d'y figurer. Qu'importe. D'autres y seront. Comme la fois où il s'est retrouvé bloqué dans le sas d'une banque, le mécanisme d'entrée étant réglé sur 150 kg pour empêcher que deux personnes puissent y entrer en même temps. Son scénario raconte l'histoire "d'un obèse qui vit dans la culpabilité après avoir perdu son boulot pour des raisons de santé et qui, en même temps, tombe amoureux d'une femme normale". Confronté aux regards des autres, le personnage est aux antipodes du gros un peu lourdingue mais tellement "sympa" qui traverse les fictions de grande audience.

"Ce n'est pas parce qu'on est gros qu'on doit être sympathique. Je réclame le droit de ne pas être drôle, mais d'avoir des angoisses, d'être stressé, de pousser des colères..., s'emporte le scénariste. Il y en a marre du 'tout le monde pareil'. Accepter les différences, ce n'est pas essayer de les réduire."

Un message que M. Jauffret n'a pas eu besoin de répéter lors de ses vacances en Inde. Là-bas, les gens ne l'ont ni insulté ni moqué. Au contraire, ils sont souvent venus caresser ce ventre hors norme, symbole de chance et de prospérité.

Frédéric Potet
Article paru dans l'édition du 27.09.05


Le Monde / Société
Bracelet électronique : la question du respect de la Constitution soulève une vive polémique

 L e ministre de la justice, Pascal Clément, a vivement été mis en cause, mardi 27 septembre, pour avoir annoncé lundi soir qu'il voulait introduire dans la loi anti-récidive présentée à la mi-octobre la rétroactivité du port du bracelet électronique pour les délinquants sexuels. "Toute personne qui sera condamnée aujourd'hui ou hier, le jour où elle sortira de prison pourra avoir un bracelet électronique relié au GPS", avait affirmé le ministre à l'issue d'une rencontre à la chancellerie avec trois des anciennes victimes de Patrick Trémeau, violeur récidiviste libéré en mai et mis en examen et incarcéré samedi pour trois autres viols. Cette mesure ne concernerait que les délinquants et criminels sexuels condamnés au minimum à cinq ans de prison.

Cette rétroactivité aurait un caractère exceptionnel, le principe de la non-rétroactivité prévalant en droit français. Elle avait déjà été intégrée dans la première mouture de la loi examinée en décembre 2004 avant d'être rejetée par le Sénat. Depuis, la loi a été complètement remaniée. Elle sera présentée à la mi-octobre avec le bracelet électronique comme mesure phare.

M. Clément, en présentant ce projet malgré un "risque d'inconstitutionnalité", avait expliqué vouloir le prendre, "et tous les parlementaires pourront le courir avec moi". "Il suffira pour eux de ne pas saisir le Conseil constitutionnel et ceux qui le saisiront prendront sans doute la responsabilité politique et humaine d'empêcher la nouvelle loi de s'appliquer au stock de détenus", a ajouté M. Clément, s'attirant ainsi les foudres des instances judiciaires et de l'opposition.

LE RESPECT DE LA CONSTITUTION EST UN "DEVOIR"

Le président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, a souligné mardi, dans une démarche qualifiée d'exceptionnelle par son entourage, que le respect de la Constitution était "non un risque mais un devoir".

L'Union syndicale des magistrats (majoritaire) et le Syndicat de la magistrature (gauche) se sont peu avant déclarés "choqués" mardi par une rétroactivité du port du bracelet électronique. "De tels propos bafouent les principes d'un Etat de droit, respectueux de la Constitution, de la convention européenne des droits de l'homme et du principe fondamental de la non-rétroactivité des lois pénales", critique l'USM qui évoque une "injonction sans précédent d'un membre de l'exécutif aux députés et sénateurs de ne pas saisir le Conseil constitutionnel". L'USM voit là "un exemple catastrophique donné aux délinquants de mépris de la loi" et "une communication purement démagogique visant à masquer la mise en place par Pascal Clément d'un budget notoirement insuffisant et d'un rationnement des frais d'enquêtes".

Le Syndicat de la magistrature appelle pour sa part "le président de la République et les parlementaires à saisir le Conseil constitutionnel afin que les principes fondamentaux soient respectés et rappelés à un ministre indigne de la République". M. Clément "ose reconnaître l'inconstitutionnalité de certaines dispositions de la proposition de la loi sur la récidive et défie les parlementaires de saisir le Conseil constitutionnel, exerçant ainsi un chantage inadmissible à l'opinion publique", critique le syndicat dans un communiqué.

"La non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère est un principe constitutionnel également affirmée par l'article 7 de la convention européenne des droits de l'homme", rappelle le syndicat. "L'incitation d'un ministre de la justice à la violation délibérée de la Constitution et de la convention européenne est intolérable et présage de lendemains particulièrement inquiétants pour la démocratie", estime le SM.

Pour les travailleurs sociaux des services de probation et d'insertion de la pénitentiaire (SPIP), Michel Flauder, secrétaire général du syndicat majoritaire Snepap-FSU, a jugé durement l'idée d'une rétroactivité de la loi. "Cela s'appelle s'asseoir sur la Constitution", a-t-il estimé.

"IRRESPONSABILITÉ TOTALE"

Le président du groupe PS à l'Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, a estimé mardi que le garde des sceaux n'était "pas digne d'exercer ses fonctions", pour avoir proposé la rétroactivité du port du bracelet électronique. "C'est plus que surréaliste, c'est totalement aberrant car le garde des sceaux est chargé de veiller au respect de la loi", a commenté M. Ayrault devant la presse à l'Assemblée.

"Aujourd'hui, [M. Clément] prend la responsabilité de violer la Constitution et il demande au Parlement de couvrir purement et simplement cette initiative. Cela dépasse l'entendement", s'est insurgé le député-maire de Nantes, en prévenant que "les députés socialistes ne céderaient évidemment pas à cette injonction du ministre de la justice". "A mes yeux, a-t-il poursuivi, il n'est pas digne d'exercer ses fonctions. On serait dans une démocratie parlementaire pleine et entière, rien que cela obligerait le ministre de la justice à donner sa démission".

Le député socialiste Jean Glavany a qualifié pour sa part "d'irresponsabilité totale" la proposition de M. Clément. "Qu'un garde des sceaux, un ministre de la République s'adresse au Parlement en disant 'je vais prendre une mesure anti-constitutionnelle, je le sais, mais je vous en prie laissez-moi faire et ne portez pas le débat devant le Conseil constitutionnel', je trouve ça d'une irresponsabilité totale", a déclaré l'ancien ministre, dans les couloirs de l'Assemblée nationale. "Je me demande si ces gens sont dignes d'être ministres de la République", a ajouté M. Glavany.

Le porte-parole du PS, Julien Dray, a quant à lui critiqué que le ministre de la justice ait incité les parlementaires à ne pas saisir le Conseil constitutionnel sur la question. M. Dray a déclaré sur France Inter ne pas pouvoir se "prononcer tout de suite" sur une éventuelle saisine du Conseil constitutionnel par le PS à propos d'une mesure qui contredit le principe de non-rétroactivité de la loi pénale. "Je considère que le procédé utilisé par M. Clément est détestable, il faut que les parlementaires gardent leur liberté", a commenté le député de l'Essonne.

Pour Julien Dray, "la vraie question qui est posée c'est le suivi médical qui doit être mis en place dans l'institution pénitentiaire et qui n'est pas mis en place (...) parce qu'il n'y a pas les moyens, il n'y a pas les médecins pour faire ce suivi". "Quand il y a ce suivi, les rapports sont formels, il n'y a pas récidive", a-t-il ajouté. Dans le cas de Patrick Trémeau, violeur récidiviste libéré en mai et mis en examen et incarcéré samedi pour trois autres viols, M. Dray a affirmé que "le bracelet électronique ne l'aurait pas empêché de continuer les viols parce qu'il s'agit de pulsions, de choses qui sont plus fortes que la personnalité".

Lemonde.fr, avec AFP et Reuters
LEMONDE.FR | 27.09.05 | 19h35


Le Monde / Opinions
Edito du Monde
Déserts médicaux

 E n France, l'égal accès aux soins sur l'ensemble du territoire ressemble de plus en plus à une fiction. Lors du rite annuel de l'"amphi de garnison", où les 4 311 étudiants de sixième année de médecine ont choisi leur spécialité de troisième cycle et la ville où ils effectueront leur internat, 971 postes d'internes en médecine générale (600 déjà en 2004) n'ont pas été pourvus. C'est le cas pour 600 postes dans les seules régions du Nord ! De véritables déserts médicaux se profilent.

En novembre 2004, l'Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS), créé en juin 2003, avait, dans son premier rapport, tiré la sonnette d'alarme. Pointant la diminution continue du numerus clausus – qui est passé de 8 671 en 1977 à 3 500 en 1993 – et le vieillissement du corps médical, il s'inquiétait d'un "problème aigu de renouvellement". Les projections sont éloquentes : dans l'hypothèse d'un numerus clausus à 7 000 à partir de 2006 (promesse de Philippe Douste-Blazy), le nombre de médecins en activité passerait de 205 200 en 2002 à 186 000 en 2025.

En tenant compte de l'accroissement attendu de la population, la densité médicale passerait de 335 pour 100 000 habitants en 2002 à 283 en 2025, une baisse d'environ 15 %. Les inégalités territoriales, déjà fortes, risquent de s'aggraver : on compte 421 praticiens pour 100 000 habitants en Provence-Alpes-Côte d'Azur, 258 en Picardie. On préfère être radiologue à Cannes que généraliste à Cambrai.

Si rien n'est fait, la perspective démographique médicale est critique. De 2008 à 2015, le solde annuel entre les entrées et les sorties sera négatif. Ainsi, en 2014, il y aurait 8 000 départs de médecins pour 5 500 arrivées. Ce n'est qu'à partir de 2016 que la situation cesserait de se détériorer. Ce déséquilibre de la démographie médicale repose inévitablement la question de la libre installation des médecins. En 2004, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie a levé le tabou en envisageant de "lier la question du conventionnement et celle de l'installation". Un médecin installé dans une zone surmédicalisée ne serait pas conventionné...

Les pouvoirs publics écartent des mesures coercitives qui se heurteraient à l'hostilité des médecins, et privilégient, outre le relèvement du numerus clausus – 6 300 en 2005 contre 5 600 en 2004 –, l'incitation. Mais les marges de manoeuvre sont étroites. La reconnaissance, en 2003, de la médecine générale comme spécialité a été un échec. Ne faut-il pas, comme le suggère Yvon Berland, président de l'ONDPS, dégager les moyens, d'abord budgétaires, pour permettre aux étudiants d'effectuer vraiment des stages de médecine générale en ville et plus encore en zone rurale ? M. Berland préconise surtout de revoir le système des épreuves classantes nationales (ECN) en organisant le concours dans sept interrégions, où on planifierait les besoins des filières en fonction de la démographie médicale. Les pouvoirs publics y semblent favorables. Mais il y a urgence à passer à l'acte.

Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Opinions
analyse
Réflexions iconoclastes sur le budget et les impôts, par Laurent Mauduit

 N' est-il pas temps de remettre en question la politique de baisse des impôts conduite depuis bientôt vingt ans, en France, par la droite aussi bien que par la gauche ? Alors que le conseil des ministres examine, mercredi 28 septembre, le projet de loi de finances pour 2006, on peut en prendre le pari : nul ne soulèvera cette question iconoclaste, pourtant au coeur des contradictions dans lesquelles se trouvent prises les finances publiques.

Dans le cas de la droite, toutes sensibilités confondues, on devine sans peine pourquoi elle est taboue : les baisses d'impôts constituent la pierre angulaire de sa politique économique. Qui ne connaît le raisonnement ? L'Etat dépense trop ; il faut donc réduire son train de vie ; ce qui permettra de redonner du pouvoir d'achat aux Français en allégeant leurs prélèvements, et de stimuler ainsi le dynamisme et la compétitivité de l'économie.

Quant à la gauche, elle critique les nouvelles baisses d'impôts annoncées par Dominique de Villepin, mais plus à cause des modalités retenues – – qui avantagent les hauts revenus – – que pour une question de principe. Car, sur le fond, les socialistes défendent depuis longtemps un cocktail budgétaire similaire – – même si le dosage peut être différent – , associant réduction des dépenses de l'Etat et baisse des impôts. Pourtant, à y regarder de plus près, on comprend vite que ce consensus perd de plus en plus de sa pertinence et que le moment est venu sinon de le remettre en question, du moins d'en débattre. Sauf à accepter que la politique budgétaire s'englue dans une impasse.

Première interrogation provocatrice, mais dont il devient difficile de faire l'économie : est-il ainsi exact que l'Etat dépense toujours davantage et qu'il est prioritaire de le mettre à la diète ?

On connaît la réponse, la plus souvent assénée dans les débats publics : évidemment oui, l'Etat fait, si l'on peut dire, du "gras" puisque la dépense publique est passée de 44,7 % du produit intérieur brut (PIB), en 1978, à 54,7 %, en 2003. N'est-ce donc pas l'indice incontestable d'un Etat devenu obèse, puisqu'il absorbe plus de la moitié des richesses produites.

Et pourtant, non ! Car si les dépenses publiques augmentent effectivement, c'est sous le coup de l'envolée de celles liées à la protection sociale (de 18,9 % du PIB à 25,2 % au cours de la même période). Si l'on s'en tient aux seules dépenses de l'Etat, il n'y a aucune progression. Atteignant 22,1 % du PIB en 1978, les dépenses de l'Etat sont restées quasi étales les vingt-cinq ans suivants, pour se situer à 22,8 % en 2003.

On peut donc défendre le modèle social français et faire valoir que le vieillissement démographique et l'amélioration des techniques médicales justifient qu'il coûte de plus en plus cher. Ou alors, on peut s'inquiéter de cette dérive et plaider pour des réformes énergiques. Mais il faut, dans tous les cas, admettre que c'est là un autre débat. Et que les dépenses strictement engagées par l'Etat ne sont pas en cause. On observe d'ailleurs que la plupart des grands pays de l'OCDE ont des taux de dépenses de l'Etat assez voisins de la France, autour de cette barre de 22 % du PIB.

Deuxième série de questions, impossibles à éluder : pendant combien de temps sera-t-il encore possible de baisser les impôts ? Y a-t-il une limite à ne pas dépasser – – sauf à prendre le risque de mettre en cause certaines des missions de l'Etat ? Personne n'ose aborder le débat de front. Il est pourtant décisif.

Car depuis deux décennies, chaque gouvernement y a été de ses baisses d'impôt. De1986 à aujourd'hui, tous les prélèvements ont été réduits. De la TVA à l'impôt sur le revenu en passant par la fiscalité de l'épargne, les taxes d'habitation et professionnelle ou l'impôt sur les sociétés, les plans d'allégement se sont succédé à marche forcée. Et s'il y a eu un impôt nouveau, l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), rétabli en 1988, pour le reste, la France n'a connu qu'une rafale de baisses.

Dans les débats publics, cette réalité est, certes, tout autant contestée. Le plus souvent, un seul chiffre est évoqué : celui qui atteste de l'envolée des prélèvements obligatoires. Qui ne connaît la tendance, rappelée à l'envi ? De 35,1 % du PIB en 1970, ces prélèvements sont progressivement passés à 43,8 % en 2003. Preuve irréfutable que l'Etat prélèverait toujours plus, pour dépenser aussi... toujours plus ! Là encore, la démonstration est entachée de mauvaise foi. Sur la période considérée, ce sont les prélèvements sociaux (CSG comprise à partir de 1991) qui ont progressé (de 13,1 % du PIB à 21,8 %), expliquant la dérive des ponctions obligatoires. Mais si l'on s'en tient au seul périmètre de l'Etat, le constat est inversé : le poids des prélèvements s'est très nettement allégé à cause des mesures de transferts, liés à la décentralisation. Mais aussi à cause, précisément, de la politique continue de baisse des impôts.

A preuve, la part des prélèvements de l'Etat a, ainsi, chuté de 18,4 % du PIB en 1970 à 15,6 % en 2003. Soit une baisse spectaculaire équivalente à 2,8 points de PIB. Sur la même période, le poids de la TVA a ainsi été allégé d'un montant équivalent à 1,7 point de PIB et l'impôt sur le revenu de 0,3 point (et même de 1,3 point si l'on prend non plus 1970 mais 1981 pour année de référence).

Cette diminution de 2,8 points de PIB des prélèvements d'Etat laisse perplexe. A-t-on relevé que ce chiffre colossal, qui équivaut à plus de 43 milliards d'euros, est voisin du déficit que l'Etat a enregistré cette même année 2003, soit 2,9 % du PIB. Il ne s'agit pas d'en conclure que sans les baisses d'impôts décidées au cours des deux dernières décennies, le budget de l'Etat serait aujourd'hui à l'équilibre. Le raisonnement serait absurde : dans une économie mondialisée, la France ne pouvait pas se tenir à l'écart de la vague du "moins d'Etat" et du "moins d'impôt" qui a commencé à déferler dans le courant des années 1980, sauf à perdre, comme on dit maintenant, de son "attractivité".

La similitude des deux chiffres incite, tout de même, à se poser une cascade de questions : la France peut-elle encore longtemps continuer à conduire à crédit une politique de baisse des impôts ? L'interrogation concerne au premier chef Dominique de Villepin qui a choisi d'annoncer une nouvelle réforme de l'impôt sur le revenu pour 2007, sans révéler, dans le même temps, les conditions de son financement. Ce qui laisse à penser que ces cadeaux fiscaux alourdiront encore un peu plus les déficits de l'Etat, et en bout de course, la dette.

Autre interrogation, plus profonde celle-là : après deux décennies de baisse des impôts (parfois sur fond de populisme antifiscal), la gauche et la droite ne devront-elles pas se préparer à un combat autrement plus difficile : recommencer à défendre auprès de l'opinion la fonction citoyenne de l'impôt ?

En tout cas, la politique budgétaire française semble arriver à un tournant de son histoire. Longtemps, Jacques Chirac a pu populariser la fameuse équation de l'économiste américain Arthur Laffer, en usant du slogan : "Trop d'impôt tue l'impôt." Mais aujourd'hui, l'équation est en train de s'inverser ; et c'est un nouveau slogan qu'il faudrait inventer : "Trop de baisse d'impôt tue l'impôt" ... et creuse le déficit.

Mais comme cette évidence n'est pas bonne à dire, le ministère des finances use de stratagèmes dont il a le secret, en affichant un budget pour 2006 dont la sincérité est douteuse, adossé à des prévisions de déficits publics très nettement enjolivées...

