Dossier «L'Affaire du RER D» / Divers | ![]() | ![]() |
La jeune femme qui a porté plainte pour une agression antisémite supposée dans le RER a avoué lors de sa garde à vue avoir tout inventé. Marie-Léonie L. a «affabulé» et «a reconnu avoir tracé elle-même les croix gammées sur son corps», a affirmé le procureur de la République de Pontoise dans un communiqué.
La jeune femme, entendue par les enquêteurs de la PJ de Versailles à l'antenne de Cergy, a été placée en garde à vue dans l'après-midi pour «dénonciation de délit imaginaire», a précisé le procureur de la République de Cergy, Xavier Salvat. Il s'agit d'une infraction qui peut tomber sous le coup de l'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique, puni d'une peine maximale de 6 mois de prison et 7 500 euros d'amende.
En décidant d'entendre à nouveau la jeune femme, les enquêteurs tentaient d'éclaircir des contradictions dans ses déclarations qui auraient été mises en évidence sur des écoutes (pratiquées dans le cadre de l'enquête de police judiciaire) où elle aurait déclaré à un proche avoir été dépassée par les événements, selon une source proche du dossier.
Lorsqu'elle a déposé plainte, la jeune femme a raconté aux enquêteurs avoir été agressée vendredi matin par six jeunes, dont quatre d'origine maghrébine, alors qu'elle se trouvait avec son bébé dans un train de la ligne D du RER, entre Louvres et Sarcelles.
Selon ses déclarations, les agresseurs, certains armés de couteaux, l'avaient d'abord bousculée puis, la croyant juive, lui avaient notamment dessiné des croix gammées sur le ventre devant des témoins qui n'auraient pas réagi.
L'analyse des bandes vidéo de la gare de Sarcelles - où étaient censés être descendus les agresseurs - n'a pas permis de les repérer. En dépit d'un appel à témoin, les enquêteurs n'ont pas fait état de passagers venus se manifester. La jeune femme avait déclaré hier à la secrétaire d'Etat aux Droits des victimes, Nicole Guedj, qu'«il y aurait eu une vingtaine de personnes capables de voir la scène, notamment un jeune homme assis à proximité», et qu'un couple l'avait aidée à sa descente du RER.
Au cours des années passées, la jeune femme avait porté plainte à six reprises, notamment pour vols et pour une agression sexuelle dans le Val-de-Marne, sans que les enquêtes ouvertes n'aboutissent, selon une source proche de l'enquête.
«L'émotion qu'a déclenchée cette information réelle ou virtuelle est une émotion authentique», a déclaré le premier ministre Jean-Pierre Raffarin, juste avant les aveux. «Restons prudents quant à l'information mais restons vigilants, car tout le monde sait que le racisme et l'antisémitisme sont des maux qu'il faut combattre avec l'énergie des pouvoirs publics mais aussi avec l'énergie des citoyens».
Le président du Conseil régional du culte musulman de Rhône-Alpes, Kamel Kabtane, a dénoncé «l'islamophobie ambiante qui règne aujourd'hui en France et où s'engouffrent tous les médias pour mettre en accusation la communauté musulmane».
Le MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) a déploré que cette affaire «ait jeté en pâture les populations des banlieues déjà stigmatisées».
«Si cette dame a commis un grave mensonge (...) cela ne doit pas nous empêcher de poser politiquement la question (de l'antisémitisme) parce qu'elle est grave, elle est au moins aussi grave que l'affabulation sinon plus grave et elle mérite d'être discutée», a déclaré le député UMP du XVIe arrondissement de Paris Claude Goasguen.
- Marie raconte fréquemment des histoires. Son entourage s'en amuse régulièrement. Lorsqu'elle est marquée par un événement dans l'actualité ou un épisode de la vie d'un de ses proches, il lui arrive de se l'approprier comme si elle l'avait vécu. Lorsque j'ai compris qu'elle était la victime dont toute la presse parlait, j'ai tout de suite pensé à un canular. Je me suis dit: «C'est sûrement un «mytho» de Marie.» Lorsque j'ai vu l'ampleur que prenait l'affaire, je ne voulais pas y croire. Je pense qu'il y a 99,9% de chances que cette affaire soit inventée de toutes pièces.
