Dossier «L'Affaire du RER D» / Libération Fermer la fenêtre
Les suites de l'affaire du RER D

Un gloubiboulga hystérique

jeudi 15 juillet 2004 (Liberation - 06:00)

 E ncore une fois, on a voulu stigmatiser les communautés africaines et maghrébines, en se faisant le relais d'une scène de violence certes plausible, mais sans prendre la peine de préciser qu'elle ne tenait que sur la foi de cette jeune femme. Pour ma part, en tant que jeune Noir d'origine africaine, cela m'a choqué mais pas vraiment étonné. Rien n'a changé en Occident, le voyou c'est toujours l'étranger et la victime est toujours crédible. Le procès d'Outreau aurait dû servir d'exemple : ne pas se hâter à des conclusions basées sur un témoignage avant d'avoir la certitude de sa véracité. Mais c'est plus facile de tomber dans la facilité et de tirer à vue sur des hordes de «sauvageons». Ces jeunes Beurs et Noirs qui brûlent des bagnoles et qui font peur à la veuve et à l'orphelin. On préfère les voir courir derrière un ballon...

Je suis très déçu de Libération qui est mon quotidien préféré et qui s'est lui aussi laissé piéger par cette supercherie médiatique, et je ne suis pas convaincu par les articles du tirage d'aujourd'hui qui nous donnent plutôt l'impression que c'est la faute des sources policières incomplètes relayées par des politiques trop soucieux de réagir rapidement que celle des médias qui n'auraient fait que relater l'info de la dépêche AFP. En plus, dans l'article consacré aux réactions des «deux communautés indignées», vous mettez une fois de plus dos à dos la communauté maghrébine et la communauté juive de France. Quand allez-vous cesser ce décalquage du conflit israélo-palestinien sur le problème des communautés en France. On ferait mieux de retrouver nos esprits et de vraiment réfléchir sur le problème des communautés en France (intégration, laïcité, racisme, violence sociale et exclusion), plutôt que de céder à ce gloubiboulga hystérique provoqué par une pauvre jeune femme victime de ses problèmes psychologiques.

Quant à vous, Libération, j'attends de vous que vous retrouviez le panache et le sens critique qui a très souvent fait votre réputation... A demain Kay Kagame (Genève)