Laurent Mauduit
Article paru dans l'édition du 28.09.05

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ouf enfin ♦ 28.09.05 | 13h15 ♦ ca fait du bien de lire autre chose que la vulgate neoliberale, je suis au danemark avec le taux d´impot le plus fort d´europe, et tous les services publics fonctionnent, le niveau de vie est parmi les plus elevés, il n´y a pas d´inegalités criantes, la cohesion sociale empeche l´insecurité. Des fois l´impot peut etre "profitable", si l´on ne prend pas que l´aspect financier.
Emilie M. ♦ 28.09.05 | 12h34 ♦ Vous militez pour payer des impôts, et bien commençons par supprimer l'abattement fiscal tout à fait injustifié dont bénéficient les journalistes.
FLORENT D. ♦ 28.09.05 | 11h48 ♦ Il faut distinguer entre deux façons de baisser les dépenses des administrations publiques : cette baisse peut se faire par une réduction des actions et des résultats de l'Etat, ou par une amélioration de l'efficacité de l'Etat à résultats égaux. La réforme de l'Etat vise la seconde méthode, laquelle peut permettre de faire des réelles économies. Or cet article n'évoque pas une seule fois la notion d'efficacité de l'action publique, ce qui est vraiment malhonnête.
citoyenX ♦ 28.09.05 | 11h28 ♦ N'importe quoi. Quelle différence faire entre l'impôt sur le revenu et la CSG qui sont deux prélèvements obligatoires, du point de vue du contribuable ? La CSG est bien un impôt, inique de surcroît : beaucoup de ménages chargés de famille payent davantage de CSG que d'impôt sur le revenu et il n'y a pas de modulation en fonction des charges de famille. Il est fallacieux de considérer séparément l'impôt sur le revenu, la CSG et les impôts locaux : ce qui diminue d'un côté augmente de l'autre etc.
JEAN CHRISTOPHE C. ♦ 28.09.05 | 09h45 ♦ On nous explique donc que l'etat est un bon gestionnaire tant qu'il s'agit de ses propres depenses; mais pour le reste des depenses c'est la gabegie! mais alors, qui est donc responsable de la gestion de la depense publique? et de la dette abyssale? n'y a-t-il plus de pilote dans l'avion? Messieurs les analystes, un peu de serieux!imaginez un chef d'entreprise qui expliquerait son mauvais resultat car ses employes depensent trop, mais pas le conseil d'administration!
Vincent P. ♦ 28.09.05 | 08h56 ♦ Intéressant et bonne remise en perspective, mais dire que les dépenses sociales qui augmentent ne sont pas du ressort de l'état, c'est faire un raccourci un peu rapide qui sert la démonstration certes, mais ne fait pas disparaître pour autant la réalité : de + en + de dépenses pour de moins en moins de recettes.
domien ♦ 28.09.05 | 02h51 ♦ Il y a au moins une dépense sur laquelle l'état n'a pas fait d'économie : c'est sur la compléxité et la paperasserie inutiles. Chaque modernisation des outils - informatique, net etc - est anéantie par une approche plus "pointue" destinée sans doute à user le budget et surtout à flatter l'ego d'un énarque qui laisse une trace. Cette inflation d'inutilité est payée par le guichetier et le contribuable qui perdent leur temps ensembles. Du moins aux heures d'ouverture...
Bruno+L ♦ 27.09.05 | 22h39 ♦ pour que LM soit écouté (on le sent timide...), un exemple personnel: revenu conjugal de 2001=57739 euros, 10.14% d'IRPP 2004=57115 euros 9.37% d'IRPP ceci avec un enfant. Pour 624 euros en moins de revenus, notre IRPP a baissé de 454 euros. Il ne nous semble pas que ces taux et ces montants soient prohibitifs, ils sont même faibles compte tenu de la dette publique et des difficultés sociales de beaucoup de nos compatriotes...
Patrice R. ♦ 27.09.05 | 22h35 ♦ Compte tenu de la structure de l'IRPP en France, toute baisse d'impôts signifie inéluctablement une réduction de la consommation (de moindre ampleur, certes). Or la consommation est le dernier rempart avant la récession. Allez donc dire aux commerçants de votre quartier (+/-favorisé) que vous allez supprimer le RMI, les allocations chômage... Les plus intelligents d'entre eux comprendront vite que leur chiffre d'affaires connaîtra une baisse rapide pouvant les conduire à la failite.
Flying-Lolo ♦ 27.09.05 | 22h20 ♦ Voilà effectivement un sujet qui permet à nos politiques de tout bord d'accumuler contre vérités, idées reçues et autre malhonnetetés intellectuelles depuis des lustres et des lustres...La définition du périmètre d'intervention de l'Etat, le niveau de prélèvements requis et les modalités de répartition de ces prélèvements entre les citoyens sont autant de sujets qui méritent débat et rigueur intellectuelle. Hélas ils sont complexes,hélas le citoyen s'y perd, hélas le politique en profite...
bloo ♦ 27.09.05 | 22h09 ♦ Au Japon, les internautes peuvent aller sur le site du gouvernement et "jouer" à construire le budget de l'état. Les conséquences de chaque choix sont commentées. Peut-être qu'une initiative identique en France permettrait aux gens de se faire une meilleure idée de ce qu'on fait de leur argent et surtout de mieux nous faire comprendre les choix qui sont faits par le gouvernement.
i2bx ♦ 27.09.05 | 20h45 ♦ Creer des richesses pour les partager. Pour les créer, liberer ce pays de son modèle social qui s'est enfermé dans le cercle vicieux du prélèvement et du retard de croissance. Oui les baisses d'impots sont nécessaires. Bientôt, en aurons nous, une nouvelle fois, la démonstration, par la pologne. Comme les US et UK nous l'ont déjà démontré il y a 20 ans, les pays d'europe du nord il y a 10 ans.
eduardo j. ♦ 27.09.05 | 17h53 ♦ L impot sur le revenu diminue, mais ils montent sur les taxes, les prelevements sociaux, et tout le reste... en definitive on debourse de plus en plus... ils nous prennent pour des idiots qui ne savent pas compter...
peutetre ♦ 27.09.05 | 17h44 ♦ Autre question iconoclaste : mais qu'est-ce que l'Etat. Avant de réhabilité l'impôt ne faudra-t-il pas redéfinir l'Etat. Comme dans les grandes tiranies naissantes il est devenu de bon ton de regreter l'ordre naturel et de mépriser les organisations humaines dont l'impôt est devenu le symbole flagrant. Haïr l'impot permet d'assouvir sa detestation de l'autre (c'est lui que en profite) et nourit le phantasme d'une société "libre" (libre de ses devoirs en vers l'autre).
asics07 ♦ 27.09.05 | 17h31 ♦ Les prélèvements obligatoires collectifs augmentent au détriment de la dépense libre du citoyen. C'est du collectivisme. Que ces dépenses soient sociales ou d'état c'est pareil. L'état est encore trop gras: il faut qu'il arrête de faire rouler des TGV à prix d'or (déficit abyssal du couple SNCF-RFF): il fait mal ce qu'un privé ferait mieux. Il est dans un secteur concurrentiel où il n'a rien à faire. Du coup, il néglige ses vraies fonctions utiles d'arbitre: misère de l'Inspection du travail.
Pierre C. ♦ 27.09.05 | 17h04 ♦ La CSG et toutes les cotisations sociales obligatoires , les taxes des collectivités locales ( ordures, habitations etc...) ne sont pas des impots. Je veux bien mais ces prélèvements sont obligatoires pour moi la définition de l'impot est : prélèvement obligatoire les impots ne diminuent pas ils augmentent je suis célibataire sans enfants je suis imposable et gagne correctement ma vie je vois bien les prélèvements augmenter la TIPP par exemple
Deathwind ♦ 27.09.05 | 16h44 ♦ D'accord pour dire que les baisses d'impot sont inutiles et populistes et ne servent qu'à accroître le déficit si elles ne sont pas compensées par une baisse des dépenses publiques. Mais sinon LMA joue un peu sur les mots. Les dépenses publiques en France sont très elevées et n'ont cessé d'augmenter. Le fait que leur évolution soit principalement dues à la Sécu ou autres n'enlèvent rien au fait qu'elles entrainent des prélèvements qui étouffent l’initiative, le travail et l’entreprise.
champollion ♦ 27.09.05 | 16h38 ♦ Une analyse originale qui a le mérite de poser des questions. Mais alors il faut se poser la question sur un personnel politique qui ne pense que de la même façon (formé à l'ENA non ?). Et si c'était un moyen de justifier les (gros) cadeaux aux riches que d'en donner un peu aux autres ?
Ouh là ! ♦ 27.09.05 | 16h20 ♦ Enfin, dans Le Monde des voix s'élèvent ... Qui n'ont rien d'iconoclastes en soit, si ce n'est peut-être par rapport à son lectorat... Eh oui le moins d'impôts cela veut dire "chacun sa gueule", la cerise sur le gateau du libéralisme forcéné, du renard dans le poulailler. Ce qui doit permettre au mieux de "privatiser les profits et solidariser les pertes". Quant à l'usage qui en est fait (de nos impôts), il nous revient de demander des comptes et d'être vigilants? c'est aussi la Démocratie.
cohelet ♦ 27.09.05 | 15h41 ♦ Je me doutais bien que la "grossophobie" envers l'Etatn'était pas sérieusement fondée comme le montrent aujourd'hui le poids étale des dépenses de l'Etat sur 25 ans (~22% du PIB)ou encore la litanie des services de l'Etat "les caisses sont vides". La protection sociale a donc pris du poids (+6,7 points de PIB sur 25 ans)et coûte aujourd'hui autant que les strictes dépenses de l'Etat. Et si à l'avenir toute la protection sociale était financée par la CSG avec des taux et des assiettes nouveaux?
jacklittle ♦ 27.09.05 | 15h30 ♦ Soyons réalistes,dans l'analyse de LM il manque une donnée capitale LA DETTE PUBLIQUE,les dernières estimations la chiffre à 1000 milliard €uros,rien que le service de la dette absorbe l'IR.Si nos politique de tous bords avaient du courage,c'est pas de baisses d'impôts dont on parlerait mais de hausses d'impôts.Sans très forte croissance -inespèrée-notre pays va très vite au "dépôt de bilan",et nos politiques devraient mettre en place un PLAN d'AUSTERITE drastique. Président:COURAGE,COURAGE.
LibertéEquitéSolidarité ♦ 27.09.05 | 14h53 ♦ Nombreux sont les citoyens qui sont prêts à payer plus d'impôts ; à condition qu'ils en aient "pour leur argent". Si c'est pour financer une politique de l'emploi inefficace, une ligne marseille-corse caricaturale, une ANPE inefficace, une université percluse de soviétismes, la gestion de la Sécu, une médecine "libérale-étatisée", des chercheurs qui ne cherchent pas, des droits acquis injustifiables, les niches fiscales, les frais de bouche et d'avion de JC, etc. On comprend qu'ils hésitent !
PIERRE G. ♦ 27.09.05 | 14h19 ♦ Conclusions mitigees. Je ne conteste pas les chiffres : j'en serais bien incapable. Je me dis simplement que je suis d'accord pour payer plus d'impots, de preference sur le revenu, ce qui me semble le plus juste. Simplement, j'aimerais bien que ct argent soit mieux gere... Voeu pieu ? Peut etre : je suis jeune et encore reveur.


Le Monde / Chats
Jack Lang : "Nous devons tenir un langage de vérité et de courage"
L'intégralité du débat avec Jack Lang, député du Pas-de-Calais, membre de la direction du Parti socialiste., mercredi 28 septembre 2005

Atahualpa : Bonjour, Monsieur Lang. Les sondages vous placent en bonne position pour la présidentielle. Ma question est : comment rompre avec le discours politique dominant pour impulser des changements massifs et non dosés par à-coups, tels qu'ils semblent être destinés à apaiser des grognes sporadiques ? Je pense particulièrement à la question du logement.
Jack Lang:
La seule solution, c'est de parler clair et concret. La question du logement est gravissime, et je crois qu'il faut avoir l'audace de la traiter de front. En particulier, parmi les réponses concrètes, il y a celle qui touche au coût du foncier, qui décourage la construction de logements sociaux. Sur ce plan, on peut imaginer des mécanismes d'acquisition par la puissance publique. L'autre sujet est celui de la mixité sociale, et là aussi, c'est une question de choix. On ne peut accepter que des villes ou des quartiers soient ghettoïsés. Des ghettos de riches ou des ghettos de pauvres. C'est une question de volonté politique forte.

Robert: La brisure provoquée par Laurent Fabius n'est-elle pas révélatrice d'une dérive "droitière" du PS ?
Jack Lang:
Dérive droitière du PS, laquelle ? Celle de Laurent Fabius ou celle de la direction du PS ? La question n'est pas claire. La dérive droitière, malheureusement, se produit parfois lorsque des responsables socialistes accèdent aux responsabilités gouvernementales. Mieux vaut être révolutionnaire au gouvernement que dans l'opposition.

LA VISION DE GAUCHE : UN "ÊTRE HUMAIN AU CŒUR D'UN PROJET DE SOCIÉTÉ"

Ludwig: Quel est le programme du PS: une gauche opposée au libéralisme ou un centrisme vaguement social?
Jack Lang:
En un mot, il y a deux visions de la société : la vision de droite, qui transforme l'être humain en marchandise et qui garantit et perpétue la dictature du profit, de la rentabilité à court terme et de la spéculation financière ; et une vision de gauche, qui, à l'inverse, place l'être humain au cœur d'un projet de société pour faire régresser la marchandisation. Nous avons besoin de services publics forts et puissants, et de politiques publiques audacieuses : éducation, recherche, industrie, etc.

Ludwig: Comment le PS peut-il renouer avec son électorat à la suite du désaveu du 29 mai ?
Jack Lang:
Le désaveu du 29 mai est un désaveu qui visait M. Chirac. Les électeurs ont exprimé une colère contre le pouvoir établi. Ils l'avaient d'ailleurs exprimée un an plus tôt, au moment des élections européennes et régionales. Le PS n'était pas candidat au scrutin du 29 mai, c'était M. Chirac proposant un texte de référendum, et celui-ci a tourné à l'anti-plébiscite, par un rejet massif de M. Chirac. D'ailleurs ceux des dirigeants socialistes qui bénéficient de la confiance populaire sont ceux-là mêmes qui ont mené campagne en faveur du oui. Preuve que pour les électeurs, la question du 29 mai était une protestation forte contre la droite, et non pas contre tel ou tel dirigeant socialiste.

Gille: "Changer le PS", cela veut-il dire rompre avec le système du parti d'Epinay ?
Jack Lang:
Sûrement pas ! Le congrès d'Epinay visait à faire du PS l'axe central de la gauche. Et aujourd'hui, plus que jamais, le PS se doit d'être offensif, créatif, audacieux, et c'est autour de lui que le rassemblement de la gauche s'opérera le jour venu.

Ludwig: Peut-on envisager une scission au sein du PS, à l'instar de ce qui s'est fait outre-Rhin avec le Linkspartei?
Jack Lang:
Sûrement pas. Cette question ne se pose pas. Je crois que l'actuelle majorité du PS l'emportera au prochain congrès, et l'autorité morale du PS en sortira renforcée.

Starsailor: Quelles propositions concrètes pour "placer l'être humain au cœur du système"? Que pensez-vous du smic à 1 500 euros?
Jack Lang:
Ce montant me paraît encore trop modeste. Si vous partez des augmentations du smic décidées sous le gouvernement Jospin, vous obtenez un chiffre de 1 400 euros en 2012. Nous proposons que cette augmentation du smic soit calculée en net. Il faut donner à chacun un logement décent, un véritable emploi et une éducation qui lui permette d'obtenir une qualification élevée. Il faut donc des politiques publiques puissantes en faveur du logement, de la croissance et de la recherche.

Clément: Que pensez-vous de la candidature d'une femme à l'élection présidentielle ?
Jack Lang:
C'est une très bonne chose. Il ne faut pas juger une candidature en fonction du sexe de la personne, mais de sa capacité à rassembler large. La question du sexe n'a pas lieu d'être posée.

Alain: Vous êtes candidat à l'élection présidentielle. Qu'est-ce qui vous différencie des autres candidats du PS?
Jack Lang:
Difficile de parler de soi-même. Il faut s'interroger sur les paramètres qui peuvent constituer une bonne candidature. Le premier est l'expérience de la gestion de l'Etat. J'ai été douze ans ministre de la République. Deuxième paramètre : la confiance populaire. J'ai le sentiment qu'elle ne m'est pas refusée. Troisième paramètre : la puissance et la force de conviction pour faire changer les choses. Cette question est à examiner par comparaison avec d'autres. Laissons le temps de la décantation faire son œuvre.

L'IMPORTANCE DU CONGRÈS DU MANS

Ludwig : Le grand nombre de candidats plus ou moins déclarés au PS ne risque-t-il pas de désorienter les partisans socialistes ?
Jack Lang:
La question des candidatures n'est pas principale aujourd'hui. Il s'agit de mettre en ordre de marche le PS dans un esprit collectif. Personnellement, je travaille de toutes mes forces à la réussite du congrès du Mans, qui aura lieu en novembre prochain. Le choix du candidat sera opéré dans un an. Patience, patience, patience...

Blutch : Alors que la France compte 3 millions de chômeurs, la division du PS est-elle un aveu d'impuissance de l'opposition à formuler des propositions claires contre ce fléau ?
Jack Lang:
Le congrès du Mans donnera la parole aux militants socialistes. Et ils trancheront clairement entre les uns et les autres. Et une fois une majorité acquise, le PS parlera d'une seule voix, en particulier pour lutter contre le cancer du chômage.

Seb: Est ce que le congrès du Mans va marquer, selon vous, le renouveau du PS ?
Jack Lang:
C'est une condition sine qua non du renouveau. C'est une étape. Après la crise qui a malheureusement fait beaucoup de mal au PS, le congrès du Mans donnera au PS une unité, une capacité à rassembler la gauche.

Miles : Ne pensez-vous pas que le manque de renouvellement du personnel politique est l'un des problèmes majeurs en France, et cela si on le compare à nos voisins européens?
Jack Lang:
C'est assez vrai. La France est marquée par une longévité exceptionnelle du personnel politique. Ce n'est pas le seul pays dans ce cas. L'Italie, par exemple, ou le Portugal, sont dans la même situation. Etrangement, les pays du Sud en général sont attachés à une certaine expérience des responsables politiques. Les pays du Nord font plus aisément confiance à des femmes ou des hommes plus jeunes, plus neufs.

Luizou: Que pensez-vous du terrain institutionnel de la Ve république ? Doit-il être bouleversé radicalement ?
Jack Lang:
Pour moi, changer la République est une nécessité absolue. Ce n'est pas un luxe d'esthète du droit. Aujourd'hui, le pays crève d'une asphyxie du système. Une des nombreuses anomalies du système français, c'est la concentration des pouvoirs entre les mains d'un seul homme, qui, en même temps, est irresponsable politiquement, pénalement et juridiquement. C'est pourquoi je propose qu'il soit à l'avenir responsable devant l'Assemblée nationale, et que notre Assemblée nationale, qui est une Assemblée au rabais, devienne une Assemblée à part entière, comme dans les autres pays d'Europe. Ce changement profond est une nécessité absolue si l'on veut transformer la situation économique et sociale. Par exemple, nous ne pourrons vaincre la malédiction du chômage si nous ne sommes pas en mesure de mobiliser l'ensemble du pays, les travailleurs, les syndicats, les entrepreneurs, les citoyens. Ceux qui souhaitent m'interroger plus précisément peuvent m'écrire sur le site : jacklang.net. Dans mon livre Changer, édité chez Plon, je soumets plusieurs autres idées de transformations.

Gedeon: Peut-on espérer une alliance entre vous et Arnaud Montebourg ?
Jack Lang:
Pour l'heure, le NPS souhaite renverser l'actuelle direction du PS. Ce n'est peut-être pas la meilleure voie pour aboutir à un accord... Mais si, comme je le crois, nous l'emportons largement au congrès du Mans, toutes les bonnes volontés seront les bienvenues. Il y a en particulier un point sur lequel les analyses de Montebourg et de moi-même convergent : la transformation de la République.

Sören : La motion Hollande, que vous soutenez, est-elle axée sur une copie du modèle scandinave, que tous le monde semble vanter?
Jack Lang:
Oui, on peut dire cela. Nous nous inspirons évidemment des expériences politiques qui réussissent. La Suède, par exemple, parvient à la fois à créer des emplois et de la richesse économique tout en assurant un haut niveau de protection sociale et une élévation de l'éducation et de la recherche.

Djiddy: Comment analysez-vous la fuite de l'électorat ouvrier vers le FN ?
Jack Lang:
C'est un phénomène déjà très ancien. Les analyses sont multiples. Certains pensent que l'affaiblissement du PC a conduit certains électeurs protestataires à voter pour un parti de gueulards. Par ailleurs, aux dernières élections, régionales et européennes, les socialistes ont retrouvé la confiance d'une bonne partie de l'électorat populaire. Il faut pour ce faire créer une dynamique, redonner une vraie espérance, et surtout proposer des projets clairs et concrets.

LA "RIGUEUR MORALE ET INTELLECTUELLE" DE LA GAUCHE

Burkimbila : Vue de l'extérieur, la France, ces dix dernières années, semble être un pays qui se crispe, qui hésite. Que faire à gauche pour créer une nouvelle dynamique, une nouvelle espérance ?
Jack Lang:
Je pense que la gauche doit être exemplaire par sa rigueur morale et intellectuelle. Face à un gouvernement qui ne cesse de tromper les Français, nous devons tenir un langage de vérité et de courage. Par ailleurs, je crois qu'il nous faudra proposer un programme qui montrera comment nous pouvons remettre en marche l'économie et assurer concrètement l'égalité des chances. Mais on ne peut pas répondre en deux mots à une telle question... Et c'est un sujet sur lequel nous avons encore à travailler, il faut le dire. Pour moi, la gauche a une double mission : rétablir une prospérité créatrice d'emplois, donner sa chance à chaque citoyen et aussi à chaque partie du territoire national.

Korch: Une coalition avec l'UDF est-elle envisageable ?
Jack Lang:
Inimaginable. Ce serait une confusion qui ajouterait au doute et au scepticisme des Français.

Blutch : Monsieur Lang, vous n'êtes pas concret dans vos réponses. N'est-il pas temps de proposer des solutions concrètes aux questions qui vous sont posées, ici comme chaque jour dans ce pays ?
Jack Lang:
Qu'on me pose des questions concrètes, et non pas des questions générales. Je veux bien répondre à des sujets précis : l'éducation, la recherche, l'industrialisation... Mais les questions qui me sont posées sont beaucoup trop générales.

Alain: L'éducation suscite un grand intérêt dans notre pays. Quelles mesures immédiates vous semblent nécessaires ?
Jack Lang:
D'abord, redonner à l'éducation une priorité dans le budget de l'Etat. Depuis trois ans, l'éducation a été littéralement massacrée. Près de 80 000 postes ont été détruits. Naturellement, ce n'est qu'une première condition d'une politique nouvelle. Pour lutter contre les grandes inégalités sociales et culturelles, il faut imaginer, parallèlement à l'école, un véritable service public d'accompagnement des enfants, des jeunes, et même des parents. Parmi les mesures que je propose : l'obligation scolaire à 3 ans, la création de classes-passerelles pour les enfants entre 2 et 3 ans, le soutien aux associations périscolaires pour favoriser l'initiation aux sports et aux arts. Je préconise aussi pour les élèves des collèges la possibilité d'une prise en charge complète des études dirigées, la création de véritables internats, le doublement des bourses. Ensuite, au lycée, je voudrais que l'on puisse prendre des mesures concrètes pour encourager les élèves à s'orienter vers les grandes voies de formation : lettres, sciences, économie, et à les détourner des voies de garage dans lesquelles ils se réfugient parfois. Enfin, notre enseignement supérieur, aujourd'hui abandonné, aurait besoin d'un coup de booster très sérieux. Et l'une des questions importantes qui se posent pour l'avenir est la pénurie de jeunes hautement qualifiés. D'où la nécessité d'un plan pluriannuel de développement des universités et des grandes écoles.

Jclaude: Et où trouver l'argent pour ces généreux programmes éducatifs ?
Jack Lang:
La question est plus générale, c'est quelles ressources nationales pour quel type de dépenses ? On est là au cœur des choix politiques. Le gouvernement actuel accorde en permanence des cadeaux fiscaux aux plus riches, dépense dans l'arme nucléaire des sommes folles. Dans le même temps, il étouffe la recherche, l'éducation et la culture, c'est-à-dire les dépenses d'avenir. C'est un choix collectif que l'on doit opérer. Il faut améliorer les ressources fiscales, notamment en frappant les hauts revenus et les patrimoines les plus importants, il faut entreprendre des économies dans certains ministères : défense ou finances. Et à l'inverse, il faut changer de braquet en faveur des ministères de l'emploi, de la recherche, de l'éducation et de la culture.

Vincent 75: Votre réaction aux propos scandaleux de M. Baroin qui met les DOM-TOM en situation explosive ?
Jack Lang:
Je suis favorable au droit du sol. Un enfant né en France est français. Je trouve inadmissible que le gouvernement envisage de remettre en cause une grande tradition nationale. Cette tentative de remise en cause du droit du sol s'inscrit dans une politique globale anti-immigrés et anti-étrangers.

L'EUROPE : "ON EST DANS UNE BELLE MOUISE AUJOURD'HUI ! "

Gilles Deuge: Et le paramètre européen ? Comment le relancez-vous ?
Jack Lang:
On est dans une belle mouise aujourd'hui ! On attend toujours le fameux plan B promis par les responsables politiques partisans du"non". Ils avaient fait croire aux Français qu'un "non" français susciterait la mise en mouvement des peuples européens pour réclamer un traité plus social encore. La triste vérité est autre : la droite libérale gagne les élections en Allemagne et en Pologne massivement. Il est donc illusoire de faire croire que l'on pourra renégocier un meilleur traité au cours des prochaines années. Mais en même temps, je suis optimiste, et si nous gagnons les élections l'année prochaine, nous essaierons avec les gouvernements de gauche européens de relancer la flamme européenne.

Mouif: Monsieur Lang, votre position au sujet de l'envolée des prix du pétrole ?
Jack Lang:
C'est un fait, consécutif à la déstabilisation du monde opéré par les Etats-Unis. Et aussi par un certain nombre d'accidents naturels comme les divers tsunamis et ouragans. Donc il n'y a pas un gouvernement mondial qui pourrait aujourd'hui empêcher cette flambée du pétrole. On peut bien sûr tenter de négocier avec les pays producteurs. On doit aussi limiter les conséquences pour l'économie, pour les investisseurs et les consommateurs de cette hausse des prix du pétrole. Nous sommes partisans que les consommateurs puissent bénéficier d'un certain nombre de rabais, notamment lorsque les prix tendent à se stabiliser. Par ailleurs, je souhaiterais que l'on crée une taxe sur les super-profits des compagnies pétrolières à hauteur de 1 milliard d'euros, pour financer dans les régions françaises les plus pauvres des infrastructures ferroviaires ou fluviales. Enfin, je crois qu'il faut plus que jamais s'interroger sur les énergies de substitution.

