Clonage humain, 1 : c'est pour demain

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Débuté dimanche 5 janvier 2003 12:36:08

 O u aujourd'hui, ou hier, on ne sait trop. Dans le texte « Eugénismes » j'évoque une expérience due à une équipe internationale dont on disait que ce n'était pas une mise au point du clonage humain reproductif – mais ça y ressemblait fort. En 1999 j'écrivais une chose qui me paraît évidente : si une technique est au point, on l'utilisera ; si elle est portable aux humains, on la leur portera. Cela concernait déjà une de ces discussions récurrentes sur le clonage qui animent régulièrement nos médias. Quelqu'un fit ou dit une chose scandaleuse, ou le Comité de Bioéthique fixa un point, ou la Commission européenne se penchait sur le dossier de va savoir quoi en rapport à la chose, et aille donc ! Journaux, radios, télés de repartir sur des considérations diverses et souvent oiseuses autour du clonage humain à but reproductif ou « à but thérapeutique » (sic). Je crois que c'était ça : la question de l'autorisation ou du moratoire sur les expériences censées développer les techniques de clonage dit à visée thérapeutique.

Je constatais qu'à ce jour toutes les techniques de reproduction assistée mises au point sur les mammifères furent portées aux humains. J'en concluais qu'incessament, et sans s'assurer de son efficacité et de son inocuité, le clonage serait porté à l'humain, puisqu'il fonctionne pour les mammifères. Peut-être tiquez-vous pour l'inocuité : si vous ne vous intéressez à ces questions que par le biais des grands médias et en lisant rapidement ou en écoutant distraitement, il vous aura probablement échappé, pour les cas précédents, que les méthodes de procréation « artificielle » (ou procréation médicalement assistée, PMA) furent portées aux humains avant qu'on s'assure de leur inocuité sur l'animal ; vous aura presque certainement échappé, même si vous vous y intéressez avec plus d'attention, une chose dont on parle très peu concernant la PMA, le taux remarquable d'échecs même après plus de trente ans de pratique. Pour la technique « la plus au point », celle banale croit-on de l'insémination artificielle, le taux d'échecs est supérieur à 60% ; pour la deuxième censément efficace, l'ovulation forcée, il dépasse les 75% ; et les autres techniques n'atteignent pas 15% de réussite[1]. Bref, ça ne marche pas terrible. Vous imagineriez qu'on présente comme un succès le fait qu'un chirurgien réussisse, selon les cas, entre 5% et 35% des ses interventions ? C'est pourtant ce que l'on fait pour la PMA.

Ça ne me choque pas plus que ça : si l'on considère la PMA une avancée nécessaire, il n'y a guère moyen de faire autrement. En la matière, nous en sommes à la situation de la chirurgie alentour de 1850, et à cette époque, on avait effectivement un taux d'échec très élevé ; comme toutes les autres sciences et techniques, la médecine ne progresse que par ses erreurs. Par contre, j'ai cru comprendre que les membres de l'Organisation des Nations unies refusaient un certain type d'erreurs, mettant en cause les humains, par un texte que tous acceptent et doivent respecter, connu comme Déclaration universelle des droits de l'homme[2]. Entre autres, l'article 5 stipule que « nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » ; sachant comment ça se passe, j'ai dans l'idée que la PMA ressort de la catégorie des « traitements cruels, inhumains ou dégradants ». La Déclaration stipule ce qui ne doit pas être, cela sans modération, je veux dire, le fait que la personne soumise à mauvais traitement soit consentante n'annule pas la chose : que les parents acceptent avec gratitude d'être « soumis à [des] traitements cruels, inhumains ou dégradants » n'empêche que les États signataires de la Déclaration doivent faire cesser la chose. Loin de l'empêcher, ils l'encouragent et souvent la subventionnent. Cela dit, ce ne serait pas le seul droit de l'homme non respecté, par exemple l'article 12 stipule que :

  1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur d'un État.
  2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.