- C'est très troublant. Il se trouve justement qu'une de ses connaissances lui a raconté une agression ressemblant étrangement à celle dont elle prétend avoir été victime. En fin de semaine derrière, elle a appris qu'un ami d'ami, un homme d'origine juive, s'était fait molester par des jeunes qui voulaient lui dérober son portefeuille. Il s'est débattu. Dans la bagarre, l'étoile de David qu'il porte toujours autour du cou est sortie de sous son pull. Ses agresseurs l'ont alors insulté et ont tenu des propos antisémites. Il a dû être hospitalisé. Marie a entendu le récit de cette histoire. Je suis frappée par la coïncidence de ces deux affaires et je suis persuadée que cet épisode à largement inspiré le scénario de son agression.
- Non pas du tout. À ma connaissance, cela ne fait pas partie de ses préoccupations.
-Bien sûr. Mais jusqu'à présent, il s'agissait de petits mensonges sans conséquence. Par exemple, elle racontait qu'elle allait en vacances à Cannes, qu'elle y passait un mois. Elle donnait une adresse, prétendait qu'il fallait l'appeler à Paris et que son téléphone était renvoyé sur son lieu de vacances, alors que cette adresse n'existait pas. Tout était faux.
Un jour, elle s'est inventé une petite sœur. Marie n'a qu'un grand frère. Elle montrait pourtant les photos d'une fillette. En fait, les clichés la représentaient, elle, enfant. Plus tard, elle a fini par dire que la «petite sœur» était morte.
Une autre fois les pompiers ont dû intervenir chez elle car elle prétextait une crise d'asthme. Son père était gardien d'un établissement scolaire, dans le XVIe arrondissement. Une année, elle a déclaré à un groupe d'amis qu'il mettait à leur disposition des locaux pour une petite fiesta. Le jour de la boum, les invités, boisson et sono sous le bras, se sont retrouvés devant une porte close...
Autre anecdote dont je me souviens. Au moment de la diffusion du premier «Loft Story», elle déclarait qu'elle connaissait bien l'une des protagonistes, Laure Delattre. Elle travaillait alors chez Pizza Hut. Tous ses collègues s'attendaient à voir l'héroïne de la télé débarquer dans le restaurant!
-Pas du tout. C'est une jeune fille tout à fait normale en apparence. Elle paraît saine, bien dans sa peau. Elle est charmante, très gentille. Elle n'a aucune perversité. Et puis soudain, elle traverse une crise.
-Je ne crois pas. Je ne suis pas sûre que sa famille ait pris la mesure du problème. Sa mère et son frère la couvrent. Ils ne veulent sans doute pas s'avouer que Marie sort parfois de la réalité.
- En avril 2003, un jeune adolescent de 13 ans est retrouvé dans une forêt par un jogger. Il ne porte plus ni montre ni chaussures et n'a plus son cartable, volés selon lui par trois individus d'une vingtaine d'années «d'origine africaine» qui l'auraient kidnappé à son domicile. Après quelques reconstitutions, le jeune garçon finit par avouer avoir tout inventé. Il craignait des remontrances de ses parents pour ses mauvais résultats scolaires.
- Une étudiante membre de l'UEJF porte plainte en mars 2003. Elle raconte avoir été agressée en rentrant chez elle au milieu de la nuit par trois hommes encagoulés qui, après l'avoir traitée de «sale juive», lui auraient gravé une étoile de David sur le bras. Après des doutes émis par le Crif sur le caractère antisémite de l'agression et la difficulté pour la police d'établir les faits, l'affaire n'aura pas de suites.
- Mohammed, un Tunisien âgé d'une trentaine d'années, est accusé en décembre 2002, de coups et blessures par des contrôleurs de bus à Marseille après avoir été intercepté sans billet. Après vérification, c'est le jeune homme qui se trouve être la victime. Une caméra à bord du bus témoigne de l'agressivité des contrôleurs.