Ludwig: Que peut faire le PS contre la marée libérale qui gagne l'Europe ?
Jack Lang:
Nous ne pouvons pas nous substituer aux électeurs polonais ou allemands. Nous avons déjà à convaincre nos propres citoyens. Et je suis convaincu que si la gauche l'emporte l'année prochaine, un leadership français peut contribuer à endiguer cette vague libérale. Et nous nous associerons à nos amis espagnols, portugais, nordiques, et sans doute italiens. C'est une dynamique que nous devons créer à partir d'une victoire électorale l'année prochaine.

Chat modéré par Alexis Delcambre et Fanny Le Gloanic
LEMONDE.FR | 28.09.05 | 17h54


Le Monde / Société
Le débat sur la récidive relancé après deux faits-divers

 L e ministre de la justice a reçu, lundi 26 septembre dans la soirée, trois victimes de Patrick Trémeau, un violeur récidiviste mis en examen et écroué à Paris, samedi 24. Les agressions pour lesquelles il est de nouveau poursuivi, comme les faits commis par un gardien d'immeuble de Soisy-sur-Seine (Essonne), qui a été écroué, jeudi 22 septembre, pour le viol et le meurtre d'une jeune femme, ont ravivé le débat sur la récidive.

Les victimes de Patrick Trémeau, conduites par l'Association pour la protection contre les agressions et les crimes sexuels, ont tenu une conférence de presse, lundi 26, au cours de laquelle elles ont dénoncé l'absence de "volonté politique" de l'Etat pour contrôler les récidivistes. "Les politiques sont responsables de la sortie de Trémeau, c'est comme s'ils lui avaient donné un bon pour recommencer" , a accusé Marie-Ange Boulaire, l'une de ses victimes. "Je veux que les politiques se sentent coupables, plus moi."

Patrick Trémeau, 42 ans, a été condamné deux fois pour viols, en 1987, à sept ans de réclusion, puis en 1998, à seize ans. Il a été libéré après dix ans d'incarcération, compte tenu des grâces présidentielles et des remises de peines prévues par la loi. Il est soupçonné d'avoir commis trois autres viols, dans la capitale, entre juin et septembre. Jean-Luc Cayez, 48 ans, avait lui aussi été condamné deux fois pour viols, à sept ans de réclusion en 1984, puis à vingt ans en 1991. Il avait été libéré en 2002 après avoir purgé la totalité de sa peine, toutes ses demandes de libération conditionnelle ayant été rejetées.

Les deux hommes n'étaient pas des inconnus pour la police et la justice. D'autant qu'ils venaient d'être inscrits dans le nouveau Fichier judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles (Fijais), qui vise à mieux surveiller les condamnés une fois libérés. Depuis sa mise en place le 1er juillet, 20 200 personnes ont été recensées dans ce fichier. Celui-ci a fait l'objet de 500 000 consultations par les services autorisés de la police et de la justice. Pour 87 % des délinquants sexuels déjà inscrits au fichier, une adresse a été identifiée. Ce fut le cas pour MM. Trémeau et Cayez. Leur signalement a été diffusé aux forces de l'ordre locales.

PROPOSITION DE LOI

Par ailleurs, l'inscription au Fijais doit être notifiée directement à la personne, pour qu'elle soit informée de ses obligations : elle doit signaler tout changement de domicile et se présenter au commissariat tous les six mois. Entre juillet et septembre, les services de police ont ainsi procédé à 3 000 notifications. Ils n'ont pas convoqué MM. Trémeau et Cayez.

En gestation depuis deux ans, la proposition de loi sur la répression de la récidive doit passer en seconde lecture à l'Assemblée nationale les 12 et 13 octobre. Le débat avait été relancé en septembre 2003 par le cas de Jean-Luc Blanche, un violeur récidiviste qui avait rompu son contrôle judiciaire. Le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, a depuis lors milité pour l'instauration de peines minimales automatiques pour les récidivistes, solution écartée par la chancellerie car contraire aux principes de l'indépendance des juges et de l'individualisation des peines. Le risque, pour un criminel, de récidiver, est inférieur à 5 pour 1 000.

Très largement modifiée à plusieurs reprises, la proposition de loi prévoit notamment l'instauration du bracelet électronique mobile pour les auteurs de crime sexuel, de meurtre, d'assassinat, d'enlèvement et séquestration.

M. Clément a souhaité, lundi 26, que ce bracelet puisse être utilisé de façon rétroactive sur toutes les personnes condamnées avant la promulgation de la nouvelle loi. Cette proposition avait été écartée en première lecture par le Sénat en raison d'un risque sérieux d'inconstitutionnalité. "Les événements récents vont me pousser à le prendre, et tous les parlementaires avec moi" , a indiqué M. Clément.

Nathalie Guibert
Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Société
EADS envisage de licencier M. Josserand après ses déclarations contre Thales

 L e groupe d'électronique et de défense Thales a annoncé, lundi 26 septembre, avoir décidé de porter plainte pour diffamation contre son ancien employé Michel Josserand et contre Le Monde.

Dans un entretien publié dans Le Monde daté du mardi 27 septembre, l'ancien PDG de la société Thales Engineering and Consulting (THEC), filiale de Thales, a dénoncé un système de corruption. M. Josserand estimait notamment que "Thales -devait- verser en commissions illégales entre 1 % et 2 % de son chiffre d'affaires global" . Licencié par Thales en janvier 2004, Michel Josserand a été embauché par le principal concurrent du groupe, EADS, en décembre suivant.

Dans un communiqué, Thales précise que le groupe "réitère son démenti formel à des accusations aussi mensongères que calomnieuses" . "De telles allégations portent un préjudice considérable au groupe Thales qui a mis en place les structures, les procédures et les contrôles indispensables au strict respect des règles du commerce international, et notamment, depuis 2000, de la convention OCDE sur la lutte contre la corruption" , ajoute Thales.

Dans un premier communiqué, le groupe avait rappelé que Michel Josserand avait été licencié "pour avoir commis des irrégularités dans le cadre d'un contrat pour la réalisation du tramway de Nice" et que l'entreprise avait "elle-même porté plainte pour corruption dans cette affaire" .

Le groupe européen d'aéronautique et de défense EADS, qui avait lancé en 2004 une tentative de reprise de Thales – et n'a pas complètement abandonné ce projet –, a aussi réagi à l'interview de son salarié. Dans un communiqué publié lundi soir, le groupe a annoncé qu'il envisageait de licencier M. Josserand.

"EADS est extrê mement choquée par les nombreuses allégations fallacieuses de cet article autant que par les accusations portées à l'encontre d'une grande société partenaire de notre groupe" , dit le texte. "EADS considère que de telles déclarations caractérisent un comportement professionnel inacceptable qui ne peut que l'amener à envisager une procédure de licenciement" à l'encontre de M. Josserand, ajoute le communiqué, qui conclut que le groupe "n'exclut pas d'engager d'autres actions en tant que de besoin".

Interrogé lundi soir, l'avocat de M. Josserand, Me François Lastelle, s'est déclaré "très surpris" par la réaction de l'employeur de son client, espérant qu'il s'agisse d'"un malentendu" . "Je n'ai rien vu contre EADS dans les déclarations de M. Josserand , explique Me Lastelle. J'espère que EADS ne va pas le lâcher comme ça, ce serait très surprenant de la part d'un groupe qui tient à son image de probité. Cela donnerait l'impression que Thales et EADS se sont mis d'accord pour des motifs inavouables."

Concernant la plainte en diffamation envisagée par Thales, l'avocat s'est dit "parfaitement serein" . "Nous fondons de gros espoirs sur l'enquête policière diligentée par le parquet de Paris. M. Josserand a livré de nombreux éléments de preuves aux enquêteurs" , a précisé Me Lastelle. Le conseil de M. Josserand a conclu en estimant que, "dans cette histoire, Thales est un peu l'arroseur arrosé. Ils ont voulu se débarrasser d'un gêneur, et ça leur revient dans la figure".

Dans l'entretien qu'il a accordé au Monde, M. Josserand assure que Thales a mis en place, en 2000-2001, un "code d'éthique" destiné à "formaliser le versement de commissions" . Selon lui, le système mis en place afin de déjouer "d'éventuelles enquêtes policières ou judiciaires" est connu des "responsables de Thales international et, bien sûr, -de- la direction du groupe".

D'après M. Josserand, "il y a des endroits" ou le versement de pots-de-vin est "inévitable" pour décrocher des marchés : "en Afrique, en Corée, en Grèce, en Italie" . "En France, cela dépend des intérêts politiques locaux ou nationaux" , assure l'ancien cadre dirigeant de Thales.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme
Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Société
Polémique après la démission forcée de la petite-fille de Maurice Papon
Maurice Papon arrive, le 4 décembre 1998, à l'hôpital de Pessac, près de Bordeaux, pour subir un bilan médical avant la reprise de son procès | AFP . Patrick Bernard
AFP . Patrick Bernard
Maurice Papon arrive, le 4 décembre 1998, à l'hôpital de Pessac, près de Bordeaux, pour subir un bilan médical avant la reprise de son procès

 C' est une femme qui fuit aujourd'hui une exposition qu'elle n'a pas sollicitée. Rattrapée par un nom – Papon – qui est celui de son grand-père et qu'elle ne porte pas. Il a suffi d'un écho paru dans Le Parisien du 22 septembre. Le quotidien faisait état des liens familiaux entre la conseillère technique, recrutée début septembre au cabinet du ministre délégué aux anciens combattants, Hamlaoui Mekachera, et l'ancien secrétaire général de la préfecture de Gironde, Maurice Papon, condamné en 1998 pour complicité de crimes contre l'humanité. A peine révélée cette information, la jeune femme, non fonctionnaire, était contrainte de remettre sa démission.

"Nous n'avons rien à lui reprocher, et sa présence dans un autre ministère ne pose évidemment aucun problème " , a expliqué à l'AFP le directeur de cabinet du ministre, Gilles de Lacaussade. "Mais nous sommes dans un ministère très particulier, celui de la mémoire, en contact permanent avec des associations de déportés, des familles de victimes. Très rapidement, d'ailleurs, des fédérations de déportés ont protesté" , ajoutait-il, concluant que "cette situation ne pouvait pas durer" .

Le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, en a été outré. Dès vendredi, il a écrit à M. Mekachera pour protester contre ce qu'il considère être une décision injuste. Il adresse par ailleurs une mise en garde, visant tout à la fois les médias et les autorités politiques. "Nous sommes dans un système de responsabilité individuelle , prévient M. Delevoye. Attention à ne pas nous laisser entraîner sur la pente de la responsabilité collective. En aucun cas, les enfants ou petits-enfants ne doivent payer la facture pour les fautes commises par un de leur ascendants."

Le fondateur de l'Association des fils et filles de déportés juifs de France, Serge Klarsfeld, a pour sa part estimé que cette éviction relevait d'"un cas de discrimination pure et simple" .

Le gouvernement semble depuis avoir pris la mesure qu'"une erreur a été commise" . L'explication avec le ministère des anciens combattants a été suffisamment sévère pour que ce dernier se refuse à présent à tout commentaire. Et Matignon a récupéré la gestion de ce dossier afin de tenter de réparer un préjudice professionnel et humain.

M. Delevoye, chez qui la conseillère avait également été chargée des relations avec le Parlement lorsqu'il était au ministère de la fonction publique, n'en voit pas moins un signe inquiétant. Il avait lui-même alors été alerté, "par un syndicaliste" sur ses ascendances familiales, confie-t-il, mais s'était refusé à "donner une prime à ceux qui pourchassent une dame qui traîne ça depuis son enfance" .

"Les médias doivent réfléchir aux conséquences des informations qu'ils exploitent" , avertit-il. Le médiateur se dit inquiet d'"une certaine forme d'instrumentalisation susceptible de donner une prime à la loi de la vengeance" . "Nous ne sommes pas dans un Etat de pénitence" , estime M. Delevoye. Il invite d'autre part les responsables politiques à assumer leurs responsabilités : "Ils doivent être attentifs au fait que leur rejet est l'expression de leur propre faiblesse. Attention à ne pas alimenter cette image de faiblesse."

Patrick Roger
Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Carnet
Nécrologie
Jacques Proust, spécialiste de la littérature du XVIIIe siècle

 J acques Proust, dont les travaux sur Diderot font toujours référence, est mort, lundi 19 septembre, à Montpellier. Il était âgé de 79 ans.

Né le 29 avril 1926 à Saintes (Charente-Maritime), Jacques Proust est élève de l'Ecole normale supérieure en 1947 et obtient l'agrégation de lettres trois ans plus tard. Chargé d'enseignement à la faculté des lettres de Montpellier en 1961, puis professeur en 1963, il fait presque toute sa carrière à Montpellier jusqu'à sa retraite en 1986, laissant le souvenir d'un enseignant rigoureux, à l'écoute des étudiants.

L'enseignement de Jacques Proust était nourri par ses travaux de recherche. Il fut le "maître des études consacrées à Diderot" (Pierre Chaunu). En 1962, ayant soutenu, sous l'égide d'André Pommier, une thèse sur Diderot et l'Encyclopédie (dernière édition en 1995 chez Albin Michel), il édite plusieurs textes du philosophe, Sur la liberté de la presse, Quatre contes, et devient ainsi, en 1964, secrétaire du comité national chargé d'éditer les oeuvres complètes de Diderot.

A la fin des années 1960, Jacques Proust établit le plan général de l'édition et, avec Herbert Dieckmann et Jean Varloot, en prend la direction. En 1976, il publie avec John Lough quatre volumes réunissant les articles de L'Encyclopédie. Sa dernière contribution à l'édition date de 1989. Le Japon, présent dans ses travaux dès 1977, a pris une place de plus en plus importante ces dernières années : il étudiait particulièrement le passage et la réception au Japon des idées, des savoirs et des croyances du XVIIIe siècle.

Non content de mener une recherche active et brillante, Jacques Proust a encouragé celle des autres : il fonde, en 1968, le Centre d'étude du XVIIIe siècle de Montpellier (aujourd'hui IRCL) qui sera rattaché au CNRS et lancera les premières missions de recherche dans les bibliothèques et les archives d'URSS et de Pologne ; de 1987 à 1989, il dirige la Maison du Liban à la Cité internationale.

Homme de convictions, hostile à la guerre d'Algérie, il avait adhéré en 1955 au Parti communiste qu'il quittera en 1976. Son engagement politique n'était pas séparable de son profond attachement à la foi protestante.

Dominique Triaire - Vice-président de l'université Paul-Valéry - Montpellier-III
Article paru dans l'édition du 28.09.05

cet article figure ici pour un motif très personnel, et sans nulle valeur documentaire manifeste: Jacques Proust fut un de mes professeurs, en ces temps déjà assez lointains où j'étudiais à l'Université Paul-Valéry, et si la nouvelle de sa mort m'a fait chagrin, le fait que Le Monde, dans sa rubrique nécrologique lui rende, un hommage (mérité), m'a fait plaisir. Outre d'être LE spécialiste de Direrot, c'était un fin connaisseur de la littérature et de la culture du XVIII° siècle et un professeur de grand talent, sachant nous intéresser à son savoir. Et en plus, il était très plaisant (dans le sens de “drôle”, amusant — et parfois ironique).


Le Monde / Europe
L'Estonie, aux prises avec son passé nazi, a accueilli le président israélien
STOCKHOLM correspondance

 R ien ne dit que l'Estonie sera désormais en paix avec son passé. Mais la décision d'un tribunal de l'ouest de cet Etat balte marque ce qui pourrait être l'épilogue d'une funeste histoire. Le tribunal de Laane a décidé, le 14 septembre, qu'un monument dédié "aux combattants de la liberté" mais représenté par un soldat en uniforme SS sera rendu à son propriétaire, un vétéran de cette époque, après avoir fait scandale l'an dernier.

Le monument maudit croupissait depuis un an dans un commissariat, après avoir été arraché de force par la police le 2 septembre 2004, une dizaine de jours seulement après sa mise en place, car il "portait tort à l'image de l'Estonie".

Le bas-relief érigé à Lihula montre un soldat en uniforme nazi, et une plaque le dédiait aux Estoniens qui ont combattu en 1940-1945 pour la restauration de l'indépendance. La plupart de ces vétérans sont des membres de la 20e division SS estonienne, qui sont considérés par beaucoup d'Estoniens comme des héros s'étant battus contre les Soviétiques : ces derniers sont, pour eux, un ennemi bien plus honni que les nazis, ce qui met les Estoniens en porte-à-faux à l'égard de la plupart des Européens.

Ce fossé s'est confirmé en mai 2005 lors des célébrations de la fin de la seconde guerre mondiale. Le président estonien tout comme son homologue lituanien avaient refusé de faire le voyage de Moscou : pour eux, la fin la guerre avait signifié le début de l'occupation soviétique.

La décision du tribunal intervient alors que Moshe Katsav vient d'effectuer la première visite d'un président israélien dans les Etats baltes. Le chasseur de nazis Simon Wiesenthal, récemment décédé, avait régulièrement dénoncé les dérapages en Estonie mais aussi en Lettonie, où des vétérans SS défilent tous les ans.

Lors de sa visite en Estonie, le 19 septembre, le président israélien a adopté un discours plus apaisant, évoquant le renouveau de la vie juive et l'absence virtuelle d'antisémitisme en Estonie. La méthode pourrait se révéler payante, tant les Estoniens se sont braqués ces dernières années à force d'être traités collectivement de collaborateurs.

Moshe Katsav a participé à une cérémonie au camp de concentration de Kloog, où près de 2 000 juifs ont été assassinés par les nazis le 19 septembre 1944. M. Katsav a également posé la première pierre de la future synagogue de Tallinn. Le geste est hautement symbolique puisqu'il s'agira du premier bâtiment juif construit dans le pays depuis la seconde guerre mondiale.

A ce jour, les autorités estoniennes n'ont pas abandonné l'idée d'honorer la mémoire des "combattants de la liberté". Mais la façon "appropriée" de le faire n'a pas encore été trouvée.

Olivier Truc
Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Entreprises
Walter Butler, énarque et proche de Dominique de Villepin

 À  une carrière dans un grand groupe ou dans la politique, Walter Butler, 49 ans, a préféré créer son entreprise de capital-risque en 1991. Butler Capital Partners, qu'il préside, gère aujourd'hui plus de 300 millions d'euros.

Américain par son père et brésilien par sa mère, M. Butler a débarqué en France à 8 ans, après le divorce de ses parents. Un choc. "Je quittais une ville ensoleillée -Rio de Janeiro- pour un pays froid, séparé de mon père", se souvient-il. Son parcours semble tracé : Institut d'études politiques de Bordeaux, maîtrise de droit, ENA en 1980. C'est Dominique de Villepin qui le fait réviser. Echanges de bons procédés : M. Butler aidera quelques années plus tard, le frère de M. de Villepin à entrer à l'ENA. Sorti parmi les meilleurs de sa promotion, M. Butler choisit l'inspection des finances.

Après des missions de contrôle de perceptions en France et en Afrique, il devient en 1986 conseiller de François Léotard au ministère de la culture. M. Butler travaille aux côtés de Jean-Marie Messier, qu'il avait croisé à l'ENA, pour privatiser TF1. "C'était passionnant. Mais j'ai compris à ce moment-là que je ne ferais ni politique ni carrière dans un grand groupe. J'y serais mort d'ennui", affirme aujourd'hui M. Butler. Il se fait embaucher par la banque américaine Goldman Sachs, part aux Etats-Unis et découvre le capital-risque.

Retour en France, en 1991. M. Butler fait jouer son carnet d'adresses. L'homme d'affaires François Pinault, proche de son beau-père, conseille à M. Butler d'entrer au capital de l'agence de publicité BDDP en 1994. "En trois ans, nous avons multiplié notre mise -15 millions d'euros pour 20 % du capital - par quatre".

Butler Capital Partners n'a pas de secteur de prédilection. En douze ans, la société a investi dans France Champignons, César (déguisements), le groupe Flo ou la SSII Osiatis. "Nous restons en moyenne cinq ans dans le capital et visons trois fois le capital investi", indique M. Butler. Boulimique de travail, ce féru d'art contemporain, a intégré en 2004 le Conseil d'analyse économique.

Nathalie Brafman
Article paru dans l'édition du 28.09.05

Découvrez les réactions des abonnés du Monde.fr à la lecture de cet article.

GB ♦ 29.09.05 | 18h01 ♦ Je me délecte en lisant ces commentaires. Ce qu'on y voit, en filigrane, c'est que les francais, ou pour le moins les lecteurs du Monde, continuent de vivre dans une douce illusion, confortable, selon laquelle les puissants qui ont de l'argent sont méchants, et les humbles sont gentils. La pauvreté et la vulnérabilité érigées en valeur morale en soi! A l'inverse, le pouvoir ou la richesse, même mérités, sont l'oeuvre du mal. Après 2000 ans d'histoire chrétienne on a pas fait bcp de progrès.
Docteur Dominique Buresi ♦ 28.09.05 | 14h33 ♦ Le MONDE avait bien voulu publier ,il y a deux ans environ , dans le courrier des lecteurs ma correspondance intitulée ''La Corse en perdition ''.Les faits actuels confirment mon triste constat. M.Paul Giaccobbi exprime tout haut ce qu'une majorité silencieuse en Corse ressent,l'avenir semblant sans perspectives .Les responsabilités sont largement partagés et les corses ne peuvent s'en exonerer;le debat politique se résumant trop souvent à des slogans. Corsica n'avvare mai bene disait Paoli .
thom ♦ 28.09.05 | 11h48 ♦ C'est beau cette faculté de capter absolument toute l'énergie sociale qu'il est possible de capter autour de soi pour grimper sans scrupules dans la vie.
Sampieru ♦ 28.09.05 | 11h39 ♦ Pour avoir travaillé avec eux (ancien client), je peux vous dire que BCP a un solide palmarès de redressement d'entreprises qui seraient mortes sants eux. Des milliers d'emplois sauvés. POur un gros bénéfice certes, mais à la hauteur du risque pris lorsqu'il s'agit de reprendre des sociétés systématiquement moribondes. Que personne d'autre ne veut.
Atahualpa ♦ 28.09.05 | 10h43 ♦ Cette relation amicale ajoute un peu plus de suspicion sur l'enjeu qui entoure cette affaire.
citoyenX ♦ 28.09.05 | 02h34 ♦ Les anciens élèves de l'ENA, c'est devenue une vraie mafia, dont le seul moteur est l'intérêt personnel et non plus le service de l'Etat et l'élaboration de solutions de bon sens pour réformer la gestion publique. Sujet tabou !
geisberg ♦ 28.09.05 | 02h20 ♦ Pas mal. je n'ai pas de sympathie particulière pour ceux qui pompent les subventions publiques, engagent des effectifs pléthoriques, fournissent un service foireux, La Société devrait simplement mettre la clef sous la porte et arrêter de dilapider mes impôts. Mais peut-on pour autant éprouver autre chose qu'un grand dégoût face à ce qui apparaît effectivement comme un autre vol organisé, drapé dans les oripeaux de la respectabilité, de la compétence, de l'honneur, etc...?
zevab ♦ 27.09.05 | 23h05 ♦ Par quel hasard curieux ce monsieur Butler est-il le seul volontaire à la reprise de la SNCM? Cette société connaitra-t-elle une fin identique à celle du groupe Flo, racheté par ce monsieur, et dont les boutiques ont récemment été fermées? Lorsqu'il n'y aura plus rien à gérer en France la vie sera plus facile pour ceux qui ont eu mission de prendre soin de ce pays.
JEAN-LUC B. ♦ 27.09.05 | 21h34 ♦ Tout va bien dans le meilleur des mondes, les grands investissent pour récupérer trois fois la mise et tant pis pour les drames sociaux. C'est la capital risque, ...des banlités mais attention à la nuit du 4 août certains privilèges peuvent être repris ou détruits.
PATRICK O. ♦ 27.09.05 | 20h17 ♦ Les copains et les coquins. Rien de nouveau sous le soleil. Les puissants, amis des puissants, aident les puissants.