Deux fondateurs de l'ONU avec siège permanent au Conseil de sécurité de cette organisation, violèrent allègrement ce droit jusqu'à la fin des années 1980, j'ai nommé la Chine et l'URSS[3]. Mais ce n'est que détail. Avez-vous lu cette Déclaration ? Et bien, qui l'a lue fait ce constat : plus des trois-quarts des membres de l'ONU violent l'un ou l'autre des droits et souvent plusieurs ; parmi ces violateurs figurent beaucoup de démocraties avancées dont la France, les États-Unis et la Grande-Bretagne, les trois autres membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU. C'est ainsi.


La question n'est pas quand ni si le clonage humain reproductif sera autorisé, mais comment on justifiera dans quelques années ce qu'on considère aujourd'hui injustifiable. L'actuelle ministresse de je ne sais quoi ou chargée de je ne sais quelle mission, Noëlle Lenoir[4], intervenant à l'époque comme présidente du Groupe européen d'éthique des sciences et des nouvelles technologies, excusez du peu, déclarait au journal Le Monde du 16 août 2001 : « Le clonage reproductif devrait être reconnu comme crime international » ; si elle fait partie de ce gouvernement dans trois ou quatre ans, sans doute elle répondra à une interview du journal Le Monde où elle expliquera, au titre de ministre de l'Europe, que l'Union doit intervenir pour réguler les pratiques de clonage humain… Crime hier, droit demain, et voilà tout.

On dit que seuls les imbéciles ne changent pas d'avis, on oublie de dire qu'il leur arrive aussi de le faire. J'ai même idée que les imbéciles changent plus souvent d'avis que les sages, car ils parlent – et pensent – en dépit du bon sens. Les politiciens sont souvent des imbéciles. C'est fonctionnel : la politique telle qu'on la pratique, qu'on nommerait plus justement démagogie[5], conduit nos humains politiques à déclarer au moment où ils le font ce qui leur semble, non le mieux ni le même le plus en accord avec leurs idées et idéaux, mais ce qui va dans le sens de « l'Opinion ». Triste à dire, mais les préjugés de cette « Opinion » sont souvent imbéciles ; en toute logique, s'en faisant l'écho il disent des imbécillités.

Je ne suis d'ailleurs pas certain qu'ils le fassent vraiment, je veux dire, pour moi ils croient savoir « ce que veut “l'Opinion” », mais je ne suis pas persuadé qu'ils le sachent vraiment. Pour le clonage, par exemple, les politiciens français et plus largement européens déclarèrent tous uniment que le clonage humain à visée reproductive, ah la la ! Ce n'est pas bien !, par conviction parfois, mais assurément aussi parce que les sondages montraient que « l'Opinion » était contre. Mais « l'Opinion » ça se travaille, on l'a vu avec les OGM : au départ « l'Opinion » était contre, mais avec un bon travail de lobbying et de propagande, on, ici les groupes financiers et industriels intéressés à leur diffusion, a fait évoluer « l'Opinion », et la majeure partie des politiciens changèrent d'avis avec elle… Si par hasard des groupes financiers et industriels puissants ont idée que le clonage humain représente un « marché porteur », il se peut bien qu'ils travailllent à faire évoluer les préjugés de « l'Opinion » sur la question ; et dans ce cas, si Mme Lenoir veut continuer à faire ministresse de l'Europe, il lui faudra réviser ses catégories concernant le (sic) « crime international ». Mais, lisant l'interview citée, on voit qu'elle aura peu d'efforts à faire.


Il me faut préciser le titre de ce texte : jusqu'ici toutes les méthodes de contrôle de la procréation réalisées sur les mammifères furent donc appliquées aux êtres humains ; actuellement, on fait du clonage de mammifères ; donc, cela dit ni glorieusement, ni anxieusement mais logiquement, demain ou dans un mois ou un an ou une décennie le clonage humain sera pratiqué, après-demain ou dans un semestre ou un lustre ou un quart de siècle il sera de pratique courante. Voilà la chose. Et si de bons esprits croient que je fais erreur, qu'il y a des limites, que là non, ce n'est pas possible et autres billevesées, je leur conseille de faire des recherches sur les cas antérieurs, et ils verront que tout ce qui, dans le domaine de la procréation, à un instant t est « inimaginable » devient à t+n ordinaire. Ils constateront aussi que t+n est souvent assez proche dans la durée de t, de un à quatre ans, et la distance entre t et t+n doit souvent plus à l'état de l'art qu'à la morale ou à la fameuse et introuvable déontologie médicale.

