Dossier «L'Affaire du RER D» / Libération | ![]() | ![]() |
PARIS - Les gardes à vue de Marie L. et de son compagnon, soupçonnés d'avoir inventé de toutes pièces l'agression antisémite de vendredi dernier dans le RER D, ont été prolongées mercredi et les deux jeunes gens devraient être présentés à un juge jeudi matin, a-t-on appris de source judiciaire.
Après l'emballement politico-médiatique déclenché par le récit de Marie L., Jacques Chirac a déclaré lors de son allocution du 14-Juillet qu'il ne "regrett(ait) pas" d'avoir réagi rapidement après la publication des premières informations samedi soir.
"C'est une affaire regrettable à tous égards mais je ne regrette pas", a-t-il dit.
Dans un contexte de recrudescence des actes racistes et antisémites, "il peut y avoir naturellement toujours des situations de manipulation qui sont les séquelles de ce mauvais climat qu'on laisse se développer ou qui s'est développé", a-t-il estimé.
"Quand il y a manipulation, il faut tout simplement que le manipulateur soit sanctionné avec toute la rigueur de la loi", a-t-il affirmé.
Les deux jeunes gens ont subi des examens psychiatriques et des perquisitions ont été menées à leurs domiciles en banlieue parisienne dans la matinée, a-t-on précisé de source judiciaire.
Il faut le temps pour analyser les résultats de ces procédures, a-t-on souligné.
Ils sont exposés à des poursuites pour "dénonciation de délit imaginaire", un délit lui-même puni d'une peine maximale de six mois de prison et 7.500 euros d'amende.
Leur éventuelle mise en examen ou leur convocation devant un tribunal à une date ultérieure devrait leur être signifiée jeudi matin.
Selon Le Figaro, une troisième personne a été placée en garde à vue dans les locaux de la Police judiciaire de Cergy-Pontoise. Il s'agirait d'un proche du couple ayant accompagné Marie L. lorsqu'elle est allée porter plainte au commissariat d'Aubervilliers vendredi dernier.
Elle avait alors affirmé avoir été agressée par des hommes d'origines africaine et maghrébine parce qu'ils pensaient qu'elle était juive.
"AFFABULATIONS"
Pour l'ancien ministre socialiste de l'Intérieur, Daniel Vaillant, le chef de l'Etat "aurait mieux fait de se renseigner" sur l'avancement de l'enquête avant de réagir même si Jacques Chirac a pu avoir "raison sur le fond" en condamnant cette attaque.
Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes, qui s'est entretenue avec la victime de cette agression présumée avant de la rencontrer lundi matin et de rapporter ses propos, trouve encore moins grâce à ses yeux.
"Des éléments d'enquête étaient présents dès lundi après-midi pour éviter à Mme Guedj la faute grave qu'elle a commise au nom du gouvernement", a-t-il expliqué sur RTL.
Le député UMP Jean Myard a quant à lui dénoncé une "hystérie médiatique" doublée d'une "hystérie politique". "Le pouvoir est aujourd'hui partout sauf là où il devrait être", a-t-il estimé, condamnant les hommes politiques qui souhaitent "épouser le rythme des médias".
Le président du Conseil régional du culte musulman de Rhône-Alpes, Kamel Kabtane, a pour sa part dénoncé une "islamophobie ambiante", tandis que le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP) a déploré que "populations des banlieues" aient été de nouveau stigmatisées.
De son côté, la mère de la jeune femme, interrogée sur RTL mercredi matin, a souhaité que "justice soit faite" mais également que sa fille soit vue par un psychiatre et soignée.
"La seule déclaration que je puisse faire c'est qu'elle soit entendue par un psychiatre et que justice soit faite, parce que ce n'est pas normal non plus qu'elle mette la France dans cet état", a-t-elle dit.
Arrivée à la PJ de Cergy-Pontoise pour être entendue comme simple témoin mardi à la mi-journée, Marie L. a avoué quelques heures plus tard avoir totalement inventé l'agression dont elle avait dit avoir été victime vendredi, avec son bébé, dans le RER
D.
Le procureur de la République de Pontoise a confirmé que la jeune femme avait "affabulé" et qu'elle avait reconnu s'être elle-même infligé des marques de coups de couteau, s'être coupé une mèche de cheveux et avoir tracé des croix gammées sur son corps.