Le Monde / Sciences
Voyager 1 s'aventure dans l'au-delà du système solairee

 D puis le 16 décembre, Voyager 1 est la première création humaine à naviguer au-delà de l'une des principales frontières du système solaire. L'écho de cette nouvelle considérable a été assourdi par son annonce prématurée, en 2002, alors que la sonde américaine ne faisait qu'effleurer cette limite. Cette anticipation avait déclenché une polémique entre astronomes participant à la mission, divergente sur la situation exacte de l'engin, et avait voilé de perplexité l'intérêt du grand public. Cette fois, plus de doutes. La publication dans la revue Science du 23 septembre d'une série d'articles concordants vaut officialisation définitive de l'événement.

Quatre sondes dans la course aux confins

La dernière aura été la première. Lancée en quatrième position dans la course aux confins du système solaire, le 5 septembre 1977, Voyager 1 aura finalement doublé ses concurrentes, toutes américaines, pour atteindre le choc terminal en tête. Sa soeur, Voyager 2, pourtant lancée quelques jours plus tôt, le 20 août, mais sur une route moins directe, aura été laissée sur place d'emblée, dès le passage près de Jupiter.

Auparavant, deux sondes Pioneer avaient, elles, pris de l'avance, puisqu'elles ont été lancées en 1972 et 1973. Pioneer 11, qui navigue en direction de la constellation de l'Aigle, ne dispose plus d'énergie et donc ne peut plus être pilotée ni donner de nouvelles depuis 1995. Quant à Pioneer 10, partie la toute première, Voyager 1 l'a "doublée" en 1998, et la distance désormais de plus de 1 milliard de kilomètres. Le retard de cette sonde, qui s'est éteinte en 2003, par rapport à son tableau de marche prévu intrigue les astronomes. Ils cherchent à comprendre depuis plusieurs années cette "anomalie Pioneer" (Le Monde du 3 novembre).

Lancée en septembre 1977, Voyager 1 aura navigué plus d'un quart de siècle pour atteindre le "choc terminal" du système solaire, à une distance que ses instruments ont permis de fixer à 14,1 milliards de kilomètres du Soleil, soit, en langage d'expert, à 94 unités astronomiques (une UA correspond à la distance moyenne entre Terre et Soleil, environ 150 millions de kilomètres). A titre de comparaison, Pluton, de loin la plus excentrée des planètes de notre système, ne se trouve qu'à 40 UA de notre étoile. Après avoir rendu visite à Jupiter, Saturne, Neptune et Uranus, en bousculant au passage nos connaissances sur ces géantes gazeuses, la sonde aura traversé les ténèbres en solitaire durant plus de la moitié de son périple.

Le "choc terminal" que Voyager 1 a franchi en décembre marque un changement radical dans le comportement du vent solaire, alimenté en permanence par les particules échappées des couches hautes de l'atmosphère du Soleil. Ce gaz s'élance à des vitesses supersoniques jusqu'aux confins du système, se comportant en ambassadeur de la puissance de notre étoile dans les zones les plus reculées. En protecteur de ses planètes aussi, puisque le cocon de plasma qu'il tisse autour de notre maison commune l'isole de la plupart des agressions provenant du milieu interstellaire. Sa force ne s'incline que devant les restrictions que lui ont imposées certains astres, notamment la Terre, qui a développé ses propres défenses contre ses excès, pour pouvoir accueillir la vie. Elle n'abdique que devant la fermeté du "choc terminal".

Là, le vent solaire freine brutalement pour passer à des vitesses nettement inférieures à celles du son. Comme s'il prenait brusquement conscience, après avoir foncé sans entraves pendant des milliards de kilomètres, du changement de milieu qui s'annonce. De fait, une fois le choc dépassé, le gaz d'origine solaire va continuer, plus progressivement, à adapter sa vitesse pour pouvoir se mélanger avec les courants interstellaires.

Voyager 1 est aujourd'hui le premier explorateur de l'histoire humaine à décrire cette zone de régulation baptisée "héliogaine". Au sortir de ce secteur tampon, il traversera l'héliopause, où les particules solaires achèvent de se fondre dans les vents du grand large galactique, marquant officiellement la fin de l'héliosphère, l'aire d'influence de notre Soleil. Devant le vaisseau ne restera plus qu'une ultime borne : le choc d'étrave provoqué par la vitesse (100 000 km/h) à laquelle notre étoile et son héliosphère traversent le milieu ambiant. Un peu comme un bateau facilite sa progression en séparant les flots grâce au mouvement d'une vague qui court juste devant sa proue.

Voyager 1 doit à une chance inouïe la possibilité de témoigner de ces phénomènes. Car, dans les années 1970, ses concepteurs ignoraient tout de la direction du Soleil à travers son petit coin de Voie lactée. De ricochet en ricochet autour des planètes visitées, le hasard a voulu que la sonde quitte le système solaire par l'avant, vers le "nez" que forme l'héliosphère en rencontrant la résistance du milieu interstellaire. "Si la sonde était sortie par l'arrière , explique Rosine Lallement, du service d'aéronomie du CNRS, elle aurait mis beaucoup plus de temps à rencontrer la limite. Elle se serait sans doute éteinte avant de l'atteindre." Le sort a placé l'engin en éclaireur inédit du mouvement du Soleil, ouvrant, à environ 180 000 km/h, la route que l'ensemble du système parcourt à raison de 4 UA par an.

Cette situation privilégiée compense largement un handicap que ses pilotes à distance ont longtemps dissimulé. Pour la première fois, dans Science , ils reconnaissent explicitement que Voyager 1 souffre depuis plusieurs années de la panne de son instrument principal, un détecteur de plasma qui aurait permis d'obtenir une mesure directe de la vitesse du vent solaire. "Les résultats de cet appareil n'étaient jamais mentionnés , raconte Mme Lallement. Les initiés savaient qu'il était en panne et qu'il allait falloir déduire la position de l'engin de l'analyse comparée des évolutions du champ magnétique et des particules à hautes énergies. C'était possible, mais beaucoup plus compliqué."

De fait, la polémique de 2002 s'est largement nourrie de cette absence de juge suprême qui aurait pu départager les observateurs des particules, qui tiraient des variations qu'ils observaient la conviction que le "choc terminal" avait été franchi, tandis que les scrutateurs du champ magnétique ne constataient aucune évolution. Ce sont sans doute des mouvements précurseurs du choc ultime qui avaient conduit à ces divergences. Depuis décembre, les données des instruments, qui mettent seize heures à nous parvenir d'une contrée si éloignée, concordent toutes. Les signes du grand passage ont été déchiffrés, sans l'aide du précieux détecteur aux défaillances passées sous silence.

Pourquoi ce mensonge par omission ? Parce qu'on peut approcher les monstres du système solaire, braver durant des décennies l'immensité glacée, et néanmoins trembler chaque année devant les arbitrages budgétaires de la NASA. Les promoteurs de la mission craignaient que l'allongement des délais, ajouté à cette panne inopinée, ne finisse par attirer l'attention des contrôleurs des coûts. La bonne nouvelle de l'hiver dernier est ainsi tombée pile, au moment où la NASA, prise à la gorge, envisageait sérieusement d'abandonner l'une des plus belles missions qu'elle ait jamais lancées.

Avec la révélation tardive de la panne, les hommes de Voyager ont même pu réussir un joli coup tactique. Le succès a sans doute assuré le financement de Voyager 1 jusqu'à l'épuisement probable de son énergie, vers 2020. Et ils ont aussi démontré que sa jumelle, Voyager 2, méritait tout autant de soins. Lancée quelques jours avant la numéro 1, celle-ci a pris du retard sur la route, mais elle dispose encore de l'intégralité de ses instruments. Son arrivée vers le choc terminal est prévue vers 2009. Elle pourra alors profiter de son parfait état de marche pour confirmer les trouvailles de son aînée, placée aux avant-postes de phénomènes que l'homme n'avait encore pu observer.

Jérôme Fenoglio
Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Sciences
Un changement de bulle risqué, dans 2 millions d'années

 L es lignes qui suivent sont réservées aux cœurs bien accrochés et non sujets aux angoisses de l'avenir. Car tout bouge dans notre galaxie, aux limites de la nausée et dans des directions qui ne présagent pas forcément que du bon. Au manège emballé qui fait tourner la Voie lactée autour de son centre à environ 250 000 km/h, s'ajoutent les mouvements locaux. Voyager 1 vient ainsi de se placer en tête du cortège formé par le Soleil et ses planètes qui traversent leur milieu ambiant, protégés par l'héliosphère, à la vitesse relative de 100 000 km/h. Vers où ?

Depuis plusieurs années, l'astronéphographie, science naissante de l'étude des nuages galactiques locaux, tente de cartographier notre itinéraire. Actuellement, le Soleil entraîne son système au sein d'un nuage dont les particules clairsemées n'opposent guère de résistance au mouvement. "A côté des nébuleuses de toutes les couleurs photographiées par le télescope spatial Hubble, notre nuage est mille fois moins dense", explique Rosine Lallement, du service d'aéronomie du CNRS.

DISPARITION DE LA VIE

Dans environ deux mille ans, nous quitterons ce "nuage local", comme l'ont appelé les astronomes, pour passer dans son voisin. Jusque-là pas d'inquiétude. Ce chapelet de nuages inoffensifs est lui-même contenu dans la "bulle locale", un coin de galaxie de 100 parsecs de côté (unité favorite des astronomes pour les grandes distances, un parsec égale 3,2 années-lumière, soit 30 millions de millions de kilomètres). Le Soleil traverse sans encombre les nuages de cette immense bulle de gaz raréfié depuis dix millions d'années.

Mais nous approchons de la sortie, et là les choses pourraient se compliquer. La vitesse et la direction de notre étoile nous destinent à pénétrer, dans environ 2 millions d'années, dans la bulle voisine, nommée Ophiuchus. Or celle-ci apparaît beaucoup plus dense que notre "bulle locale". Que se passera-t-il lorsque l'héliosphère rencontrera ces gaz très concentrés ?

De premiers modèles, encore très parcellaires, estiment qu'elle pourrait s'effondrer sous l'augmentation de la pression. Situé à 14 milliards de kilomètres du Soleil, le choc terminal pourrait se répercuter jusqu'à l'orbite terrestre. Ces hypothèses conduiraient à de nouvelles glaciations et à un scénario de disparition de la vie sur Terre – mais à une échéance bien plus rapprochée que celle de la fin du Soleil dans plusieurs milliards d'années.

J. Fe.
Article paru dans l'édition du 28.09.05


Le Monde / Sciences
Forte augmentation des gaz à effet de serre depuis 1990

 L es gaz à effet de serre, dont le dioxyde de carbone (CO2), ont augmenté de 20 % entre 1990 et 2004 sur la planète, d'après un nouvel indice publié, mardi 27 septembre, par l'Agence fédérale américaine océanographique et atmosphérique (NOAA), à partir des travaux de son laboratoire de Boulder (Colorado).

Cet indice de mesure des émissions liées au réchauffement atmosphérique (Annual Greenhouse Gas Index, ou AGGI) sera publié chaque année. Il traque dans l'atmosphère l'accumulation de ces gaz provenant de l'activité industrielle, des gaz d'échappement automobile ou de phénomènes naturels, à partir d'un réseau d'observatoires et d'une centaine de sites, de l'Arctique au pôle Sud. De 2003 à 2004, l'indice AGGI a augmenté de 1,12 %.

David Hofmann, directeur de la NOAA, a expliqué que "cet indice servira de point de repère pour mesurer le succès ou l'échec des efforts mis en œuvre pour réduire les émissions de CO2 et des autres gaz à effet de serre". Selon les calculs du laboratoire de la NOAA à Boulder (Colorado), le CO2 représente environ 62 % des gaz à effet de serre en 2004.

UN JALON POUR KYOTO

La NOAA mesure les émissions de gaz à effet de serre depuis 1979. Elle a choisi 1990 comme base de calcul de son nouvel indice, année qui correspond à celle choisie dans le protocole de Kyoto comme jalon des futures réductions ou augmentation de ces gaz.

L'accroissement annuel le plus important des émissions de gaz à effet de serre a été observé de 1987 à 1988 avec 2,8 %, hausse en grande partie liée à l'apparition cette année-là du courant marin chaud El Niño.

La plus faible augmentation de ces gaz a été enregistrée en 1993, avec une hausse de 0,81 % par rapport à 1992. Les émissions avaient cru fortement en 1991 avec l'éruption du volcan Pinatubo aux Philippines.

Avec AP
LEMONDE.FR | 28.09.05 | 10h12


Le Monde / Chats
Avons-nous besoin des OGM ?
L'intégralité du débat avec Guy Riba, directeur général délégué de l'INRA, mercredi 28 septembre 2005.

Lolo : Comme consommateur, en quoi les organismes génétiquement modifiés (OGM) m'apportent-ils quelque chose ?
Guy Riba :
Il est clair qu'aujourd'hui, les organismes génétiquement modifiés qui sont sur le marché n'apportent rien au consommateur, ni en matière de prix, ni en matière de sécurité des aliments, ni en matière de qualité nutritive. Pour autant, il se peut que dans le futur, de nouveaux OGM soient conçus et qu'ils aient un intérêt pour le consommateur, soit parce que les produits seront moins chers, soit parce qu'ils seront meilleurs pour la santé.

Bastien : Pourquoi les OGM font-ils si peur ?
Guy Riba :
Je ne sais pas pourquoi les OGM font si peur. Je pense qu'ils sont apparus à un moment où il y avait des problèmes qui étaient induits par des pratiques de recherche et que la polémique sur les OGM s'est trouvée synchrone de ces problèmes-là. Donc aujourd'hui, il faut tenir compte de ce débat et essayer de reprendre les questions les unes après les autres, et de développer la controverse sur chacune de ces questions pour que peu à peu les opinions convergent, soit pour l'interdiction de tel ou tel OGM, soit pour le développement de tel ou tel autre.

Zarma : Les OGM s'appliquent-ils à toutes les cultures ? Maïs, blé, légumes, etc. ?
Guy Riba :
Pour l'instant, les OGM ne s'appliquent pas à toutes les espèces. Les espèces pour lesquelles on a majoritairement des variétés transgéniques sont le maïs, le colza et le coton. Aujourd'hui, dans le marché public, il n'y a pas de légume transgénique, pas de fruit transgénique.
Sur les marchés français et à l'étranger, il n'y a que des papayes, dont la commercialisation est très limitée. Pour autant, la science est capable de faire des espèces transgéniques dans plusieurs espèces de fruits ou de légumes. Et peut-être un jour verra-t-on des espèces de fruits et de légumes. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.

Zarma : Qu'est-ce qu'il l'explique ? On n'est pas assez avancé dans la recherche ?
Guy Riba :
En effet, on n'est pas assez avancé dans la recherche, on n'est pas capable de maîtriser toutes les questions. Et puis les consommateurs, de façon évidente, sont réservés. Des recherches déjà engagées ont même été arrêtées en attente d'un plus grand engouement des consommateurs pour ces produits-là.

David : Est-il exact que les semences de certains OGM sont stériles et donc non réutilisables ?
Guy Riba :
Pour l'instant, les semences des OGM ne sont pas stériles. Elles peuvent être réutilisées. Mais il faut savoir que pour beaucoup d'espèces, leur réutilisation ne présente pas d'intérêt parce que les variétés cultivées sont hybrides. Cela n'est pas lié à la problématique des OGM, mais au développement génétique des espèces. Depuis plus de cinquante ans, les gens cultivent des maïs hybrides et, chaque années, sont obligés d'acheter une semence. Donc le fait qu'elle soit OGM ne change rien.
Il y a un deuxième aspect : il y a six ou sept ans, un brevet avait été déposé pour rendre les semences stériles. Et l'idée était d'empêcher le flux de pollen. Du coup, on réduisait les incertitudes à l'égard de l'environnement. Mais ce brevet, appelé "Terminator", a été rejeté, parce que justement il obligeait à l'achat régulier de semences. Il a fait l'objet d'une vive polémique et a été abandonné. Ceux qui l'ont promu n'avaient pas prévu ça pour obliger les agriculteurs à acheter des semences, mais pour limiter les flux de pollen.

DES RISQUES INEXISTANTS ?

Romain : Quel est le risque réel pour l'environnement ? La dissémination du "transgène" est-elle vraiment à craindre ?
Guy Riba :
A mon avis, il faut regarder au cas par cas. Si l'on prend le maïs, aujourd'hui, il n'y a à mon sens aucun risque pour l'environnement à cultiver du maïs transgénique. S'agissant de colza ou de betterave, il faut au préalable que l'on évalue les risques, notamment ceux liés à la capacité de ces espèces cultivées à se croiser avec des espèces proches sauvages, non cultivées.
C'est la raison pour laquelle nous, nous plaidons pour que des essais à grande échelle puissent être organisés pendant un temps suffisant pour caractériser et évaluer ces effets, et concevoir des méthodes pour les gérer.

Froid : Connaît-on précisément les conséquences des OGM en ce qui concerne la santé ? Des études ont-elles été menées ?
Guy Riba :
Des études ont été menées. De tout ce qui a été fait aujourd'hui, toutes les études conduites, à court ou moyen terme, n'ont jamais rien montré. Aucun effet néfaste sur la santé n'a été révélé. Par ailleurs, aujourd'hui, il y a 80 millions d'hectares de plants transgéniques cultivés dans le monde, et dans 70 % des produits alimentaires transformés, il y a soit des dérivés de maïs, soit des dérivés de soja.
Par conséquent, on peut considérer que des millions de personnes mangent chaque jour des aliments contenant un ingrédient dérivé d'une culture transgénique. Et ce recul acquis aujourd'hui nous permet de considérer que les risques pour la santé induits par les OGM actuels sont inexistants.

Sophie : Le soja est de plus en plus utilisé actuellement en remplacement du lait, y compris dans les laits pour nourrissons. Quels sont les risques éventuels liés à l'utilisation du soja transgénique dans ce contexte ? Y a-t-il des études effectuées à ce sujet ?
Guy Riba :
Quand une plante transgénique est proposée sur le marché, il y a plusieurs types d'évaluation du risque qui sont faits. D'abord, des études à partir de la plante entière, qui est ingérée par des vaches, des rats, des souris, selon des protocoles toxicologiques bien précis, et on regarde au cours du temps comment évoluent le poids des animaux, leur développement, mais aussi s'ils meurent, on regarde leurs pathologies internes éventuelles. Et jusqu'ici, aucun risque n'a jamais été révélé, y compris pour le soja.
Deuxièmement, lorsque ces variétés transgéniques ont une vocation phytosanitaire, on applique sur celles-ci un pesticide ; on regarde le métabolisme de ce pesticide dans la plante, et on regarde ses effets toxicologiques. Là encore, on n'a jamais rien observé au niveau pathologique. On peut toujours dire que tout n'a pas été fait, il n'empêche qu'aujourd'hui, je le répète, avec les connaissances acquises, les tests réalisés et le recul que l'on a sur leur consommation, on peut dire que les risques induits par les variétés transgéniques pour la santé humaine sont inexistants.
Rien n'est révélé. Donc, pour moi, les vraies questions induites par le développement des OGM sont de deux natures : d'une part, les risques éventuels pour l'environnement, qui, comme je l'ai dit, doivent être étudiés au cas par cas puis d'une manière globale, et d'autre part, les risques économiques.

Sophie : Estimez-vous avoir le recul nécessaire pour affirmer l'innocuité des OGM sur des organismes plus sensibles, comme ceux des nourrissons ? Je pense à des risques à long terme.
Redas : Ne pensez-vous pas qu'on manque de recul pour évaluer les conséquences sur la santé et la biodiversité ? L'amiante n'est pas dangereux non plus à court et moyen terme, mais tue à long terme...
Guy Riba :
Il faut bien séparer la problématique santé publique de la problématique environnementale. En ce qui concerne la santé publique, toutes les commissions, tous les experts, tous les tests et le recul que j'évoquais tout à l'heure, tout cela converge pour dire que les risques induits par les OGM existants à l'égard de la santé publique sont des risques mineurs.
Personne ne peut dire que les risques n'existent pas. Personne ne peut dire qu'il ne se passera jamais rien. Mais on peut dire que pour l'instant, nous n'avons rien observé.
En revanche, à l'égard de l'environnement, des effets non désirables ont été observés. C'est la raison pour laquelle je considère que les efforts de recherche et les conditions de mise sur le marché doivent privilégier l'examen des risques pour l'environnement. Par exemple, ce peut être la capacité d'invasion de l'écosystème par la plante transgénique, ou la capacité du pollen de la plante transgénique à se retrouver dans des espèces sauvages non cultivées. Dans ce cas, on voit bien que le pollen, en se diffusant, entraînera la diffusion du transgène. A mon avis, c'est cela qu'il faut prioritairement étudier.

Yop : Etant donné l'impact probable, durable et général sur l'environnement, le risque est tout de même conséquent : conservez-vous des souches de l'existant non modifiées ?
Guy Riba :
C'est une très bonne question. Au moins nous, à l'INRA, nous avons considéré que le fait de voir des approches biotechnologiques se développer obligeait l'organisme à avoir une politique renforcée en matière de ressources génétiques sauvages. Donc oui, pour la plupart des espèces cultivées, nous disposons de ressources génétiques qui regroupent des variétés ou des isolats venus du monde entier. On fait ça pour le blé, pour le maïs, pour l'ail, pour l'échalote, pour la luzerne, etc. Et on le fait aussi pour les animaux et pour les micro-organismes.