Enfin, s'ils y prêtent attention, ils s'apercevront que sur ces questions on a un schéma très régulier, de cet ordre : des chercheurs tentent de réaliser une certaine chose sur des animaux autres que mammifères, pour la raison simple que les manipulations sont au départ plus faciles avec les insectes ou les batraciens ; une fois les méthodes bien maîtrisées, les mêmes équipes ou, le plus souvent, d'autres, tentent de les porter vers les mammifères, en général les animaux domestiques de type ovins ou bovins ; à un moment, ce portage réussit, on en parle d'abondance et comme, cette fois, il s'agit d'animaux génétiquement et formellement très proches des humains, se développe une polémique sur les risques d'application à notre espèce de ces méthodes, car systématiquement ce portage est décrit comme un risque, disons, une « animalisation » de l'être humain, avec évidemment en arrière-plan la hantise des pratiques eugénistes de type nazi ; un temps, généralement assez court, il naît des grandes polémiques médiatiques, soit que des États libéralisent des recherches dans le domaine craint, soit que des illuminés disent qu'ils sont en passe de, ou qu'ils ont réussi à porter la méthode à l'humain ; puis un jour, on apprend qu'une équipe tout ce qu'il y a de sérieuse, appartenant à un organisme au-dessus de tous soupçons et financée par un gouvernement le plus probe et honnête possible, vient de réaliser la chose. Dans la discrétion mais nullement dans le secret. À partir de ce moment, la question n'est plus que de savoir quand le législateur « normalisera » la pratique. En général, ça prend assez peu de temps pour deux raisons : « l'Opinion » est avide de profiter de la nouvelle technique et tous les pays sont sur les rangs pour proposer leurs services dans le domaine. Donc, politiques et commerciaux se rejoindront pour considérer qu'il faut à tout prix légaliser la chose.

Vous avez sans doute entendu le bruit actuel (en janvier 2003) sur les Raéliens et leur supposé succès en matière de clonage reproductif humain : ne vous y laissez pas prendre, c'est du flan, ils n'ont pas réussi, ils n'en ont pas les moyens intellectuels et financiers. Certaines choses ne sont pas à la portée d'un particulier ou d'une institution de taille modeste. Par contre, c'est un signe. Des illuminés il ne faut pas espérer qu'ils réalisent de grandes choses sur un plan social, technique ou scientifique ; par contre, leurs chefs ne sont pas des illuminés, mais de bons analystes des courants de société, à l'affût de ce qui est possible, probable et souhaité par elles et par « l'Opinion ». Dans notre cas M. Raël, alias, c'est plus prosaïque, Claude Vorilhon, voit comme moi qu'en l'état des choses et au su des cas antérieurs, le moment où une équipe sérieuse, riche et bien pourvue en moyens et personnels, est en passe d'annoncer la naissance du premier clone officiel. Imaginons que les Raéliens fassent l'annonce de leur succès après celle de l'équipe sérieuse : ça apparaîtra comme une tentative maladroite pour rattraper l'actualité, une fausse annonce peu crédible. Notre brave Raël n'est pas un imbécile – sinon il ferait de la politique –, il sait que beaucoup de personnes sont intéressées par l'idée d'être clonées ou d'obtenir le clone d'une certaine personne ; s'il se place « le premier sur le marché » il a de bonnes chances de glaner beaucoup de gogos en annonçant le premier clonage humain réussi.