- L'affaire de Christophe Bentboa en juin 2002 fait la une de toute la presse. Cet homme, âgé de 30 ans, chauffeur de bus sur une ligne réputée sensible des quartiers nord de Marseille, affirme que deux jeunes avec des masques de carnaval l'ont menacé dans son bus et l'ont aspergé d'essence avant de craquer une allumette. Ce fait divers fait grand bruit jusqu'à ce que les policiers relèvent de nombreuses incohérences dans le récit du chauffeur de bus qui avoue finalement avoir tout inventé. Pas satisfait de son affectation sur cette ligne de bus, il espérait par cette affaire obtenir une mutation dans un quartier moins sensible.
- En décembre 1999, une jeune femme se présente à la gendarmerie de Genlis, en Côte-d'Or. Elle dit avoir été agressée et présente des blessures à coups de cutter au front, aux jambes et à la main gauche. L'enquête révélera vite qu'il s'agit d'automutilations.
- Le doute n'a pas été levé sur l'affaire de Sandrine. Cette jeune femme gardien de la paix dépose plainte en 1997 pour un viol en réunion dont elle aurait été victime sur la ligne C du RER, entre Brétigny et Dourdan. L'enquête fait apparaître de telles invraisemblances que le juge demande aux policiers de tout reprendre de zéro. Les faits sont d'autant plus troublants qu'en 1989 la jeune femme avait déjà porté plainte pour des faits similaires. Les enquêteurs avaient alors conclu à la «grande fragilité psychologique» de la jeune femme.
Recherche témoins despérément. Un appel à témoin, lancé ce week-end, et des patrouilles de policiers dans les trains de la ligne concernée n'ont donné aucun résultat comme ont été également infructueuses les investigations effectuées dans les cités les plus sensibles de Sarcelles, où seraient descendus les présumés agresseurs.Plus encore, les seuls témoignages importants collectés pour le moment dans cette affaire sont en défaveur de la victime ! Le SRPJ de Versailles a en effet recueilli, hier après-midi, le témoignage spontané d'une femme se présentant comme étant proche de Marie-Léonie (lire ci-dessous) et qui a souligné sa «mythomanie» latente. Habitant le XVIe arrondissement, ancien arrondissement de Marie-Léonie, cette femme aurait notamment raconté aux enquêteurs que Marie-Léonie n'en était pas à son coup d'essai. Des accusations particulièrement graves qui, si elles sont prises avec prudence par les policiers, vont naturellement être soigneusement vérifiées. Un second témoignage est plus embarrassant : la victime présumée aurait été vue montant dans le RER D, à la station de Louvres (Val-d'Oise), avant son agression, mais avec les vêtements déjà déchirés...
Combinant émotion populaire, fragilité de la preuve et polémique naissante, l'affaire du RER D est décidément des plus délicates.
Loin de ces considérations, les policiers poursuivent leur enquête en recueillant notamment les bandes vidéo de la SNCF pouvant aider à identifier d'éventuels agresseurs. L'analyse de la bande vidéo de la gare de Garges-Sarcelles, où, selon la victime, les six jeunes agresseurs, trois étant armés «de couteaux d'une lame de 15 centimètres de couleur grise», auraient sauté sur le quai avant de s'enfuir n'a pas permis d'observer une scène semblable.
Reste donc aux policiers à coller au plus près des faits et des déclarations de Marie-Léonie L., dont la personnalité a naturellement été passée au crible, comme c'est l'usage en pareil cas. Une source policière indiquait hier au Figaro que la jeune femme avait porté plainte six fois dans les cinq à six dernières années dans des affaires de vol ou d'agression. Cette même source précisait que ces plaintes seraient restées sans lendemain avant de conclure que la victime ne présentait pas, en l'état de l'enquête, de troubles psychologiques ou psychiatriques.
Sa propension à déposer plainte exceptée, la victime présumée du RER D a, en effet, un profil des plus classiques. Vivant en concubinage et mère d'une petite Léa, Marie-Léonie a passé deux ans au collège privé Notre-Dame-de-Grâce de Passy, entre 1995 et 1997, avant, à 16 ans, d'être orientée vers des lycées professionnels, dont le lycée d'enseignement professionnel René-Cassin où elle a terminé ses études en 1999. Marie-Léonie vit aujourd'hui à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) où elle menait une existence sans histoire. Jusqu'au 9 juillet 2004.