LES AGRICULTEURS, DÉPENDANTS DES SOCIÉTÉS DE SEMENCE

MoiMiaou : Les OGM peuvent être intéressants au niveau productivité agricole, certes. Mais à quoi cela sert-il si, comme les médicaments non génériques, ils ne sont diffusés sur la planète que sous brevet payant, inaccessibles aux populations peu "friquées" ? On referait le scénario désastreux des molécules anti-sida ? Comment garantir l'autosuffisance alimentaire dans ce nouveau cadre ?
Guy Riba :
C'est une question difficile. Je vous ai dit tout à l'heure que pour beaucoup d'espèces cultivées, on utilise, partout dans le monde, des variétés hybrides. Donc déjà, dans ce cas-là, l'agriculteur est déjà dépendant de la société qui lui vend la variété. Que celle-ci soit transgénique ou pas ne change rien  à la dépendance de l'agriculteur à l'égard de son fournisseur de semences.
Deuxièmement, la plupart des cultures font appel à des traitements phytosanitaires. Les agriculteurs, y compris dans les pays en voie de  développement, sont tenus d'acheter des produits phytosanitaires ; ils sont déjà liés avec ces sociétés-là. On voit bien que la problématique de la transgenèse ne résout pas ce problème, elle maintient une dépendance des agriculteurs à l'égard des sociétés, mais il faut être conscient que la plupart des agriculteurs sont déjà liés. Il faut donc regarder d'une autre manière la dépendance de l'agriculteur à l'égard de son travail.
Ce qui me frappe, c'est qu'aujourd'hui, les femmes dans les pays en développement passent une grande partie de leur temps à sarcler les champs avec leurs enfants sur le dos. Et le fait d'avoir des variétés transgéniques leur permettrait de récupérer ce temps passé à sarcler. Donc je suis conscient que les variétés transgéniques maintiennent la dépendance économique des agriculteurs à l'égard de ces grandes sociétés, mais en revanche, elles peuvent libérer du temps de vie de ces agriculteurs.
Enfin, il me semble que l'un des moyens de limiter cette dépendance à l'égard des grandes sociétés est de pousser la recherche publique pour qu'elle-même prépare le matériel génétique qui pourra être exploité par les agriculteurs sans dépendance vis-à-vis des grandes sociétés. Et l'une des erreurs magistrales dans le débat sur les OGM aujourd'hui, c'est qu'il se fait au détriment de la recherche publique, qui est victime des oppositions.

Sam : Ces populations auront-elles assez d'argent pour les acheter ?
Guy Riba :
J'ai déjà répondu. Elles achètent déjà des variétés et des produits phytosanitaires. Je suis tout à fait d'accord pour dire que les OGM ne résolvent pas le problème, mais ils ne l'ont pas créé.

Sophie : Le comportement de certains de ces géants de l'agroalimentaire, tel Monsanto, est quand même lourd de conséquence dans les pays du tiers-monde. Nous ne  pouvons pas attendre que des sociétés privées agissent avec déontologie et dans le respect du bien-être des populations de ces pays. A quels contrôles sont-elles soumises ?
Guy Riba :
Il n'y a pas de contrôle réglementaire. Les produits que vendent ces sociétés sont soumis aux réglementations. Le problème est dû au fait qu'on leur laisse des oligopoles. Il faut que ces sociétés se trouvent dans un jeu de compétition équilibré qui permette justement qu'il y ait des régulations du marché qui se  fassent par la compétition.  C'est exactement le même problème que le marché automobile. Si demain une seule marque de voiture domine le marché, elle pourra vendre ce qu'elle veut au prix qu'elle veut.

LA CULTURE OGM EN ZONE ARIDE : UN MENSONGE

Jérémie : Qu'en est-il de la culture OGM pour prévenir la faim en région aride, notamment en Afrique ?
Guy Riba :
C'est un mensonge, y compris de certaines grandes sociétés, que de faire croire que par les OGM on va demain être capable de cultiver les plantes en zone aride. On en est loin. Parce que les déterminants génétiques de la capacité de pousser en zone aride sont très compliqués.
Mais en revanche, il faut laisser se développer les recherches, car ce qui est inaccessible aujourd'hui sera peut-être accessible dans dix ou vingt ans. Encore une fois, le drame aujourdh'ui, c'est qu'à cause de ce débat, nous n'avons plus les moyens ni la motivation pour travailler sur ce sujet.

Ribambelle : L'INRA a-t-elle déjà fait "don" d'un de ses brevets sur plantes transgéniques à la FAO pour qu'il soit mis à la disposition des agriculteurs des pays en voie de développement à des conditions avantageuses ?
Guy Riba :
Nous n'avons pas de brevet sur du matériel transgénique susceptible d'être exploité. Mais dans le cadre de nos conventions, par exemple au sein du programme "Génoplante", nous avons convenu de donner gratuitement nos droits de licence à des organisations qui diffusent l'innovation à des groupements fermiers dont le revenu est inférieur à 10 000 euros par an.

Zarma : L'INRA est-il en faveur du développement des OGM dans les cultures ? Mène-t-il des campagnes d'informations pour faire adhérer l'opinion publique ?
Guy Riba :
Dans nos interventions, on ne cherche pas à dire s'il faut ou pas développer des OGM. En tant que recherche publique, on cherche à éclairer la décision des autres. On développe les arguments de risques, d'avantages, d'inconvénients qui permettent à ceux dont c'est la charge de prendre la décision. C'est la raison pour laquelle nous considérons que, lorsque c'est nécessaire, nous devons pouvoir conduire les essais, y compris en plein champ, pour obtenir les données qui permettent aux décideurs de décider.

Froid : Transformer le vivant n'est pas sans signification métaphysique... Des philosophes travaillent-ils avec les scientifiques qui mènent ces expériences ?
Guy Riba :
Ce qui est intéressant aujourd'hui dans la problématique des OGM – et c'est une bonne chose, peut-être une première –, c'est que tout le monde, le citoyen et tous les secteurs de recherche, s'implique dans la réflexion. Des philosophes, des sociologues, des spécialistes de la propriété intellectuelle s'associent aux agronomes, aux généticiens, aux économistes, aux physiologistes, aux médecins, pour contribuer à la compréhension des OGM.
Il y a plusieurs moyens pour cela. En ce moment, au sein de l'ANR (nouvelle Agence nationale pour la recherche), il y a un programme de 2 millions d'euros qui vient d'être ouvert et qui permet à l'ensemble des différentes disciplines de recherche que l'on vient d'évoquer de participer.

Romain : On parle beaucoup des plantes, mais la recherche OGM n'est-elle pas aussi un grand espoir lorsqu'il s'agit de transgénèse animale ? En particulier en ce qui concerne le cochon et les espoirs de xénogreffes ?
Guy Riba :
Les xénogreffes n'ont pas à voir avec les OGM. Pour l'instant, s'agissant du clonage, il y a des recherches qui sont conduites, qui ont pour but essentiellement de permettre la production par des animaux de protéines que, jusqu'ici, ils ne produisaient pas.

Bastien : L'avenir des OGM risque-t-il d'être compromis ?
Guy Riba :
Le risque principal, c'est que seul le secteur privé promouvra des OGM, seules les plus grandes entreprises seront compétitives à cet égard. Le fait qu'il y ait moins d'acteurs qui étudient et développent des OGM fait que la diversité génétique à l'origine du matériel commercialisé va se réduire. Par ailleurs, cela va favoriser les monopoles ou les oligopoles, ce qui n'est pas satisfaisant.

Chat modéré par Constance Baudry et Stéphane Mazzorato
LEMONDE.FR | 28.09.05 | 12h23


Mercredi 28 septembre 2005 de 17h à 19h
Chat avec David Kessler, directeur de France Culture
Retranscription du chat
(version épurée [suppression de tous les "un(e)tel(lle) et parti(e)/arrivé()], sauf ceux du début [sinon le dialogue n'a plus de sens]. Pour une version non épurée, aller sur le site de France-Culture…[1])

David_Kessler: Bonjour à toutes et à tous. Je suis très heureux de trouver l'occasion de m'entretenir avec vous, quelques jours après avoir pris mes fonctions de Directeur de France Culture.