Il y a la suite : c'est bien beau que les gogos viennent, mais si on ne leur donne pas ce qu'ils attendent ou s'ils ne peuvent conserver l'espoir de l'obtenir ils repartiront. Ici, il y a un calcul : l'espoir persistera si l'équipe officielle fait son annonce dans un délai raisonnable, au plus quelques mois. Il faut faire son annonce au bon moment, disons, dans les six à huit mois au plus avant l'annonce sérieuse. C'est mon calcul. Tel que je le vois, on devrait l'avoir courant 2003. Dommage que je n'aie pas une mentalité d'escroc, je crois que je ferais un bon prophète[6]. Enfin…


Que je critique ne signifie pas que je considère que la chose critiquée ne doit pas être, mais plutôt je souhaiterais qu'elle soit autre. Si l'on me demande une opinion in abstracto je dirai que je ne vois pas d'intérêt particulier au clonage ni à toute autre forme de PMA ; il se peut qu'on en tire quelque chose de valable, mais sûrement pas pour la procréation. Donc, si le but est, je ne sais, améliorer en quelque façon le processus procréatif on laisse tomber, si le but est autre il faut voir, mais alors, qu'on nous le dise. J'ai dans l'idée que le clonage ou du moins les recherches sur le clonage pourraient apporter beaucoup à l'humanité, sauf si on les entreprend de la même manière qu'on a mené et qu'on mène encore celles sur les précédentes méthodes de PMA. Or, tel que ça part, on voit que ce sera pareil sinon pire.

La société n'est pas une abstraction, une opinion abstraite sur une chose concrète a donc peu d'intérêt. La PMA marche mal, même avce la méthode la plus simple. Les femmes ne sont pas des vaches dont on attendra la période de chaleur pour les inséminer en étant presque assuré du résultat. Il y a un tas de facteurs que le biologiste ou le médecin ne peuvent contrôler et qui créent de l'incertitude. Un taux de réussite supérieur à 20% serait déjà un exploit. Même le plus scientiste[7] des techniciens de la PMA s'aperçoit bien que, d'une part le « rendement » ne sera jamais élevé, de l'autre ça n'apporte pas grand chose au processus naturel. Le croirez-vous, sauf pour les cas de stérilité masculine la majeure partie des PMA se fait avec des couples fertiles sans problème réel qui plus qu'autre chose veulent se rassurer en procréant « scientifiquement »[8]. Ce n'est pas un phénomène nouveau : depuis que la société est société, il y a des personnes incapables d'entreprendre quelque chose si le sorcier, le devin ou le prêtre ne leur certifient que les signes sont bons. Actuellement, le plus couramment consulté parmi les shamans est le médecin, et voilà tout. Sans exclure qu'on aille en consulter d'autres, d'ailleurs.

Je me moque des médecins mais prends leur rôle social et technique très au sérieux mais ils interviennent dans trois domaines d'utilité inégale : le soin, la prévention et l'assistance. Dans le premier ils sont assez efficaces ; dans le deuxième ils peuvent l'être si la société organise les conditions d'une politique de prévention ; dans le troisième ils sont des sortes de marabouts ou exorcistes : ça marche si on y croit et si on y est prêt. La PMA, sauf pour les personnes stériles, ça relève surtout de l'assistance et de l'aide psychologique, avec quelques passes magiques genre scientifique et médical pour faire plus vrai. Comprenez-moi : je considère les marabouts, exorcistes, sorciers et prêtres utiles à la bonne marche d'une société et d'un grand secours pour ses membres ; que les médecins fassent de la sorcellerie me semble une bonne chose ; me gêne qu'ils fassent passer pour science ce qui n'est que du maraboutage, et prétendent dans leur grande majorité que le maraboutage est inefficace et nocif pour la société. Pourtant, ils ont assez conscience de faire du maraboutage… Je parle des médecins et techniciens en « PMA appliquée », non des chercheurs en « PMA fondamentale ». Ceux-là mènent un autre travail et ne masquent généralement pas leur taux d'échec, normal quand on fait de la recherche. Les praticiens, eux, tentent de faire croire qu'une technique aléatoire et peu efficace relevant plus de l'incantation que de la médecine est un travail scientifique bien maîtrisé et d'une grande efficacité. Les chercheurs s'en fichent un peu, cherchent et ne se désolent pas de ne pas trouver, ou de trouver parfois – souvent – ce qu'ils ne cherchaient pas. L'incertitude et la surprise sont le lot ordinaire du chercheur, particulièrement en biologie. Ça fait le charme de la chose.