Quel que soit le scénario finalement retenu, le tee-shirt de Marie-Léonie L. a bien été déchiré au niveau de la poitrine et son visage griffé. Dans le procès-verbal d'audition du vendredi 9 juillet à 15 h 20, le policier du commissariat d'Aubervilliers a clairement indiqué «vu et constaté». La formule est absente, en revanche, quand le procès-verbal évoque des marques, au marqueur noir, au niveau du coeur et une mèche de cheveux coupés sur le côté gauche du visage. Le policier n'a-t-il pas constaté de visu les faits ou a-t-il oublié de le préciser sur son compte rendu ? Le dossier ne le dit pas, mais une source judiciaire proche de l'enquête précisait que les blessures légères avaient bien été «constatées médicalement et policièrement». Un petit hématome, sur le front de son bébé de 13 mois, a été constaté. Ces traces d'agression ont été dûment constatées par un praticien d'une clinique privée, puis par un médecin d'une unité médico-judiciaire où les policiers d'Aubervilliers avaient envoyé Marie-Léonie et la fillette.
Violence il y a bien eu, mais les policiers attendent toujours que des témoins viennent leur expliquer ce qui a pu se passer le vendredi 9 juillet dans le RER D. Marie-Léonie a cité trois individus susceptibles de les éclairer : un couple, «Marie-Thérèse, 45 ans» et son époux, qui l'ont soutenu après l'agression et lui ont promis qu'ils reprendraient contact avec elle et un jeune homme qui aurait assisté à la scène. Hier soir, ces deux hommes et cette femme restaient introuvables.
L'ENQUETE POSE plus de questions qu'elle n'apporte pour l'instant de réponses. Quatre jours après l'agression cauchemardesque dont Marie L. déclare avoir été victime dans le RER D, les policiers de la PJ de Versailles n'ont pour l'instant pas recueilli d'éléments susceptibles d'étayer les dépositions de cette jeune femme de 23 ans.
Vendredi dernier, après être montée dans un wagon à deux étages en gare de Louvres (Val-d'Oise) avec sa petite fille de 13 mois dans une poussette, Marie s'est installée au niveau de la plate-forme située devant les portes. C'est là, selon ses déclarations, qu'elles auraient été agressées par un groupe de six jeunes, quatre d'origine maghrébine et deux Noirs africains. Après avoir découvert dans son portefeuille qu'elle avait été domiciliée dans le XVI e arrondissement de Paris, l'un des assaillants aurait lancé : « Dans le XVI e , y a que des juifs ! » Le calvaire de la jeune femme aurait alors débuté. Durant près d'un quart d'heure, alors qu'une vingtaine d'usagers se trouvaient dans le wagon, la passagère explique que ses agresseurs lui ont tailladé ses vêtements, coupé des mèches de cheveux et dessiné des croix gammées sur le ventre à l'aide d'un feutre. Les six individus auraient abandonné leur victime en gare de Garges-Sarcelles, où ils seraient sortis en emportant son sac à dos et en faisant tomber la poussette sur le quai. « Aucun témoin direct qui puisse nous apporter des éléments ne s'est signalé pour l'instant et nous n'avons pas non plus retrouvé de trace d'appel aux services d'urgence au moment de l'agression, déplorait hier Xavier Salvat, le procureur de Pontoise. Si des personnes susceptibles de témoigner ont peur, elles doivent savoir qu'elles peuvent le faire en conservant l'anonymat. » La jeune femme, qui aurait finalement reçu l'assistance d'un couple sur le quai, affirme avoir alerté un guichetier de la gare. Là encore, les enquêteurs n'ont pas retrouvé la trace de ces témoins potentiels. Les cinq agents SNCF présents ce jour-là sont formels : aucun incident de ce type ne leur a été signalé.