Ariane est arrivé(e).
David_Kessler: Bonjour Ariane.
boubou: boujour !
lol est arrivé(e).
Pierre_Coudouy est arrivé(e).
David_Kessler: Bonjour Pierre.
montesse est arrivé(e).
Dupon est arrivé(e).
Eloïse est arrivé(e).
Ci-devant_auditeur est arrivé(e).
marc est arrivé(e).
Pierre_Coudouy: Bonjour, c'est rapide... j'ai été surpris !
David_Kessler: Bonjour Montesse, Dupon, Eloise, ci-devant...
eric: Mr Kessler, j'ai envoyé un long mail ce matin concernant la ligne éditoriale de france culture lors du décès du pape, avez vous pu le lire?
David_Kessler: Non, je ne l'ai pas eu le temps de le lire.
Marc_Guidoni: Bonjour
Tristan_Corre: Bonjour,Craingnez-vous aussi les critiques et pour les museler, perpétrez-vous aussi la politique des ascenseurs en confiant émissions et chroniques aux journalistes de la presse écrite ?
David_Kessler: Je ne crains absolument pas les critiques. Au contraire, je les écoute toujours avec attention et je n'ai l'intention de museler personne.
boubou: bonjour Monsieur Kessler et félicitation pour votre nomination (félicitation aussi à Laure Adler qui a apparemment est très heureuse dans son "nouveau" travail qu'elle fait très bien).
David_Kessler: Merci beaucoup de ces félicitations collectives.
boubou: on a beaucoup parlé de vous dans la presse mais on ne sait pas, nous avec qui vous travaillez. Avez-vous "gardé" Laurence Bloch, l'adjointe de Laure Adler ?
David_Kessler: J'ai gardé Laurence Bloch avec bonheur.
Cyril_Ravison: Bonjour, j'espère qu'on restera à un France Culture sans publicité!!! c'est indispensable...s'il vous plait!!!
David_Kessler: Je suis convaincu qu'un espace radiophonique sans publicité est une chance formidable et à ma connaissance, personne n'a l'intention de revenir l à dessus.
boubou: Avec qui d'autres travaillez-vous, qui vous conseille ?
David_Kessler: L'ensemble des collaborateurs qui travaillaient avec Laure Adler est resté à mes côtés, cela n'exclut pas pour l'avenir que je m'entoure de nouveaux conseillers pour les programmes.
Marc_Guidoni: Bonjour. Envisagez-vous une grande émission type "travaux publics" en direct et en public de manière récurrente dans une grande capitale régionale comme Lyon, ainsi que cela se fait à Paris?
David_Kessler: Il est peut-être un peu difficile d'imaginer une émission délocalisée en permanence en province. En revanche, je crois indispensable que des émissions de France Culture puissent régulièrement aller
David_Kessler: à la rencontre de nos auditeurs en région.
eric: Merci pour les émissions sur le web. Nous pouvons enfin écouter les programmes à n'importe quelle heure.
Tristan_Corre: Retrouverons-nous les Décraqués?
David_Kessler: J'ai indiqué à tous les collaborateurs de France Culture que j'étais par principe, hostile à toutes restaurations.
David_Kessler: J'ai indiqué en même temps, que si des producteurs, anciens de la chaîne, avaient des projets nouveaux à présenter, je les regarderai avec une grande attention.
Ci-devant_auditeur: Je ne m'associe pas aux félicitations et je proteste au contraire contre le sabordage de France Culture.
David_Kessler: Je crois absolument nécessaire le débat sur les contenus de France Culture. Je crois cependant, que l'excès est tout à fait nuisible à ce débat. Selon moi, il n'y a ni sabordage, ni danger pour la
David_Kessler: chaîne, ce qui n'exclut pas une réflexion permanente sur son évolution.
ClaireM3T: Bonjour Monsieur Kessler ! Qu'est-ce qui dans votre trajet professionnel vous amène aujourd''hui à la tete de France Culture et quelles sont vos envies pour cette radio
David_Kessler: Ce qui m'y amène est un intérêt ancien et pour les médias, et pour les questions culturelles et intellectuelles. Je souhaite cette radio, avant tout, curieuse, ouverte et pluraliste.
Marc_Guidoni: Pardon de poursuivre la question précédente mais en quoi la délocalisation sur une base hebdomadaire d'une émission dans la deuxième aggloméraation de France poserait-elle un si gros problème?
David_Kessler: Ma réponse concernait la possibilité d'avoir des émissions quotidiennes en province. Je coirs indispensable que France Culture puisse aller dans plusieurs villes, à la rencontre des auditeurs
David_Kessler: &e toutes régions.
stefan: Quelle est votre émission préférée ?
David_Kessler: Je les aime toutes !
ClaireM3T: Est-il possible que de nouveaux acteurs, autres que les animateurs déjà du sérail vous proposent des nouveaux concepts d'émission ou projets ? par quels moyens préservant la confidentialité ?
David_Kessler: C'est évidemment, non seulement possible, mais souhaitable. D'ailleurs beaucoup de producteurs sont apparus récemment sur l'antenne et il suffit de m'écrire personnellement.
Cyril_Ravison: Pensera t'on un jour à France culture que la messe le Dimanche à 10 H sur une chaine public n'est pas admissible, même si par ailleurs, d'autres émissions sont consacrées à d'autres religions...
David_Kessler: La diffusion de la messe le dimanche matin est une obligation qui résulte du cahier des charges de Radio France, au même titre que les émissions d'autres religions. La même obligation existe aussi pour les télévisions publiques.
boubou: êtes-vous vraiment sincère quand vous dites toutes les aimes ??? lol !
David_Kessler: J'exagère peut-être un peu... mais pas beaucoup !
Auditriste: Que pensez-vous des innombrables multidiffusions, rediffusions ?
David_Kessler: l'étude attentive de la grille à laquelle j'ai procédé me fait penser que le terme "inombrable" est excessif.
Marc_Guidoni: Je compte sur vous pour continuer à nous offrir cet incomparable espace de poil à gratter pour les neurones. Mais pensez bien à construire "France" Culture et pas uniquement "Paris" Culture. :-)
David_Kessler: Je partage tout à fait votre sentiment. Je crois que nous devons, en permanence, faire attention à nous ouvrir à la fois sur les créations et les idées qui parcourent la société française dans sa
David_Kessler: &iversité sociale et géographique. Je suivrai donc votre conseil.
ClaireM3T: message destiné au modérateur, j'ai envoyé un message juste avant 17 h00 peut-on la renvoyer en direct cela concernait les sentiers de la création et les chemins de la connaisance et l'élitisme
Modérateur: reposez votre question
Cyril_Ravison: donc vous aimez aussi la messe...:o))))
David_Kessler: Bien entendu :)
boubou: Les sentiers de la création sont vraiment formidables. Un seul problème... Je n'ai que 2 oreilles et un seul cerveau, je ne puis écouter le vrai FC et le dérivé d'FC en même temps... Comment faire ?
Marc_Guidoni: Merci pour votre franchise et bon courage. Marc
David_Kessler: Je préfère que nous puissions "trop" offrir à nos auditeurs que pas assez grâce à l'écoute différée sur Internet, il doit y avoir des possibilités même si je sais que les journées n'ont que 24 heures.
bouli: une place plus grande pour les reportages dans les émissions est-elle à l'étude?
David_Kessler: Cette question fait effectivement partie des sujets de réflexion pour l'évolution de la grille de France Culture.
Cyril_Ravison: je pense que plus d'émission scientifique à france culture serait un bien (et moins d'économie et de politique) non?
David_Kessler: Je pense que l'économie et la réflexion politique doivent avoir leur place sur France Culture. Je partage votre souci d'avoir des émissions scientifiques de haut niveau et en même temps accessible à
David_Kessler: &es auditeurs non spécialistes.
eric: Concernant la Politique: France Culture était très décalée lors du référendum comme d'autres d'ailleurs. Ce décalage est il discuté pour l'avenir des débats?
David_Kessler: Je crois que France Culture a laissé une large place à la diversité des opinions. Cela dit, il est vrai que le sentiment exprimé par nos auditeurs d'un décalage fait partie des sujets sur lesquels
David_Kessler: les producteurs d'émissions s'interrogent pour l'avenir.
alain: écoutez-vous france- culture et depuis quand ?
David_Kessler: J'écoute régulièrement France Culture depuis longtemps mais je dois l'avouer, mon écoute est aujourd'hui plus monomaniaque qu'hier.
Marc_Guidoni: Je me risque sur une question un peu tarte à la crème, mais vos anciennes amours avec le cinéma au CNC vous donnent-elles envie de donner une meilleure place au 7ème art sur l'antenne?
David_Kessler: Ca n'est pas tarte à la crème. Je suis convaincu que le cinéma tient aujourd'hui une place essentielle dans la culture contemporaine et donc, je réfléchis bien sûr, à la place qu'il doit prendre sur
David_Kessler: France Culture. Des émissions importantes lui sont déjà consacrées.
boubou: Envisagez-vous (j'aimerai bien, vous vous en doutez) de mettre en place une grande émission de littérature populaire ?( Marc Voinchet n'a pas forcément le temps d'entrer en profondeur, étant donné la
boubou: grande actu culturelle et Pascale Casanova est très "pointue"...)
David_Kessler: Comme pour le cinéma. C'est aussi une suggestion intéressante.
En_finir_avec_Tout_arrive: Pourquoi les messages de protestation sont-ils écartés ?
David_Kessler: Ils ne le sont pas tous. Mais je me réjouis qu'il y aient aussi quelques félicitations et des questions constructives.
Cyril_Ravison: Y'a t'il des ententes entre les différentes radio de radiofrance pour se partager certaines "catégorie d'auditeurs" ou certaines thématiques?
David_Kessler: Il n'y a pas, à ma connaissance, de définition a priori des auditeurs qui sont libres d'aller où ils veulent. En revanche, il est clair qu'en ce qui concerne France Culture, sa vocation première est
David_Kessler: &e parler de culture.
Auditriste: Si vous êtes auditeur depuis longtemps, avez-vous remarqué un changement disons depuis 10 ans de cette radio ?
David_Kessler: Je vous vois venir !
ClaireM3T: Ne croyez -vous pas que les chaines MMI sentiers et chemins sont trop élitistes "élitistes" . Il faudrait faire de l'élistisme plus populaire cad faire des mises en scène ou l'auditeur ne se sentent
ClaireM3T: pas exclus, car comme nous l'a montré le réferendum, toute "l'élite" et les intellectuels sont loin des préoccupations de tout un chacun ; excusez pour le décousu !
David_Kessler: Il est toujours difficile de trouver un point d'équilibre entre le reproche qui nous est parfois fait d'être trop élitiste et celui, inverse, d'avoir renoncé à toutes exigences.
David_Kessler: Je crois pour ma part, que nous devons à la fois être exigent sur les contenus et compréhensible pour nos auditeurs.
riri: je trouve le midi treize heures trente très lourd.Une demi heure d'infos musclées après le bavardage de Marc Voichet c'est aride .Par ailleurs france Culture est toujours très interessante
David_Kessler: Je n'entends pas du tout l'émission de Marc Voinchet comme un bavardage mais au contraire, comme une familiarisation élégante avec les différentes branches de la création.
David_Kessler: Sur la durée, et sur la place du journal, je suis tout à fait d'accord pour considérer qu'il faut y réfléchir.
dédé: Pourriez-vous édicter une charte déontologique à propos des producteurs qui s'invitent entre eux?
David_Kessler: Je suis tout à fait décidé à fixer des règles claires sur cette question.
David_Kessler: Je crois que France Culture accueillant beaucoup de créateurs, il est normal qu'on puisse parler de leurs ouvrages sur l'antenne. Mais qu'il faut le faire dans un cadre défini et en évitant toute
David_Kessler: complaisance.
Cyril_Ravison: Pourquoi aucune emission et les différents journaux de France culture ne traite sensiblement jamais de Sport, qui fait partie d'une certaine culture ?
David_Kessler: Le rôle de France Culture n'est certainement pas de rendre compte des manifestations sportives, ce que font les autres antennes. Cela n'exclut pas à mon avis, qu'une réflexion sur le sport et ce
David_Kessler: qu'il représente dans notre société puisse y avoir sa place... C'est déjà le cas, une fois par mois dans "surpris par la nuit".
arthur: Le théâtre est de moins en moins présent sur l'antenne. Allez-vous y remédier?
David_Kessler: Je ne suis pas sûr que ce soit exact. Nous y consacrons une heure et demie par semaine et Tout arrive en parle très régulièrement.
David_Kessler: Je profite de cette occasion pour inviter nos auditeurs aux débats que nous organisons sur le théâtre après Avignon le 15 octobre après midi au théâtre de la Bastille.
Franck: Il y a peu de critique sur FQ et trop de complaisance à l’égard des éditeurs. Rendrez-vous l'antenne plus indépendante ?
David_Kessler: Je sais que le risque de la complaisance est toujours présent dans les médias, quels qu'ils soient et même sur France Culture. Je demande à tous les producteus de veiller à éviter de donner cette
David_Kessler: impression. Je crois que c'est une exigence forte de nos auditeurs.
mignot: a propos du théatre je souhaite les pieces et pas leur glose
David_Kessler: Les pièces ont toutes leurs places dans le cadre des fictions diffusées sur l'antenne à raison de 7 heures et demi par semaine.
ClaireM3T: pourriez-vous penser à améliorer l'interactivité avec vos auuditeurs, les meler mieux au débat de société, les inviter dans à un vrai dialogue avec les invités ou les animateurs
David_Kessler: &ans le cadre des déplacements en province que j'ai indiqué envisager, je pense que ces dialogues sont possibles et souhaitables.
Cyril_Ravison: les chroniques d'Albert Jacquart et d'Hubert Reeves sont géniales, gardez les SVP!!!
David_Kessler: Merci.
bérolde: Ne pensez-vous pas qu'une approche plutôt sociologisante et trop "en prise directe avec l'actualité" ait tendance à l'emporter sur une vision plus patrimoniale de la culture ?
David_Kessler: C'est un débat qui existe chez nos auditeurs mais aussi qui parcourt notre antenne. Il est important, à la fois, de faire connaître notre héritage mais aussi les tendances qui animent la création
David_Kessler: contemporaine. Le point d'équilibre est certainement à trouver encore.
Franck: Le direct entraîne des dégradations, parfois catastrophiques (ex. Chemins de la conn.). Peut-on espérer un retour aux émissions montées ?
David_Kessler: Ces émissions, à ma connaissance n'ont pas disparues. Elles sont très nombreuses mais le direct doit aussi avoir sa place et donne de la force à une radio comme France Culture.
ClaireM3T: Contre Expertise de Brice Couturier était une émission géniale parce qu'elle décrivait sans fard les grands mécanismes de nos sociétés en n'épargnant pas certains à qui ces situations profitent
David_Kessler: Je partage votre enthousiasme pour cette émission.
c__est_mal_barré: En fait, vous êtes là pour prendre le thé
David_Kessler: Volontiers avec vous, quand vous le souhaitez.
mignot: nous sommes plusieurs a avoir la nostalgie des longues rediffusin de la nuit . Est ce si couteux ?
David_Kessler: Il y en a tous les week-end. Les nuits de samedi et dimanche.
Camille: La grille de France-Culture est saturée d'émissions d'entretiens qui occuperaient 5 minutes dans une émission montée. A quand la confection d'émissions de radio qui faisaient le renom de F-C
dédé: L'humour quotidien, le débat littéraire critique, le docu musical, le docu scientifique ont disparu
Rrose: Quelle place comptez-vous accorder à la pure crétion radiophonique (de type ACR ou des anciennes Nuits magnétiques). C'est ce qui faisait autrefois la magie de cette station.
Rrose: Le direct ne nuit-il pas à la réflexion ? Laissez-le à France Inter !
David_Kessler: Je mesure que pour certains auditeurs, l'antenne passée est toujours préférable à l'antenne présente comme la République est toujours plus belle sous l'Empire. Ce qui me paraît intéressant est de
David_Kessler: réfléchir à notre antenne à venir. Aucun des genres : documentaires, créations radiophoniques, fictions, mais aussi, directs et débats ne doit disparaître de celle-ci. Car c'est cet ensemble qui fait
David_Kessler: la singularité de France Culture.
Rrose: Avez-vous un véritable projet ? Vous semblez ne faire que défendre les choiux (souvent malheureux) de Laure Adler.
David_Kessler: Je considère que Laure Adler a fait des choix très souvent heureux pour cette station. Quant à mon projet, vous le verrez se concrétiser lors de la grille de rentrée 2006 que j'assumerai comme mon
David_Kessler: véritable premier choix.
eric: Conclusion: on a bien quelques critiques histoire d'améliorer les programmes mais franchement FC c'est la meilleure radio du moment! Bonnes ondes à tous et merci!
David_Kessler: Merci.
ClaireM3T: Pour revenir à l'interactivité il n''y a pas que le dialogue sur place vous pouvez aussi utiliser le téléphone ou internet !
David_Kessler: &'ores et déjà, et ce chat en est la preuve. Internet est un excellent moyen de dialogue avec nos auditeurs.
David_Kessler: Je crois cependant que des rencontres sur place, ont une valeur particulière.
Dominique: Pensez-vous que l'âge des auditeurs est important?
David_Kessler: Je crois que tous les âges peuvent avoir accès à France Culture. Tout simplement, parce que je suis convaincu que les sujets que nous abordons ne visent en particulier ni aucune catégorie socio-professionnelle, ni un âge déterminé.
peintur: que de vilains pseudos !!
zorbac: zorbac FQ se distingue notamment par la grande qualité de l'information. Cette qualité est favorisée par le nombre et la longueur des journaux. Allez-vous les maintenir ?
David_Kessler: Je partage votre sentiment sur la qualité et le ton très particulier de l'information de France Culture. Sur la place et la longueur des journaux, il est trop tôt pour moi pour avoir un avis définitif.
Rrose: Monsieur Kessler, de grâce, ne cédez pas au "jeunisme" ! Oui, les "vieilleries" que nous pouvons parfois réentendre la nuit ne peuvent susciter la "nostalgie" de l'intelligence et du temps long !
David_Kessler: Il n'y a aucun "jeunisme" dans mes propos. Je crois simplement que la radio se construit au fur et à mesure. Mais France Culture a cette particularité de produire sans cesse du patrimoine radiopho
David_Kessler: nique et je partage votre souci que nous puissions l'exploiter pleinement pour que nos auditeurs s'enrichissent aussi grâce au passé.
Claude_Martin: Je renchéris sur le direct et le montage : ce n'est pas qu'une question de nostalgie. Je suis une "jeune" auditrice (2ans seulement) et plus de rigueur serait souvent nécessaire.
ClaireM3T: je ne suis pas d'accord avec les internautes qui sont pour retirer le direct, l''actualité ; Au contraire France culture doit etre plongé dans notre réalité, nous donner les clefs pour la comprendre
David_Kessler: La variété des points de vue me conduit à penser qu'il faut, effectivement, un juste équilibre entre les deux mais je partage pleinement l'exigence de rigueur qui n'est pas incompatible avec le direc
peintur: jeunisme sûrement non mais trop de jingles et auto promotion
vitte_r: et ces jingles imbéciles nous allons devoir les supporter encore longtemps?
Claude_Martin: FQ pour toutes et tous : oui, mais comment connaître FQ et avoir accès au détail de ses programmes ? même télérama n'est pas à la hauteur !
David_Kessler: Il faut savoir que l'auto promotion est un des rares moyens de faire connaitre nos programmes à nos auditeurs car nous avons peu de moyens de communication externe. Quant aux jingles, je n'exc lue pas, que nous puissions les modifier.
Rrose: Et la "pub" déguisée, ces partenariats imbéciles qui nous font douter de l'indépendance de vos journalistes et producteurs...
David_Kessler: Je ne vois pas bien pourquoi nos partenariats seraient particulièrement "imbéciles" je puis vous dire que beaucoup d'organisateurs de festivals et de manifestations culturelles, partout en France,
David_Kessler: sollicitent la présence de France Culture.
Cyril_Ravison: A France Culture, l'économie prend plus de place que l'environnement (je ne compte qu'une émission à ce sujet...) C'est un choix?
David_Kessler: Je crois en effet, que les questions environnementales sont appelées dans les années à venir à jouer un rôle de plus en plus essentielles dans notre réflexion.
Rrose: Le problème avec le partenariat c'est que les journalistes de france culture ne peuvent pas critiquer ces manifestations l'esprit serein...
David_Kessler: Je ne pense pas que ces partenariats gênent en quoi que ce soit la liberté des journalistes de France Culture. Ce qui s'est dit sur Avignon sur notre antenne en est la preuve.
Marc_Guidoni: Il parait que la persévérance est une vertu... je retente donc ma question : comment se mettre en contact avec votre équipe de direction après ce chat pour proposer un concept d'émission en public e
Marc_Guidoni: en public et en région.....
David_Kessler: Il suffit d'écrire à France Culture pour que le projet que vous présenterez soit examiné très attentivement.
QUAND_EST-CE_QUE_çA_COMME: non mais quel hypocrite ce directeur
David_Kessler: Ah bon !
Dominique: Oui, mais le partenariat avec les journaux de la presse écrite ?
David_Kessler: Il permet aussi à france Culture de toucher un public plus large qui s'intéresse aux sujets dont nous traitons. Là aussi, il faut veiller à préserver notre indépendance éditoriale.
Bérolde: Pensez-vous qu'il en faille pour tous les goûts ?
David_Kessler: Je crois qu'on ne pourra jamais satisfaire tous les goûts dans la mesure qu'il y a autant de goûts que d'auditeurs.
David_Kessler: Mais la diversité est la meilleure voie pour essayer d'en satisfaire le plus grand nombre.
vitte_r: QUI est en charge du recrutement des jounalistes et sur quels critéres?
David_Kessler: C'est la direction de la rédaction de France Culture en liaison avec la Direction des ressources humaines et la chaîne, s'agissant des journalistes professionnels.
Bérolde: En satisfaire le plus grand nombre est-il donc un objectif ?
David_Kessler: Je considère que l'audience n'est pas un objectif en soi, de France Culture. En revanche, je veux être sûr que toute personne qui s'intéresse à la culture puisse avoir accès à notre radio.
David_Kessler: Il faut donc bien qu'elle soit diverse.
montesse: Je re-tente ma question, qui me semble avoir une certaine importance : quels développements envisagez-vous sur le web pour France-Culture?
David_Kessler: Outre notre site web et les deux web radio, la question à venir est certainement celle du téléchargement des émissions qu'on appelle le "pod casting".
David_Kessler: je suis très désireux que France Culture propose rapidement à ses auditeurs des émissions à télécharger, nous y travaillons avec les autres directions de Radio France. Cela suppose de régler un
David_Kessler: certain nombre de questions, notamment celle des droits.
Bérolde: La question de l'audience peut-elle toutefois influer sur la programmation ?
David_Kessler: Non. S'il s'agit de renoncer à nos exigences pour rechercher à tous prix de l'audience. En revanche, être accessible, compréhensible, clair, me paraissent être des exigences normales.
Cyril_Ravison: ça c'est une bonne idée le "pod casting"... et comme ça on range définitivement le magnétophone!
dédé: Pourquoi tant de chroniques courtes? C'est du savoir light?
David_Kessler: La chronique est un genre radiophonique qui est par nature, court.
ça_commence_quand?: c'est cool de voir qu'il y a d'autres accro de FQ, mais super triste de voir toutes les questions qu'on ne voit pas
David_Kessler: J'en suis désolé. Mais vous êtes tellement nombreux et tellement rapides que je n'arrive pas à suivre.
peintur: il est lent
David_Kessler: Il est lent... C'est bien ce que je viens de vous dire !
Rrose: Je pose à nouveau la même question : êtes-vous vous-même un auditeur de France Culture ? Depuis combien de temps, et combien d'heures par jour ? Avez-vous pu suivre l'évolution de sa programmation ?
David_Kessler: Retrouvez la retranscription du chat demain. j'ai déjà répondu à cette question.
peintur: je ne parle pas de kessler mais du tchatt biensur
Cyril_Ravison: bon, en tous les cas il est marrant...même si un peu langue de bois
David_Kessler: Le moins possible...
michel_h: face à la souffrance sociale qui nous enveloppe, nous attendons de FQ les outils nécessaires à l'exercice d'une pensée libre créatrice et constructive et non à la séduction des courbes flatteuses de t
David_Kessler: Je partage à la fois votre constat et votre objectif. Personne n' a à France Culture les yeux rivés sur les courbes d'audience. Mais personnellement, je continue à croire qu'il n'y a pas
David_Kessler: &'incompatibilité entre culture et accès au plus grand nombre.
Agnès: Que sont devenus les centaines de producteurs des Chemins de la Connaissance, d'A Voix Nue, des chemins de la Musique.
Agnès: Pourrons-nous retrouver cette diversité ?
vitte_r: comme Agnes je dis.
peintur: cela existe encore
David_Kessler: La diversité des producteurs que vous appelez de vos voeux existe toujours dans les très nombreuses émissions documentaires de la chaine : 12 heures par semaine. C'est en effet la nature même de ces
David_Kessler: émissions que d'être produites par des acteurs différents.
Bérolde: Diriez-vous qu'un sujet sur, mettons, "Star academy" ait sa place sur France-Culture ?
David_Kessler: Non !
montesse: je continue sur le web : quand une émission disparait des programmes, son site disparait aussi, et donc les bibliographies, les liens... Ne pourrait-on ouvrir une section "archives" sur le site de FC?
David_Kessler: C'est une suggestion qu'on peut regarder.
jérémie: pourquoi pas star ac si c'est presente par des sociologues et des psychanalystes?
ClaireM3T: Si star académy, comme symptome d'une société qui ne donne que ça comme perspective à sa jeunesse ? Non ?
David_Kessler: je ne suis pas sur que France Culture en rajoute sur un phénomène dont tous les autres ont déjà parler mais je suis sûr qu'on a déjà eu l'occasion de traiter dans nos émissions de la télé réalité.
didier: l'ouverture sur le monde semble se fair de plus en plus depuis les studios parisiens. Il ya eu des semaines espagnoles ou libanaises. ce sont les questions de fric qui freinent leur développement ?
David_Kessler: Les questions de "fric" comme vous dites, sont aussi une préoccupation constante quand on gère une chaine. Je tiens beaucoup à ces déplacements à l'étranger qui expriment notre curiosité pour d'autres
David_Kessler: cultures. Simplement, nos moyens étant limités, nous devons choisir les destinations avec discernement.
peintur: mr ou mlle le modérateur qd je disais" cela existe encore" je parlais d'auditeur n'ayant pas le net à la maison.merci de rectifier.
Petrus: que pensez-vous de la place de la musique sur France Culture?
David_Kessler: C'est un sujet que je considère comme important. J'ai demandé à une productrice de la chaine de me faire un rapport sur cette question.
David_Kessler: Et des recommandations pour l'avenir.
vitte_r: F. C est devenue un club d'auto satisfaction a peu de frais
David_Kessler: Je trouve cette appréciation tout à fait excessive. Mais comme je l'ai déjà dit, je coirs qu'il faut être très vigilant contre tout sentiment de complaisance ou de connivence sur l'antenne.
David_Kessler: J'aurai l'occasion d'en parler avec les producteurs.
arnaud: Vous venez du CNC. Ne pensez vous pas que l'on pourrait ameliorer l'emission de critique du samedi?
Lorient0873802716: FC sur le Web : un son très désagréable : un projet existe-t'il pour rapidement retrouver une qualité correcte?
David_Kessler: On le souhaite tous. Evidemment. Après, c'est une question de moyens budgétaires.
michel_h: dans 5 mn y a Jean Lebrun
David_Kessler: Oui. Je vous le confirme.
vitte_r: vous ecoutez le matin la tranche 7 9 ?
David_Kessler: Tous les jours.
vitte_r: et vvous aimez
David_Kessler: Oui.
Agnès: Aviez-vous constaté en tant qu'auditeur la dégringolade de qualité de france-Culture
David_Kessler: Non.
brigitte_bertin: A propos des feuilletons de 11 heures, il n'y a pas de résumé avant chaque épisode et ensuite, il y a trop de rediffusion "rapide cf ls nouvelles confessions...
David_Kessler: Bonne remarque. Je pense qu'ill faut améliorer la présentation.
Petrus: a quand une émission qui concerne les enfants?
David_Kessler: Il y en a plusieurs, les mercredis et samedis après midi.
Rrose: Nous qui espérions un sauveur... aurons-nous un fossoyeur ?
David_Kessler: J'espère que non...
brigitte_bertin: j'écoute france culture 24/presque sur 24 et je trouve qu'il y a ttrop d'auto-publicités..
David_Kessler: Retrouvez la retranscription du chat demain. Déjà répondu à cette question.
Petrus: En ce qui concerne les programmes pour enfants, Je pense en particulier à des fictions, je n'en ai jamais entendues.
David_Kessler: Tous les mercredis après midi, (16 Heures).
Cyril_Ravison: y'a t'il parité entre les animateurs? j'ai l'impression qu'il y a beaucoup plus d'hommes? non?
David_Kessler: C'est vrai sur les quotidiennes...
vitte_r: vous etes fache avec les Inrock?
David_Kessler: Pas du tout...
Franck: (Attn modo : la question qui suit n'est franchement pas si scandaleuse, soyez chic...) Les chroniques du matin sont pénibles : obsession idéologique, mauvaise foi, et parfois carrément les insultes...
David_Kessler: Par définition, les chroniques expriment des sensibilités personnelles... et reflètent des styles particuliers. Les quatre chroniqueurs du matin ne partagent pas la même approche des questions qu'ils traitent. Je suis conscient qu'il a pu, à cet égard, avoir un problème avec le référendum.
Cyril_Ravison: heureusement qu'il y a Marc Kravetz!!!
Agnès: Les matins sont par trop saucissonnés
David_Kessler: Il faut remarquer qu'il n'existe aucune autre radio où un invité le matin, a 50 minutes pour s'exprimer et dialoguer.
David_Kessler: Ceux qui passent sur France Culture nous disent très souvent leur satisfaction d'avoir du temps et de ne pas être en permanence, interrompus.
Agnès: Je vais vous dire ma grande crainte. Que france-Culture ne retrouve plus sa qualité d'avant, et doucement glisse vers France-Inter, alors par souci d''économie, on fusionne et hop.
David_Kessler: Je crois, au contraire, que France Culture continue d'occuper une place unique dans le paysage radiophonique et je ferai tout pour qu'il en soit ainsi dans l'avenir. Aucune fusion n''est envisagée...
David_Kessler: Tout au contraire, France Culture voit sa vocation réaffirmée.
nanc: l'invité n'a pas 50 minutes !
David_Kessler: Il a exactement 50 minutes.
minerve: Oui mais s'il n' yavait pas Alexandre Adler et AG Slama, on n'aurait pas d'interlocuteur valable (intellectuellement parlant), pour critiquer l'idéologie de droite à partir de ses propres arguments.
Petrus: Je vous ai entendu ce midi sur la chaine parler de l'activité patrimoniale de FC, il est quand meme clair que de plus en plus d'émissions sont devenues du magazine d'actu culturelles !
David_Kessler: Je suis frappé au contraire de l'usage intensif par les producteurs de France Culture des archives radiophoniques. Comme je l'ai déjà dit, entre le patrimoine et l'actualité, il faut après trouver
David_Kessler: un juste équilibre.
Lorient0873802716: Le patrimoine (fond d'archive) de FC ne devrait-il pas être mis à la disposition de tous, à l'exemple des médiathèques qui mettent à dispo : livres, revue, disques etc..
David_Kessler: La loi prévoit que les émissions de Radio France deviennent propriété de l'INA, trois ans après la diffusion.
minerve: Quelle est la proportion d'auditeurs deFrance Culture?
Cyril_Ravison: c'est qui votre patron? le CSA?
David_Kessler: Il y a aujourd'hui en moyenne 600.000 auditeurs par jour.
David_Kessler: Jean-Paul Cluzel.
Petrus: OUi mais L'ina les revend au prix fort
David_Kessler: L'INA nous les revend aussi.
peintur: entre archives et ultra contemporanéité n'y a t'il pas un juste milieu?
David_Kessler: Certainement.
Rrose: Utiliser le patrimoine d'hier c'est bien. Créer celui de demain ce serait mieux ! Avec les bavardages actuels (en matière de programmes), cela semble difficile.
David_Kessler: Quand j'écoute le nombre d'émissions consacrées à la description de phénomènes de société, le nombre de documentaires que nous diffusons souvent mal connus, je suis au contraire fier de la création
David_Kessler: &'un patrimoine radiophonique pour la radio.
David_Kessler: L'histoire de la cinémathèque française, samedi dernier, le Sri Lanka après le stunami, huit jours auparavant... Hugo Pratt sont autant d'émissions patrimoniales.
Cyril_Ravison: et JP Cluzel il n'a pas une vision du partage thématique entre les radios de radiofrance?
David_Kessler: Vous pourrez en parler avec lui, le jeudi 6 octobre.
Agnès: Moi je n'ai pas digéré l'éviction de Bertrand Jérôme et même si Françoise Treussard anime bien l'émission, le duo me manque toujours, comme me manquent chaque jour les Décraqués, je sais bien que vous
David_Kessler: J'ai dit que "les émissions qui avaient eu leur place sur la grille mais qui avaient, depuis, disparues, n''ont pas vocation à revenir comme telles. Je préfère accueillir des projets nouveaux qui
David_Kessler: peuvent s'inspirer du même humour et de la même liberté d'esprit.
minerve: Il y a au moins un avantage à FC, c'est de nous faire entendre des spécialistes de leur sujet et pas des pantins médiatiques et communicants capables de parler de tout et de rien avec le même vernis .
montesse: Vous êtes "fier de la création d'un patrimoine radiophonique"; à quelles conditions pourrait-il etre mis à la disposition du public? L'INA est-il INcourtournAble?
David_Kessler: C'est la loi qui fixe les rapports entre Radio France et l'INA.
Petrus: Oui mais une semaine d'archivage sur le web c'est trop peu.
David_Kessler: Comme je l'ai dit, nous réfléchissons à la possibilité d'aller plus loin en ce domaine mais il faut préalablement régler les problèmes de droits.
Rrose: Qu'allez-vous retenir de ce véritable dialogue de sourds ?
David_Kessler: Je n'ai pas eu, du tout, le même sentiment que vous. Sauf à penser que pour vous, un dialogue, c'est adhérer spontanément à vos positions.
David_Kessler: Je retiens d'abord l'attachement à France Culture de ses auditeurs.
Rrose: Non, mais vous semblez plus sur la défensive qu'à l'écoute d'auditeurs particulièrement attachés à leur chaîne...
David_Kessler: J'écoute tous les auditeurs. Vous pouvez aussi admettre qu'ils n'ont pas tous, les mêmes sentiments que vous.
Fabrice: Bonjour Monsieur Kessler, je viens d''arriver sur le chat et ne sait pas si vous avez pu répondre à la question posée par avance la semain derniere concernant les fictions radiophoniques ? Merci.
Modérateur: reposez la
vitte_r: qui est ce monsieur Modérateur?
Modérateur: c'est moi, un pb ?
Agnès: Est-ce que les nuits de france-Culture vont être totalement consacrées aux archives ?
David_Kessler: Non, c'est impossible.
emecrire: n'ai-je pas le droit de poser une question relative a l'embauche?
David_Kessler: Tout est possible.
Rrose: Pourquoi est-ce impossible ?
David_Kessler: ¨Pour des raisons financières.
emecrire: comment postuler pour travailler a france culture?
David_Kessler: En présentant des projets.
peintur: bon eh bien c'était mon premier ttchhhaaatttt,c'est drôle et sympathique.
Agnès: Rrose, c'est la vie.
geneve: en tout cas sur l'Europe les questions ne passent pas
geneve: il est temps de parler du patrimoine radiophonique EUROPEEN sur France culture, la peu europeenne
David_Kessler: France Culutre est une chaine qui consacre beaucoup de temps aux questions européennes. Il est même arrivé qu'on lui reproche d'en parler trop. Peut-être faudra-t-il aussi en parler différemment.
ds: projet: émission consacrée à la sociologie juste après Répliques. Que pensez-vous dudit projet?
David_Kessler: J'attends de voir le projet.
minerve: Pour moi aussi c'était mon premier chat. Je trouve ça frustrant intellectuellement mais un peu instructif quand même.
David_Kessler: Il est vrai que ce type de dialogue a ses limites. Je souhaite qu'il soit poursuivi, comme je l'ai dit tout à l'heure par des dialogues en face à face.
nanc: a propos d'europe France culture est peut etre la seule radio qui consacre une rubriuqe à l'europe à 7 h30 !!!
Petrus: quand verra-t'on de nouvelles émissions?
David_Kessler: Les deux rendez vous que je vous fixe sont ceux de janvier, avec des changements légers et surtout, la rentrée 2006. Nous travaillons déjà sur la nouvelle grille.
Bonne_chance_David!: je propose que vous invitiez martin scorsese à une de vos emissions à l'occasion de l'inauguration de la cinémathèque
David_Kessler: Cela a été fait lundi soir lors de l'émission spéciale que nous avons consacré à l'inauguration du nouveau bâtiment.
minerve: Parlez de FC autour de vous; Je l'ai découverte dans les années 60 à l'école de la République, et, malgré certaines dérives (pas le temps de développer) il faut défendre et protéger ce type de radio.
Rrose: Bon courage ! J'espère que vous saurez nous rendre inteligents, et inversement !
David_Kessler: Merci à toutes et tous de ce dialogue. Je prends mes fonctions avec la conviction que France Culture est une radio unique et qu'il faut la préserver. Je mesure à l'écoute des demandes parfois
David_Kessler: contradictoires, qu'il faut savoir rester modeste mais, ambitieux sur nos exigences.
David_Kessler: Vos remarques sont donc toujours les bienvenues.
Fabien_de_Stenay: ah zut c'est fini
David_Kessler: &emain à partir de 17 heures, ce sera Michel Meyer de France Bleu qui répondra à vos questions. A demain, bonne soirée !