Le clonage humain est pour demain. Je m'avance en le prévoyant pour le milieu de l'année 2003[9], mais je vous promets que, s'il dure ce qu'il doit durer, l'annonce du « premier » clonage humain se fera avant la fin du mandat actuel de Jacques Chirac. Comme moi, les gens de média, le pressentent pour bientôt, sinon ils n'auraient pas fait toute cette publicité aux Raéliens et à leur bidonnage. Eh ! Ce n'est qu'une parmi ces milliers d'idioties sectaires qui sortent sans arrêt. Disons que les médias sont nettement prêts pour l'annonce depuis fin 2000, début 2001, et chaque année plus ils sont sensibles aux annonces bidons et leurs donnent chaque fois plus de la crédibilité, non parce qu'elles sont crédibles, mais parce que le clonage humain l'est. Toute personne raisonnable ne peut en aucun cas croire qu'un groupe de délirants comme les Raéliens puisse en quelque manière faire quelque chose comme du clonage ; puis, le matériel qui, même s'ils avaient les compétences pour le faire, leurs serait nécessaire, est très contrôlé par les gouvernements des pays où on le fabrique, non tant parce qu'ils se méfient des Raéliens ou assimilés que parce qu'ils n'ont pas envie que ça tombe entre les mains de n'importe quel État, ergo, si même les Raéliens avaient les moyens financiers pour se le procurer, les gouvernements, ne pouvant l'ignorer, le leurs confisqueraient puisqu'ils avaient annoncé publiquement qu'ils feraient du clonage humain. Vous le voyez, le clonage raélien n'est pas crédible. Pourtant, les médias, même les censément plus sérieux, tels Le Monde ou Le Figaro, l'ont présenté tel, et continuent de le faire. C'est qu'il y a en tout journaliste deux personnes : le professionnel informé et roublard et l'humain ordinaire prêt à croire l'incroyable. La première fait le même calcul que Raël : en l'état actuel des choses, les premières annonces de clonages réussis ne sauraient tarder, probablement dans un des pays du « G8 » ou, par prudence, via une équipe internationale « offshore », comme celle dont je parle dans « Eugénismes », de manière que les gouvernements si vertueux du G8 ne se mettent pas en défaut avec leur propre législation. La seconde prend en compte l'analyse de l'état des choses, mais met de côté la raison, pour accepter comme vrai ou vraisemblable ce qui ne l'est pas, simplement parce que c'est possible. Est impossible la capacité des Raéliens à le faire, est possible le clonage même, donc on accepte de donner du crédit à ce qui n'en a pas pour satisfaire l'avidité crédule de l'humain ordinaire qu'on a en soi. En outre, mais ça joue moins qu'on ne pourrait le croire, il y a l'aspect commercial : d'évidence, un sujet comme « le premier clonage humain » ça fera vendre, Coco ! Au moins autant que la publication des « bonnes feuilles » du rapport Starr…


Après m'être mis à dos la corporation des médecins et celle des journalistes, il me faut je crois conclure. L'annonce du premier clonage humain réussi s'annonce pour bientôt et, je le disais, pour une fois j'aimerais qu'on ne traite pas la chose comme on a traité les précédentes techniques de PMA. Précisément, j'aimerais que cette fois on la retire des mains des « spécialistes » et des politiques pour la mettre dans celles de « l'Opinion », qu'elle ne s'exprime plus par le biais des sondages et des éditoriaux de journaux, mais de sa propre voix. Qu'on se décide à demander à des citoyens clairement informés de s'exprimer, par le moyen qu'on voudra, sur une question d'importance et qui n'est pas l'objet des marabouts de la PMA. Je souhaite ceci : que l'on consulte les citoyens sur l'ensemble des techniques de PMA, qu'ils donnent une bonne fois leur avis là-dessus.