Vue en gare de Louvres le pantalon déjà déchiré Les policiers espéraient également découvrir de précieux indices sur la bande de vidéosurveillance de la gare. Les premiers visionnages effectués hier n'ont rien donné. « Pour l'instant, il n'apparaît pas de groupe ressemblant de près ou de loin aux six jeunes décrits », confie un policier. Un de ses collègues souligne par ailleurs que les croix gammées dessinées sur le ventre de Marie L. sont « inversées ». Et un témoin a affirmé aux enquêteurs avoir vu la jeune femme en gare de Louvres, le pantalon déjà déchiré. Enfin, les policiers, après vérifications, émettent des doutes sur la réalité du trajet que la victime a indiqué avoir emprunté ce matin-là. « La gravité des déclarations de la victime est telle que tout est vérifié et en l'absence de témoins directs, c'est un travail complexe , insiste Franck Carabin, du syndicat d'officiers Synergie. Des contradictions sont apparues. » La personnalité de la victime est également à l'étude. Certains de ses proches ont été entendus hier. La police judiciaire a relevé que, durant les cinq dernières années, Marie avait déposé plainte à au moins cinq reprises pour des affaires de vols, de violences et plus récemment pour une agression sexuelle pour laquelle elle s'était rendue en novembre au commissariat de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne). Le dossier a été classé sans suite. « Tout cela ne fait pas d'elle une affabulatrice, souligne un policier. Les recherches se poursuivent pour retrouver les agresseurs auxquels elle dit avoir été confrontée. » Hier, dans l'attente de l'issue de l'enquête, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a appelé les Français au « courage citoyen ». Dénonçant l'antisémitisme comme une honte, le chef du gouvernement a ajouté : « Il y a aussi un mal dans notre société, c'est l'indifférence face à la violence », évoquant le fait qu'aucun passager du train ne soit intervenu.
ILS ÉTAIENT entre cinq cents et un millier, hier en fin d'après-midi, rassemblés près du métro Belleville à Paris, à l'appel du Parti communiste, pour protester après l'agression dans le RER D et dire « non à l'antisémitisme ». Un petit succès pour une manifestation lancée la veille, et par le seul PC. « Il fallait réagir vite », explique Marie-George Buffet, premier secrétaire du Parti.
Pour parler, c'est Henri Malberg, juif, ex-conseiller de Paris élu du XXe, figure militante de Belleville, qui a été désigné par le Parti. L'ancien élu souligne la symbolique de ce quartier, « où tout parle d'une vie possible entre des gens venus de lieux si différents ». Et s'en prend au « laminoir du libéralisme », qui « attaque en profondeur le ciment de notre société ». Dans la foule comme sur les banderoles, juifs et arabes font cause commune. « Juifs et arabes unis pour la justice », proclame l'une d'elles.
«Il n'y a pas d'excuse» Dans un message lu en son nom, Mouloud Aounit, secrétaire général du Mrap, fait entendre une musique un peu particulière. « A force d'exclure les plus démunis, de choisir entre les victimes du racisme, en privilégiant les uns plutôt que les autres, il ne faut pas s'étonner » de cette agression, affirme-t-il ainsi. Nasser Ramdane, au nom de SOS Racisme, n'a pas la même analyse. « Ce n'est pas parce qu'on est jeune et pauvre qu'on a le droit d'être antisémite, lance-t-il, très applaudi par la foule. Tout comme il n'y avait pas d'excuse à voter Front national parce qu'on était dans une situation de précarité, il n'y a pas d'excuse aujourd'hui à être antisémite parce qu'on est victime de l'exclusion. » Rémy et Fred, une trentaine d'années, ont confectionné leur propre banderole : « Fuck tous les cisteras. Les flammes de l'enfer vous attendent », peut-on y lire. « J'ai vécu toute mon enfance à Sarcelles, et cette violence gratuite contre les juifs, je l'ai toujours vue, raconte Fred. Y'en a marre, il faut que ça s'arrête. » Au même moment, rue de Babylone (VII e ), à l'initiative de Jean-Paul Huchon, le président de la région Ile-de-France, quelque trois cents élus, de la gauche à l'extrême droite, sont rassemblés dans l'hémicycle. Parmi lesquels, Dominique Strauss-Kahn (PS), Nicole Guedj (secrétaire d'Etat UMP aux Droits des victimes) ou Dominique Voynet (Verts). « Tous unis contre l'antisémitisme », souligne Huchon. Qui promet « les décisions qui s'imposent ». Et met ses « collègues » devant leurs responsabilités : « Ces jeunes sont passés par notre système scolaire et ont grandi dans nos villes. Ils sont notre terrible héritage, et notre faute. »