[1] Cela dit, ça vaut le coup de lire la version avec les “partis/arrivés”, des noms souvent significatifs, des publicités, des insultes, des provocations, des commentaires, comme “modérateur_de_merde”, “Restaurer_exigence_intell”, “lorientais0873802716”, “mamémoire_fait_du_sport”, “dialogue_de_sourds”, “sosfranceculture_free_fr”, “Laure_va-t-en_sur_NRJ”, etc. Ça peut faire rire ou sourire…


Le Monde / Opinions
Edito du Monde
SNCM, le naufrage

 D ans le naufrage de la Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM), l'Etat fait une démonstration d'irresponsabilité, de couardise et enfin d'inconséquence. Et ce, en dépit de l'intervention musclée de l'armée, mercredi 28 septembre, contre les grévistes "mutins" qui s'étaient emparé du "Pascal Paoli".

Irresponsabilité que de laisser au fil des années, depuis 1991, s'engloutir 1,2 milliard d'euros d'argent public sous couvert d'assurer la continuité territoriale entre l'île et le continent. Couardise, puisque rien n'a été fait par les six présidents successifs pour remédier, quitte à oser affronter les syndicats, aux maux évidents de la société : sureffectifs, productivité déplorable, navires trop coûteux, service commercial qui maltraite les passagers... Ajoutons un laisser-faire coupable face au Syndicat des travailleurs corses (STC) aux troubles objectifs politiques qui lui font réclamer une "corsisation" des emplois.

En 2004, les pertes d'exploitation de la SNCM ont encore atteint 29,7 millions pour un chiffre d'affaires de 193 millions d'euros : un abysse. La société privée concurrente, Corsica Ferries, affiche des bénéfices et un trafic en hausse.

On connaissait des privatisations "vente des bijoux de famille", quand l'Etat impécunieux a un besoin urgent de liquidités. Le premier ministre vient d'inventer une nouvelle catégorie : la privatisation défausse. Incapable d'affronter le problème, il le passe au privé, qu'il admet seul capable de courage.

Et, sans doute pour cacher sa honte de présider la capitulation d'un Etat qu'il ne cesse de déclarer vouloir, par ailleurs, interventionniste et fort, le premier ministre fait gérer toute l'affaire par le lointain préfet de Provence-Alpes-Côte d'Azur. Procédure inédite de voir le préfet chercher, puis négocier, avec les repreneurs privés puis annoncer, sinon décider, du nom du groupe retenu, en l'occurrence le fonds d'investissement Butler Capital partners.

Les réactions négatives des syndicats étaient parfaitement prévisibles. Les débordements aussi. Le rapt d'un navire par le STC, puis l'envoi des commandos de l'armée ajoutent le ridicule à la violence. A quoi s'ajoute l'inconséquence : en déclarant, dans la soirée de mardi, vouloir rester actionnaire minoritaire de la SNCM, le gouvernement semble disposé à faire machine arrière.

Il faut maintenant renégocier les prix avec M. Butler, qu'on vient de mettre, par cette volte-face, en position de force pour relever ses conditions. A supposer qu'il n'abandonne pas, ce qu'on comprendrait.

Le dossier SNCM n'est pas facile. La France n'a pas su gérer sa marine marchande depuis la guerre, d'où sa régression dans ce secteur alors que ses côtes lui donnaient un avantage. Quand la complexité corse s'invite sur la passerelle, on comprend que le voyage sera forcément mouvementé.

Mais le succès de Corsica Ferries montre que le coupable est l'actionnaire public, cet Etat qui, du début à la fin, aura fait preuve de sa faiblesse.

Article paru dans l'édition du 29.09.05


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ahuri... ♦ 28.09.05 | 18h42 ♦ faudrait quand même expliquer à nos énarques de ministre et à nos syndicalistes toujours prêts à défendre même l'indéfendable que la valeur d'une entreprise ne se mesure pas à la valeur comptable des actifs, mais à la capacité du management de rentabiliser ces actifs et de générer du cash flow (autrement qu'en quémandant de l'argent public). Choqué également par la demande immédiate de requalifier les actes délictueux (criminels?) des enragés...

Stéphane D. ♦ 28.09.05 | 18h23 ♦ Des fonctionnaires se partagent un (gros) gateau. Se fachent quand on fait remarquer que le meme gateau dans le privé est meilleur et/ou coûte 2 fois moins cher. Les usagers sont méprisés, insultés et ignorés. On les fait payer cher alors qu'en impôts ils ont déja payé deux fois la prestation. La gestion est inexistante, la mesure de la qualité aussi. On ne peut rien changer au nom du "service public". SNCM, université, éducation nationale, ANPE, certains hopitaux... meme combat.

le rèveur ♦ 28.09.05 | 18h14 ♦ Le corporatisme voilà le fossoyeur des services publics et non les 35 heures. Il faut abolir les statuts particuliers et mettre le monde du travail sur un même pied d'égalité c'est-à-dire régi uniquement par le Code du travail. En somme mettre fin aux privilèges et à la gabegie. C'est là, a mon avis,la seule façon de sauvegarder nos services public du naufrage qui les guette un à un.

legourrier ♦ 28.09.05 | 18h02 ♦ Le ridicule et l'inconséquence de l'état comme des syndicats est évident mais il ne faut pas oublier que la compagnie concurente (Sardinia ferries et non Corsica ferries) est sous pavillon "italien" et l'origine du capital de cette société serait intéressant à connaître comme la nationalité des équipages et leurs conditions de travail. A noter également l'absence totale de service à bord des "Sardinia ferries" qui explique en partie la différence d'effectifs à bord.

wellington ♦ 28.09.05 | 18h01 ♦ On se répète:l'Etat a vocation à garantir des normes d'accès égal pour tous les citoyens à des services de première nécessité ce qui au passage, doit permettre la réquisition pour service minimum en cas de grève. Mais il n'a pas pour vocation de gérer des compagnies aériennes (cf la privatisation d'Air France) des flottes de ferries ou des usines à mettre des petits pois en boîte. Que M. Butller soit un proche du PM est fâcheux pour le PM, mais devient lourd pour le repreneur. Bonne chance.

treve ♦ 28.09.05 | 17h34 ♦ Une étude poussée de la conflictualité dans cette entreprise permettrait à l'éditorialiste de comprendre pourquoi la situation de la SNCM s'est dégradée alors même que les résultats de la Corsica Ferries ont été symétriquement opposés. Oui l'Etat n'a pas eu le courage de réformer la SNCM, mais qui l'aurait eu quant on voit les risques de troubles à l'ordre public. La vérité c'est qu'il n'existe aucune justification du caractère national de cette compagnie.

lojol ♦ 28.09.05 | 17h33 ♦ Ce qui me parait étrange, c'est la position du STC qui est, nous dit-on proche des indépendantistes corses.Or,ce syndicat en appelle à l'arbitrage de l'Etat français, il y a une subtilité qui m'échappe chez ceux qui stigmatisaient la politique de francisation des effectifs de la SNCM

treve ♦ 28.09.05 | 17h29 ♦ Drôle de texte asymétrique... Insister sur l'inconséquence de l'Etat est commode même si sa gestion a été mauvaise, mais pourquoi le Monde ne dit il rien de la responsabilité de la CGT et du STC dans cette affaire. Pour mémoire la CGT a obtenu l'hérédité de l'emploi puisque les enfants d'employés avaient une priorité à l'embauche. Le STC lui revendiquait l'emploi ethnique voulant réserver les places aux Corses.

JEAN FRANCOIS M. ♦ 28.09.05 | 17h25 ♦ Tout à fait d'accord avec cet éditorial.J'ai eu le "privilège",pendant de nombreuses années, de "bénéficier" des tarifs et des "services" de la SNCM, au temps béni du monopole.Ce naufrage actuel était hélas parfaitement prévisible(il faudrait aussi parler de l'usage qui est fait sur l'ile des fonds de la continuité territoriale!) Un exemple de plus de la manière dont peuvent être dilapidés des fonds publics quand ne peut s'exercer un réel contrôle démocratique.

Penseelibre ♦ 28.09.05 | 17h14 ♦ A Daniton : Ce n'est pas que tous les bons gestionnaires ne sont que dans le privé, c'est que ceux, qui y sont, sont obligés d'être bons, sinon ils dégagent ! Rien ne condamne un fonctionnaire à ne pas savoir gérer et voir lucidement les choses, mais si son patron, le politique, a peur de faire des vagues, çà ne sert à rien qu'il soit bon . En plus il est vrai qu'un certain nombre de bons gestionnaires rejoignent le privé où ils sont mieux payés !

factual ♦ 28.09.05 | 17h05 ♦ C'est sur qu'il est plus facile pour un politique de s'envoler vers la cote pacifique pour clamer des codes de bonnes conduites vis à vis d'une société privée exemplaire qui vous a laissé des milliards d'impots, que d'assumer sur la cote méditéranéenne votre incompétence et la gabegie d'une société dont vous avez la charge. On a vu des régiments de politiques prêts à aller à Palo Alto expliquer à HP "comment faire", mais pas grand monde pour le faire là "où ils sont pourtant en charge"

cohelet ♦ 28.09.05 | 16h57 ♦ Editorial qui analyse bien l'irresponsabilité et la défausse de l'Etat. On pourrait ajouter que W.Butler est aussi un énarque passé aux affaires. On pourrait aussi suggérer, compte tenu du succès de Corsica Ferries et des beaux batiments (vus TV) dont dispose la SNCM, de fusionner les 2 sociétés. Cela ouvrirait le port de Marseille à Corsica Ferries et créerait un beau réseau maritime de ferries dans ce nord ouest de la Mediterranée.

factual ♦ 28.09.05 | 16h55 ♦ A Daniton "abandonnée" me semble un mot bien mal choisi pour une société qui reçoit en subvention du contribuable la moitié de son chiffre d'affaire depuis x années. La privatisation n'a pas à être justifiée, c'est une option. C'est les pertes de la société publique qui doivent l'être. En tant que contribuable, je me fiche d'être co-propietaire d'un navire. Ne me demandez pas d'utiliser cette excuse pour refuser une privatisation.

dominique b. ♦ 28.09.05 | 16h42 ♦ la couardise me semble partagée par toute la classe politique , majorité comme opposition : mais il n'est pas politiquement correct de dénoncer une toute puissance syndicale dans les entreprises publiques ou à l'intérieur des services publics ( au hasard, et par exemple l'éducation nationale ), ni pour la gauche française de s'interroger publiquement sur les méfaits ou effets "secondaires " des 35 heures dans les dites entreprises.La démagogie, elle seule gouverne, et depuis longtemps.

Penseelibre ♦ 28.09.05 | 16h24 ♦ Est-il si nécéssairement prévisible que les syndicats corses se conduisent aussi stupidement qu'on pouvait le craindre ? Oui l'Etat a eu de graves faiblesses dans l'histoire de ce naufrage mais qui a généré cette situation d'équipages pléthoriques et de productivité que même Astérix ( cf Astérix en Corse , les scènes des prisonniers qui construisent la voie romaine et chargent la galère ) n'aurait pas osé imaginer aussi faible ?

DANITON ♦ 28.09.05 | 16h16 ♦ On peut même se demander si la S.N.C.M. n'a pas été "abandonnée" pOur mieux ensuite justifier sa privatisation ou alors les bons gestionnaires sont tous dans le privé même aprés avoir été formés à l'E.N.A. !!!!

monrog ♦ 28.09.05 | 15h52 ♦ Editorial impeccable : rien à y retrancher, tout au plus ajouter que ce n'est, hélas, pas le seul dossier que l'Etat, de + en + impuissant et réduit à la parole, ne sache pas régler. Morale cruelle : sa lâcheté ne lui garantit même pas l'estime ; tout au plus la survie provisoire.

FDMLDP ♦ 28.09.05 | 15h50 ♦ La preuve manifeste que secteur public et entreprises nationalisées ne sont un label ni de compétence, ni de vertu, ni surtout de moindre coût social.

♦ 28.09.05 | 15h40 ♦ Dominique de Villepin aurait ordonné au prefet d'intervenir militairement. A. Juppé avait peut-être raison quand il parlait d'un homme d'état pour temps de guerre à propos de lui.

LUC d. ♦ 28.09.05 | 14h55 ♦ Dans cette chasse aux coupables, pas un seul mot des salariés de la SNCM qui campent sur les célèbres "avantages acquis", qui traitent leurs clients comme certains fonctionnaires (pas tous, Dieu soit loué), traitent certains des administrés que nous sommes et qui enfin utilisent des moyens dont on ne savait pas qu'ils étaient licites.

janvion ♦ 28.09.05 | 14h21 ♦ "Mais le succès de C-F montre que le coupable est l'actionnaire public, cet Etat qui, du début à la fin, aura fait preuve de sa faiblesse." Mais qui se cache donc derrière cet Etat ? Il s'agit d'hommes et de femmes, tous leur nom sont connus ou presque, surtout pour les premiers d'entre eux, les hauts fonctionnaires, préfets, ministres, présidents, on a des photos pour eux même ! Profondément démocrate et modéré, je m'interroge souvent sur la façon dont on me gouverne, est-ce bien sérieux ?

factual ♦ 28.09.05 | 14h19 ♦ Tout est dit. Avec le reflexe bien français que le seul acteur venant avec une proposition de solution se retrouve seul et immédiatement sur le banc des accusés


Le Monde / Société
Des islamistes arrêtés lundi auraient avoué viser trois objectifs à Paris

 L es magistrats antiterroristes français auraient établi que les neuf islamistes présumés arrêtés lundi envisageaient des attentats contre le siège de la DST, l'aéroport d'Orly et le métro parisien, selon des sources proches du dossier citées par l'AFP et Reuters : "au moins un", voire plusieurs des suspects placés en garde à vue auraient en effet avoué, et leur projet était même "très avancé", ont indiqué ces sources, soulignant que l'intervention de la police avait permis d'éviter un passage à l'acte. Lors des perquisitions, les policiers n'avaient cependant saisi ni armes, ni explosifs, ni composants chimiques à l'appui de la thèse de la préparation d'attentats.

Ces aveux confirment ceux recueillis auprès de M'Hamed Benyamina, boucher à Trappes, dans les Yvelines, interpellé et interrogé à Oran le 9 septembre, sur mandat d'arrêt français. C'est d'ailleurs ses déclarations, transmises par la justice algérienne à la justice française, qui ont amené l'interpellation des neuf personnes lundi, à Trappes (Yvelines) et à Evreux (Eure).

Salah Djemaï, avocat de M'Hamed Benyamina, a estimé que son client a été interrogé en Algérie dans des conditions contestables. "Quelqu'un d'équilibré ne fait pas des aveux suicidaires comme ceux-là", a-t-il déclaré, parlant aussi de torture. Selon lui, il s'agit d'"un coup monté", d'une "opération menée de connivence entre la DST et la sécurité militaire algérienne. Nicolas Sarkozy a exploité ce dossier pour muscler son discours".

La sécurité du siège parisien de la direction de la surveillance du territoire (DST) avait été renforcée mi-septembre, à la suite des informations fournies par les autorités algériennes. Une source proche du dossier précise que l'apparition de la DST parmi les cibles potentielles d'attentats terroristes constitue une première.

Au terme de la période de garde à vue de quatre jours, quatre des neuf personnes interpellées devraient être présentées, vendredi, à des magistrats instructeurs, en vue de leur probable mise en examen.

Avec Reuters et AFP
LEMONDE.FR | 29.09.05 | 16h20


Le Monde / Société
Surenchères et dérapages politiques sur la question de la récidive

 L e débat sur la récidive s'enflamme. Jamais, depuis deux ans, le ministre de la justice n'a semblé aussi proche du ministre de l'intérieur : voulant imposer le futur bracelet électronique aux personnes déjà condamnées, Pascal Clément et Nicolas Sarkozy ont tous les deux appelé, mardi 27 septembre, à ne pas tenir compte du principe de non-rétroactivité des lois pénales. Pour le garde des sceaux, la lutte contre la récidive vaut que le gouvernement prenne "le risque de l'inconstitutionnalité."

"Le bracelet électronique est une peine"
Si "nul n'est censé ignorer la loi" , nul ne saurait être puni au nom d'un texte qu'il ne pouvait connaître au moment des faits : c'est le principe de la non-rétroactivité des lois. L'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme indique que "nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée" . Selon l'article 112-1 du code pénal, "sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis" . Le même article précise que "peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date" . Ce principe s'applique, en matière pénale, aux lois répressives plus sévères. Dans sa décision du 2 mars 2004, le Conseil constitutionnel avait autorisé l'inscription au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infraction sexuelle (FJAIS) des "auteurs d'infractions -sexuelles- commises avant la date de publication de la loi". Il avait estimé que cette mesure ne constituait "pas une sanction mais une mesure de police" . Qu'en serait-il du bracelet électronique mobile ? "Il s'agit d'imposer à quelqu'un une contrainte. Le bracelet est une peine", estime Dominique Rousseau, professeur de droit et membre du Conseil supérieur de la magistrature.

Sous la pression d'une succession de faits divers dramatiques, une nouvelle loi sur la récidive est en passe d'être votée, qui sera examinée en seconde lecture à l'Assemblée nationale les 12 et 13 octobre. Depuis 2003, face à la volonté de M. Sarkozy d'imposer des peines automatiques minimales aux récidivistes, ce texte d'origine parlementaire n'a cessé d'évoluer. Le bracelet électronique mobile est devenu l'une de ses mesures phares. Le gouvernement souhaite instaurer la surveillance électronique par satellite des condamnés dangereux dans le cadre du suivi socio-judiciaire.

Cette peine permet déjà au juge d'imposer un contrôle et des soins au condamné, une fois sa peine purgée. Le suivi, créé en 1998 pour les seuls agresseurs sexuels, sera étendu aux meurtriers. Dans ce cadre élargi, la chancellerie affirme que le bracelet sera une mesure de sûreté, et non une peine. Mais ce point suscite un débat chez les juristes.

"NE PAS SAISIR LE CONSEIL"

M. Clément a affirmé vouloir appliquer le bracelet aux personnes condamnées avant la future loi, prenant ainsi le risque d'inconstitutionnalité d'une telle mesure. Un amendement a déjà été adopté en ce sens par la commission des lois de l'Assemblée nationale le 6 juillet. "Les événements récents me poussent à prendre ce risque et les parlementaires avec moi. Il suffira pour eux de ne pas saisir le Conseil constitutionnel" , a lancé M. Clément, lundi, avant de renouveler ses déclarations mardi.

Ces propos ont suscité de vives réactions. Le président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, a rappelé à l'ordre le garde des sceaux : "Le respect de la Constitution est non un risque, mais un devoir" , a-t-il déclaré, mardi. Pour Jean-Marc Ayrault, le président du groupe socialiste de l'Assemblée, M. Clément "n'est pas digne d'exercer ses fonctions" .

L'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) s'est dite "profondément choquée" : "De tels propos bafouent les principes d'un Etat de droit." Selon le Syndicat de la magistrature (SM, gauche), en "défiant les parlementaires de saisir le Conseil constitutionnel" , le ministre exerce "un chantage inadmissible à l'opinion publique" . M. Sarkozy, qui réunissait mardi policiers et gendarmes au Palais des congrès, à Paris, a, pour sa part, affirmé : "Je souhaite que l'on se pose la question de la rétroactivité du suivi socio-judiciaire pour les multirécidivistes condamnés avant 1998, comme c'est le cas dans l'affaire du violeur des parkings parisiens." Il a ajouté qu'il avait "bien l'intention" de faire de la récidive "un combat devant l'opinion publique" , assurant qu'il avait sur ce sujet l'appui de Jacques Chirac : "Sa mobilisation et notre entente sur ce sujet sont totales."

Les débats à l'Assemblée risquent d'être vifs. L'instauration du bracelet électronique, mesure coûteuse et attentatoire aux libertés, soulève de nombreuses questions : quels seront les services responsables du suivi des condamnés ? Quelle sera la durée d'une telle mesure ? Certains députés avaient réclamé vingt ans. Une mission conduite par le député (UMP) Georges Fenech a conclu, au vu de rares expériences étrangères, qu'une durée de cinq ans était le maximum supportable par les individus.

"CONSENTEMENT ÉCRIT"

M. Sarkozy a également réclamé, mardi, que l'on puisse administrer aux agresseurs sexuels, contre leur volonté, un traitement médicamenteux contre la libido. Un tel traitement figure aussi dans la proposition de loi contre la récidive, mais le texte envisage de soumettre la prescription au "consentement écrit et renouvelé" du condamné.

Plusieurs dispositions prévoient un allongement des peines pour les récidivistes. Pour eux, le nombre des sursis avec mise à l'épreuve sera désormais limité à deux. Voire à un seul, en cas d'agression sexuelle ou de violence. Le risque, pour un criminel, de récidiver est inférieur à 5 pour 1 000.

Le texte prévoit aussi que le tribunal amené à juger un récidiviste soit contraint de prononcer un mandat de dépôt à l'audience, sauf avis motivé du juge. Cette disposition heurte l'indépendance des juges et n'est pas soutenue par la chancellerie.

En revanche, le ministre de la justice a souhaité que les auteurs d'actes graves attendent plus longtemps avant de pouvoir demander une libération conditionnelle : le délai d'épreuve sera porté de quinze ans à dix-huit ans pour les condamnés à perpétuité et de quinze ans à vingt-deux ans pour les récidivistes.

L'Assemblée devra aussi se prononcer sur la proposition de M. Fenech d'instaurer des périodes de sûreté plus longues, de vingt-cinq ans. Selon les magistrats, il s'agirait plus d'un effet d'annonce que d'une garantie contre la récidive. Enfin, sur proposition de M. Sarkozy, il est prévu que les associations de victimes soient consultées par le tribunal de l'application des peines avant toute décision de libération conditionnelle.