La PMA, outre son efficacité limitée et son utilité douteuse, coûte très cher. Ça m'énerve qu'on économise des bouts de chandelle sur mon dos dans des domaines dont l'utilité et l'efficacité ne font pas de doute et qu'on dépense des sommes énormes pour une pratique n'ayant qu'un vague rapport avec la médecine et la santé et aux résultats assez décevants. Le citoyen moyen est bluffé par les réussites, et les médecins et chercheurs spécialisés en PMA doués en communication, maintenant, si au lieu de parler des seuls rares succès on faisait une vraie information, en parlant du taux d'échec sur l'ensemble des femmes, du taux d'échec absolu, du taux d'échec comparé parmi les population fertiles et parmi les populations stériles, si l'on produisait non plus des jolies images de la petite Amandine si mignonne dans son berceau mais des témoignages de femmes ayant subi une PMA – notamment celles assez nombreuses (majoritaires) en ayant subi plusieurs pour aucun résultat –, ça ferait une base de discussion solide et pertinente pour déterminer si oui ou non il vaut de creuser le trou de la sécu pour ça. On parle sans fin de « démocratie directe » et de « démocratie d'opinion » et on ne les voit jamais venir : il me semble que, pour aller vers ça, la PMA serait un bon début…

Terminé dimanche 5 janvier 2003 23:05:22


[1] Entendons-nous : le taux d'échecs relativement au nombre de femmes qui font une demande de PMA ; rapporté au nombre total de tentatives, le taux d'échecs est bien supérieur…
ADDENDUM. Lisant un article sur le docteur Antinori, je peux vous dire que j'étais très optimiste : on annonce le bon docteur comme ayant d'excellentes « performances » avec « un taux de succès (c'est-à-dire de naissances) estimé à plus de 25% » pour la FIV (fécondation in vitro). Enlevez quelques pourcents à mes estimations…
[2] Vous ne pensez pas qu'il serait temps que l'on cesse de dire les droits de l'homme pour passer aux droits de l'humain ? Moi si.
[3] Pour autant que la Russie post-soviétique et la Chine actuelle aient cessé de violer ces deux droits de l'Homme, ce qui ne me semble pas évident.
[4] Ça sert, de récupérer des documents un peu partout, j'ai fini par trouver quelle est sa fonction : ministre déléguée aux Affaires européennes.
[5] « Attitude consistant à flatter les aspirations à la facilité ou les préjugés du plus grand nombre pour accroître sa popularité, pour obtenir ou conserver le pouvoir », me dit mon dictionnaire, et c'est bien ce que me semblent faire presque tous les politiciens – et en tout cas ceux qui ont le plus de succès.
[6] Note ultérieure (au 07/03/2004). Je me suis trompé de quatre à six mois pour la date de l'annonce, mais pas pour la date approximative où le premier clonage réussi déclaré, celui coréen, fut fait. Note sur la note (au 16/09/2013). Le fait que l'annonce fut bidon ne change rien à l'affaire : le désir de réussite de clonage humain était tel que plusieurs équipes sérieuses se sont mises sur cette recherche. On n'a entendu parler de l'échec coréen que parce que son promoteur a tenté de le faire passer pour une réussite, le mieux qu'on puisse supposer est que les autres équipes se sont bien gardées de communiquer sur leurs tentatives…
[7] Plus ou moins un synonyme d'abruti…
[8] Note au 04/07/2005 : j'écoutais hier une émission où un praticien de la procréation médicalement assistée expliquait qu'en 2002 en France environ 110.000 femmes subirent une forme de PMA ; dans ce pays, le nombre total évalué de couples ayant des motifs légaux d'y faire appel est d'environ 60.000 ; donc, les praticiens de la PMA exercent leur art le plus souvent dans l'illégalité. On peut se demander pourquoi ; une réponse possible est, je crois, que le coût moyen d'une PMA est de 10.000€, et que ce qui est coût pour la patiente est revenu pour le praticien…
[9] Entendons-nous : pour prévoir l'annonce officielle du réputé « premier clonage humain réussi ». Si même c'était vrai, ce que je ne crois pas, le fait qu'il existe un clonage réussi implique qu'il y en eut auparavant un certain nombre, et pour être réaliste, un nombre certain, de ratés. C'est, je ne sais pas, comme la première transplantation cardiaque réussie : elle couronnait une longue série de transplantations ratées. Si vous n'en faites pas, je ne sais pas comment vous imaginez la recherche scientifique ou médicale, en tout cas, si vous croyez que ça réussit du premier coup, c'est une erreur. Une très grosse erreur.