Nathalie Guibert
Article paru dans l'édition du 29.09.05


Le Monde / Société
Pour les psychiatres, la castration chimique n'est pas la panacée

 L a proposition de Nicolas Sarkozy d'imposer un traitement médicamenteux aux violeurs récidivistes est jugée irréaliste et contraire à la déontologie médicale par les psychiatres spécialistes de la délinquance sexuelle. Réagissant aux déclarations du ministre de l'intérieur, affirmant qu'il faut "pouvoir imposer le suivi médicamenteux aux individus qui ne contrôlent pas leurs pulsions" , les psychiatres soulignent que ce type de traitement, s'il s'avère utile chez certains patients, ne peut en aucun cas constituer une réponse systématique, et a fortiori être administré sous la contrainte. "Laisser croire au public que ces médicaments seraient la panacée contre la délinquance sexuelle est une escroqueri e" , s'indigne le docteur Daniel Zagury, expert auprès des tribunaux.

Désignés par le terme impropre de "castration chimique" , les médicaments antiandrogènes, qui agissent par suppression du désir, sont désormais considérés comme des traitements efficaces dans certaines déviances sexuelles. Il en existe deux types : la cyprotérone, commercialisée en comprimés sous le nom d'Androcur, et la leuropreline, qui se présente sous forme injectable avec effet retard. Jusqu'ici autorisé dans le traitement du cancer de la prostate, l'Androcur a reçu, le 21 juillet, une extension d'indication pour le traitement de la délinquance sexuelle par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Par ailleurs, l'Inserm met en place, sous la direction du professeur Serge Stoléru, une étude comparative de l'efficacité de ces deux types de traitements qui débutera dès janvier 2006 sur 48 patients volontaires.

Utilisant les antiandrogènes depuis plusieurs années avec des délinquants sexuels, le docteur Bernard Cordier, chef de service à l'hôpital Foch, à Suresnes (Hauts-de-Seine), explique que ces traitements "ne sont pas curatifs, mais sont un "frein" à la libido, qui agissent comme un coupe-faim" . On les utilise chez des personnes qui ne parviennent pas à maîtriser leurs pulsions sexuelles et qui craignent de passer à l'acte ou de récidiver, décrit le docteur Cordier. Ce sont des patients demandeurs d'un effet rapide.

Mais le traitement de fond reste la psychothérapie. Pédophiles pour la plupart, ces patients sont rarement récalcitrants au traitement : "Toutes les personnes à qui je l'ai proposé l'ont accepté, car le traitement n'est pas considéré comme une punition, mais comme une aide qui soulage." Aidés par la psychothérapie, certains patients arrêtent la prise de médicament au bout de quelques mois ; d'autres préfèrent continuer malgré les effets secondaires au long cours, comme l'ostéoporose.

Pour les psychiatres, les antiandrogènes ne peuvent en aucun cas être imposés aux patients. "Il est tout simplement impensable de traiter de force un patient , soutient le docteur Cordier. C'est contraire à la déontologie médicale française et cela pourrait être considéré comme une torture." "Je ne vois pas comment contraindre certains sujets, surtout ceux inscrits dans la toute-puissance , analyse le docteur Roland Coutanceau, qui dirige une consultation spécialisée à La Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine). Il faut au contraire un travail de conviction pour faire comprendre au sujet l'intérêt qu'il a à ne pas récidiver."

Pour le docteur Zagury, l'idée d'imposer un traitement médicamenteux révèle "une confusion courante faite entre le délinquant sexuel et le malade mental" . "On ne soigne pas un pédophile comme un schizophrène, à qui l'on peut imposer des soins , précise-t-il. Les personnes présentant des troubles de la personnalité ne peuvent être contraintes, cela ne donnerait tout simplement aucun résultat."

Cécile Prieur
Article paru dans l'édition du 29.09.05


Le Monde / Société
Alain Boulay, président de l'association Aide aux parents d'enfants victimes (APEV)
"Nous sommes pour les libérations conditionnelles car elles garantissent un certain suivi"

 Q ue pensez-vous de la proposition du ministre de la justice d'imposer aux personnes déjà condamnées des bracelets électroniques dans le cadre de la future loi sur la récidive en contravention avec le principe de non-rétroactivité des lois ?
Au nom de ce principe, on sacrifie des enfants et des jeunes femmes. Je pense que l'on peut y contrevenir de façon exceptionnelle, et tout particulièrement pour les auteurs de crimes sexuels. En même temps, nous savons bien, à l'association, qu'aucun moyen n'est efficace à 100 %. Fichier des agresseurs sexuels, bracelet électronique, suivi socio-judiciaire, il faut utiliser toute la panoplie pour multiplier les filets de sécurité autour de ces personnes. Le problème, c'est le manque de moyens.
Trois exemples : un agent de probation m'a écrit. Il assure le suivi de 150 personnes en liberté conditionnelle, il ne peut les voir qu'une fois par an. Comment peut-il être efficace ? La loi de 1998 avait instauré la présence d'un référent psychiatrique dans chaque département. Sept ans plus tard, la moitié des postes ne sont pas pourvus. On nous a aussi promis des prisons-hôpital composées de petites unités capables d'accueillir les criminels sexuels. On n'en a pas encore vu une sortir de terre.

Etes-vous favorable à ce que les victimes soient associées à la décision d'accorder la liberté conditionnelle à des détenus ?
Nous sommes absolument contre et serons toujours contre. Les victimes n'ont pas à prendre la responsabilité d'une décision de remise en liberté. Cela doit exclusivement dépendre des magistrats. Les victimes ne peuvent être juge et partie. On ne pourrait être que systématiquement contre les remises en liberté. En plus, il n'y a aucun rapport entre la récidive et le fait que les victimes soient sollicitées. Nous demandons simplement qu'elles soient tenues informées dans les cas de libération conditionnelle, et seulement dans ces cas, qu'elles soient respectées.

Au cours des dernières années, la durée moyenne des peines criminelles effectuées s'est allongée. Cela vous rassure-t-il ?
En allongeant les peines, on repousse le problème. Il ne faut pas leurrer les victimes : tout criminel sortira un jour. La question cruciale n'est pas celle de la longueur des peines. Elle se formule plutôt de cette manière : qu'est-ce que l'on fait de ces gens quand ils sortent de prison ? Dans cette perspective, nous sommes défavorables aux remises de peine et pour les libérations conditionnelles. Car celles-ci garantissent un certain suivi de la personne. Nous préconisons aussi la mise en place d'un observatoire de la récidive et la mise en route d'études sur les profils des agresseurs.

Est-ce que le sentiment naturel des victimes n'est pas d'exiger une peine maximale ?
L'association est très attachée à la peine de réclusion criminelle à perpétuité. C'est une valeur symbolique. Nous savons bien qu'elle n'est pas appliquée. Ce n'est pas le problème. Nous sommes favorables à un effort d'explication en direction des victimes, qui soit institutionnalisé à tous les moments : l'instruction, le procès. Cette démarche leur permet d'accepter la peine.

Etes-vous favorable à la castration chimique imposée aux criminels sexuels, comme le défend le ministre de l'intérieur ?
Le mot me semble impropre. Il s'agit d'une mesure temporaire qui n'est pas irréversible, contrairement à la castration physique. Elle doit faire partie de l'arsenal. Mais, encore une fois, je crois à la complémentarité du système.

N'y a-t-il pas, en dernier ressort, une part de la souffrance des victimes qui échappe entièrement au traitement judiciaire ?
Bien sûr. Il y a des familles qui se retirent le droit de vivre, de fêter Noël, de rire. La justice ne pourra jamais répondre à ça.

Propos recueillis par Pascal Ceaux
Article paru dans l'édition du 29.09.05


Le Monde / Société
Le nombre de condamnés à perpétuité a été multiplié par trois en trente ans

 L e gouvernement appelle à plus de sévérité contre les criminels, en proposant notamment d'allonger les peines que devront purger les récidivistes. La durée exceptionnelle de la détention de Lucien Léger, qui sera libéré lundi 3 octobre après 41 ans de réclusion, rappelle que les lois en vigueur permettent déjà de mettre à l'écart de la société des individus pendant un temps très long. Le nombre de condamnés à perpétuité, sanction pénale parfois qualifiée de "peine de mort lente" , a été multiplié par trois en trente ans, selon une étude non publiée du ministère de la justice : ils étaient 524 au 1er janvier 2005 contre 185 au 1er janvier 1975.

Comment s'appliquent les peines

La perpétuité. La réclusion criminelle à perpétuité est prononcée par la cour d'assises. Elle peut être commuée en "peine à temps" en fonction de l'évolution du condamné.

La période de sûreté. Créée en 1978, elle empêche tout aménagement de peine (permissions de sortir, libération conditionnelle, etc.) pour les auteurs d'infractions graves (assassinat, viol ayant entraîné la mort...). Elle est automatique pour les peines supérieures ou égales à dix ans (elle s'établit alors à la moitié de la peine et à 18 ans pour les perpétuités). Elle peut aussi, depuis 1994, faire l'objet d'une décision spéciale du jury de la cour d'assises, en étant portée aux deux tiers de la peine ou à 22 ans en cas de perpétuité, voire 30 ans dans des cas exceptionnels.

Les réductions de peine. La loi prévoit des réductions automatiques pour bonne conduite (3 mois la première année, 2 mois les années suivantes, 7 jours par mois restant) ou dans le cadre du décret de grâce collective du 14 juillet (4 mois maximum). Les "remises de peine supplémentaires" (3 mois maximum par année de détention) quant à elles sont accordées en fonction des efforts de réadaptation sociale manifestés par le condamné.

La libération conditionnelle. Elle peut être accordée à partir de la moitié de la peine, ou des deux tiers, dans le cas des récidivistes. Pour les condamnés à la réclusion à perpétuité elle ne peut intervenir qu'au bout de 15 ans. La libération conditionnelle est assortie de mesures d'assistance et de contrôle (résider dans un lieu, répondre aux convocations du juge de l'application des peines ou du travailleur social) qui ne peuvent excéder dix ans.

Le suivi socio-judiciaire. La peine complémentaire de suivi socio-judiciaire a été créée en 1998. Elle est actuellement réservée aux délinquants sexuels. Le suivi socio-judiciaire permet, dès l'incarcération ou à la libération du condamné, de lui imposer des obligations (ne pas rencontrer de mineurs, par exemple) et de prononcer une injonction de soins, pendant une durée n'excédant pas 20 ans.

Les services de la chancellerie ont étudié tous les condamnés à perpétuité libérés entre 1995 et 2005, soit 151 personnes au total, dont trois avaient été initialement condamnées à la peine de mort. L'étude s'est aussi penchée sur ceux qui étaient incarcérés au 1er mai 2005 (562 personnes).

UNE DÉTENTION PLUS LONGUE

"A l'heure où le débat est vif sur ce thème" , les auteurs expliquent en préambule qu'il n'est pas contradictoire de parler de la "durée effective des peines perpétuelles" , titre de leur étude. En effet, "la peine perpétuelle signifie rarement l'incarcération pour le reste de la vie. Elle peut être commuée en peine à temps". En outre, "si elle n'est pas commuée, la libération conditionnelle peut être obtenue après un délai d'épreuve de quinze années".

Les détentions effectuées par les condamnés à perpétuité sont de plus en plus longues. Leur durée moyenne était de 17,2 ans dans deux précédentes enquêtes, l'une menée auprès des sortants de 1961 à 1980, l'autre conduite auprès des libérés de 1989. Elle est passée à 20 ans, parmi les libérés de 1995 à 2005. Un sur cinq a été incarcéré pendant plus de 22 ans. L'évolution est importante : cette proportion était infime (1,6 %) dans l'enquête la plus ancienne. Ces prisonniers étaient en moyenne âgés de 51 ans à leur sortie.

La grande majorité (85 %) sont sortis dans le cadre d'une liberté conditionnelle, après vingt ans de réclusion en moyenne. L'effet de la loi du 15 juin 2000 est notable. Avant 2001, la décision de libération conditionnelle appartenait au ministre de la justice. Entre 1995 et 2001, on ne compte que huit sortants condamnés à la peine perpétuelle par an. Après la réforme, la décision est confiée à une juridiction collégiale : entre 2001 et 2004, le nombre moyen annuel de sortants a triplé, pour atteindre 26.

Seuls douze condamnés (8 %) ont effectué une "sortie sèche", sans obligations. Ce sont eux qui ont subi les peines les plus longues : jusqu'à 33 ans. Par ailleurs, cinq personnes sont mortes en prison, trois ont obtenu une suspension de peine pour raisons médicales, trois ont été graciées par le président de la République.

En mai 2005, y compris Lucien Léger, trois condamnés purgeaient leur peine depuis plus de 40 ans et dix-sept depuis plus de 30 ans. L'étude a aussi mesuré la proportion de perpétuités assorties d'une période de sûreté, pendant laquelle aucun aménagement de peine n'est possible : elle se monte à 84 %. La période de sûreté maximale, 30 ans, était prononcée pour 16 condamnés sur 562.

"L'allongement des peines perpétuelles est confirmé , concluent les auteurs de l'étude. Les condamnés exécutant cette peine au 1er mai 2005 vont sans doute effectuer une durée de détention encore plus longue : 31 % ont une peine de sûreté supérieure ou égale à 20 ans. Ils sont relativement âgés et les conséquences du vieillissement de la population s'avéreront complexes pour la gestion des établissements pénitentiaires comme pour la réintégration de ces condamnés dans la société."

Nathalie Guibert
Article paru dans l'édition du 29.09.05


Le Monde / Société
Josacine : l'hypothèse de l'accident domestique réapparaît devant le tribunal
LE HAVRE (Seine-Maritime) de notre envoyée spéciale

 L e 25 mai 1997, la cour d'assises de la Seine-Maritime condamnait Jean-Marc Deperrois à vingt ans de réclusion criminelle pour l'"empoisonnement" de la petite Emilie Tanay, âgée de neuf ans, décédée après une ingestion de cyanure. La procédure d'appel des arrêts de cour d'assises n'étant pas encore instituée, le rejet, un an plus tard, du pourvoi de M. Deperrois devant la Cour de cassation, puis celui de la requête en révision de son procès, en décembre 2002, devaient tourner la page judiciaire de l'"affaire de la Josacine." C'est elle, pourtant, qui a occupé, mardi 27 septembre, le tribunal correctionnel du Havre.

Devant cette juridiction comparaissait notre collaborateur Jean-Michel Dumay, auteur d'une contre-enquête, Josacine, le poison du doute, publiée en mars 2003 aux éditions Stock, qui était poursuivi pour "diffamation" par l'un des principaux témoins de cette affaire, Jean-Michel Tocqueville. Dans ce livre, qui reprend et développe un article publié dans Le Monde daté 24-25 novembre 2002, le journaliste défend l'hypothèse selon laquelle Emilie Tanay ne serait pas morte d'un empoisonnement volontaire – dont Jean-Marc Deperrois s'est toujours proclamé innocent – mais à la suite d'un accident domestique camouflé.

Etayée par une étude minutieuse du dossier d'instruction, et notamment par la révélation d'écoutes téléphoniques passées inaperçues tant aux yeux des enquêteurs qu'à ceux de la défense de l'accusé, cette hypothèse met en cause M. Tocqueville – au domicile duquel la petite Emilie se trouvait le jour du drame – et son ami Denis Lecointre. Ce dernier, qui avait lui aussi intenté une procédure en diffamation contre le journal et l'auteur de l'article, a perdu son procès devant la cour d'appel de Toulouse en juin 2004.

"ÉLÉMENTS NOUVEAUX"

Dans les attendus de sa décision, la cour avait infirmé le jugement de première instance et prononcé la relaxe du journaliste en estimant que sa démarche, qui s'appuyait sur "des éléments sérieux" , devait "être considérée comme légitime" . L'ensemble de ces éléments a été rappelé devant le tribunal du Havre.

Mais l'enjeu de cette audience allait bien au-delà de la seule question de la diffamation, comme en témoignait la présence, dans les rangs du public, des membres du comité de soutien à Jean-Marc Deperrois et de son nouvel avocat, Me Thierry Lévy, associé dans ce dossier à Me Valérie Rosano. Tous deux ont en effet déposé, mercredi 7 septembre, une nouvelle requête en révision du procès, en s'appuyant sur les "éléments nouveaux " apportés par la contre-enquête. Ils rendent, selon eux, "vraisemblable" l'hypothèse selon laquelle l'enfant aurait ingéré par erreur du cyanure qui se trouvait dans un flacon au domicile de M. Tocqueville. Un accident, que celui-ci aurait camouflé en mélangeant a posteriori le produit mortel à la Josacine (Le Monde du 14 septembre). Les avocats de M. Deperrois ont donc suivi avec attention un débat susceptible d'être versé à l'appui de leur requête.

Pour leur défense, assurée par Me Yves Baudelot, Jean-Michel Dumay et les éditions Stock avaient notamment fait citer, outre l'infirmier anesthésiste et le médecin urgentiste qui avaient apporté les premiers soins à l'enfant, une infirmière de l'hôpital où elle avait été transférée, ainsi que l'ex-épouse de Jean-Michel Tocqueville et Denis Lecointre. Si ce dernier a opposé un mutisme las aux questions de la présidente du tribunal sur le sens d'une conversation téléphonique – interceptée par les enquêteurs – au cours de laquelle il évoquait avec M. Tocqueville, "ton produit qu't'as mis dans la Josacine" , Sylvie Tocqueville a confié, pour sa part, qu'elle croyait désormais "plausible" la thèse d'un accident domestique suivi de sa dissimulation. Ce qui n'était jusqu'alors qu'une hypothèse de papier faisait ainsi une entrée discrète dans une enceinte judiciaire.

Jugement le 21 novembre.

Pascale Robert-Diard
Article paru dans l'édition du 29.09.05


Le Monde / Société
Une campagne défend l'usage du "vrai nom du médicament"

 R éunis au sein du collectif Europe et médicament, la revue indépendante Prescrire, la Mutualité française et l'Union fédérale des consommateurs (UFC-Que choisir) ont lancé, mardi 27 septembre, une campagne en faveur de la prescription en dénomination commune internationale (DCI) intitulée "le vrai nom du médicament" .

Alors que dans bon nombre de pays européens (Royaume-Uni, Pays-Bas, Suède, Belgique, etc.) la DCI est couramment pratiquée par les médecins, en France, seulement 7 % des ordonnances sont libellées avec le nom du principe actif contenu dans le médicament et non pas son nom de marque.

Ibuprofène plutôt qu'Advil, lopéramide plutôt qu'Imodium... adopter la DCI "permet de ramener chaque produit à sa juste valeur thérapeutique en s'affranchissant de toute influence promotionnelle" , estime Jacques Juillard, président de l'association Mieux prescrire.

Regrettant qu'en France il n'existe pas de "base de données publiques du médicament" et que seul le Vidal – dictionnaire des noms commerciaux – trône sur le bureau des médecins, le collectif va publier, notamment sur Internet, des "fiches pratiques" sur "les multiples avantages de la DCI" .

Derrière les quelque 8 000 noms commerciaux de médicaments, se cachent en réalité seulement 1 700 DCI. "Raisonner en fonction du nom de la substance active permet, pour les médecins et pharmaciens, de prévenir les effets indésirables et les risques d'interactions médicamenteuses et, pour les consommateurs, aide à éviter les surdosages" , insiste Alain Bazot, président de l'UFC-Que choisir.

En juin 2002, lors de la revalorisation de la consultation à 20 euros, les généralistes s'étaient notamment engagés à prescrire davantage en... DCI.

Sandrine Blanchard
Article paru dans l'édition du 29.09.05


Le Monde / Société
Controverse à Strasbourg sur la recherche sur l'embryon

 U n groupe de 73 députés européens vient de relancer la controverse sur l'origine, communautaire ou nationale, du financement des recherches menées sur des embryons humains. Ces parlementaires ont adressé, le 20 septembre, une lettre ouverte à José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, peu de temps avant que celle-ci dévoile le détail du 7e programme européen de recherche et de développement, qui concernera la période 2007-2013. Ils demandent que l'Union européenne (UE) cesse de financer de tels travaux, illégaux dans plusieurs Etats membres.

Ces eurodéputés rappellent les conclusions formulées par le Parlement dans sa résolution du 10 mars 2005 relative "au commerce d'ovules humains" . Après un vote réunissant une majorité constituée de la droite alliée aux Verts, le Parlement s'était félicité d'une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies qui invitait la Commission à retirer tout soutien et tout financement au clonage thérapeutique. Le Parlement souhaitait alors que la Commission "applique le principe de subsidiarité aux autres recherches sur les embryons et les cellules souches embryonnaires, afin que les Etats membres dans lesquels ce type de recherche est autorisé financent celles-ci au moyen de leurs budgets nationaux" . Il ajoutait que "l'Union devrait financer de préférence des recherches alternatives telles que celles portant sur les cellules souches somatiques ou ombilicales" , qui ne nécessitent pas la destruction d'embryons humains et ne soulèvent pas de problèmes éthiques. Les signataires de la lettre ouverte sont essentiellement des catholiques allemands (CDU), mais aussi polonais, tchèques, irlandais, italiens, etc.

La Commission, qui n'a pas prévu de changer de politique, rappelle que le 7e programme de recherche – comme le 6e – exclut le clonage à visée thérapeutique et que la résolution du Parlement est juridiquement non contraignante. Elle estime qu'elle pourra trouver, au Conseil et au Parlement européen, une majorité pour adopter son 7e programme, bien qu'avec l'élargissement intervenu en 2004 les pays prônant le respect des valeurs chrétiennes soient plus représentés. Elle insiste sur l'étroite surveillance dont font l'objet les recherches de ce type. Elle a soumis aux 25 Etats membres les quatre projets impliquant des recherches sur les cellules souches embryonnaires. Trois ont été adoptés à l'unanimité, et le quatrième n'a été rejeté que par l'Autriche, alors que la législation de deux autres pays, la Pologne et la Lituanie, interdit ce type de recherche. Ces projets ont représenté un financement de 500 000 euros, soit 0,002 % du budget du 6e programme (17,5 milliards d'euros).

La Grande-Bretagne ne pourra pas demander un financement européen des travaux qu'elle autorise depuis 2002, et qui ne peuvent être menés qu'à partir de la création d'embryons humains par la technique du clonage thérapeutique par transfert nucléaire, une technique similaire à celle qui avait permis la création, en 1997, de la brebis Dolly. Invoquant le risque du développement de trafic de cellules sexuelles féminines, Jacques Chirac s'était, en 2001, prononcé contre la légalisation en France de cette pratique, que la loi de bioéthique du 8 août 2004 interdit.

Jean-Yves Nau et Rafaële Rivais à Bruxelles
Article paru dans l'édition du 29.09.05


– Les longues –
                 
                 

    En extra: Les éditos du Monde    

[*] «Longues propagandistes» parce qu'il existe aussi, dans cette rubrique, des «brèves propagandistes» reprenant surtout des dépêches de l'AFP. Ici, on trouvera pour l'essentiel des articles parus dans Le Monde, qui par le fait, sont beaucoup plus longs…